Le 25 septembre, lors de la 79ème Assemblée générale des Nations unies, le Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, a de nouveau pris une position ferme sur la question de l’agression rwandaise, accusant directement le Rwanda d’être à l’origine de l’instabilité à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC).
Cette session, tenue du 24 au 30 septembre 2024, avait pour thème : « Ne laisser personne de côté : agir ensemble pour la paix, le développement durable et la dignité humaine des générations présentes et futures ».
À cette tribune internationale, le chef de l’État a mis en lumière la crise sécuritaire préoccupante qui sévit à l’Est de la RDC et a réitéré ses appels à des sanctions contre le Rwanda, accusé de soutenir la rébellion du M23, responsable d’une crise humanitaire ayant entraîné le déplacement de millions de personnes.
« La résurgence du groupe terroriste M23, soutenu par le Rwanda, a provoqué une crise humanitaire sans précédent, avec près de 7 millions de déplacés internes… Nous appelons la communauté internationale à condamner fermement ces actes et à imposer des sanctions ciblées contre le Rwanda pour son rôle déstabilisateur », a-t-il insisté.
Un « rendez-vous manqué » ?
Malgré ces appels répétés, des sanctions concrètes contre le Rwanda tardent à être appliquées, ce qui suscite des critiques au sein de la classe politique congolaise. Le parti Engagement citoyen pour le développement (ECIDé) de Martin Fayulu qualifie le discours du président Tshisekedi de « rendez-vous manqué ». Pour Muhindo Kasekwa, député honoraire de ce parti, le Rwanda continue d’utiliser la question des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) comme prétexte pour justifier ses ingérences. Une tactique employée depuis les guerres de l’AFDL, du RCD et du CNDP, jusqu’à la rébellion actuelle du M23. « Le discours du président est un rendez-vous manqué. La question des FDLR sert d’alibi pour le Rwanda depuis la guerre de l’AFDL, du RCD, du CNDP à ce jour et cette question nous a été imposée par les Nations unies », a-t-il commenté.
Sur la feuille de route de Luanda, Félix Tshisekedi a réaffirmé l’engagement de la RDC à poursuivre le processus initié dans le cadre du dialogue entre Kinshasa et Kigali. Selon lui, ce processus vise à restaurer la confiance entre les deux pays et à réduire les risques de voir la crise actuelle dégénérer en conflit régional.
Toutefois, la société civile reste sceptique quant à la possibilité d’une solution diplomatique avec le Rwanda, évoquant les doutes sur le respect des engagements pris par ce dernier. « Il a bien fait, mais on pourrait lui donner une note de trois sur dix. C’est bien de taper du poing sur la table, mais le Rwanda n’est pas un partenaire sérieux pour honorer ses engagements », a estimé Étienne Kambale.
À l’inverse, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) a salué le discours du chef de l’État. Georges Yalala, cadre du parti présidentiel, a affirmé que l’allocution de Félix Tshisekedi a abordé les enjeux cruciaux affectant la région des Grands Lacs. « Il a presque tout abordé, notamment la guerre injuste que le Rwanda nous impose », a-t-il souligné.
Les investissements en Afrique
Le Président Tshisekedi a également mis l’accent sur la nécessité de réformes structurelles pour faire face à l’émergence des technologies numériques, qui requièrent une révision de l’architecture financière et un financement adéquat. Il a exprimé l’aspiration de la RDC à attirer des investissements pour améliorer la connectivité en Afrique, appelant à la coopération des partenaires multilatéraux et des opérateurs de télécommunications, avec un focus sur le transfert des connaissances.
Parmi les projets prioritaires, il a évoqué le maillage du continent, reliant le sud et le nord de l’Afrique ainsi que l’océan Indien à l’Atlantique. Il a également insisté sur la nécessité de renforcer la traçabilité des minerais stratégiques afin de garantir une exploitation responsable et durable des ressources nationales.
Le Président a par ailleurs souligné l’urgence de remédier à la déconnexion croissante entre la jeunesse africaine et le marché de l’emploi. Il a plaidé pour des investissements accrus dans l’éducation, particulièrement dans les domaines des STEM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques), tout en créant un environnement favorable à l’innovation.
Un gain diplomatique pour Tshisekedi
Au cours de cette Assemblée générale, la RDC s’est affirmée comme un acteur clé dans la compétition pour un siège parmi les membres non permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. La RDC a déjà remporté un premier succès en étant élue membre du Conseil des droits de l’homme pour le mandat 2025-2027, se classant à la sixième place.
Lors de son discours à l’ONU, le chef de l’État avait déjà insisté sur l’importance pour la RDC de siéger au Conseil de sécurité pendant deux ans. Une fois élue, la RDC entend jouer un rôle actif dans la revitalisation de la Charte des Nations unies et participer de manière constructive aux débats et actions qui en découleront, avait-il déclaré.
Dominique Malala