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Lutte contre le changement de la Constitution : le « Sursaut national » peine à mobiliser la rue

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Le 27 novembre 2024, la Police nationale congolaise a étouffé dans l’œuf la marche initiée par le « Sursaut national », une plateforme de l’opposition et de la société civile créée pour barrer la route au changement de la loi fondamentale envisagé par le président de la République, Félix Tshisekedi. À Kinshasa, l’adhésion populaire à une telle initiative semble encore faible sur le terrain.

Après l’interpellation brutale, le 14 novembre, de l’ancien candidat à la présidentielle de 2023, Delly Sesanga, la plateforme dont il est l’un des leaders a tenté, sans succès, une nouvelle manifestation populaire le 27 novembre dans la commune de Ngaba, à l’ouest de la ville de Kinshasa. Après une sensibilisation des Congolais le long de l’avenue Université en vue d’un rassemblement au rond-point Ngaba pour démarrer la marche, les cadres, militants et sympathisants du Sursaut national ont été empêchés d’amorcer cette manifestation. Parmi eux figuraient l’ancien député national Ados Ndombasi, l’opposante Bernadette Tokwaulu et certains membres de la société civile.

« Levez-vous ! Bravez la peur », a lancé Delly Sessanga à la population congolaise lors d’une interview à la presse. Et de poursuivre : « Nous faisons la campagne de sensibilisation pour que tous les Congolais se lèvent comme un seul homme afin que cette initiative de changement de la Constitution ne passe pas ». Après l’échec de cette manifestation, le Sursaut national a promis un meeting au terrain municipal de Masina, le 14 décembre.

Deux ailes pour défendre la Constitution

Pour mener une fronde contre le changement de la Constitution, l’opposition se montre encore désunie. Deux coalitions semblent mener la bataille. Il s’agit du Sursaut national, regroupant, entre autres, Delly Sessanga, président du parti Envol, Ados Ndombasi, coordonnateur de l’Alternative 2028, le professeur Mathieu Kalele et Bernadette Tokwaulu. Il y a également des membres de la société civile, tels que Jean-Claude Katende, président de l’Association africaine pour la défense des droits de l’homme (ASADHO).

À côté de cette coalition, une autre aile a vu le jour le 20 novembre, composée du Front commun pour le Congo (FCC) de l’ancien président de la République, Joseph Kabila, de l’ECIDé de Martin Fayulu, de LGD de Matata Ponyo et de Ensemble pour la République de Moïse Katumbi. Pour ce groupe d’opposants, le projet de révision de la Constitution porté par le président Félix Tshisekedi représente une grave menace pour la souveraineté nationale et la démocratie en République démocratique du Congo (RDC).

Mais ces deux ailes manifestent chacune dans leur coin. Le jour de la marche du Sursaut national, les membres de l’autre branche n’ont pas été visibles sur le terrain. Il en est de même pour ceux du groupe de Delly Sessanga, qui n’étaient pas associés à la déclaration commune du 20 novembre. Une absence de synergie qui risque de ne pas favoriser une grande adhésion populaire en faveur de cette lutte contre le changement de la Constitution.

Le passé du FCC joue contre la mobilisation ?

Lors de leur déclaration commune faite le 20 novembre au siège de la CENCO, les opposants ont dénoncé ce qu’ils qualifient de « plan diabolique » visant à changer la Constitution et à consacrer la balkanisation de la RDC. Ils ont aussi appelé les Congolais, aussi bien dans le pays que dans la diaspora, à organiser des manifestations pour défendre la Constitution de 2006 et empêcher Félix Tshisekedi de modifier les dispositions limitant le nombre et la durée des mandats présidentiels.

Curieusement, parmi les signataires de cette déclaration commune figurait Emmanuel Ramazani Shadary, ancien dauphin de Joseph Kabila à la présidentielle de 2018. Il représentait le FCC de Joseph Kabila dans ce combat contre la modification de la Constitution. Mais le passé de répression du régime Kabila lors des manifestations contre la révision de la même loi dérange une partie de l’opinion. Sous Joseph Kabila, plusieurs Congolais ont perdu la vie en tentant de défendre la Constitution. C’est le cas de Rossy Mukendi, Luc Nkulula et Thérèse Kapangala.

En septembre 2016, l’opposition avait appelé à manifester dans tout le pays pour signifier à Joseph Kabila son « préavis », trois mois avant l’expiration de son mandat, le 19 décembre 2016. Bilan des manifestations : au moins 15 morts. L’ancien chef de l’État se retrouvait dans l’actuelle situation de Félix Tshisekedi, où il exerçait son dernier mandat présidentiel. Mais l’ex-Raïs ne montrait aucun signe laissant penser qu’il souhaitait organiser la présidentielle en décembre 2016. La suite de l’histoire est connue : un glissement de deux ans au sommet de l’État, avant de passer le pouvoir à Félix Tshisekedi en janvier 2019, après une présidentielle tenue fin 2018. Ce passé semble discréditer le combat pour le respect de la Constitution que veut mener le FCC aux côtés des autres opposants.

Heshima

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