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GENOCOST : un travail de mémoire qui prend de l’ampleur 

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Les drapeaux congolais étaient en berne sur l’ensemble du territoire national, le 2 août 2024, journée dédiée à l’hommage aux victimes des guerres à des fins économiques. Ce travail de mémoire, officiellement démarré en 2023, prend de l’ampleur à travers le pays. A l’international, certains « bourreaux » hésitent encore pour relayer le message… 

Dans une atmosphère lugubre, seize membres du gouvernement dont la Première ministre, Judith Suminwa Tuluka, ont assisté à la cérémonie de commémoration des massacres des Congolais tombés dans les différentes guerres que le pays a connues, particulièrement la guerre de 6 jours, en juin 2000, entre les armées rwandaise et ougandaise, à Kisangani, chef-lieu de la province de la Tshopo. Félix Tshisekedi était attendu à Kisangani pour présider cette journée nationale. Mais, en raison d’un séjour médical en Belgique, il a été représenté par la Première ministre, Judith Suminwa.

Constant Mutamba, ministre d’Etat en charge de la Justice n’a pas su retenir ses émotions, lui qui a été témoin oculaire de ces événements macabres. Lors d’un exercice de témoignage, loin d’être une réminiscence, Constant Mutamba comme d’autres ministres, ont fondu en larmes en écoutant une dame amputée des jambes, suite à la barbarie rwando-ougandaise. Devant la fosse commune numéro 1 du cimetière de la guerre de 6 jours où s’est déroulée la première partie des commémorations officielles, la Première ministre Judith Suminwa a soutenu Mimi Otshudi en sanglots. Par célébration, cette dame invalide a enfin vécu le deuil de membres de sa famille. « Pour moi, c’est en ce 2 août que mes parents sont véritablement enterrés et c’est aujourd’hui pour moi le véritable deuil, après 24 ans ce n’est pas facile. », a déclaré la victime. 

Une autre cérémonie a aussi eu lieu à Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, une autre province martyre confrontée actuellement aux combats entre les rebelles du M23 appuyés par l’armée rwandaise contre les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). Un cimetière a même été préparé pour accueillir les nouvelles victimes tuées par le M23-RDF dans le territoire de Nyiragongo, toujours dans la province du Nord-Kivu. 

GENOCOST, initiative de la société civile 

Dans la soirée du 2 août, une partie de la société civile, à l’origine de la commémoration du Genocost, il y a deux ans, s’est aussi recueillie à la place rond-point du Canon. Une cinquantaine de personnes ont entouré le drapeau de la RDC avec des bougies allumées, et n’ont pas hésité à critiquer très fortement les autorités accusées d’avoir récupéré leur initiative depuis l’année passée. « Ce que nous reprochons aux organisateurs de Genocost, entre autres, le Fonarev [le Fonds national des réparations des victimes de violences sexuelles liées aux conflits, des victimes des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité qui est l’organisateur officiel], c’est purement politique. Mais ce que nous avons organisé ici au rond-point du Canon, c’est purement civil. L’initiative vient totalement de la société civile, la politique ne doit que nous accompagner. », a estimé à RFI Christian Nkambi, un des participants.

Hésitation à l’international… 

Plus de 25 villes à travers le monde, dont Bruxelles, ont accueilli des cérémonies commémoratives en hommage à ces victimes de massacres. Mais ce sont uniquement des Congolais de la diaspora qui tentent de manière informelle à imposer ce travail de mémoire au monde, particulièrement en Occident où agissent en sous-main les principaux soutiens du Rwanda et de l’Ouganda, deux pays qui appuient des rébellions en République démocratique du Congo depuis la fin du génocide rwandais il y a près de 30 ans. « C’est ici qu’il y a les vrais bourreaux de nos victimes. L’Union européenne signe des contrats miniers avec le Rwanda alors que ce pays ne dispose pas ces matières premières. Ce sont eux qui encouragent les massacres dans notre pays. L’Union européenne finance l’armée rwandaise qui tue chez nous », a déclaré un Congolais de la diaspora. Si dans 25 villes, les Congolais essaient de commémorer ces massacres, des institutions occidentales dont l’Union européenne hésitent pour parler de ce « Genocost ». 

Quid du Genocost… 

Le Genocost est la contraction de deux mots, génocide et économie. Selon les initiateurs de ce néologisme, la plateforme d’actions de la jeunesse congolaise (CAYP), cette campagne a été lancée notamment dans le but d’une reconnaissance officielle du génocide congolais dû à des intérêts économiques. À Bruxelles, CAYP ainsi que la communauté congolaise de Belgique, ont organisé, pour la deuxième année consécutive, un rassemblement au square Lumumba à 20h00, sous le thème « Justice et Dignité ». En parallèle, une messe commémorative, conduite par Genocost et l’ambassade de la RDC à Bruxelles, s’est tenue à la Basilique de Koekelberg à 17h00.

Genocost vise à faire du 2 août, date anniversaire du début de la seconde guerre du Congo en 1998, une journée de commémoration des victimes du « génocide économique » en République démocratique du Congo. A travers cet événement mondial, l’organisation souhaite également mettre en lumière « les conséquences dévastatrices subies par le peuple congolais, en honorant les vies perdues, les communautés brisées et les traumatismes persistants ».

Le conflit, qui dure des décennies en RDC, a causé des millions de morts. D’après CAYP, ce génocide n’est pas le premier : sous le règne colonial de Léopold II (1885-1908), environ dix à treize millions de Congolais ont été tués par l’exploitation du caoutchouc et d’autres ressources du pays. “Cette histoire est souvent absente des programmes scolaires, laissant de nombreux Congolais dans l’ignorance”, déplore CAYP. D’autres pays africains, comme le Kenya et le Burkina Faso, célèbrent également cette journée.

Heshima 

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