Economie

Conjoncture, lorsque les prix deviennent vertigineux dans nos marchés

La surchauffe des prix des biens et services, il y en a eu en République démocratique du Congo. Mais la hausse constatée actuellement sur le marché a atteint de degrés inimaginables. Avec une économie tournée vers l’extérieur, tous les ingrédients d’exacerbation de la crise se sont comme donnés rendez-vous pour asphyxier les consommateurs : covid-19, guerre en Ukraine…

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 Pays à économie extravertie, la République démocratique du Congo est triplement frappée par l’inflation et les effets de la crise se font sentir significativement dans des ménages. Pour Jean-Claude Masangu Mulongo, ancien gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC), la situation du pays est plus que préoccupante, étant donné que son économie dépend des importations. Du coup, l’Etat et les consommateurs sont sous-pression face à la non maitrisable hausse généralisée des biens et services constatée sur le marché.

Après la crise créée par le Covid-19, la guerre en Ukraine est venue mettre en mal les chaines d’approvisionnement mondiales avec la pénurie du carburant à la pompe. Conséquence, alors que la surchauffe des prix des biens de première nécessité était déjà un cassetête pour la majorité de la population congolaise, sa tendance devient haussière. Sans qu’il n’y ait de dévaluation de la monnaie nationale, les prix des denrées de grande consommation (surgelés, vivres secs, produits manufacturés et autres) ont tous pris de l’ascenseur. 

Une augmentation exagérée

 Dans tous les marchés de Kinshasa (Rond-point Ngaba, Gambela, Somba Zikida, Liberté, Matete…), les prix ont considérablement augmenté. Un sac de farine de froment est passé de 68 000 à 93 000 FC et celui du ciment gris de 50 kilos de 8,3 à 10 dollars. L’augmentation est surtout observée en ce qui concerne les vivres frais : poissons chinchards, poulets, cuisses de poulets… Un carton de chinchards 16+ qui se vendait à 73 000 FC, se vend maintenant à 120 000 FC. Celui de 20+ est passé de 120 000 à 170 000 FC. Vendu naguère à 45 000 FC, le carton de poulets se vend présentement à 85 000 FC. Pour ce qui est de vivres secs, le constat est le même. Un bidon d’huile de palme de 25 litres se négocie actuellement à 52 000 francs, alors qu’il se vendait dans un passé récent à 45 000 FC. 

Les autres produits ne font pas exception. Au marché de Rondpoint Ngaba, un sac de braise se vend entre 40 000 et 45 000 FC. De même, les feuilles de manioc, les gombos, les amarantes…subissent la même loi : une botte d’épinards passe de 2000 à 3000 FC. Toutefois, l’inflation concerne aussi bien la capitale que l’arrière-pays. A Mbuji-Mayi (Kasaï Oriental), par exemple, un casier de bière (Dopel Munich, Skol, Simba, Tembo…) coûte 60 voire 70 000 FC, alors qu’il se vendait à 42 000 francs. Du coup, une bière est passée de 4500 à 8 000, voire 9 000 FC.

Diverses causes à la base…

Depuis l’époque du gouvernement Ilunkamba, les prix des denrées alimentaires connaissaient déjà une augmentation persistante. La hausse est devenue davantage vertigineuse sous Jean-Michel Sama Lukonde, avec comme ministre de l’Economie nationale, Jean-Marie Kalumba, déchu de ses fonctions le 30 mars 2022 à l’Assemblée nationale. N’ayant rien fait pour stopper l’envolée des prix, Jean-Marie Kalumba était visé par une motion de défiance pour plusieurs griefs ; notamment la hausse de prix des produits de première nécessité et la mauvaise gestion des 20 millions de dollars débloqués par le gouvernement pour l’achat des chinchards. 

Nonobstant cela, certains vendeurs de Kinshasa justifient la hausse des prix par la multiplication des taxes qui ne leur permettent plus de réaliser des bénéfices. D’après Jean-Paul Nemoyato, ministre congolais honoraire de l’Economie, la hausse des prix des biens et services en RDC se justifie par trois faits, notamment le cumul des marges bénéficiaires par certains opérateurs économiques. « Il y a des opérateurs économiques qui sont à la fois importateurs, négociants en douane, transitaires, transporteurs, grossistes et détaillants, alors que la loi prohibe ce type de comportement », explique t-il. Les deux autres raisons qui justifient l’augmentation, indique-t-il, sont « le commerce triangulaire et la manipulation à souhait des prix Fob et Cif ». 

Une crise mondiale ! 

Début mars, au terme d’un travail de trois jours, une mission du Fonds monétaire international (FMI) avait alerté sur une probable baisse d’activité en raison de l’envolée des prix de l’énergie. Parmi les risques évoqués par le FMI, il y a la hausse des prix mondiaux des denrées alimentaires en raison de la crise russo-ukrainienne. Certaines sources économiques renseignent que les prix de la majorité des produits alimentaires de base s’envolent sur le continent entier. D’après Ollo Sib, analyste de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et du Programme alimentaire mondial (PAM/WFP) pour l’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest, cette région (Afrique centrale) était déjà en alerte au dernier trimestre de 2021, avec une hausse de 39% des prix alimentaires par rapport à la moyenne sur la même période des cinq dernières années.

 Hubert MWIPATAYI

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