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Accord sur les minerais entre RDC-USA : l’ultime carte pour mettre fin à 30 ans de guerre ?
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4 mois agoon
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La redaction
En février, l’Africa-USA Business Council, un groupe de pression, a écrit au secrétaire d’État américain Marco Rubio au nom d’un sénateur congolais. Ce think tank évoque un possible accord qui inclurait un « partenariat économique et militaire » entre Washington et Kinshasa. Depuis, des discussions semblent faire du chemin. Si un tel accord est signé, la République Démocratique du Congo (RDC) pourrait-elle enfin respirer un nouvel air de sécurité dans l’Est du pays ? C’est visiblement ce qu’espère le gouvernement congolais. Dans le cadre de cet éventuel deal, Donald Trump a dépêché un émissaire ce week-end auprès de Félix Tshisekedi.
Le chef de l’État congolais a échangé, dimanche 16 mars 2025 à Kinshasa, avec M. Ronny Jackson, envoyé spécial du président des États-Unis Donald Trump et membre du Congrès américain. La rencontre a eu lieu à la Cité de l’Union africaine, dans la commune de Ngaliema. Au menu de leurs échanges : la crise sécuritaire et humanitaire qui prévaut dans l’Est de la RDC, marquée par la présence des troupes rwandaises qui appuient les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Selon la Présidence congolaise, l’émissaire américain a insisté sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la RDC. « Nous allons travailler pour que tous les obstacles qui s’érigent sur le chemin de la paix soient ôtés afin que la paix revienne en RDC », a déclaré M. Ronny Jackson.
Kinshasa, qui compte conclure un accord sur les minerais stratégiques avec Washington, attend des États-Unis un investissement dans le secteur de la sécurité afin de rompre le cycle de 30 ans d’instabilité et d’agression répétée par le Rwanda et l’Ouganda dans l’Est du pays. « Nous voulons travailler pour que les entreprises américaines puissent venir investir et travailler en RDC. Et pour cela, nous devons nous rassurer qu’il y a un environnement de paix », a ajouté M. Ronny Jackson.
Kinshasa veut rompre un cycle de 30 ans de violence
La RDC semble se tourner vers les États-Unis dans ses derniers efforts pour trouver un allié dans sa lutte contre l’avancée des rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) appuyés par l’armée rwandaise. Mais Kinshasa ne voit pas seulement la crise sécuritaire actuelle. Le gouvernement congolais veut trouver un accord sur l’accès des Américains à certains minerais critiques qui lui permettra d’obtenir en échange un partenariat sécuritaire capable d’aider à stabiliser l’est du pays. S’inspirant de l’intérêt manifesté par Washington pour les minerais de l’Ukraine, la RDC, riche en ressources, espère conclure son propre accord avec le pays de l’Oncle Sam.
Déjà sous l’administration Biden, les Américains ont démontré qu’ils ne veulent plus laisser les Chinois seuls dans la course aux minerais stratégiques en RDC. Et Washington ne cache plus son appétit. « Les minerais essentiels dont notre monde a besoin pour les véhicules électriques et les semi-conducteurs peuvent être trouvés ici », avait déclaré Joe Biden en justifiant sa visite, le 4 décembre 2024, en Angola. Pris de vitesse par Pékin, Washington veut frapper un grand coup pour tenter de rattraper son retard dans l’exploitation de ces minerais, essentiels notamment pour les batteries des voitures électriques.
Quelle pourra être la nature du deal ?
D’après certaines fuites obtenues par la presse, il s’agit d’un accès des États-Unis aux minerais stratégiques de la RDC qui portera essentiellement sur l’octroi aux entreprises américaines de droits d’extraction et d’exportation afin de sécuriser une chaîne d’approvisionnement stable et directe pour les secteurs de la défense et de la technologie. Kinshasa propose également d’accorder aux entreprises américaines le contrôle opérationnel du port en eaux profondes de Banana, garantissant une supervision américaine de cet important hub d’exportation des minéraux africains.
Le gouvernement congolais se dit également prêt à collaborer avec les États-Unis pour développer un stock stratégique de minéraux congolais, renforçant ainsi la résilience économique et sécuritaire des États-Unis. En contrepartie, la RDC compte obtenir un renforcement de la coopération militaire avec les États-Unis, notamment la formation et l’équipement des FARDC « pour protéger les routes d’approvisionnement en minéraux contre les groupes armés soutenus par des puissances étrangères ».
Toujours dans le cadre de ce deal, le gouvernement congolais envisage de remplacer « les opérations inefficaces de maintien de la paix de l’ONU » par une coopération sécuritaire directe avec les États-Unis.
Intérêt américain
L’échange de minerais contre la sécurité entre la RDC et les États-Unis soulève des questions géopolitiques et économiques non moins complexes. La RDC est l’un des plus grands producteurs mondiaux de ressources minières, notamment de minerais essentiels comme le cobalt, le cuivre, le coltan et le lithium, qui sont cruciaux pour les technologies modernes, y compris les batteries pour les véhicules électriques, les téléphones mobiles et autres appareils électroniques.
D’un côté, les États-Unis ont un intérêt stratégique dans la sécurisation de l’approvisionnement en minerais rares, étant donné leur rôle majeur dans l’industrie technologique mondiale. Les États-Unis cherchent à diversifier leurs sources d’approvisionnement en minerais rares pour réduire leur dépendance vis-à-vis de la Chine, qui domine la chaîne d’approvisionnement mondiale pour ces minerais. La nature du deal consisterait donc à fournir un accès privilégié à certains minerais critiques et, en échange, Washington pourrait éventuellement proposer un apport sécuritaire en termes de formation militaire et d’équipements militaires adaptés dans le contexte de la RDC.
Accès aux marchés et à la technologie
Les États-Unis sont l’une des plus grandes économies du monde et possèdent des entreprises technologiques avancées. En établissant des partenariats, la RDC pourrait avoir un meilleur accès aux marchés mondiaux pour ses minerais, en particulier les métaux rares comme le cobalt et le cuivre, qui sont essentiels pour des industries telles que les batteries électriques, les technologies de communication et l’énergie renouvelable. Ce partenariat pourrait permettre à la RDC de bénéficier d’un transfert technologique, avec la possibilité d’améliorer la chaîne de valeur des minerais sur place. Un tel accord pourrait inclure des investissements dans les infrastructures de la RDC, comme les routes, les chemins de fer et les ports, afin de faciliter l’extraction, le transport et l’exportation des minerais. C’est d’ailleurs sur ce volet des infrastructures que l’ancien président américain Joe Biden a visité l’Angola dans le cadre du corridor de Lobito qui partira du port de Lobito en Angola jusqu’en RDC. Cela pourrait améliorer la compétitivité du secteur minier congolais tout en stimulant la croissance économique.
L’opposition boude…
Ce deal, qui pourrait stopper une insécurité qui dure depuis 30 ans, dérange l’opposition. Celle-ci voit dans ce possible accord une volonté de Félix Tshisekedi de brader les minerais du pays pour sauver son pouvoir. Pour Olivier Kamitatu, cadre de Ensemble pour la République et porte-parole de l’opposant Moïse Katumbi, cette proposition n’est rien d’autre qu’une escroquerie. « Les tentatives de s’attirer les faveurs de Donald Trump en échangeant des terres rares et des minéraux stratégiques contre la protection d’une kleptocratie clanique ne trompent personne. Les observateurs informés savent bien que les mines du Katanga sont en grande partie aux mains des Chinois ou d’étrangers », a-t-il écrit sur son compte X.
Ultime recours contre une instabilité chronique
Les minerais, notamment le coltan, le tungstène et l’étain, sont une source importante de financement pour les groupes armés qui opèrent dans l’est de la RDC. Ces groupes contrôlent souvent les zones minières et extorquent des revenus pour financer leurs activités militaires. Un accord visant à améliorer la traçabilité et la gestion des ressources minières pourrait réduire cette source de financement, affaiblissant ainsi les groupes armés et contribuant à la paix. Un tel accord pourrait encourager les États-Unis et d’autres partenaires internationaux à soutenir des initiatives de gouvernance plus transparente dans les zones minières, en améliorant la gestion des ressources et en réduisant la corruption. Une meilleure gestion des revenus issus des minerais pourrait permettre des investissements dans les infrastructures locales, créant ainsi un environnement plus stable et propice à la paix.
Si les États-Unis s’engagent à soutenir un commerce équitable et durable des minerais congolais, cela pourrait renforcer les liens économiques entre les deux pays. Cette collaboration pourrait offrir une alternative plus sûre et plus transparente aux chaînes d’approvisionnement informelles souvent exploitées par des groupes armés. Les populations locales pourraient bénéficier d’emplois réguliers et d’une plus grande sécurité économique, ce qui limiterait le soutien aux groupes armés.
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Du papier aux projecteurs : HESHIMA ouvre la scène aux artistes congolais
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4 jours agoon
juillet 1, 2025By
La redaction
Depuis plusieurs années, HESHIMA Magazine valorise les parcours inspirants des politiciens, économistes, bâtisseurs, artistes, entrepreneurs et penseurs congolais à travers des portraits documentés et dossiers spéciaux.
Aujourd’hui, cette vision prend un nouveau souffle. HESHIMA passe de la plume à la scène, et ouvre un espace inédit d’expression et de révélation avec le lancement de HESHIMA Talent — une télé-réalité musicale inédite, mais surtout, la porte d’entrée vers le tout nouveau label HESHIMA Music Group.
Pour ce faire, HESHIMA annonce la première édition du concours de musique intitulé « Heshima Talent » qui démarre du 1er au 15 Juillet 2025.
HESHIMA Talent : du média au label, un projet de transmission et d’élévation
HESHIMA Talent est bien plus qu’une émission musicale. C’est une plateforme de détection des artistes de demain, un média vivant, et surtout le canal de lancement officiel du label HESHIMA.
Créé pour propulser les jeunes talents congolais sur le devant de la scène, le label HESHIMA incarne la volonté de professionnaliser et structurer l’industrie musicale locale, avec une vision moderne, ancrée dans la culture urbaine et les valeurs panafricaines.
Le casting HESHIMA Talent est donc une opportunité unique : celle de faire partie de la première génération d’artistes accompagnés par le label HESHIMA.
Cet événement sans précédent au regard de son format vise à promouvoir les jeunes talents musicaux à travers la République démocratique du Congo et sa diaspora en trasformant des destins dans ce secteur. Les candidats intéressés sont appelés à postuler en ligne du 1er au 15 juillet 2025. Ce concours, ouvert aux artistes amateurs et semi-professionnels entre 14 et 33 ans, se veut une vitrine de la richesse musicale congolaise, centrée sur divers styles.
Le label HESHIMA : produire, encadrer, faire rayonner
À l’issue du programme, le/la gagnant(e) de HESHIMA Talent bénéficiera d’un contrat de production complet au sein du label HESHIMA : enregistrement, clip, accompagnement artistique, stratégie image et distribution, une tournée nationale et internationale.
Mais au-delà du gagnant, le label HESHIMA souhaite constituer une véritable pépinière de talents, incluant aussi des profils issus de la diaspora, afin de faire rayonner la musique congolaise au-delà des frontières.
Une vision 360°, fidèle à l’ADN HESHIMA
Du magazine au label, HESHIMA suit une seule ligne : valoriser ce que le Congo a de meilleur.
Après avoir mis en avant les décideurs, les créateurs, les bâtisseurs, il est temps de révéler ceux qui font vibrer le pays à travers la musique.
HESHIMA Talent est donc la continuité naturelle de cette mission, mais aussi un acte fondateur pour ce qui devient aujourd’hui une marque culturelle à part entière.
Comment participer ?
1. Suivre @heshima_mag et @heshima_talent2025 sur Instagram, TikTok, Facebook.
2. Envoyer une vidéo a cappella (prénom + ville + âge) à : 📱 WhatsApp : +243 81 081 82 83
📧 Email : info@heshimardc.net.com
3. Attendre la réponse du comité. Si présélectionné(e), une date pour se présenter au casting final à Kinshasa sera communiquée.
Clôture des candidatures vidéos (RDC + diaspora) : 15 juillet 2025.
Les artistes vont être sélectionnés par des coachs vocaux et les différentes primes connaîtront la participation des grands noms de la musique congolaise. Ces primes seront également diffusées en ligne (YouTube, TikTok Live, Facebook Watch) avec une large couverture assurée par des chaînes de télévision congolaises. Cet événement, haut en couleur, consacrera également le lancement officiel du label « HESHIMA MUSIC GROUP » (HMG).
Un appel aux sponsors et partenaires engagés pour la culture
HESHIMA Talent est plus qu’un programme télévisé : c’est un projet culturel, social et entrepreneurial. Il vise à valoriser les talents congolais, à promouvoir une image positive de la jeunesse et à renforcer les industries créatives locales.
Nous lançons un appel à tous les partenaires, marques, institutions ou mécènes désireux de s’associer à une initiative porteuse de sens, d’impact et de visibilité.
Sponsoring, co-branding, soutien logistique, dotations ou diffusion : toutes les formes de partenariat sont les bienvenues.
En rejoignant l’aventure HESHIMA Talent, vous vous associez à une vision moderne, panafricaine et ambitieuse du divertissement culturel.
Contact partenariat : info@heshimardc.net| 📱 WhatsApp : +243 81 0818283
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Polémique en RDC : les mandats des juges de la Cour constitutionnelle sont-ils illégaux ?
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5 jours agoon
juin 30, 2025By
La redaction
En République démocratique du Congo (RDC), la Cour constitutionnelle, instituée par la Constitution du 18 février 2006, est au cœur d’une controverse persistante qui menace son rôle de gardienne de l’État de droit. Chargée de veiller à la conformité des lois, de trancher les contentieux électoraux et de résoudre les conflits entre institutions, cette juridiction suprême est essentielle à la stabilité démocratique du pays. Pourtant, depuis son installation officielle le 4 avril 2015, elle fait face à des accusations récurrentes de politisation, alimentées par des irrégularités présumées dans la nomination et le renouvellement de ses juges. En 2025, la polémique s’intensifie autour de la légalité des mandats des juges actuellement en place, suscitant des débats sur leur légitimité et l’indépendance de l’institution.
La Constitution de 2006, dans son article 157, établit la Cour constitutionnelle comme la plus haute autorité en matière de contrôle constitutionnel. Selon l’article 158 et la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013, la Cour est composée de neuf juges nommés par le Président de la République : trois sur son initiative, trois désignés par le Parlement réuni en congrès, et trois par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Deux tiers des membres doivent être des juristes issus de la magistrature, du barreau ou de l’enseignement universitaire, avec au moins 15 ans d’expérience professionnelle. Les juges bénéficient d’un mandat de neuf ans non renouvelable, avec un renouvellement par tiers tous les trois ans. Pour les membres initiaux, les deux premiers renouvellements (2018 et 2021) devaient se faire par tirage au sort pour déterminer quels juges quitteraient leur poste après trois, six ou neuf ans.
Le président de la Cour, élu par ses pairs pour un mandat de trois ans renouvelable une fois, est investi par ordonnance présidentielle. La loi impose des incompatibilités strictes : les juges ne peuvent occuper de fonctions gouvernementales, de mandats électifs ou d’activités politiques, bien que l’enseignement supérieur soit autorisé. Ces dispositions visent à garantir l’indépendance et l’impartialité de la Cour, mais leur application a souvent été mise en doute, notamment en raison de nominations perçues comme politiquement motivées.
Les débuts sous Joseph Kabila (2014-2018)
La Cour constitutionnelle a été officiellement installée le 4 avril 2015, marquant le début de son fonctionnement sous le régime de Joseph Kabila. Une ordonnance présidentielle du 7 juillet 2014 nomme les neuf premiers juges : Vunduawe Te Pemako, Luzolo Bambi, Banyaku Luape, Jean-Louis Esambo, Luamba Bindu, Corneille Wasenda, Funga Molima, Kalonda Kele et Kilomba Ngozi Mala. Selon le cadre légal, le premier renouvellement par tiers devait intervenir en 2018, avec un tirage au sort pour sélectionner un juge par groupe (présidentiel, parlementaire, judiciaire).
En 2018, le renouvellement prévu n’a pas suivi la procédure légale. Au lieu d’un tirage au sort, deux juges, Jean-Louis Esambo et Banyaku Luape, ont démissionné, et un troisième, Kalonda Kele, est décédé. Ces départs ont permis le remplacement de trois juges sans tirage au sort, une pratique critiquée pour son opacité. Le 16 mai 2018, trois nouveaux juges, Norbert Nkulu, François Bokona et Jean Ubulu, ont été nommés afin de combler le vide. Ces nominations, impliquant des figures de la majorité présidentielle de Kabila, ont été contestées par l’opposition et la société civile, qui dénonçaient une politisation de la Cour.
Les tensions sous Félix Tshisekedi (2019-2022)
L’arrivée de Félix Tshisekedi à la présidence en janvier 2019 a exacerbé les tensions autour de la Cour, notamment en raison de la coalition fragile entre sa coalition, Cap pour le changement (CACH), et le Front commun pour le Congo (FCC) de Joseph Kabila. En juillet 2020, Tshisekedi a nommé trois nouveaux juges : Dieudonné Kaluba Dibwa, Kalume Yasengo et Dieudonné Kamuleta Badibanga. Ces nominations, réalisées sans consultation préalable avec le FCC, majoritaire au Parlement, ont été dénoncées comme anticonstitutionnelles. Le FCC, dans un communiqué publié par de nombreux médias, a qualifié ces ordonnances de violations graves, accusant Tshisekedi de « haute trahison ».
De plus, deux juges, Noël Kilomba et Jean Ubulu, ont refusé leur mutation à la Cour de cassation, arguant que leur mandat de neuf ans à la Cour constitutionnelle n’était pas terminé. Cette résistance a renforcé les accusations de passage en force de Tshisekedi, le FCC dénonçant l’absence de consultation du CSM. Le procureur général près la Cour constitutionnelle a toutefois défendu la légalité des nominations, affirmant leur conformité à la Constitution, comme rapporté par RFI le 15 octobre 2020.
En 2022, un nouveau renouvellement a eu lieu, avec le remplacement de trois juges : Dieudonné Kaluba Dibwa, Evariste-Prince Funga Mwata Molima et Polycarpe Mongulu, ce dernier étant décédé. Christian Bahati Yuma, Sylvain Lumu Mbaya et Mandza Andia Dieudonné ont été nommés pour les remplacer, après un tirage au sort pour Kaluba et Funga, conformément à la loi. Ce renouvellement, bien que plus conforme aux procédures, a été entaché par des soupçons de corruption, notamment dans l’affaire Bukanga-Lonzo, où Kaluba serait impliqué.
La crise de 2024-2025
En avril 2024, la Cour a atteint neuf ans d’exercice, déclenchant un débat sur la légalité des mandats des juges restants. Selon Radio Okapi, dans un article du 6 avril 2024, certains, dont le Centre des recherches et d’étude sur l’état de droit en Afrique (CREEDA), soutiennent que la Cour est devenue illégitime, car elle n’a pas été renouvelée conformément à l’article 7 de la loi organique, qui exige le remplacement des juges un mois au plus tôt ou une semaine au plus tard avant l’expiration de leur mandat. D’autres, comme l’avocat Willy Wenga, estiment qu’il s’agit d’un renouvellement par tiers, citant trois juges en fin de mandat : Corneille Wasenda, Jean-Paul Mavungu et Norbert Nkulu.
Cependant, cette liste pose problème. Norbert Nkulu, nommé en 2018, devrait rester en fonction jusqu’en 2027, tandis que Corneille Wasenda, membre initial de 2015, aurait dû être remplacé plus tôt si le tirage au sort avait été respecté. L’absence de renouvellement en 2021, qui aurait dû être le deuxième cycle, a créé une confusion sur les mandats. En 2025, la polémique s’est intensifiée avec le report de l’élection du président de la Cour, prévue initialement pour le 20 juin 2025. Dieudonné Kamuleta Badibanga, président depuis 2022, reste en fonction, mais des tensions persistent autour de la composition de la Cour.
Une publication sur le réseau social X d’un internaute (@Daddy Kalubi Mukendi) défend l’idée que chaque juge bénéficie d’un mandat plein de neuf ans, sauf en cas de tirage au sort, de démission ou de décès. Cette position contredit l’interprétation selon laquelle un tirage au sort doit avoir lieu tous les trois ans pour renouveler un tiers des juges, suggérant une divergence dans l’interprétation des textes juridiques.
Les nominations de 2020 : Un point de rupture
Les nominations de 2020 par Tshisekedi ont marqué un tournant dans la crise. Selon une publication du journal La Libre du 21 octobre 2020, ces ordonnances, non contresignées par le Premier ministre de l’époque, issu du FCC, ont été perçues comme un passage en force. La prestation de serment des nouveaux juges, dénoncée comme « du théâtre » par Ferdinand Kambere, Secrétaire général adjoint du parti du président honoraire Joseph Kabila, a accentué les tensions. Cette crise a révélé un conflit profond entre les camps de Tshisekedi et Kabila, chacun cherchant à contrôler une institution clé pour les contentieux électoraux. Cette crise est celle qui a provoquée par la suite la rupture entre CACH et FCC.
Les nominations de 2025 : Une nouvelle polémique
En janvier 2025, la nomination de deux nouveaux juges a relancé la controverse. Selon Tv5 Monde, les autorités ont présenté ces nominations comme un moyen de redresser le système judiciaire, mais l’opposition y voit une tentative de Tshisekedi de consolider son influence en vue d’une éventuelle révision constitutionnelle. Cette perception est renforcée par le report de l’élection du président de la Cour en juin 2025, perçu comme une manœuvre pour maintenir des juges proches du pouvoir en place.
Points de vue des experts
Les experts juridiques congolais sont divisés sur la question. Me Jean-Pierre Makasu déclare : « La Cour constitutionnelle est devenue un outil au service du pouvoir exécutif. Les irrégularités dans les nominations et les retards dans les renouvellements sapent sa légitimité et compromettent l’État de droit. » Cette critique reflète un sentiment répandu parmi les opposants, qui accusent la Cour de partialité.
À l’inverse, le professeur Albert Matadila, constitutionnaliste, adopte une position plus mesurée : « Malgré des irrégularités, la Cour continue de remplir ses fonctions. Une réforme du processus de nomination est nécessaire, mais il ne faut pas discréditer l’ensemble de ses décisions. » Cette perspective met l’accent sur la nécessité de réformes structurelles pour renforcer l’indépendance de l’institution.
Paul-Gaspard Ngondankoy, juriste et analyste politique, cité dans un article de l’Agence Congolaise de Presse (ACP) du 5 juin 2025, propose une révision de la loi organique pour clarifier les procédures de renouvellement et limiter les ingérences politiques. Il suggère un dialogue inclusif impliquant les institutions, les partis politiques et la société civile pour restaurer la confiance.
Implications pour la démocratie congolaise
La polémique autour de la Cour constitutionnelle a des répercussions profondes sur la démocratie congolaise. En tant qu’arbitre des contentieux électoraux, la Cour joue un rôle déterminant dans la légitimité des processus électoraux. Les accusations de politisation, comme celles entourant les élections de 2018 et 2023, où la Cour a validé des résultats contestés, ont alimenté la méfiance des citoyens. Selon un rapport du Congolese Research Institute for the Improvement of the Functioning of Institutions, publié en mars 2025, 68 % des Congolais interrogés estiment que la Cour manque d’indépendance.
De plus, les irrégularités dans les renouvellements et les nominations controversées renforcent la perception d’une justice aux ordres. Cela risque de compromettre la stabilité politique, surtout à l’approche des prochaines élections. Comme le souligne Me Marlène Makuba, avocate et militante des droits humains : « Une Cour constitutionnelle perçue comme illégitime ne peut garantir des élections transparentes. Sans réformes, nous risquons une crise institutionnelle majeure. »
Vers des réformes nécessaires
Pour surmonter cette crise, plusieurs réformes sont envisagées. Premièrement, le respect strict du calendrier de renouvellement par tiers, avec un tirage au sort transparent, est essentiel pour dissiper les soupçons d’arbitraire. Deuxièmement, une clarification des dispositions contradictoires entre la Constitution et la loi organique s’impose. Par exemple, l’article 158 de la Constitution stipule un mandat de neuf ans non renouvelable, mais le mécanisme de tirage au sort peut écourter les mandats, créant une ambiguïté exploitée politiquement.
Enfin, une plus grande transparence dans le processus de nomination, avec une consultation effective des parties prenantes (Parlement et CSM), renforcerait la légitimité des juges. Le professeur Mukendi propose la création d’une commission indépendante pour superviser les nominations, une idée soutenue par des organisations comme le CREEDA. Ces réformes, si elles sont mises en œuvre, pourraient restaurer la confiance dans la Cour et consolider l’État de droit en RDC.
Un défi pour l’État de droit
La polémique autour de la Cour Constitutionnelle de la RDC met en lumière les défis structurels auxquels le pays est confronté dans la consolidation de son État de droit. Les irrégularités dans les renouvellements, les nominations controversées et les accusations de politisation compromettent la crédibilité de cette institution essentielle. À l’approche des prochaines échéances électorales, la légitimité de la Cour sera déterminante pour garantir des processus démocratiques transparents et équitables. Des réformes urgentes, combinant transparence, respect des textes juridiques et dialogue inclusif, sont nécessaires pour restaurer la confiance et renforcer l’indépendance judiciaire en RDC.
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65 ans d’indépendance et 30 ans d’instabilité sécuritaire : la RDC à la croisée des chemins
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5 jours agoon
juin 30, 2025By
La redaction
La République démocratique du Congo (RDC) célèbre, ce 30 juin 2025, 65 ans de son indépendance. Cet anniversaire intervient trois jours après la signature, à Washington DC, d’un important accord de paix entre Kinshasa et Kigali pour tenter de mettre fin aux violences armées qui durent depuis 30 ans dans l’Est du pays. Cet accord pourrait-il marquer un tournant décisif dans la résolution du conflit ? Décryptage.
De 1960 à 2025, la RDC a connu des avancées, comme des réformes institutionnelles ou des périodes de croissance économique, mais aussi de profondes régressions, marquées par des crises politiques et des conflits armés dans plusieurs secteurs : politique, économique, sociale, sécuritaire et géopolitique. De Joseph Kasa-Vubu à Félix Tshisekedi, en passant par Mobutu, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila, le pays a connu plusieurs insurrections. Mais l’instabilité sécuritaire s’est aggravée au lendemain du génocide rwandais de 1994. Depuis le milieu des années 1990, l’Est de la RDC est marqué par des conflits armés successifs, menés par des groupes comme l’AFDL (1996-1997), le RCD (1998-2003), le MLC (1998-2003), le CNDP (2006-2009) et le M23 (2012-2013 et depuis 2021).
Dans ce pays aux dimensions continentales, Joseph Kasa-Vubu et Lumumba ont fait face à des sécessions (Katanga et le Sud Kasaï), plus tard, le président Mobutu fera face à la rébellion de Pierre Mulele ainsi que de Laurent-Désiré Kabila. Quand ce dernier devient président de la République, il fera face non seulement à des multiples insurrections (RCD, MLC, RCD-KML) mais aussi à une guerre d’agression rwandaise, burundaise et ougandaise en 1998. Son fils, Joseph Kabila, sera confronté au CNDP de Laurent Nkunda, puis le M23 en 2012-2013. A son tour, Félix Tshisekedi est également confronté à une agression rwandaise déguisée en rébellion de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), une coalition incluant le M23, soutenue par le Rwanda.
Malgré les ingérences étrangères et toutes ces rébellions, la RDC a résisté à de nombreuses tentatives de balkanisation. Amputé de ses deux capitales provinciales (Goma et Bukavu) depuis plus de cinq mois par la rébellion de l’Alliance Fleuve Congo (AFC) soutenue par le Rwanda, le pays est – 65 ans après – à la croisée des chemins pour tenter de refaire encore son unité. L’accord de paix signé le 27 juin 2025 à Washington DC, sous la médiation américaine, pourrait être un début de solution à ces 30 années de violence.
L’Accord signé est-il différent des autres traités avec le Rwanda ?
Le texte signé à Washington énonce le respect de l’intégrité territoriale de deux pays, la RDC et le Rwanda, il prévoit l’arrêt des hostilités, le désarmement et l’intégration conditionnelle des groupes armés, ainsi qu’un mécanisme conjoint de coordination en matière de sécurité. Mais l’élément central de l’accord est le retrait des troupes rwandaises du sol congolais, un point particulièrement sensible. En effet, les rebelles de l’AFC/M23 n’ont pas agi seuls dans la conquête du vaste espace congolais qu’ils occupent actuellement dans les provinces du Nord et Sud-Kivu. Ils ont bénéficié du commandement, appui logistique et en hommes de l’armée rwandaise selon un rapport des experts des Nations unies publié en 2024. L’accord prévoit donc le retrait ou le désengagement de ces troupes rwandaises du sol congolais. Mais ce retrait devrait se faire concomitamment avec la neutralisation par le gouvernement congolais des rebelles des FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda) formées par d’anciens responsables du génocide rwandais après 1994, présentes dans l’Est de la RDC depuis les années 1990. Kigali considère ce mouvement créé par d’anciens génocidaires comme une menace « existentielle » à la sécurité du Rwanda.
L’accord prévoit aussi une coopération autour des richesses naturelles, notamment la gestion des parcs nationaux et des ressources transfrontalières. Dans l’ensemble, ce document a repris des points classiques que Kinshasa et Kigali revendiquent souvent. Mais la seule nouveauté, c’est l’implication active des Etats-Unis comme médiateurs de dernière minute dans cette crise. Peut-être que cela pourrait aider enfin à la mise en œuvre de cet accord. C’est le seul point de différence avec les accords signés précédemment, notamment l’Accord-cadre d’Addis-Abeba pour la paix en RDC et dans la région des Grands Lacs.
Le gouvernement trouvera-t-il les FDLR à neutraliser ?
Dans ce document, l’engagement pris par le gouvernement congolais de neutraliser les rebelles des FDLR représente un défi majeur. Le premier couac pourrait venir de cette incise qui est d’ailleurs liée au désengagement des forces rwandaises du sol congolais. Les deux séquences sont liées, ce qui met un coup de pression sur le gouvernement congolais pour mettre rapidement la main sur les FDLR.
Mais le problème, c’est que la zone de localisation de ces rebelles est celle occupée actuellement par l’armée rwandaise et les rebelles de l’AFC/M23. Pourquoi n’ont-ils pas eux-mêmes neutralisé ces rebelles ? En acceptant ce pari, le gouvernement congolais va-t-il trouver cette force résiduelle dans quel autre coin du pays ? Dans le Maniema ou dans le Kasaï ? Le quartier général des FDLR étant souvent à Rutshuru ou à Masisi, deux territoires congolais actuellement sous contrôle de l’armée rwandaise et des rebelles du M23.
L’autre incertitude, c’est que depuis 20 ans la lutte contre les FDLR n’a jamais définitivement abouti malgré les opérations conjointes menées avec l’armée rwandaise notamment dans l’opération « Kimia II » en 2005 et « Amani leo » en 2009. Sous Félix Tshisekedi en 2020, l’armée a remis au Rwanda des centaines des FLDR et leurs dépendants. Certaines affirmations qui ne sont pas sourcées, certains rebelles des FDLR capturés et extradés vers le Rwanda sont revenus sur le sol congolais. Cet engagement visant à neutraliser les FDLR pourrait donc être une épine sous le pied du gouvernement. Il risque de se transformer en opération conjointe entre les armées congolaise et rwandaise. Outre les défis liés aux FDLR, l’accord de paix a également des répercussions sur les acteurs locaux, notamment Corneille Nangaa, leader de l’AFC/M23.
Conquête de Kinshasa, Corneille Nangaa abdique ?
Après la signature de l’accord de paix entre Kinshasa et Kigali, le coordonnateur de l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23), Corneille Nangaa a été obligé de changer de langage. L’homme qui rêvait de « défaire le monstre » (Félix Tshisekedi) qu’il disait avoir lui-même créé, l’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) semble perdre cette ambition. Dans une allocution à l’occasion du 30 juin, fête de l’indépendance, Corneille Nangaa a quasiment renié cet agenda subversif en affirmant que son mouvement ne poursuivait ni la gloire ni le pouvoir. « Nous ne poursuivons ni la gloire, ni le pouvoir : notre engagement vise à sortir la RDC du cycle d’insécurité, de pauvreté, d’exclusion, de discriminations, de médiocrité, de l’arbitraire, de la dictature et des injustices. Nous sommes un peuple debout, uni dans sa diversité, mû par la volonté de vivre ensemble dans la dignité », a-t-il déclaré.
En réalité, le M23 n’a jamais eu des revendications de nature à renverser le pouvoir à Kinshasa. Corneille Nangaa semblait plutôt se servir de ce mouvement pour assouvir sa soif de vageance politique contre Félix Tshisekedi après la rupture des liens politiques entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi. Selon une analyse de François Soudan, rédacteur en chef de Jeune Afrique, publiée en 2024, « dans le jeu de Kigali, Joseph Kabila apparaît comme une carte pour faire pression sur Félix Tshisekedi, rien de plus. »
D’après Pierre Boisselet, directeur du pilier violence de l’institut congolais Ebuteli, si le Rwanda retire son soutien à l’AFC/M23, rien ne prouve la capacité de cette rébellion à défaire les FARDC malgré le recrutement et la formation en cours des nouveaux combattants. « Lors de toutes les campagnes qui ont permis de gagner du territoire, c’était, à priori, toute l’armée rwandaise qui était en première ligne. Donc, le M23 n’a pas forcément non plus démontré sa capacité à soutenir un conflit contre les FARDC », a-t-il analysé sur les antennes de RFI.
Avec cet accord de paix signé à Washington, il pourrait être de plus en plus difficile pour Nangaa ou Kabila de réaliser la chute du régime Tshisekedi. Mais cela n’est pas non plus un gage de retour de la paix dans l’ensemble du pays. Il faudrait maintenant pointer le curseur sur Doha, au Qatar, pour régler la question de l’AFC/M23 et projeter – peut-être – l’organisation d’un dialogue national au pays avec l’initiative de la CENCO-ECC.
Cet accord de paix obtenu avec une grande implication des Etats-Unis – un médiateur qui a les moyens de faire pression sur Kigali et Kinshasa – cela peut être un élément majeur dans le début de la résolution de cette crise qui date. « Mais pour que l’accord se concrétise sur le terrain, il faudra que la pression américaine soit maximale, et surtout, s’inscrive dans la durée. La paix ne reviendra pas d’un coup de baguette magique, car les difficultés ne manquent pas pour mettre fin à une guerre de 30 ans », estime le journaliste français Christophe Rigaud.
L’accord de Washington représente une opportunité historique pour la RDC, mais sa réussite dépendra de la volonté politique, de la pression internationale et d’une stratégie globale pour désarmer les groupes armés, réintégrer les ex-combattants et promouvoir un dialogue national inclusif.
Heshima
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