Decouverte

De la chronique musicale au journalisme politique MARIUS MUHUNGA, une métamorphose réussie !

De ses débuts à Kikwit au sein de la radio communautaire des Jésuites, en passant par la chronique musicale dans plusieurs chaines de télévision à Kinshasa, le concepteur du célèbre « Jeudi Marius » a changé son fusil d’épaule. Aux Etats-Unis où il est installé depuis un temps, ce professionnel des médias incarne un autre journalisme. Portrait.

Published

on

 Disparu des petits écrans congolais depuis quelques années, Marius Muhunga, la quarantaine révolue, réapparaîtra depuis les Etats-Unis, notamment en marge des élections présidentielles et législatives de 2018. Celui qui a fait un nom dans la chronique musicale en République démocratique du Congo s’était affiché sur un autre créneau : le journalisme politique.

Avec un nom de l’émission proche de ses inspirations de chronique musicale, l’ancienne voix de Radio Télé Kin Malebo (RTKM) et de Raga FM a conçu, depuis les Etats-Unis, « Marius chez vous ». Cette émission politique a eu des audiences considérables sur les réseaux sociaux en RDC et dans sa diaspora, comptant plus de 100 mille abonnés sur YouTube et beaucoup plus sur son compte Facebook. « Marius chez vous », c’est comment ramener le vrai sens du journalisme. Le journalisme qui ne donne pas son avis, qui donne l’information de façon objective. Ce qui n’est pas le cas dans la plupart des médias [au sein de la diaspora, Ndlr]. », explique Marius Muhunga à Heshima Magazine.

 Cette façon de faire la presse autrement a été appréciée au sein de la diaspora. « Du coup, ce qui s’est passé c’est que je retrouve des gens, qui ne se retrouvaient pas dans l’autre façon de faire le média, qui viennent vers moi. Ceci coïncide avec le début des élections en République démocratique du Congo. Je me pointe au milieu de deux camps : celui de Félix Tshisekedi et de Martin Fayulu où les partisans sont complètement divisés. Et mon émission vient donner de l’espace à ces deux camps, quelle que soit votre tendance, à venir vous exprimer. Les gens voient et [apprécient] que je donne la parole à tout le monde avec le même respect… », ajoute-t-il.

Ses difficiles débuts

Jeune et balloté entre Kinshasa et Kikwit, dans le souci d’étudier, Marius Muhunga ne rêvait pas encore les médias il y a plus d’une vingtaine d’années en arrière. Son destin a été, en quelque sorte, stimulé par deux hommes : Anderson Manza et le père Zabala. Le premier, son camarade à l’université, fut celui qui l’avait tiré pour aller chercher une place dans la radio communautaire Tomisa des pères Jésuites, à Kikwit, dans l’actuelle province du Kwilu, à l’Ouest de la RDC. Le deuxième, c’est ce responsable de la radio qui a déniché son excellent timbre vocal.

« (…) Etant à Kikwit, il y avait une radio qui a ouvert. C’était une première radio à Kikwit, la radio Tomisa. Une radio du diocèse de Kikwit. Au fait, c’était une initiative des prêtres Jésuites. Et quand cette radio a ouvert, ils avaient besoin des gens qui pouvaient amener des projets pour présenter des émissions. Un ami à moi qui s’appelle Anderson Manza, avec qui j’étudiais à l’université, est venu me chercher un jour pour me dire : écoute Marius, il y a une radio qui vient d’ouvrir. Je pense que nous pouvons proposer un projet là-bas pour travailler. Pour moi, je n’avais jamais imaginé faire la radio, même si j’étais un grand fan, quand j’étais enfant, des animateurs radio comme Ilunga Mwana Bute qui est resté, par ailleurs, mon modèle depuis ce temps là. Donc, mon ami vient me chercher à la maison. Je me souviens que ce jour là, je n’avais même pas envie d’y aller. Il m’a forcé, presque forcé, pour aller à la radio et parler aux responsables afin de nous donner un espace. », relate Marius Muhunga.

Et de poursuivre : « On rencontre le responsable de la radio, c’était le père Zabala, un prêtre Jésuite d’origine espagnole. Après il dit oui, si vous avez une idée, vous l’apportez. Anderson a proposé une émission de dédicace chanson. Pour moi, ce n’était vraiment pas faire une émission dédicace chanson, parce que je voulais une émission plutôt scientifique. Anderson prend le micro en premier et quand je prends le micro en deuxième, le père Zabala arrête tout ! Il dit : « est-ce que tu as déjà fait la radio quelque part ? » Moi je dis non, je n’ai jamais fait la radio, c’est la première fois que j’entre dans un studio radio. Après il me dit : « tu as une très belle voix pour la radio ». Donc, pour moi, c’est un grand compliment. Et finalement, on enregistre cette émission, on enregistre le générique. Après l’émission passe le soir. Et le lendemain, je viens à l’université, tout le monde parlait de moi. Tout le monde parlait de ma voix, combien je parle bien à la radio. Du coup, c’était un grand leitmotiv, c’était une grosse motivation ! Je me suis donné à fond. Le fait que le père Zabala avait dit ça, cela a réveillé en moi le mec de la radio qui sommeillait en moi. Pendant je crois deux ans, à Kikwit, l’émission « Une chanson pour toi » était devenue l’émission vedette de la radio, j’étais devenu célèbre à Kikwit. Et après, j’ai créé une autre émission « Savoir plus » parce que j’étais attaché à la culture générale. »

Métamorphose réussie !

Plusieurs années après, Marius Muhunga deviendra une des voix de référence dans l a chron i q u e musicale à Kinshasa, voire à travers le p a y s . 

le succès de son émission « Jeudi Marius », il va, plus tard, affronter la chronique musicale à la télévision jusqu’à changer son fusil d’épaule pour embrasser un autre créneau aujourd’hui. Une métamorphose qui a bien réussi. Puisqu’actuellement, grâce à son émission politique « Marius chez vous », il a arraché un contrat à la Voix de l’Amérique (VOA). Et en marge de la dernière Assemblée générale des Nations-Unies, le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, lui a accordé une interview exclusive. Un entretien qui a été très suivi et relayé par des médias locaux. « Avoir une interview avec le président de la République, c’est aussi une responsabilité de savoir comment le pays vous regarde. », commente en toute modestie l’intéressé, évoquant une « consécration des efforts » qu’il a fournis. Et cela, non sans renvoyer l’ascenseur au chef de l’Etat qui l’avait aussi félicité à la fin de l’interview, visiblement à cause de cette mutation réussie. « Je remercie en passant le président de la République d’avoir accepté de me donner cette interview (…) », lance le désormais sociétaire de la Voix de l’Amérique. Mais avant d’opérer cette métamorphose, dans son fort intérieur, le Marius d’hier était déjà révolté par une chose : le manque d’estime dont sont parfois victimes des chroniqueurs de musique face à leurs confrères de la chronique politique. « Je n’ai jamais rêvé d’être chroniqueur de musique. C’est une étiquette qui me faisait très mal.

Le média, c’est mon monde. Je me considère comme un poisson dans l’eau. Mettez-moi où vous voulez, je me sentirai à l’aise, sauf les sports […] Le fait que des chroniqueurs politiques interviewaient les politiques et que nous, les artistes, nous diminuait. Et ça me rongeait ! (…) », avoue-t-il. D’ailleurs, pour lui, au regard de son amour pour la culture générale, il était chroniqueur musical malgré lui. Et, aux Etats-Unis, il laisse simplement éclater l’autre pan de son talent. Et après avoir franchi un tel palier, « MM » court toujours derrière son « plus grand rêve ». Celui d’avoir un « grand média » qui peut contribuer à l’évolution de la démocratie en RDC.

Notoriété au service des démunis

Toujours habité par l’idée d’aider les plus démunis, Marius Muhunga va mettre sa notoriété à contribution. Après avoir engrangé un nouveau succès dans la présentation de Vodacom Super star en 2011 tout en prenant aussi son indépendance vis-à-vis des chaines de télévision en créant sa propre société de production audiovisuelle « Pro-Image », il va concevoir une autre émission au contenu philanthropique dénommée : « Tout est possible ». « J’ai été inspiré du fait que je connaissais des gens qui avaient les moyens et de l’autre [côté] des gens qui n’avaient rien. Donc, j’ai créé cette idée d’amener à la télé ces deux extrémités pour profiter de mon carnet d’adresse afin d’aider ceux qui étaient dans le besoin. D’où, la création de cette émission Tout est possible (…). Cette émission restera vraiment mon émission de cœur », assure-t-il.

Généreux de nature, Marius Muhungu trouve toujours une brèche pour pouvoir aider des gens qui se trouvent dans des situations de manque. A défaut d’avoir une fortune qui pourrait satisfaire un plus grand nombre de nécessiteux, cet homme des médias met son carnet d’adresse à contribution pour atteindre ceux qui peuvent aider les autres. « Le mauvais souvenir dans cette émission était qu’un jour il y a une famille qui est venue me voir dont un enfant qui était très malade. Je pense que l’enfant était né avec une malformation physique. Je suis allé voir la famille. Et le lendemain, j’ai trouvé quelqu’un qui pouvait aider et qui a mis les moyens. Je suis allé à l’hôpital, aux Cliniques universitaires, j’ai eu une ambulance pour venir chercher cet enfant. Et, arrivé à la maison, on me dira que cet enfant est décédé la nuit. Ça c’était vraiment la mauvaise expérience que j’ai eue dans cette émission », se souvient Marius. Mais une mauvaise expérience qui l’avait motivé à réagir plus vite quand des gens étaient en situation de besoin.

Dido Nsapu

Trending

Quitter la version mobile