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RDC : l’opposition boude les consultations politiques, mais pour combien de temps encore ?

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Les consultations politiques pour la mise en place d’un gouvernement d’union nationale initiées par le président de la République démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi, ont démarré lundi 24 mars 2025. Mais une partie de l’opposition – non des moindres – semble encore bouder la démarche. Le Front commun pour le Congo (FCC) et d’autres forces de l’opposition rejettent actuellement ce format de discussions.

Menées par Désiré-Cashmir Eberande Kolongele, conseiller spécial du chef de l’État en matière de sécurité, ces consultations sont ouvertes alors qu’une partie de l’opposition continue d’exiger un dialogue national. La première journée de cet exercice politique était réservée aux chefs de corps des institutions et certains leaders politiques de l’ancien format du présidium de l’Union sacrée de la Nation. La Première ministre, Judith Suminwa, le président de l’Assemblée nationale Vital Kamerhe ainsi que le président du Sénat, Jean-Michel Sama Lukonde, ont été tour à tour reçus par le conseiller spécial du chef de l’État. Modeste Bahati Lukwebo a également fait partie des personnalités consultées dès ce premier jour.

Pour cet exercice, Eberande Kolongele a fixé les principes à ne pas dépasser, notamment celui de la « suprématie » de la Constitution, l’unité nationale, l’intangibilité des frontières, la souveraineté nationale, mais aussi et surtout le « respect des institutions établies et la gouvernance inclusive et participative ». Pour celui qui mène ces discussions, ces éléments ne sont pas négociables. Pourtant, c’est justement sur ce dernier principe que surfe le FCC de l’ancien président Joseph Kabila. Toutes les institutions et tous les animateurs d’institutions issus des élections de décembre 2023, organisées « en violation des lois pertinentes et marquées par une fraude d’ampleur inédite, sont illégitimes et que cette illégitimité est une des principales causes de la crise actuelle », a déclaré Raymond Tshibanda, président de la cellule de crise du FCC. Cette illégitimité, fait-il remarquer, ne peut donc être ignorée ou exclue des débats, si le véritable objectif des consultations est de régler la crise.

Tshisekedi va-t-il étendre son approche ?

Face à une crise sécuritaire majeure et à des tensions internes croissantes, Félix Tshisekedi doit impérativement rechercher une cohésion nationale pour affronter ces défis complexes. Officiellement, une grande partie de l’opposition refuse de prendre part à ces consultations. Si les acteurs majeurs de la crise politico-sécuritaire ne sont pas concernés par ces discussions autour de la formation d’un gouvernement d’union nationale, il sera difficile pour le chef de l’État de ratisser large en vue de faire face aux défis du moment. Après avoir été consulté, Vital Kamerhe a passé un message empreint de sagesse, estimant qu’il ne faudrait plus frustrer les autres avec des déclarations à travers les médias ou les réseaux sociaux. Pour lui, le chef de l’État a besoin de tout le monde pour cimenter cette cohésion nationale.

L’opposition attend le dialogue de la CENCO-ECC

Malgré la main tendue de Félix Tshisekedi, les principaux opposants boycottent encore ce format et priorisent les consultations initiées depuis février par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC).

Rodrigue Ramazani, secrétaire général du parti Envol de Delly Sessanga, estime que ces consultations visent à renforcer le pouvoir de Félix Tshisekedi. Selon lui, l’Envol refuse de cautionner une telle manœuvre politique. « Le pouvoir Tshisekedi doit ravaler son orgueil et placer l’intérêt du peuple au-dessus des calculs politiciens, en adhérant à cette démarche portée par les pères de l’Église, qui est la seule voie crédible pour restaurer la paix et la cohésion nationale », a-t-il déclaré. Du côté de Ensemble pour la République, cette démarche initiée par le chef de l’État met la charrue avant les bœufs : « Vous n’avez pas encore créé d’union nationale, mais vous commencez déjà par mettre un gouvernement dit d’union nationale. C’est une perte de temps. Nous nous inscrivons dans le cadre des consultations menées par les évêques. » Martin Fayulu également attend le dialogue de la CENCO-ECC. Ce qui laisse penser qu’officiellement, aucun opposant majeur ne veut se rendre aux consultations initiées par Félix Tshisekedi.

Cependant, il convient de nuancer cette position : les déclarations officielles peuvent masquer d’éventuelles discussions discrètes. Tout dépend de la souplesse du régime en place. Les choses peuvent évoluer dans le sens souhaité par l’opposition, et une partie de celle-ci pourrait éventuellement être convaincue d’adhérer au schéma de Tshisekedi. Pour lancer ces consultations, les services du pouvoir doivent avoir pris suffisamment d’informations au sein de l’opposition. Il serait hasardeux de lancer de telles consultations sans tenir compte de l’avis de l’opposition. Mais le pouvoir peut aussi se montrer flexible au cas où l’opposition reste figée dans ses convictions d’avoir un dialogue dans le format initié par la CENCO-ECC. En 2016, Joseph Kabila avait lancé un dialogue national, mais celui-ci n’avait pas fait l’unanimité au sein de l’opposition, ce qui l’avait poussé à organiser un nouveau dialogue, cette fois sous l’égide de la CENCO.

Heshima   

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