Dossier

De 1960 à aujourd’hui,les événements marquants de l’histoire du Congo-Kinshasa

Le 30 juin 1960, l’heure est à la commémoration de l’indépendance du pays. Ou plutôt à l’éducation. Celle de l’histoire de la colonisation de la Belgique sur le peuple congolais. L’occasion de faire la lumière sur cette période encore largement méconnue et tue. Au travers de cet article, plusieurs portes d’entrée sont proposées pour comprendre les enjeux et les conséquences de cette sombre partie de l’histoire.

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Le 27 janvier 1960, Grand Kallé & l’African Jazz jouent pour la première fois, à l’hôtel Plaza de Bruxelles, « Indépendance Cha Cha ». Le morceau de rumba, qui honore les leaders congolais de l’époque en plusieurs langues – lingala, kikongo –, célèbre l’indépendance à venir de ce qui est encore le Congo belge. Quelques heures plus tôt, en effet, ce jour là, les leaders politiques congolais et les délégués belges réunis au sein de la table ronde ont décidé de la date qui libérera le pays de plus de soixante-quinze ans de colonisation belge. Ce sera le 30 juin.

La réunion, qui, pour les autorités belges, ne devait être que consultative, dépasse au final toutes les attentes des dirigeants politiques congolais qui ont fait le déplacement. Pendant les plusieurs semaines qu’a duré la table ronde, Joseph Kasa-Vubu, de l’ABAKO, Patrice Lumumba – leader du Mouvement national congolais tout juste libéré de prison – et le Katangais Moïse Tshombé ont fait pression, via le Front commun. La Belgique, qui pensait conserver quelques piliers institutionnels de sa colonie, comme la Défense, les Affaires étrangères et le contrôle de la monnaie, lâche. En ce début d’année 1960, les représentants congolais exultent : l’indépendance n’a pas été octroyée par la Belgique mais bel et bien conquise par les Congolais eux-mêmes.

Le 30 juin 1960, le Congo belge accède à l’indépendance. Le pouvoir est partagé entre Joseph Kasa-Vubu, président, et Patrice Lumumba, Premier ministre. Rapidement, le pays sombre dans le chaos. Le 5 juillet, une mutinerie éclate au sein des troupes congolaises de la Force publique à encadrement belge.

Le 11, la riche province minière du Katanga (sud-est) fait sécession, entraînée par Moïse Tschombé, avec l’appui de puissances coloniales et des Etats-Unis. La période troublée qui suit est marquée par l’envoi de Casques bleus et l’assassinat de Lumumba en 1961. Le Katanga retourne sous l’autorité du gouvernement en 1963.

Mobutu prend le pouvoir et promeut l’authenticité

De 1964-1965, une vaste rébellion d’inspiration communiste embrase le pays. Le 24 novembre 1965, Joseph-Désiré Mobutu, commandant de l’armée, renverse le président Kasa-Vubu. L’évènement signe pour tous les Congolais le début d’une nouvelle ère, qui durera trente-deux ans. En 1971, l’ancien journaliste devenu militaire change de nom. Désormais, il faut l’appeler Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Za Banga, une initiative personnelle qu’il s’appliquera finalement à mettre en place dans tout le pays autour du concept dit de l’authenticité. Il s’appuie sur son parti-Etat du Mouvement populaire de la Révolution (MPR).

Le Congo devient le Zaïre, Léopoldville devient Kinshasa et Élisabethville s’appelle désormais Lubumbashi. Les Congolais aux noms francophones sont invités à choisir de nouveaux prénoms et l’abacost (A bas le costume) est imposé comme tenue vestimentaire aux hommes en lieu et place du costume-cravate. Les Zaïrois doivent être tels qu’ils sont, mais pas comme on voudrait qu’ils soient.

En 1973, Mobutu instaure la «zaïrianisation», une politique de préférence nationale consistant à chasser les opérateurs économiques étrangers et nommer à leur place des Zaïrois. En 1976, le virus Ebola, qui peut provoquer une fièvre hémorragique, est identifié pour la première fois au Zaïre. Depuis, le pays a connu dix épidémies d’Ebola, dont la dernière, en cours, a déjà fait près de 300 morts.

De 1977-1978, Mobutu parvient à contenir, avec une aide étrangère, des tentatives de sécession du Katanga, rebaptisé Shaba. A Kolwezi des parachutistes français et belges évacuent les ressortissants étrangers. La longue dictature du «roi Léopard» maintient l’intégrité territoriale de l’exZaïre mais mate toute opposition et ruine l’économie.

La RDC et les Kabila père puis fils

Au Zaïre comme hors de ses frontières, la rébellion s’organise. Un mouvement hétéroclite armé, soutenu par les États-Unis de Bill Clinton, l’Angola de Dos Santos et les armées rwandaises et ougandaises, se forme : l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL). À sa tête, un ancien marxiste congolais, Laurent-Désiré Kabila.

Le 17 mai 1997, Laurent-Désiré Kabila prend le pouvoir à Kinshasa. Il se proclame chef de l’Etat, après huit mois d’une rébellion partie de l’Est, soutenue notamment par le Rwanda, qui chasse le maréchal Mobutu. Il rebaptise le pays République démocratique du Congo. Affaibli par la crise économique et discrédité auprès des Occidentaux, le régime de Mobutu tombe. Le président déchu s’enfuit dans sa ville natale de Gbadolite, puis s’envole d’abord au Togo, puis au Maroc. Quelques mois plus tard, il meurt d’un cancer de la prostate alors que le Zaïre devient la République démocratique du Congo (RDC).

Le vent d’espoir qui avait soufflé lors des dernières années de l’ère Mobutu a vite tourné. Le multipartisme est supprimé et une nouvelle Constitution met le président à la tête des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Laurent-Désiré Kabila est aussi chef de l’armée, de l’administration et de la diplomatie.

Laurent-Désiré Kabila, d’une rébellion à l’autre

Le pays s’engage rapidement dans un conflit meurtrier. Car le nouveau chef d’État fait volte-face en 1998 et rompt avec ses anciens alliés rwandais et ougandais. En août, des révoltes éclatent dans le Kivu, à l’est. Elles dégénèrent vite en conflit régional : les forces gouvernementales, soutenues par l’Angola, la Namibie et le Zimbabwe, s’opposent à des rébellions appuyées par le Rwanda et l’Ouganda. La « Première Guerre mondiale africaine » fera 4 à 4,5 millions de personnes, selon l’International Rescue Committee. Elle durera jusqu’en 2003. Entretemps, Laurent-Désiré Kabila est assassiné, le 16 janvier 2001, et remplacé par son fils, Joseph, 28 ans, pour une période de transition.

En août 1998, une nouvelle rébellion éclate au Kivu (Est) avant de dégénérer en conflit régional, opposant forces gouvernementales, soutenues par l’Angola, la Namibie et le Zimbabwe, à des rébellions appuyées par le Rwanda et l’Ouganda.

 Joseph Kabila : crise politique et rébellions

Le 26 janvier 2001, Joseph Kabila succède à son père assassiné. Il est élu président en 2006 lors des premières élections libres depuis l’indépendance, puis réélu en 2011 lors d’élections marquées par des violences et des fraudes.

 En mai 2012 débute dans le Kivu la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23), surtout composé d’ex-rebelles congolais tutsi. Cette rébellion est vaincue fin 2013.

La guerre se prolongera jusqu’en 2003.

En 2015, la perspective d’un maintien au pouvoir de Kabila au-delà de son dernier mandat, qui s’achève en décembre 2016, déclenche de violentes manifestations avec des dizaines de morts.

 Les années de « glissement »

En décembre 2006, il est élu président au second tour devant Jean-Pierre Bemba avec 58 % des voix, lors des premières élections libres de la RDC depuis l’indépendance. Cinq ans plus tard, Joseph Kabila réitère. La Commission électorale nationale indépendante (Ceni) le proclame président, avec 48,95 % des voix. Malgré la contestation du chef de file de l’opposition Étienne Tshisekedi de l’UDPS, Joseph Kabila conserve le fauteuil présidentiel, au Palais de la nation.

  Une place qu’il s’évertuera à conserver à partir du 19 décembre 2016, date qui signe pourtant la fin de son mandat présidentiel. Des manifestations réclamant son départ sont sévèrement réprimées. Mais les autorités le martèlent : le pays est dans l’incapacité logistique d’organiser des élections. Une justification qui arrange bien Joseph Kabila, qui, pendant ce temps-là, peut conserver le pouvoir.

En septembre 2016, le Kasaï (centre) bascule dans la violence après la mort d’un chef coutumier tué par les forces de sécurité. Fin 2016, un accord politique permet à Kabila de rester jusqu’à des élections prévues fin 2017, mais le scrutin sera repoussé fin 2018. Plusieurs manifestations réclamant son départ sont sévèrement réprimées.

2019, arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi

Le 5 novembre 2017, après deux reports, la Ceni annonce une date pour des élections. Ce sera le 23 décembre 2018. Joseph Kabila, sous pression de la Communauté internationale, et interdit par la Constitution de se présenter à un troisième mandat, annonce ne pas être candidat. Il désigne à sa place un dauphin, Emmanuel Ramazani Shadary. L’opposition, qui fait bloc au début, se divise. Félix Tshisekedi, avec l’appui de Vital Kamerhe, se désolidarise de Martin Fayulu, soutenu notamment par Jean-Pierre Bemba et le Katangais Moïse Katumbi, dont les candidatures n’ont pas été acceptées par le pouvoir. C’est finalement la coalition du fils d’Étienne Tshisekedi – décédé le 1er février 2017 –, Cap pour le changement (Cach), qui l’emporte, après des semaines de controverses.

Après des élections de décembre 2018, Félix Tsishekedi remplace Joseph Kabila à la tête de la RDC. «Certains estiment que cette date marque le début d’une nouvelle ère pour la RDC. Par contre, pour d’autres, l’arrivée de Félix Tshisekedi signe des changements de gouvernance et sociétaux.

2020-2021, entre espoirs et difficultés

Comme l’ensemble de la planète, la République Démocratique du Congo n’a pas été épargnée par l’épidémie du coronavirus. Touché dans un deuxième temps, le continent africain continue d’ailleurs de dénombrer contaminations et décès.

 En 2020, la RDC vit encore et toujours des temps compliqués. À l’est du pays, l’épidémie d’Ebola frappe les habitants. Dans le reste du pays, les groupes armés congolais et étrangers continuent de sévir. «Les conditions de vie restent difficiles, la monnaie est dépréciée, le peuple a du mal à joindre les deux bouts.

 Raymond Befonda

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