Société

Les Humbu : peuple autochtone de Kinshasa

Les Humbu auraient occupé la région de Kinshasa et du Stanley Pool au XIXe siècle. Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, des pêcheurs et surtout des commerçants téké venus du nord, installent des marchés et des villages au sud du Pool Malebo et sur les plateaux qu’on nommera plus tard les plateaux des Batéké. Ces villages sont des colonies car les Téké se limitent à la pêche et au commerce.

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 Les Humbu (Houmbou, Bawoumbou) sont un peuple d’Afrique centrale établi à l’ouest de la République démocratique du Congo.

Leur capitale est Lemba, actuellement, une des 24 communes de Kinshasa. Ils sont maintenant assimilés aux Téké, bien que ceux-ci les aient colonisés au XVIIIe siècle.

 Les terres qui leur appartiennent de façon coutumière sont : Lemba, Limete, Masina, Makala, Kintambo, Gombe (Kinshasa), Selembao, Binza, Lutendele et Benseke. Leur chef coutumier est David Matadi Kibala.

Histoire

Les tribus de la région, Humbu et Mfinu, étaient considérées comme les propriétaires de ce côté du fleuve. Au fil du temps, les colons Téké poussent la population locale plus loin des rives, vers l’intérieur des collines. Les principaux villages Téké de la rive sud étaient Nsasa avec près de 5000 habitants, Ntambo avec moins de 3000 habitants. Lemba, parmi une multitude de petits villages humbu, était la capitale marchande et politique des Humbu, avec environ 300 habitants. Les marchés du fleuve voyaient des caravanes d’esclaves porteurs d’huile, d’amandes, de palme, d’arachides, de sésame et d’ivoire aller et venir.

Pour les Bahumbu, propriétaires terriens de Kinshasa-ouest, « la terre est la deuxième valeur après le clan ou le lignage, valeur suprême (…). Il n’y a pas de terre vacante ; toute terre appartient à un clan. Elle est inaliénable et imprescriptible » (KAMBIA K., 1978). La propriété des Bahumbu s’organisait autour des clans. Chaque clan comprenait plusieurs villages. La protection de cette propriété foncière était assurée par le chef de clan, mais gérée collectivement par les frères, sœurs et enfants. Cette organisation foncière constituait un gardefou contre un abus quelconque. Nul n’avait le droit de céder à une tierce personne la terre du clan. Cependant, la disparation physique d’un chef de clan entraînait parfois la dislocation de la propriété foncière. Elle déclenchait des conflits fratricides. 

 L’arrivée des Européens sur la terre des Bahumbu et surtout le développement de la ville ont désarticulé cette organisation. La valeur vénale donnée à ce patrimoine foncier clanique fut à l’origine du non-respect de la tradition. Il s’en est suivi une spéculation foncière sur les terres des ancêtres.

Traditionnellement, trois clans se partageaient l’espace de Kinshasa-ouest : Le domaine du clan Kinsinga limité à l’ouest par la rivière Binza s’étendait au-delà de la Lubudi. Les villages Masuba, Mbanza Boma, Luputambo situés  sur la rive droite de la rivière Binza constituaient ce qu’on appelait les villages Balari. Leurs populations étaient en effet apparentées aux Balari du Congo Brazzaville. Ces villages étaient sous l’autorité du chef Binza. Au sud, à l’emplacement de l’Université Pédagogique Nationale, se trouvait le village Materi Mando. Plus au sud, les villages Kinkela et Badiadingi appartenaient au groupement de Kimwenza, sous la dénomination de Balasinga. Tous ces villages de la vallée de la Bumbu furent unifiés sous l’autorité d’un seul chef Balasinga en 1935. Ce nom disparaît en 1935 en faveur de Badiadingi, qui figure depuis cette date sur toutes les cartes et documents officiels. Le domaine de Kinga Na Nsuadi a été le premier à être atteint par l’urbanisation. Il n’en reste plus de terres libres. Toutes ont été vendues. Le clan Kinzina avait le plus petit domaine foncier de tous, quand bien même il s’était étendu par squattérisassions  en grignotant celui du clan Kianga na Nsuadi. Ce domaine est à l’heure actuelle, totalement urbanisé. Le village Malueka et Kimpete Mpete en faisaient partie.

Le domaine foncier du clan Lukunga couvrait tout le sud et l’ouest de Kinshasa ouest. Les villages Mbudi, Kimbuala, Mbenseke Mfuti, Mitendi et plusieurs autres villages du sud appartiennent à ce domaine.

 Commerce fluvial pendant le dix-neuvième siècle

Pour comprendre la vie économique et sociale des populations de la rive méridionale du Pool Malebo pendant le dix-neuvième siècle, il est important d’avoir une idée de sa configuration géographique. La rive méridionale était composée de plusieurs villages d’importance variable : d’une part des villages riverains et d’autre part des villages qui se situaient dans l’hinterland. Il y avait deux principaux villages riverains: Ntsasa (Kinshasa) et Ntamo (Kintambo). Ils étaient les marchés les plus importants de la rive méridionale.

Dans une étude consacrée aux anciens villages des environs de Kinshasa, Léon de Saint Moulin (1969) rapporte que les principaux villages de la rive méridionale étaient Kinshasa, Kintambo, et Lemba. Kinshasa, Kintambo et d’autres villages   tels que Ndolo, Kingabwa, Mokila, Kinsuka, etc., étaient des villages riverains et appartenaient aux Batéké. Dans l’hinterland, les villages appartenaient aux Bahumbu. Le village principal était Lemba ou Mbanza-Lemba, qui était un grand centre commercial. À côté de nombreux petits villages Bahumbu, on peut citer certains, tels que Kimbangu et Kimwenza, qui étaient également très connus.

La vie socio-économique des populations variait selon qu’elles habitaient les villages riverains ou les villages de l’hinterland. Jan Vansina (1973) indique que les villages principaux du Pool pouvaient être considérés comme des villes commerciales. Ils étaient, contrairement aux villages de l’hinterland, très agglomérés et composés de plusieurs villages, souvent six ou sept. Le village de Kinshasa par exemple, était composé de plusieurs petits villages qui allaient de la plaine de Kalina à Ndolo. La plupart des villages riverains avaient une population mélangée composée des Tio et des Bobangi.

Ils étaient peuplés et organisés de manière particulière : il y avait une poignée d’hommes libres qui dirigeaient et contrôlaient un grand nombre d’esclaves. Les principaux dirigeants avaient des centaines d’esclaves et un peu plus d’une  vingtaine de femmes chacun. On pouvait estimer à environ cinq mille habitants, la population des villages comme Kintambo ou Kinshasa. En plus, ces grands villages, recevaient périodiquement des caravanes de commerçants en provenance des différentes parties de l’axe commercial congolais. Les commerçants y établissaient des campements pendant plusieurs semaines.

Les habitants des villages riverains cultivaient peu et achetaient plutôt les produits vivriers en provenance des villages de l’hinterland (chez les Bahumbu). On trouvait quelques hommes à Kinshasa, comme dans les autres villages riverains, qui pratiquaient la pêche. Mais le plus grand nombre vivaient du commerce local. Quant aux femmes des villages riverains, elles ont connu des changements dans leurs pratiques économiques suite au grand commerce fluvial. Par exemple, on trouvait très peu de champs cultivés par ces femmes. Elles étaient davantage occupées à l’artisanat et particulièrement à la poterie. De même, elles préparaient d’énormes quantités de pain de manioc (chikwangues) pour les caravanes des commerçants qui campaient périodiquement dans les grands villages. Elles participaient aussi aux marchés locaux des vivres tenus par les femmes des villages de l’hinterland. Malgré tout ce travail, elles semblaient disposer de beaucoup plus de temps libre que les femmes vivant dans les villages de l’hinterland. (Vansina 1973 : 255-262).

Chez les Bahumbu, les populations ont continué à vivre essentiellement de l’agriculture. On y trouvait aussi bien des marchés d’importance régionale que locale, les uns plus importants que les autres, selon le rôle joué, soit dans le grand commerce fluvial, soit dans les échanges locaux. Par exemple, un marché tel que celui de Lemba dans le Pumbu, était un centre commercial de loin plus important que celui de Kimwenza, qui était un marché d’intérêt plus local. Il attirait différents acteurs impliqués dans le grand commerce fluvial, comme les Bobangi qui remontaient en pirogues la rivière Ndjili jusqu’à Kimbangu et de là, atteignaient assez facilement leur destination, Lemba. (Bontinck 1983b :169-170). (à suivre).

 Raymond Befonda 

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