Nation

Kabila, c’est l’AFC-M23 : Tshisekedi avait-il raison ?

Published

on

L’ancien président de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, a rompu son légendaire silence pour commenter la crise sécuritaire qui secoue l’Est du pays. Mais sa sortie médiatique a scandalisé une grande partie de l’opinion congolaise, principalement au sujet des rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) qu’il a carrément absout. Ce qui laisse penser que la dénonciation de Félix Tshisekedi sur une collusion entre Joseph Kabila et l’AFC-M23 est authentique.

À force de vouloir à tout prix se venger de Félix Tshisekedi, Joseph Kabila a-t-il pactisé avec les rebelles du M23 qui commettent des massacres dans les provinces du Nord et Sud-Kivu ? C’est ce que certains semblent comprendre après avoir lu la tribune de l’ex-président parue, le week-end dernier, dans un journal sud-africain, The Sunday Times. Pour l’ancien président congolais, la solution pour mettre fin au conflit dans l’est de la RDC n’est pas militaire. Ni l’envoi de troupes ni d’équipements supplémentaires en soutien à l’armée congolaise ne pourront résoudre la crise. Pourtant, en 2013, lui-même, alors président de la République, avait bénéficié du même soutien de la SADC, dont certains pays (Afrique du Sud, Tanzanie et Malawi) avaient fourni des troupes pour composer la Brigade d’intervention de l’ONU qui avait aidé les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) à défaire militairement le M23.

Kabila absout le M23

Au pouvoir en 2012, Joseph Kabila avait refusé plusieurs fois de négocier avec les rebelles du M23. Après la chute de la ville de Goma en novembre 2012, il avait finalement changé d’avis en acceptant des discussions. Il avait d’abord engagé un dialogue avec les pays voisins, à savoir le Rwanda et l’Ouganda, qui soutiennent cette rébellion. Après le retrait des insurgés de Goma sans coup de feu, le président Kabila avait fini par monter une opération militaire intitulée « Pomme orange » qui, ensemble avec la brigade d’intervention agissant sous la bannière de l’ONU, avait neutralisé cette rébellion.

Lors d’un échange avec la société civile de Goma, fin 2013, Joseph Kabila avait fini par reconnaître que l’accord du 23 mars 2009 signé avec les rebelles du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) était « une erreur » à ne plus commettre. Son porte-parole de l’époque, Lambert Mende, avait indiqué que s’il fallait faire la guerre pendant 100 ans, la RDC la ferait, pourvu que ces « bandits » ne soient plus intégrés dans l’armée. Mais aujourd’hui, Joseph Kabila absout le M23. « Contrairement à ce que les autorités de Kinshasa veulent faire croire, la crise ne se limite pas aux actions incontrôlées du M23 présenté à tort comme un groupe anarchiste, un proxy d’un État étranger sans revendications légitimes ni à un simple désaccord entre la RDC et le Rwanda. La crise en RDC remonte à 2021 et est multidimensionnelle », a écrit Joseph Kabila. Une incohérence majeure avec son appréhension de la rébellion pendant qu’il était au pouvoir.

Tshisekedi avait-il raison d’accuser Kabila ?

Avec ce masque qui tombe, beaucoup de Congolais pourraient donner raison à Félix Tshisekedi qui accuse toujours son prédécesseur d’être derrière l’autre appendice du M23, l’Alliance Fleuve Congo (AFC), dirigée par l’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Corneille Nangaa, réputé proche de Joseph Kabila. Lors d’une interview accordée à certains médias congolais depuis Bruxelles, Félix Tshisekedi avait accusé, en août 2024, son prédécesseur d’être derrière l’alliance entre Corneille Nangaa et le M23. Et Félix Tshisekedi l’a encore répété récemment avec conviction. « Dans ce pays, il n’y a pas mieux informé que le président de la République », a réagi le vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani.

Une autre opinion pense que Joseph Kabila est dans une logique d’insurrection pour renverser militairement Félix Tshisekedi. Le soutien militaire de l’Afrique du Sud gêne ce projet. Pour lui, l’envoi des troupes sud-africaines est un gaspillage des ressources pour soutenir un tyran. « Le monde observe attentivement si l’Afrique du Sud connue pour son humanisme et ses valeurs continuera d’envoyer des troupes en RDC pour soutenir un régime tyrannique et combattre les aspirations du peuple congolais. », a conclu Joseph Kabila.

Après cette tribune, il se dégage une sorte de pacte entre le président rwandais, Paul Kagame, Joseph Kabila, l’opposant Moise Katumbi et Corneille Nangaa pour renverser le régime de Félix Tshisekedi. Le M23, qui a toujours eu des revendications principalement centrées sur les Kivus, est devenu le bras armé de ces politiciens dans l’objectif de faire revivre l’AFDL aux Congolais, tout en nourrissant l’ambition de faire tomber Kinshasa. Cette démarche présumée indique que Joseph Kabila n’avait pas quitté le pouvoir de son plein gré. Il voulait jouer au bonneteau avec Félix Tshisekedi mais cela a mal tourné.

Heshima

Trending

Quitter la version mobile