Société

Nyiragongo : 19 ans après, les laves ont de nouveau coulé !

Nyiragongo, considéré par plusieurs spécialistes comme le volcan le plus dangereux d’Afrique est entré en éruption samedi 23 mai, la veille de la pentecôte, journée censée commémorer le Saint -Esprit. Une fois de plus, ce sont des larmes des populations du Nord-Kivu, traumatisées et en débandades, ne sachant dans quel sens s’orienter. C’est presque le monde entier qui témoigne sa solidarité à la province du Nord-Kivu, située à l’Est de la RD C, dans laquelle a été déclarée depuis un mois l’état de siège par le président Félix Tshisekedi, une province connue pour son instabilité entretenue par des rebelles. Bilan provisoire, 15 morts.

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Sauve qui peut !

Goma! Plus de 600 000 habitants, 900km². Il doit son nom au volcan éteint, le Mont Goma, qui lui-même doit son nom au mot swahili « ngoma » qui signifie « tambour ».

Samedi 22 mai, il est 18 heures lorsque le Nyiragongo vomit sa première lave. C’est au moment où celle-ci descend du haut des 3 470 mètres d’altitude du Mont, parcourant les dix kilomètres qui le séparent de Goma, que des milliers de Congolais se mettent à fuir en direction de la ville rwandaise de Rubavu. L’affolement est visible partout, l’odeur du soufre ayant envahi la ville. La lave approche et l’électricité est tout de suite coupée dans une grande partie de la ville. Atteignant presque l’aéroport, la lave s’est arrêtée dans la banlieue, à 1,2 Km de Goma. Si c’est à Buhene que les dégâts sont importants, cependant, la ville est privée d’eau à boire et la route Goma-Rutshuru est coupée. La lave qui coulait vers le Rwanda, envahi ladite route sur une distance de 1200 mètres à la hauteur de Kibati, dans le territoire de Nyiragongo. Des véhicules se retrouvent ainsi bloqués tant du côté de Rutshuru que de Nyiragongo. 

 Nyiragongo, une « bombe » dangereuse.

Les spécialistes disent que le Nyiragongo est le volcan le plus actif d’Afrique et aussi le plus dangereux, car constituant une menace pour au moins 1,5 million d’habitants.

 Ce volcan couve le plus grand lac de lave pratiquement permanent au monde et son niveau monte et redescend fréquemment. Le volcanologue Benoît Smets affirme pour sa part que le cratère du volcan Nyiragongo contient assez de lave pour remplir 2 500 piscines olympiques. Le fait que ses coulées de lave peuvent descendre d’une pente à une vitesse de 100 km/h fait de lui davantage un volcan plus dangereux.

Les dégâts des éruptions précédentes

En janvier 2002, le Nyiragongo était encore entré en éruption, crachant un nuage de cendres de 3 kilomètres de haut et larguant entre 15 et 25 millions de mètres cubes de lave sur la ville de Goma. Cette fois-là plus de 100 personnes avaient été tuées et la lave avait détruit environ 14 000 habitations, laissant 130 000 personnes dans la rue, et entre 300 000 et 500 000 personnes déplacées au Rwanda.

On affirme que, de toutes les éruptions, celle de janvier 1977 demeure la plus destructrice. Comme lors des deux dernières éruptions, la lave avait envahi la ville de Goma, faisant entre 600 et 2 000 victimes. Cette coulée de lave, indique-t-on, était la plus meurtrière connue, et aussi d’un plus gros débit, avec environ 20 millions de mètres cubes en une demi-heure. Les spécialistes comparent l’éruption du 22 mai à celle de 1977.

Félix Tshisekedi retourne à Kinshasa

Au lendemain de l’éruption , Félix-Antoine Tshisekedi décide d’écourter son séjour en Europe. Vite, le président de la République est rentré au Congo dimanche afin de superviser la coordination de secours aux populations sinistrées. Face à l’urgence et les défis humanitaires, le gouvernement s’est réuni à deux reprises, avant de dépêcher immédiatement une délégation gouvernementale afin d’apporter un appui aux autorités provinciales. Huit ministres, parmi lesquels celui de la Recherche scientifique, José Mpanda, sont arrivés à Goma, notamment pour évaluer la situation sanitaire et humanitaire, mais aussi pour évaluer les dégâts matériels. Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement a, au nom de ce dernier, rassuré la population de Goma, en affirmant que tout sera fait pour leur apporter l’appui nécessaire afin de faire face à la catastrophe naturelle qu’est l’éruption volcanique. Le ministre des Transports, Voies de communication et Désenclavement, Chérubin Okende, en ce qui le concerne, a ordonné la fermeture des aéroports de Goma et de Kavumu/Bukavu.

De son côté, le gouverneur militaire du Nord-Kivu, le Lieutenant général Constant Ndima a sur place présidé une réunion de crise le dimanche. À l’issue de celle-ci, plusieurs résolutions ont été prises. Entre autres, l’évaluation de la situation humanitaire dans les hôpitaux et autres structures de santé, l’évaluation des mouvements de la population, la poursuite de la surveillance tectonique du volcan… Pendant ce temps, le gouvernement provincial a suspendu les cours jusqu’à nouvel ordre. Contre toute attente, l’éruption du Nyiragongo est venue ajouter d’autres priorités, à côté des objectifs de neutralisation des groupes armés qui, depuis des années, tuent dans cette partie du pays, poursuivis dans le cadre de l’état de siège décrété par le chef de l’Etat.

Faute de financement et manque de précautions

Si toutes les précautions étaient prises, les 15 morts que l’on déplore auraient certainement survécus, certes les 17 villages seraient touchés par la lave. La réalité est que le volcan n’était plus surveillé depuis sept mois, faute de financement pour soutenir l’Observatoire volcanologique de Goma (OVG) : pas d’appui du gouvernement ni celui des bailleurs. Selon l’OVG, l’éruption a été soudaine parce que le projet de la Banque mondiale s’est arrêté en juin 2020. D’octobre à avril 2021, il n’a plus eu accès à Internet. Pendant six mois, l’évolution des activités volcaniques n’étaient plus suivies, soit six mois pendant lesquels l’OVG était privé d’Internet. C’est seulement, grâce à l’intervention d’un partenaire américain qu’en mai, l’internet a pu être rétabli. Vital Kamerhe, président de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), fustige cette « négligence » en ces mots : « Tout laisse croire que l’organe créé pour la surveillance des activités volcaniques, OVG, n’a pas été doté des moyens financiers et matériels adéquats pour la prévention de ce genre de catastrophe. Ceci doit changer pour minimiser, dans l’avenir, les dégâts », a-t-il indiqué. Vital Kamerhe propose en outre la création d’un fonds de solidarité pour secourir les sinistrés.

HESHIMA

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