Culture

Koffi Olomide, d’hier à demain !

Star de la scène musicale congolaise si prisée, ce talentueux artiste-musicien, toujours
en vogue depuis un peu plus de quarante ans, a su élever la musique à une gamme encore plus
haute et en devenir l’un des monuments les plus emblématiques de son histoire.

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Photo: Shutterstock

De son vrai nom, Antoine Agbepa Mumba, Koffi Olomide né le 13 juillet 1956 à Kisangani en République Démocratique du Congo, grandit d’abord dans la commune de Lemba surnommée fièrement Quartier Latin à cause de sa proximité avec le campus de l’Université de Kinshasa qui semble avoir déversé son savoir sur les Lembaltèques.

Serait-ce de ce passage dans cette commune avant son installation à Lingwala qui l’inspira ultérieurement le nom de son orchestre ou son séjour estudiantin en France d’où vient la dénomination de cet espace marqué par la présence de la prestigieuse Université de la Sorbonne de Paris et toute l’ambiance qui lui est associée ?

Toujours est-il, c’est dans ce vivier intellectuel que ce garçon intelligent prendra comme modèle artistique la veine poétique et intello de la musique congolaise initiée par des ensembles musicaux des étudiants congolais de la Belgique comme les Los Nickelos et le Yéyé National ou encore de Tabu Ley Rochereau.

Dans tous les cas, Koffi Olomide dévoile très tôt ses talents artistiques. Dès l’âge de 13 ans, il apprend à jouer de la guitare et se lance dans les années 70 dans la composition des chansons en dilettante et son talent de parolier le fera surnommer « l’étudiant le plus célèbre du Zaïre ».

Les voies du destin
Alors que Papa Wemba essaye de sortir de ses déboires avec ses anciens collègues de Zaïko Langa-Langa et de Isifi Lokole, Koffi Olomide vient à sa rescousse dans Viva la Musica, le nouvel orchestre qu’il vient de monter en 1977, en étant certainement l’un de ses meilleurs paroliers avec des tubes à succès comme Mère Supérieure, Aïssa na Zoé, Ebale Mbonge… Lui-même se décide à interpréter ses propres compositions et monte sur scène au côté de Papa Wemba et le public découvre un jeune homme aux allures timides qui lui débite de très belles mélopées comme Princesse ya Sinza, Anibo, Ekoti ya Nzube, Elengi ya mbonda, Bien aimée, etc.

En dépit de ses hésitations à tracer son avenir professionnel après l’obtention de son diplôme en sciences commerciales de l’Université de Bordeaux, les voies irrésistibles du destin le happent pour l’imposer dans ce domaine musical où il parvient à relever le défi de se faire adopter auprès d’un public kinois réputé pour son exigence.

« Il est le premier artiste Africain Noir à remplir l’imposant Palais Omnisports de Bercy à Paris en 2000 »

Son style de crooner de la rumba congolaise ne se démentira pas au fil du temps car son savoir-faire ne cesse de se confirmer. Il lui donnera le nom de Tcha Tcho, en se faisant accompagner par son orchestre Quartier Latin International créée en 1986. Son art se définit comme un mélange indéfinissable de noblesse de coeur exprimée dans des mélodies et paroles imprégnées de classe et de subtilités qui tout de suite font les délices de la gent féminine, chacune des « Koffiettes » émues dans leur sensibilité se sentant être élevée sur un piédestal. Parfois au grand dam des hommes qui voient en lui une grande capacité d’entregent même si dans leur rang se comptent aussi de nombreux « Koffiphiles ».

C’est dire que son thème de prédilection est l’amour chanté en susurrant ces phrases joliment tournées qu’on dit être des traductions en lingala des grands poètes du monde, avec des sentences en français glissées ici et là ainsi que des formules qui font autorité et méritent sans conteste à être décortiquées. Il en abordera bien sûr d’autres, comme celui de la réplique aux commérages de ses détracteurs jaloux, de son succès fulgurant en réponse aux fausses rumeurs, sur son arrestation voire de l’annonce de son atteinte de sida (Droits de l’homme, Petit frère ya Yesu), celui de la séparation dramatique suite au départ vers d’autres cieux (Ngobila), celui de l’hommage des célébrités (Henriquet, miss Congo 1988 ou D’jino) comme d’autres dans leur malheur (Myriam Moleka), ou encore celui de la famille et de l’amitié…

Il finit par arracher un premier titre comme «Meilleur vedette de la chanson zaïroise».

Mega star !
Dès l’aube des années 90, Koffi Olomide prend son envol : année après année, tube après tube, le succès ne cesse de coller à la peau de Koffi Olomide.

D’auteur-compositeur-interprète talentueux, Koffi Olomide ajoute une autre corde à son arc : celui de chorégraphe par son jeu scénique en adoptant la danse Ndombolo incontournable pour animer les sorties et les fêtes dans toute l’Afrique et sa diaspora durant plus d’une bonne décennie.

Il rentre dans la cour des grands grâce à ses opus de haute facture et acquiert bien vite une dimension africaine, puis carrément mondiale, couronnée par une comptabilité hyper élogieuse de marques de reconnaissance. Il glane les exploits et les trophées.

Il décroche plusieurs disques d’or, successivement en 1994 avec « Noblesse oblige », en 1998 avec «Loi», l’année suivante pour le compte de Quartier Latin International avec « Droit de veto », en 1999 suivi de « Attentat » en 2001, « Effrakata » et en 2008 pour «L’album du Prêtre autrement dit Bord ezanga kombo».

Il se voit décerner de nombreuses distinctions prestigieuses : à domicile comme meilleur auteur compositeur et meilleur album de l’année 1991 aux Trophées de la musique zaïroise pour « les Prisonniers dorment » puis sept fois plébiscité en 2002 pour l’album « Effrakata » (meilleur album de l’année, meilleure chanson de l’année pour « Effervescent », meilleur auteur-compositeur et meilleur artiste-musicien pour lui-même, meilleur chanteur pour Fally Ipupa, meilleur animateur pour Kérosène, meilleur orchestre pour Quartier Latin) ; à Abidjan en 1994, meilleur chanteur et meilleur clip ; en Afrique du Sud, la collection des Kora Awards comme meilleur artiste d’Afrique centrale en 1998, simultanément en 2002, quatre Kora pour à la fois être le meilleur artiste d’Afrique centrale et le meilleur artiste masculin d’Afrique, à avoir conçu la meilleure vidéo d’Afrique et gagner le Prix spécial du Jury, et encore le Kora Award en faveur de son orchestre en 2003 primé comme meilleur groupe africain, sans oublier le Kora Award en 2005 en guise de récompense pour l’ensemble de sa carrière en tant que meilleur artiste de la décennie.

Sollicité partout, même par les puissants d’Afrique pour des tournées dans les palais présidentiels du Gabon et du Congo-Brazza, il triomphe dans des salles mythiques : il est le premier artiste Africain Noir à remplir l’imposant Palais Omnisports de Bercy à Paris en 2000 ; il prend d’assaut l’Olympia de Paris en 1998, le Zénith de Paris à cinq reprises (1998, 2001, 2003, 2007, 2009), le Stade des Martyrs de Kinshasa en 2002, avec parfois des constats dramatiques avec 16 morts en 2003 dans un stade au Bénin consécutivement à une bousculade pour cause d’affluence, rançon de l’engouement mal maîtrisé par les organisateurs.

Sa présence est notoire dans les médias internationaux (Trace Africa, M6, Canal +, MCM Africa, TV5 Monde, France 24, RFI…) et les réseaux sociaux notamment iTunes Store ou Youtube atteignant plusieurs millions de vues en ce compris des répercussions dans la vente colossale des disques.

Tout au long de sa carrière, il s’affuble ou on lui gratifie des surnoms élogieux tels Rambo, Kolo Lupemba (porte-bonheur), Quadra Kora Man pour les 4 Koras décrochés, Mopao Mokonzi, ou Mopao Sarkozy en souvenir des habitants du XVIème arrondissement de Paris administrés par un certain maire nommé Sarkozy, Akram Ojjeh un milliardaire libanais, Songe ya Mbeli (pointe de couteau !)…

Apothéose mi-figue, mi-raisin !
Alors que Koffi Olomide est au summum de son art, son brillant parcours est semé d’embûches et entaché de déboires judiciaires.

Il doit faire face à la défection en 2006, de ses collaborateurs, des chanteurs de haut vol comme Fally Ipupa, Ferré Gola et bien d’autres piliers de son orchestre qui conduisent à sa désintégration. Ce n’est pas une première pour Koffi, qui avait subi un choc aussi virulent en 1998 lorsque Bouro Mpela, Sam Tshintu, Modogo Abarambwa, Somono Dolce, Mboshi lipasa, Patty Bass, Lebu Kabuya, décident de rester en Europe et créent le groupe Académia.

Seulement, les départs de Fally et Ferré, deux de ses plus belles pioches coïncident, dans la foulée, avec des dossiers aussi farfelus que compliqués. Koffi est victime de la virulence de l’action des Combattants, groupe d’opposants de la diaspora congolaise qui frappe d’ostracisme depuis 2010, les artistes-musiciens du terroir accusés de soutenir le régime en place à Kinshasa et de dépravation des moeurs.

Sur le registre des démêlés judiciaires, le Grand Mopao est condamné avec sursis par la justice française et congolaise pour diverses affaires judiciaires.

Ces événements ne l’ébranlent toutefois pas, il n’en démord pas moins dans la voie du succès, signe de la solidité d’une maturité : il procède au remplacement de son ensemble musical par les Mineurs de Quartier Latin composés de “mon ami Guelord”, Guanghzou, Arabe, Zoé Bella, Scotty Pipen, Ba pinces, et à l’intégration d’autres talents comme Cindy Le Coeur, tête de gondole de son succès futur, mais aussi Jos Diena, Gabanna Tatshou, Ono Kapanga, Jitrois Galliano. Il décide de la constitution du label Koffi Central en 2013, il se consacre à l’émergence des jeunes pousses.

Renaissance !
Néanmoins, après ce qu’il convient de qualifier de traversée du désert, du moins sous les cieux européens, après une absence d’au moins 11 ans sur la scène européenne, Koffi Olomide sera en concert dans la plus grande salle de spectacle du vieux continent, “Paris la Défense Arena” dans la capitale française, le 13 février 2021, pour la précision à 21h13.

Désormais, le boycott souvent qualifié d’injustifié dont ont été victimes les artistes-musiciens Congolais de la part des combattants de la diaspora congolaise les empêchant de se produire sur les scènes n’a plus de raison d’être : de plus, aujourd’hui un des leurs en la personne du Président Félix Tshisekedi se trouve à la tête du pays. Déjà, le succès de la tenue en février 2020 du concert de Fally Ipupa à Paris, malgré l’ombre des menaces et les tentatives manifestes de sabotage, donne le ton.

Ce grand come-back est annoncé avec pompes et les différents supports que ce soit sur les pages Facebook et Instagram de l’artiste musicien et l’attente est à la mesure de ce grand événement de retrouvailles fusionnelles entre Koffi et ses fans dans un contexte de pandémie de Covid-19.

D’abord par son ampleur, l’ambition de Mopao Mokonzi est montée d’un cran pour affronter ce qui représente aujourd’hui la plus grande salle d’Europe d’une capacité de 42.000 places, soit pratiquement le double du Palais Omnisports de Paris Bercy investit vingt-ans auparavant, exploit qui avait fait de lui le premier artiste Noir Africain à remplir ce qui était alors considéré comme le plus vaste lieu de spectacle parisien.

Ensuite par sa charge émotive, tant par les retrouvailles de l’artiste avec son public au point d’annoncer lui-même les couleurs en s’épanchant dans l’émission musicale « C’est le moment » d’Ata Ahli Ahebla : « Je verserai des larmes ce jour-là en les revoyant. Ils me manquent terriblement ». Et vice-versa pour le compte de ses fans par le background de tous les souvenirs des décennies passées contenus dans les tubes qui seront chantés ce jour-là et les promesses du show.

D’ores et déjà, la répétition bat son plein et la billetterie du concert est opérationnelle depuis le 23 juin 2020.

C’est donc dire que ce qu’il qualifie être « le concert de sa vie » sera l’expression de la consécration grandiose d’un succès prolifique et qui selon ses propres mots mettra «le Congo et l’Afrique à l’honneur».

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