Nation

Réduction du train de vie des Institutions : l’attente interminable

Le mardi 15 septembre 2020 a marqué la rentrée parlementaire en République Démocratique du Congo, un événement très attendu donnant le go à la session de septembre réputée essentiellement budgétaire. Entre l’année 2019 qui a vu le Parlement voter un budget de 10 milliards de dollars américains, une première pour la RDC, et ce jour, de nombreux événements se sont succédés dont le principal est assurément la pandémie Covid-19 qui a secoué le monde et paralysé la plupart des économies dont celle du Congo plus que jamais extravertie. La Chine principale partenaire économique de la RDC est aussi un des pays les plus touchés par la Covid-19 et suite à la fermeture des frontières pour réduire les risques de contamination, les échanges économiques entre les deux pays ont sensiblement baissé.

Published

on

Tous ces éléments ont inévitablement des répercussions sur le prochain budget que devra voter le Parlement congolais. Des économistes annoncent déjà des sacrifices auxquels sera appelée la population congolaise à consentir, parmi lesquels la récession et la réduction du train de vie des institutions, cette dernière étant un sujet qui fâche.

Une volonté populaire !

A l’occasion des dernières assises du séminaire « Makutano », une rencontre annuelle d’hommes d’affaires et managers qui se tient chaque année à Kinshasa, le Ministre congolais des Finances publiques, José Sele Yalaghuli a lancé un appel pathétique pour la réduction du train de vie. L’argentier national avait déclaré : « un budget, c’est une série de prévisions en dépenses et en recettes. Si les recettes ne rencontrent pas le niveau prévu, il faut réduire les dépenses’’. Cette logique économique est vécue dans sa forme la plus paradoxale dans la mesure où très souvent les dépenses explosent alors que les recettes sont en train de diminuer.

Quelques mois plus tard, alors que le Congo est en confinement, répondant à une question d’ordre économique, le sénateur Augustin Matata Ponyo, autrefois Premier Ministre (2012-2016) a estimé que la RDC ne pourra mobiliser que 3 milliards de dollars sur les 11 milliards projetés dans le budget 2020.

D’où la nécessité de la réduction du train de vie des institutions. Le Sénateur Matata suggère la réduction de la taille du gouvernement et investir dans le secteur productif comme l’agriculture industrielle pour sauver l’économie nationale unijambiste suite à sa dépendance du secteur minier.

L’honorable Delly Sesanga fait de la réduction drastique du train de vie des institutions son cheval de bataille. D’après l’élu de Luiza et président du parti Envol, il est inconcevable de consacrer toutes les ressources du pays pour faire vivre les institutions.

Se confiant à Jeune Afrique pendant l’état d’urgence, le vice-président de la chambre haute du Parlement Samy Badibanga a lui aussi préconisé un régime de minceur.

Tout autant que ses prédécesseurs, Albert Yuma président de la Fédération des Entreprises du Congo (FEC) s’est largement appesanti sur le dossier. ‘’ Malheureusement, si tout le monde est d’accord sur le fait qu’il faut réduire le train de vie des institutions, très peu de personnes, y compris le gouvernement ne se sentent concernés’’ a-t-il regretté. L’Etat doit maîtriser ses dépenses, comment y arriver quand on crée chaque fois de nouvelles institutions s’est-il interrogé. N’est-ce pas là vouloir quelque chose et en même temps son contraire ?

Des solutions courageuses !

A ce sujet, des économistes proposent des mesures strictes parmi lesquelles :

  • La Suppression de certaines représentations diplomatiques non stratégiques ;

Avec 56 ambassades et une vingtaine de consulats, la RDC dépense énormément dans les allocations de ses représentations diplomatiques, certaines n’étant plus indispensables. Pallier ce problème aurait un effet mélioratif sur le budget

  • La réduction de la taille des membres des services d’appoint d’institutions

D’une Institution à une autre, la taille des membres varie entre 50 et plus avec une pléthore enregistrée au sein des services d’appoint. Une véritable entaille pour le Trésor public obligé de payer très souvent au-delà des prévisions.

  • La réduction de la taille de l’équipe gouvernementale grâce à un remaniement ;

Les frais de mission, les frais d’installation, les primes sectorielles, les frais de fonctionnement ajoutés aux émoluments, les 65 membres du Gouvernement Ilunga Ilunkamba coûtent un bras au Trésor Public.

Quoique très souvent la résultante normale des coalitions, le côté éléphantesque de l’actuel gouvernement doit interpeller au plus haut niveau, le salut du peuple et le développement du pays encore dans les marasmes de la vie doivent être le moteur de toute action politique

  • Le maintien de l’IPR ;

Une décision à la fois saluée et décriée qui doit cependant demeurer afin de soulager le budget de l’Etat. L’Administration publique de la RDC compte plus d’un million d’agents, la retenue de 15% sur leurs différentes rémunérations peut constituer une belle enveloppe qui peut aisément être reversée dans autre secteur

  • La réduction des rétrocessions allouées aux services d’assiettes ;

A titre de motivation pour les agents appelés à être performants dans la mobilisation des recettes, l’Etat a mis en place une rétrocession pouvant atteindre 10% sur toutes les recettes enregistrées par les services d’assiettes. Une enveloppe qui peut sensiblement être revue à la baisse afin de maximiser l’action du côté du Trésor Public.

  • L’abrogation du Décret 018/038 relatif aux avantages reconnus aux anciens membres du Gouvernement ;

Une grosse épine sous les pieds des gouvernants qui en 2018, avec ce décret de Bruno Tshibala ont vu assurés leurs vieux jours. D’après ce document, une indemnité mensuelle estimée à près de 30% des émoluments que touchent les membres de l’actuel gouvernement, des soins médicaux, un voyage annuel et 1 000 dollars américains comme frais couvrant le loyer, sont entre autres les avantages reconnus aux anciens ministres depuis 2018. Ce qui peut être considéré comme du pain béni pour certains, est une sérieuse pénalité pour le Trésor Public. La suppression de cet acte peut être salutaire.

  • L’adoption d’une loi des finances rectificative ;

Ceci consiste à réduire considérablement les prévisions budgétaires en tenant compte des réalités découlant la crise sanitaire causée par le nouveau coronavirus, ayant dévasté la quasi-totalité des économies du Monde.

  • La surséance de tout recrutement dans la Fonction Publique ;

En attendant des signaux positifs de l’économie congolaise, il convient de stopper avec le recrutement dans la Fonction Publique, le plus gros employeur du pays.

  • La Lutte contre les dépassements des lignes budgétaires

Deux poids-deux mesures !

Depuis janvier 2020, l’Etat congolais par l’entremise des Ministères du Budget et des Finances procède à la retenue de 15% dénommée « Impôt professionnel sur la rémunération » lequel s’applique sur les Agents publics de l’Etat et ceux des entreprises du portefeuille de l’Etat.

Cette pratique qui est un devoir civique permettant à un peuple de construire son pays et booster son développement, a toutefois fait couler de l’encre et de la salive auprès de certaines voix qui considèrent cela comme une politique discriminatoire.

D’après ces analystes, la couche sociale frappée est celle qui gagne le moins et c’est encore sur elle que l’Etat vient ponctionner 15% largement suffisant pour soulager le loyer d’un fonctionnaire déjà sous-payé.

La réduction du train de vie a donc commencé et devra se poursuivre sans la moindre discrimination afin de compenser d’une part le manque à gagner de l’économie congolaise enregistré au cours de l’année 2020 et projeter sérieusement le développement de la RDC, ce géant longtemps endormi, d’autre part.

Jean Marie Mawete/Heshima

Click to comment

Trending

Quitter la version mobile