Société

Diététique: Le Kongo bololo : une plante à multiple usage

De par son appellation qui trahit d’emblée de la répugnance à son égard, le kongo bololo est une plante traditionnellement usitée pour ses vertus thérapeutiques qui a connu en RDC un regain d’intérêt lors de la survenance du coronavirus. Ses vertus diététiques n’en sont pas moins certifiées. Mieux encore, sous le nom de ndolè, il représente un plat emblématique du Cameroun.

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De son vocable scientifique « vernonia amygdalina » de la famille des Asteraceae, le kongo bololo, dans sa version en lingala est un végétal qui, de prime abord, susciterait à son endroit de la répulsion (bololo se traduit par amer). Il a pourtant d’autres dénominations moins effrayantes, du moins pour celui qui n’a pas connaissance de la langue de sa désignation.

Ainsi, il est nommé kilulukunju en swahili, mandudindudi ou nkulu-nkulu en kikongo, mindudi mintela en kiyombe et mukadi kadi en kiyansi. En outre, cette plante d’Afrique tropicale est largement présente dans plusieurs pays du centre du continent (Angola, Cameroun, RDC, Congo-Brazzaville, RCA) de l’ouest (Bénin, Nigéria, Mali, Guinée, Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Siéra Léone), de l’est (Ethiopie, Rwanda, Burundi, Kenya, Ouganda, Tanzanie, Zambie) avec des qualifications spécifiques à chaque pays ou aux différents peuples.

La plante du kongo bololo se présente sous forme d’un arbuste haut de 2 à 5 m, obtenu par multiplication de graines. Elle est composée de feuilles elliptiques à bords dentés, pubescents aux inflorescences en cymes terminales et en capitules de couleur rose.

Ce végétal pousse sauvagement en forêt et dans les savanes herbeuses ou arbustives des tropiques, de même qu’il peut faire l’objet d’une culture pour l’importance qu’elle revêt entre autres pour l’alimentation et la santé humaine, et pareillement pour les abeilles en tant que plante mellifère qui viennent y butiner le nectar pendant la saison sèche, propice à procurer du miel. 

Ndolè, un plat royal succulent

Les principes actifs du kongo bololo

 Les études scientifiques menées sur cette plante déterminent la présence d’un glucoside appelé vernonine ou vernoniosisde, à l’origine de son nom didactique. De plus, les feuilles de cette plante contiennent des aminoacides de type arginine, cystine, histidine, isoleucine, leucine, lysine, méthionine, phénylalanine, thréonine, glycine, proline et sérine, riches en protéines essentielles à la croissance de l’organisme. La plante renferme aussi de nombreuses propriétés antiparasitaires, antioxydantes, antipyrines, antimicrobiennes, anthelminthiques, cholagogues avec des effets purgatif, aseptique, diurétique, aphrodisiaque et hypotenseur.

Les vertus du kongo bololo

A la suite de l’avis des diététiciens et des phytothérapeutes, des recherches scientifiques précisent que cette plante anéantit quasi-miraculeusement plusieurs maladies et d’une manière générale, elle améliore le système immunitaire. Habituellement, le kongo bololo est réputé pour éliminer les vers intestinaux et différents maux de ventre. Sa notoriété convient de même pour la guérison du paludisme. La plante guérirait le diabète comme diverses infections, notamment hépatiques. Elle est un remède efficace contre certains types d’empoisonnement ou de morsure du serpent. Elle provoque la réduction du niveau d’œstrogène dans le corps et la diminution de la glycémie. Elle induit l’apoptose dans la culture cellulaire et intervient dans l’inhibition des cellules ainsi que dans la suppression des métastases de celles-ci. Elle soigne le cancer et certaines maladies virales. Elle assure une sensibilité à la chimiothérapie.

Grâce à ses vertus aseptiques, l’usage de la tige du végétal agit contre la flore microbienne de la bouche et de ce fait est recommandé en hygiène dentaire.

 Préparation et consommation

Les feuilles de vernonia sont particulièrement appréciées en Afrique occidentale et centrale. La plante y est préparée en soupes avec des feuilles hachées comme au Nigeria ou en ragoûts comme au Cameroun dont le ndolé détient une réputation exceptionnelle dans la gastronomie continentale.

La plante est cependant largement utilisée en boisson. En raison de son amertume, elle peut remplacer le houblon pour aromatiser la bière. La préparation du kongo bololo est assez élémentaire, car elle n’exige pas beaucoup d’ingrédients : des feuilles de la plante en assez grande quantité et très peu de sel de cuisine suffisent pour obtenir la solution attendue.

 Ainsi, une fois prêtes, les feuilles du kongo bololo sont pilées sans y adjoindre de l’eau afin d’extraire le jus, puis verser une toute petite portion de sel de cuisine. Il est à noter que l’ajout du sel de cuisine dans une préparation de kongo bololo est vivement contre-indiqué aux femmes enceintes. A certaines mixtures, il y est ajouté une cuillère à soupe de sucre pour atténuer son goût désagréable. Le breuvage obtenu par la décoction des feuilles du kongo bololo est déversé dans une bouteille ou un bocal en verre ou en plastique. Le contenant doit être hermétiquement fermé et conservé à l’abri de la lumière durant trois jours. La potion peut également contenir la matière macérée.

Le liquide est avalé dans une cuillère à soupe, deux fois le matin et le soir pour un adulte ou même trois fois par jour selon la prescription, contre une cuillère à café le matin et le soir pour un enfant de moins de 5 ans pour divers emplois thérapeutiques, dans le traitement du paludisme, de la fièvre, de douleurs de tête, de la toux, de la diarrhée, de la dysenterie, des vers intestinaux, des maux d’estomac et de maladies gastro-intestinales, de l’hépatite, de la constipation voire de l’empoisonnement et même aussi contradictoire que cela soit de traiter l’infertilité et opérer à titre abortif.

 La poudre de l’écorce est un anti-venin et la pulpe des tiges est également reconnue pour combattre contre les vers, de même, les pousses peuvent servir dans le brossage des dents. Toutefois, le respect strict de la posologie doit être de mise. Car s’il lui est prêté des vertus miraculeuses, il peut être dangereux dans son usage. Sa prise ne peut pas aller de pair avec certains aliments, comme les boissons alcoolisées en ce compris le vin de palme et de canne à sucre, le piment, l’huile, la graisse de poissons et de viande. Sa dangerosité a d’ailleurs été confirmée dans son usage contre le coronavirus. En effet, lors de l’apparition de cette pandémie, le kongo bololo s’est, on ne sait comment, vu attribuer des qualités nouvelles, du fait de sa prétendue efficacité pour lutter contre sa propagation. A peine l’engouement de son absorption entamé, des intoxications et au moins cinq décès ont été signalés pour rapidement décourager ses partisans.

Le ndolè, de l’amertume à la succulence

Bien que présente dans la plupart des pays d’Afrique tropicale, seul(e)s les Camerounais(es) ont su maîtriser l’amertume de cette plante à priori rebutante pour en faire un légume d’un plat typique hissé parmi les plus savoureux de la gastronomie africaine, dont la notoriété ne cesse de s’imposer à travers le monde. La préparation du ndolè est le résultat d’un laborieux lavage pour en ôter dans la bonne mesure son amertume en le mettant à bouillir avec du sel gemme et en le plongeant dans de l’eau claire tout en le pressant systématiquement jusqu’à atteindre une légumineuse d’un vert brillant. A sa suite, un pilage fastidieux de feuilles de vernonia bien choisies jeunes et tendres est effectué puis elles sont brassées simultanément ou non avec de la viande, du poisson fumé et des crevettes légèrement poêlées pour qu’elles gardent leur agrément croquant. Le tout est mari – né dans un subtil dosage d’ingrédients comprenant des gousses d’ail, des oignons, du basilic et de l’arachide. L’arachide nature joue d’ailleurs un rôle déterminant dans la cuisson. Elle est plongée dans l’eau durant une bonne heure puis écrasée fine – ment en purée afin de rendre la sauce du plat consistante.

Selon la composition des ingrédients du mets dont l’art de la cuisson est fonction du doigté propre à chaque famille qui en préserve jalousement la recette, le ndolè est considéré comme une véritable spécialité réservée à des personnes choyées et des invités de marque qui ont le privilège de se délecter d’un mélange exquis d’une garniture au goût à la fois amer, sucré et salé, nappé d’une sauce de la couleur verte du légume et rose des crevettes, en l’accompagnant de la chikwangue (le miondo camerounais), la banane plantain frite ou cuite à la vapeur.

Et donc, le ndolè est tellement bon qu’il peut être un plat-piège: les Camerounais affirment qu’il n’est pas exclu que les femmes y mettent tout leur talent pour tenir leur homme par le ventre et que certaines se permettent d’y immerger quelques magies dont elles ont le secret pour l’emprisonner sentimentalement et se garantir de sa totale docilité. En tout état de cause, cette plante est surprenante à plus d’un titre, car malgré sa renommée au premier chef désagréable, sa consommation vaut certainement bien la peine en raison du nombre de maladies qu’elle guérit et de l’étonnante surprise qu’en donne la cuisine camerounaise.

Vitho wa Vitho

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