La grave crise sécuritaire qui sévit en République démocratique du Congo (RDC) pousse le chef de l’État, Félix Tshisekedi, à opérer de multiples changements, notamment sur le plan sécuritaire. Alors qu’un dialogue se profile à l’horizon avec les rebelles du Mouvement du 23 Mars (M23/AFC), Tshisekedi réorganise son appareil sécuritaire en nommant un nouveau conseiller spécial en matière de sécurité. À ce poste, le professeur Désiré Cashmir Eberande Kolongele succède à un autre universitaire, Jean-Louis Esambo.
Ancien directeur de cabinet intérimaire du chef de l’État et ex-ministre du Numérique, Désiré Cashmir Eberande occupera désormais le poste de conseiller spécial du président en matière de sécurité. L’ordonnance présidentielle le nommant a été lue mercredi 5 février 2025 à la télévision nationale (RTNC). Élu député national dans la circonscription de Bulungu, dans la province du Kwilu, il pilotera le puissant Conseil national de sécurité (CNS), une structure stratégique auparavant dirigée par l’ancien sécurocrate François Beya.
Depuis l’ère de Joseph Kabila, ce poste a vu défiler plusieurs personnalités, telles que Pierre Lumbi, Jean Mbuyu, François Beya, Jean-Louis Esambo, et désormais Désiré Cashmir Eberande. Ce dernier aura la lourde tâche de diriger le Conseil national de sécurité dans un contexte particulièrement critique. Le pays traverse l’une des crises les plus graves de son histoire. Après avoir pris Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, le 27 janvier, les rebelles du M23, soutenus par les troupes rwandaises, ont lancé une nouvelle offensive dans l’Est du pays mercredi 5 février, reprenant leur progression vers Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu. La cité minière de Nyabibwe, située à environ 100 kilomètres de Bukavu, est déjà tombée aux mains des insurgés. Ces derniers visent désormais l’aéroport de Kavumu, avant de tenter d’atteindre Bukavu.
Tshisekedi tient deux fers au feu
Félix Tshisekedi poursuit la réorganisation de l’armée et des autres secteurs de la sécurité, malgré les revers militaires dans l’Est du pays. Parallèlement, le chef de l’État garde deux options ouvertes : l’option militaire et celle du dialogue. Si la première a montré ses limites pour l’instant, la seconde semble être la moins coûteuse en termes de pertes humaines et de préservation des maigres acquis engrangés jusqu’ici. Bien qu’il ait initialement refusé de dialoguer avec les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, Tshisekedi a finalement accepté les pourparlers proposés par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC). Ces discussions, qui s’inscrivent dans le cadre d’un pacte social pour la paix, incluront Corneille Nangaa et d’autres représentants du M23.
Une donne vient compliquer l’équation, c’est que Corneille Nangaa est désormais sous mandat d’arrêt international lancé par la justice militaire. Comment va-t-il apprécier cette situation ? Comment l’ECC et la CENCO vont-elles prendre langue avec un homme recherché ? C’est là où les romains s’empoigneèrent.
Sur le plan régional, Félix Tshisekedi et son homologue rwandais, Paul Kagame, sont attendus samedi 8 février à un sommet conjoint de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE), prévu à Dar es Salam, en Tanzanie. Le président du Conseil européen, António Costa, a annoncé avoir eu des échanges avec les deux chefs d’État directement concernés par cette crise. « Il faut trouver une solution durable à long terme pour la stabilité de la région », a-t-il déclaré, exprimant son espoir de voir des « discussions constructives » s’engager à Dar es Salam.
De son côté, la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) a salué la tenue de ce sommet conjoint SADC-CAE, prévu les 7 et 8 février. Cette organisation régionale qualifie ces assises d’« occasion cruciale » pour s’attaquer à la crise sécuritaire et humanitaire qui affecte des millions de civils dans la région des Grands Lacs.
Heshima