Compagnon d’Etienne Tshisekedi Wa Mulumba, Antoine Gabriel Kyungu Wa Kumwanza a tiré sa révérence depuis Luanda, en Angola, où il était allé en soins médicaux. Celui que des Katangais appelaient affectueusement « Baba » (Papa) avait une aura indiscutable, capable de rassembler des foules, mais surtout de fédérer la population de cette partie de la république. Félix Tshisekedi avait fait de lui son plus grand allié, depuis son accession à la magistrature suprême. Même Moïse Katumbi faisait profil bas face à Kyungu Wa Kumwanza que l’on prenait pour un tireur qui ratait rarement sa cible.
Maintenant que le « Baba » n’est plus, qui pourrait fédérer les Katangais autour de la vision du chef de l’Etat ? La mort de ce baobab du KATANGA fait coïncider son agenda avec la dernière sortie médiatique de Moïse KATUMBI, un autre notable de cet espace qui garde encore des puissants réseaux à ce jour. Mais peut-on dire qu’il pourra rouler pour le Chef de l’État dans la perspective de 2023? Rien n’est moins sûr. Pénétrant par effraction sa récente interview sur Jeune Afrique, ses intentions pour 2023 sont mises à nu et à découvert. Pas besoin de voir les choses dans la pénombre de ses intentions, tout a été clair.
D’abord sur la loi appelée communément #Loi Tshani# que plusieurs militants de l’udps utilisaient sur la toile pour décourager ses ambitions présidentielles à peine voilées, il a tracé une ligne rouge. Comme pour conditionner sa participation à l’union sacrée à sa capacité d’être candidat en 2023. D’ailleurs, on serait en droit de croire qu’il ne fait même plus parti de l’union sacrée. Alors quelle carte pour le Chef de l’État en 2023 dans le grand KATANGA ? Richard MUYEJ sera un pion d’une importance capitale. La partie qui se bousculera pour l’avoir aura le grand KATANGA avec lui. Mais qui a l’avantage du rapprochement en cette période ? Le président de la République qui constate les évènements liés à la disparition de Baba KYUNGU aura tort de négliger, voire de minimiser la carte Richard MUYEJ.
Un peu comme un Bahati Lukwebo pour les Kivu, un Jean-Pierre Bemba pour le grand Equateur ou encore un Christophe Mboso N’kodia pour le grand Bandundu, Félix Tshisekedi est désormais un peu esseulé dans le grand Katanga. Un vide qu’il devait vite combler. Au Lualaba, pendant que la gouverneure intérimaire, Fifi Masuka, remue ciel et terre pour gagner la confiance du chef de l’Etat, elle reste cependant moins pesante sur l’échiquier katangais. Rien qu’au Lualaba, pendant le séjour prolongé de son titulaire à Kinshasa, la gouverneure adjointe a créé des dissensions aussi bien au sein de l’administration provinciale que dans les communautés. En juin dernier, dans ses accusations, un député provincial, Donat Tshimboj, évoquait notamment la chasse aux sorcières orchestrée par cette autorité intérimaire. « Tous ceux qui sont qualifiés de pro Muyej sont pourchassés, voire suspendus entre autres, les ministres, des agents du gouvernorat, dont 28 sont chassés.
Même les ouvriers engagés pour sa propre brigade du gouvernorat sont en grève, impayés depuis 3 mois », avait-il dénoncé, sans oublier d’épingler des tensions communautaires. Ce qui nécessite, pour le chef de l’Etat, un personnage du tempérament de Muyej pour garder le grand Katanga dans le giron du pouvoir, bien que possédant déjà un Premier ministre originaire de cette partie du pays. Au-delà du casting de son personnage fédérateur, Richard Muyej reste aussi bâtisseur. Ses réalisations dans le Lualaba parlent en sa faveur. Alors que son entité ne représentait qu’un vaste chantier minier – en dehors des infrastructures en majorité héritées de la colonisation – l’homme a su métamorphoser ce coin de la République. Un réseau d’infrastructures a vu le jour dans la province.
Des routes restées longtemps en terre battue ont été asphaltées. Comme un sanctuaire béni, le Lualaba se retrouve avec des grands gisements. Ayant pris la part du lion en termes de richesses exploitables par rapport aux trois autres provinces issues du démembrement (75% des minerais de l’ex-Katanga gisent au Lualaba), l’entité gérée jusqu’à décembre 2020 par Richard Muyej a montré un autre visage de modernité. A Kolwezi, routes, bâtiments publics, hôtels et lodges sentent un luxe récent. Et le reste du Lualaba n’est plus cette vaste étendue parsemée des carrières de mines, mais à ses côtés, des quartiers et cités se modernisent… Richard Muyej a initié le chantier d’une plate-forme aéroportuaire ambitieuse pour la province. Cet élan de bâtisseur pourrait être coupé si le gouverneur ne reprend pas ses fonctions au Lualaba. Ce qui risque d’être aussi un handicap pour le bilan du chef de l’Etat en 2023. Puisqu’il faudrait également convaincre les Congolais de cette partie du pays sur ce qui a été fait en leur faveur pour qu’en revanche, ils renouvellent leur suffrage au chef de l’Etat, Félix Tshisekedi.
Pour rappel, parti prendre part à la dernière conférence des gouverneurs des provinces à Kinshasa en décembre 2020, le gouverneur Muyej n’est jamais rentré dans sa province même après les soins médicaux en Afrique du Sud. Une mission de contrôle de l’IGF était passée en son absence au Lualaba. Les conclusions de cette inspection lui avaient été présentées par l’inspecteur général, Jules Alingete Key, dans la capitale congolaise et ils ne débouchent sur aucune poursuite. Ce qui permet à tout congolais de se faire idée.