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Trafic à sens unique à Kinshasa : des usagers du transport en commun sacrifiés !

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Instauré fin octobre en réponse aux embouteillages chroniques dans la capitale de la République Démocratique du Congo (RDC), le dispositif expérimental de sens unique alterné prend très peu en compte les réalités des usagers du transport en commun à Kinshasa. Plusieurs Kinois se voient contraints de marcher aux heures de pointe, faute de trouver un taxi.

Dans le but de permettre aux véhicules de circuler sans trop d’embouteillages, plusieurs arrêts de bus ont été quasi-supprimés ou déplacés. Les bifurcations permettant aux conducteurs des véhicules de transport en commun de faire demi-tour pour rejoindre les arrêts ont également été supprimées dans le cadre de ce dispositif. De Magasin-Kintambo à la Place Royale, il devient de plus en plus difficile d’utiliser les bifurcations, à l’exception du rond-point Socimat. Conséquence : rareté des transports en commun et attroupements des Kinois aux arrêts de bus. Des centaines de Congolais ont dû marcher, lundi 11 novembre, faute de transports disponibles.

« C’est nous qui sommes sacrifiés dans ce dispositif à sens unique alterné. Ils ont préféré privilégier les véhicules privés au détriment du transport en commun », a réagi Jean-Pierre Kombe. Ce dernier raconte avoir passé trois heures près de l’Hôtel de Ville de Kinshasa, dans l’espoir d’attendre un bus pour Pompage, dans l’Ouest de la capitale. Finalement, il a décidé d’expérimenter, malgré lui, les vertus de la marche, espérant croiser un taxi allant dans sa direction. D’autres transporteurs ont triplé le prix de la course sur certains itinéraires. Aux heures de pointe, l’itinéraire Zando-UPN est facturé entre 5000 et 6000 FC, alors qu’il coûte généralement entre 2500 et 3000 FC. Quant à l’itinéraire Zando-Pompage, qui coûte normalement 2500 FC, il est porté à 5000 FC l’après-midi.

Le paradoxe de ce dispositif est que les embouteillages persistent sur certains axes. Par exemple, une partie du tronçon du Tourisme à Magasin-Kintambo est constamment embouteillée aux heures de pointe. Il en va de même au niveau de Socimat, près de l’ambassade de France et de la Place Mandela, sur le Boulevard du 30 Juin. Dans certains axes congestionnés, un Congolais, dont la photo a été largement partagée lundi sur les réseaux sociaux, a même déplié un matelas pour attendre la fin des embouteillages. « Le défi du 21e siècle pour notre capitale, c’est de simplement pouvoir se rendre au travail ! C’est désolant », a déploré Tysia Mukuna, propriétaire de l’usine de café « La Kinoise ». Elle affirme avoir passé 4 heures et 45 minutes dans les embouteillages, tant à l’aller qu’au retour, pour se rendre à son usine à Kingabwa.

Depuis le 27 octobre, la Commission nationale de prévention routière (CNPR) et l’Office des voiries et drainage (OVD) expérimentent – non sans difficultés – cette nouvelle gestion de la circulation à Kinshasa. Ce dispositif impose un sens unique entre 5 h et 10 h, puis de 15 h à 21 h, sur des axes souvent congestionnés aux heures de pointe. À l’Est, le Boulevard Lumumba, au niveau de l’entrée de N’djili, est concerné. À l’Ouest, plusieurs routes sont ciblées, notamment les avenues du Tourisme et Nguma ainsi que le Boulevard du 30 Juin. L’avenue des Poids Lourds, au nord-est de la ville, a également été incluse dans ce dispositif. Les résultats de cette initiative restent toutefois mitigés.

Aucune solution de rechange en vue

Kinshasa connaît une croissance démographique accélérée, avec une projection de 20 millions d’habitants d’ici 2030. Pourtant, les dirigeants congolais n’ont pas mis en place de projection concrète pour adapter leur politique à cette réalité. « Un jour, nous allons nous réveiller un matin et tous les services publics vont s’arrêter : eau, électricité, routes… », avait estimé Benjamin Wenga, ancien directeur général de l’Office des voiries et drainage (OVD). La ville subit une pression considérable, notamment sur ses infrastructures de transport. Les embouteillages, qui causent des retards et des pertes économiques importantes, figurent parmi les préoccupations majeures de la capitale. Aucune solution pérenne ne semble toutefois en vue.

Relance attendue du train urbain

Conçu en 2022, le projet ferroviaire MetroKin à Kinshasa n’a toujours pas été lancé. Initialement prévu pour mars 2024, son lancement a été retardé en raison de problèmes fonciers. Plusieurs sites ferroviaires ont été lotis à Kinshasa. Lors du dernier séjour de Félix Tshisekedi en France, un protocole d’accord a été signé avec le groupe français Alstom, qui s’est associé au consortium dirigé par l’Africa Finance Corporation (AFC) pour mettre en œuvre ce projet. Ce dernier vise à créer un réseau ferroviaire dédié à la mobilité urbaine dans la ville. Il prévoit la modernisation d’un réseau existant sur 300 km. L’une des sections importantes consiste à rénover 25 km de voies pour interconnecter la gare centrale de Kinshasa à l’aéroport international de N’djili. La première phase du projet devrait coûter 250 millions de dollars à l’État. Si ce projet se concrétise, il pourrait inciter certains Kinois qui utilisent des véhicules privés à adopter le train pour se rendre au travail, ce qui allégerait, dans une certaine mesure, la congestion sur les routes de la ville.

Heshima

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