Nous rejoindre

Nation

De gouvernement en gouvernement : Les ministres indéboulonnables de la RDC sous Tshisekedi

Published

on

Alors que la République démocratique du Congo (RDC) est dans l’attente d’un gouvernement d’union nationale, comme annoncé par Félix Tshisekedi en février dernier, certains noms résonnent comme des échos persistants dans les couloirs du pouvoir. Jean-Lucien Busa Tongba, Julien Paluku Kahongya, Aimé Sakombi Molendo, Didier Budimbu Ntubuanga, Augustin Kibassa Maliba et Irène Esambo Diata forment un sextuor d’une rare constance. Depuis le premier gouvernement de Sylvestre Ilunga Ilunkamba en 2019, ils ont traversé les deux mandats de Jean-Michel Sama Lukonde jusqu’à l’équipe actuelle de Judith Suminwa, défiant les remaniements et les tempêtes politiques. Qui sont ces figures indélogeables ? D’où viennent-elles ? Et qu’est-ce qui les maintient si proches du président ? Voici leur histoire, celle d’une stabilité qui intrigue autant qu’elle fascine.

Jean-Lucien Busa Tongba : du Commerce extérieur au Portefeuille

C’est dans le territoire de Budjala, province de l’Équateur, que Jean-Lucien Busa Tongba voit le jour le 26 mars 1962. Loin du tumulte de Kinshasa, cet homme au profil discret bâtit son parcours entre les amphithéâtres et les bureaux administratifs. Formé en gestion, il enseigne l’audit financier et la gestion à l’Institut Supérieur du Commerce et de Gestion de la capitale. Pendant près d’une décennie, de 1992 à 2001, il travaille à la Société Nationale d’Électricité, un géant public aux prises avec les défis énergétiques du pays. Ce passage lui offre une immersion dans les rouages économiques, une expérience qui façonnera son avenir.

En 2006, il fait son entrée sur la scène politique en se faisant élire député pour Budjala. À l’Assemblée, il se distingue comme vice-président de la commission économique et financière, plongeant dans les dossiers complexes de l’économie congolaise. En 2013, il fonde le Courant des Démocrates Rénovateurs, son parti politique, avant de lancer la Coalition des Démocrates deux ans plus tard. Cette coalition remporte plusieurs sièges aux législatives, renforçant son poids politique. Busa joue un rôle stratégique en 2016 en conduisant la délégation de l’opposition au pré-dialogue, une étape clé dans la transition vers le pouvoir actuel.

Son aventure ministérielle sous le mandat du président Tshisekedi commence en 2019 sous Ilunga Ilunkamba, où il prend les rênes du Commerce extérieur. Il conserve ce poste sous les deux gouvernements de Sama Lukonde, affirmant son rôle dans un secteur vital pour les échanges économiques du pays. Mais avec l’arrivée de Judith Suminwa, un changement survient : Busa Tongba hérite du ministère du Portefeuille, un portefeuille stratégique qui le place au cœur de la gestion des entreprises publiques. À 63 ans, il reste une figure incontournable, évoluant avec aisance dans les arcanes du pouvoir.

Julien Paluku Kahongya : de l’Industrie au Commerce extérieur

Julien Paluku Kahongya naît le 13 décembre 1968 à Buramba, dans le Nord-Kivu, une région marquée par des décennies de conflits. Cet homme au charisme affirmé se forge une réputation dès ses débuts. Titulaire d’un master en santé communautaire obtenu en 2005 à l’Université libre des Grands Lacs, il commence comme maire, d’abord à Butembo, puis à Beni, où il lance des projets d’infrastructures qui marquent les esprits dans ces villes souvent laissées pour compte. En 2007, il devient gouverneur du Nord-Kivu, un poste qu’il occupe pendant douze ans. Gérer une province rongée par les groupes armés et les crises humanitaires forge son caractère et son influence.

Élu député national pour Lubero en 2011, puis en 2018, il consolide son ancrage électoral. Fondateur du Bloc Uni pour la Renaissance et l’Émergence du Congo, il s’allie à l’UDPS de Tshisekedi, devenant un pilier de la coalition au pouvoir. En 2019, sous Ilunga Ilunkamba, il prend la tête du ministère de l’Industrie, un poste qu’il conserve sous les deux gouvernements de Sama Lukonde. Avec Judith Suminwa, un virage se dessine : Paluku hérite du Commerce extérieur, succédant à Busa Tongba. À 56 ans, il incarne une ambition intacte, prêt à relever de nouveaux défis dans un pays aux échanges commerciaux encore balbutiants.

Aimé Sakombi Molendo : des Affaires foncières aux Hydrocarbures

À Kinshasa, Aimé Sakombi Molendo grandit sous l’ombre imposante de son père, Dominique Sakombi Inongo, ancien ministre de l’Information sous Mobutu. Mais il ne se contente pas de cet héritage : il trace sa propre route, d’abord dans les médias. Conseiller au ministère de l’Information, président de Canal Futur, une chaîne liée à l’UNC de Vital Kamerhe, il se fait aussi connaître comme promoteur du site 7sur7.cd, un média en ligne qui gagne en influence. Ce parcours dans la communication lui confère une visibilité et une aisance précieuses.

Sur le terrain politique, il s’engage comme secrétaire interfédéral de l’Union pour la Nation Congolaise à Kinshasa et la coalition Cap vers le changement, qui porte Tshisekedi au pouvoir. En janvier 2024, il est élu député national, ajoutant une légitimité électorale à son CV. En 2019, sous Ilunga Ilunkamba, il devient ministre des Affaires foncières, un poste qu’il garde sous les deux gouvernements de Sama Lukonde. Avec Suminwa, un tournant inattendu : Sakombi prend les rênes des Hydrocarbures, un secteur stratégique où les enjeux pétroliers pourraient redéfinir son rôle.

Didier Budimbu Ntubuanga : De l’EPST aux Sports

Didier Budimbu Ntubuanga naît le 17 décembre 1977 à Kinshasa, dans une famille bien connectée. Fils de Dikumbaka Budimbu, ancien ambassadeur, et de Suzanne Yala Kaba, il grandit dans un milieu privilégié. Formé en droit en France et en Belgique, il complète son parcours avec un diplôme en droit public à l’Université de Kinshasa, une base solide pour une carrière ambitieuse. Autorité morale du parti politique Autre vision du Congo (AVC), il entre au gouvernement en 2019 sous Ilunga Ilunkamba comme vice-ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et technique, un poste qu’il occupe jusqu’en 2021.

Avec le premier gouvernement Sama Lukonde, il est propulsé ministre des Hydrocarbures, un portefeuille qu’il conserve sous le second mandat de Lukonde. Mais sous Judith Suminwa, un changement radical se produit : Budimbu hérite du ministère des Sports et Loisirs, un virage surprenant pour ce juriste de formation. En avril 2022, une brève audition par l’Agence Nationale de Renseignements (ANR) pour des raisons de « sécurité » avait fait trembler son parcours, mais il avait repris ses fonctions sans fléchir. À 47 ans, il incarne une nouvelle génération, adaptable et résiliente.

Augustin Kibassa Maliba : le maître discret des Télécommunications

Augustin Kibassa Maliba naît le 30 novembre 1971 à Lubumbashi, dans une famille où la politique est une affaire de sang. Fils de Frédéric Kibassa Maliba, co-fondateur de l’UDPS aux côtés d’Étienne Tshisekedi en 1982, il grandit dans l’ombre d’un héritage puissant. Moins médiatisé que d’autres ténors congolais, cet homme discret s’est imposé par sa maîtrise des nouvelles technologies, mais aussi par des liens familiaux stratégiques qui en disent long sur son influence. Sa sœur, Isabelle Kibassa-Maliba, est mariée à Jean-Claude Tshisekedi, frère aîné de Félix Tshisekedi et fils d’Étienne Tshisekedi, tissant un réseau familial au cœur du pouvoir.

Son parcours politique s’enracine dans les méandres de l’UDPS. Après la scission entre UDPS-Kibassa, dirigée par son père, et UDPS-Tshisekedi, Augustin prend les rênes de la faction familiale à la mort de son père. Mais en 2018, il opère un virage décisif : il rallie Félix Tshisekedi, scellant une réconciliation entre les deux branches. Ce soutien, consolidé lors des élections de 2018 et réaffirmé en 2023, l’ancre dans l’UDPS unifié, où les alliances familiales renforcent sa position.

Kibassa Maliba ne doit pas tout à sa lignée. De 2003 à 2006, il siège comme député national durant la transition, actif au sein de la commission Reconstruction et Développement, prouvant qu’il n’est pas un novice propulsé par favoritisme. En 2019, il accède au ministère des Postes, Télécommunications et Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (PTNTIC) sous Ilunga Ilunkamba. Maintenu sous les deux gouvernements de Sama Lukonde, son portefeuille s’élargit au numérique sous Judith Suminwa, reflet des ambitions technologiques de la RDC. Cette longévité remarquable sous Félix Tshisekedi intrigue : au-delà de son expertise, le mariage de sa sœur Isabelle avec Jean-Claude, grand frère et proche conseiller de Félix, pourrait bien être une clé. Cette connexion familiale, liant les Kibassa et les Tshisekedi, offre une stabilité politique dans un paysage souvent chaotique.

À 53 ans, Augustin Kibassa Maliba incarne une figure de l’ombre aux assises solides. Sa permanence aux PTNTIC, son passé parlementaire et son ancrage dans l’UDPS, dopé par ce réseau familial, en font un pilier aussi discret qu’incontournable. Dans un Congo en quête de modernité numérique, il trace son chemin, porté par l’héritage et les alliances.

Irène Esambo Diata : la voix des vulnérables

Irène Esambo Diata émerge à Kinshasa dans un milieu marqué par un engagement pour la justice sociale. Juriste de formation, elle se distingue par son dévouement aux droits humains, notamment en faveur des plus fragiles. Avant 2019, elle n’occupe pas de mandat électoral, mais son parcours au sein de l’UDPS et son militantisme pour l’inclusion lui ouvrent les portes du pouvoir. Sa nomination reflète une intention de Tshisekedi de mettre en avant des figures sensibles aux questions sociales, une touche d’humanité dans un gouvernement souvent dominé par des portefeuilles économiques.

Dès 2019, sous Ilunga Ilunkamba, elle devient ministre déléguée auprès du ministre des Affaires sociales, chargée des personnes vivant avec handicap et autres personnes vulnérables, un poste qu’elle conserve sous les deux gouvernements de Sama Lukonde. Avec Judith Suminwa, elle reste fidèle à cette mission, toujours en tant que ministre déléguée aux personnes vivant avec handicap. Bien que son rang soit subalterne, sa présence constante dans un domaine aussi sensible témoigne d’une confiance durable et d’un rôle symbolique au sein de l’équipe dirigeante.

Une trajectoire à travers les gouvernements

Leur parcours à travers les gouvernements dessine une fresque de continuité. Sous Ilunga Ilunkamba, Busa Tongba dirige le Commerce extérieur, Paluku prend l’Industrie, Sakombi s’installe aux Affaires foncières, Budimbu débute comme vice-ministre de l’Enseignement, Kibassa Maliba pilote les PTNTIC, et Esambo Diata défend les personnes vulnérables. Avec le premier gouvernement Sama Lukonde, la stabilité prédomine pour la plupart : Busa Tongba reste au Commerce extérieur, Paluku à l’Industrie, Sakombi aux Affaires foncières, Kibassa Maliba aux PTNTIC, Esambo Diata dans son rôle délégué, tandis que Budimbu passe aux Hydrocarbures. Le second mandat de Lukonde confirme cette tendance, les six figures conservant leurs positions respectives.

Sous Judith Suminwa, un remaniement redistribue les cartes : Busa Tongba glisse au Portefeuille, Paluku récupère le Commerce extérieur, Sakombi s’empare des Hydrocarbures, Budimbu se tourne vers les Sports et Loisirs, Kibassa Maliba élargit son mandat aux PTNTIC et Numérique, et Esambo Diata demeure ancrée dans son rôle social. Ce jeu de chaises musicales montre leur capacité à s’adapter tout en restant au cœur du pouvoir.

Les clés d’une longévité exceptionnelle

Qu’est-ce qui explique leur permanence ? La loyauté apparaît comme un fil rouge. Dans un pays où les alliances s’effritent aussi vite qu’elles se nouent, Busa Tongba, Paluku, Sakombi, Budimbu, Kibassa Maliba et Esambo Diata, tous membres de l’union sacrée de la nation, ont soutenu Tshisekedi dès ses premiers pas au sommet. « Ce sont des compagnons de route qui ont cru en lui dès le départ », confie un analyste politique, préférant l’anonymat. Cette fidélité semble avoir scellé une relation de confiance difficile à ébranler.

Leur expertise joue un rôle tout aussi crucial. Busa Tongba, avec son passé à la SNEL et son expérience parlementaire, maîtrise les enjeux économiques et politiques. Paluku, fort de ses années comme gouverneur dans une province sensible, apporte une vision pragmatique. Sakombi, héritier d’une tradition politique et rompu aux médias, excelle dans les dossiers complexes. Budimbu, juriste, conjugue rigueur et ambition. Kibassa Maliba, technicien des télécommunications, s’impose dans un secteur en pleine mutation. Esambo Diata, avec sa sensibilité juridique et sociale, incarne une constance dans les questions humanitaires. « Félix s’entoure de gens qui savent faire tourner la machine », glisse un ancien ministre, soulignant leur importance dans une administration parfois critiquée pour son improvisation.

Leur ancrage local renforce leur position. Paluku, élu deux fois député et ex-gouverneur, domine le Nord-Kivu. Busa Tongba reste influent dans le grand Équateur. Sakombi, avec son élection en 2024, et Budimbu, député national du kongo Central, incarnent des bastions électoraux précieux. Kibassa Maliba et Esambo Diata, bien que moins visibles électoralement, tirent leur force de leur enracinement dans leur milieux et de leur proximité avec le parti présidentiel. Cette popularité, directe ou indirecte, les rend indispensables pour mobiliser les foules. Aussi, leur capacité à tisser des alliances et à esquiver les scandales les protège des vents contraires.

Une proximité avec Tshisekedi : confiance ou stratégie ?

Leur relation avec Félix Tshisekedi intrigue. Pour certains, ils forment un cercle restreint, un noyau dur qui sécurise le président face aux tensions avec l’opposition et d’anciens alliés comme Joseph Kabila. « Ce sont ses yeux et ses oreilles dans des secteurs clés », avance un observateur. Pour d’autres, c’est un choix stratégique : en s’appuyant sur des figures expérimentées, Tshisekedi stabilise un équilibre fragile au sein de sa majorité.

Cette constance n’échappe pas aux critiques. « Pourquoi toujours les mêmes ? », s’agace un député de l’opposition. « Le président parle d’union nationale, mais recycle des visages familiers. » Une interrogation qui pourrait peser alors que ce nouveau gouvernement se profile à l’horizon.

Des figures pour l’avenir ?

Jean-Lucien Busa Tongba, Julien Paluku Kahongya, Aimé Sakombi Molendo, Didier Budimbu Ntubuanga, Augustin Kibassa Maliba et Irène Esambo Diata ne sont pas de simples silhouettes dans le décor politique congolais. Leurs parcours, de l’Équateur au Nord-Kivu, des médias aux télécommunications, du droit aux vulnérables, témoignent d’une diversité et d’une résilience qui forcent l’admiration. Leur présence continue sous Tshisekedi reflète une confiance profonde, mais aussi une stratégie pour tenir un pays en quête de cohérence. Alors que la RDC entre dans une nouvelle ère avec la perspective du gouvernement d’union nationale, une question flotte dans l’air : jusqu’où ces indéboulonnables accompagneront-ils Félix Tshisekedi ? L’avenir seul apportera une réponse.

Heshima

Continue Reading

Nation

Consultations politiques en RDC : l’illusion d’un consensus plane  

Published

on

Les consultations initiées par le président Félix Tshisekedi pour la formation d’un gouvernement d’union nationale semblent jusqu’ici tourner uniquement autour des personnalités de sa propre famille politique, l’Union sacrée de la Nation. Une semaine après, l’opposition reste toujours sur sa position et refuse une telle proposition. Si l’opposition ne répond pas, le consensus recherché par le chef de l’Etat pour faire face aux défis sécuritaires dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) risque d’être une illusion.

Les consultions menées par Eberande Kolongele, conseiller spécial du chef de l’Etat en matière de sécurité reprennent, ce lundi 31 mars 2025, à Kinshasa. Après avoir vu défiler Vital Kamerhe, Jean-Pierre Bemba, Modeste Bahati, Jean-Michel Sama Lukonde et d’autres leaders de la majorité au pouvoir, les opposants se font toujours attendre. Cette semaine, l’unique opposant qui pourrait se pointer au bureau du conseiller spécial, c’est l’ancien Premier ministre Adolphe Muzito. Le président du parti Nouvel Elan s’est montré favorable à cette initiative. « Ici, il ne s’agit pas de questions de la majorité ou de l’opposition, parce que nous ne sommes pas en train de défendre nos programmes en tant qu’entités partisanes, entités politiques, mais ici, il s’agit de la nation qui est en danger. Nous devons d’abord préserver la nation, avant de retourner dans nos casquettes politiques », a justifié le secrétaire général de son parti, Blanchard Mongomba. Ce dernier insiste qu’il faut soutenir les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) mais surtout le chef de l’État, Félix Tshisekedi, qui est au front face à cette agression rwandaise sous couvert du Mouvement du 23 mars (M23).   

Du côté du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD), la position reste inflexible. La formation politique de l’ancien président Joseph Kabila veut un dialogue « inclusif » où toutes les questions liées à la crise actuelle seront traitées. Quant à Martin Fayulu, Delly Sesanga et Moïse Katumbi, ils ont foi au dialogue initié par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et l’Eglise du Christ au Congo (ECC).       

L’illusion d’illusion d’un consensus

Avec ce format des discussions, le pouvoir risque de finir ces consultations sans atteindre l’objectif recherché, celui de réunir le maximum des Congolais pour faire face à la crise sécuritaire. A défaut d’avoir tout le monde, il y risque d’un débauchage des individus au sein de l’opposition pour donner l’illusion d’un consensus et sauver ces consultations. « Le pouvoir, bien sûr, invite les opposants, non pas par générosité d’âme, mais plutôt pour donner l’illusion d’un consensus. », estime Guylain Tshibamba, expert en communication stratégique.

L’histoire politique est riche en exemple. En 2016, Joseph Kabila – refusant un format neutre du dialogue – avait fait venir le Togolais Edem Kodjo pour conduite le dialogue dit de la Cité de l’Union africaine. Un dialogue qui a débouché sur la nomination du Premier ministre Samy Badibanga. Mais l’illusion de ce consensus n’avait pas tardé à montrer ses limites. Le chef de l’Etat de l’époque était obligé de reprendre à zéro pour ratisser large afin de mieux apaiser les tensions. Ce qui l’avait conduit à accepter le dialogue dit de la Saint Sylvestre mené par la CENCO. Même si le Premier ministre nommé – Bruno Tshibala – était aussi un débauché, mais ces pourparlers avaient permis de traverser cette zone de turbulence pour arriver aux élections de 2018.

Avoir la lucidité de lire l’histoire et d’anticiper sur les événements pourrait permettre à la République de ne pas perdre du temps face au danger existentiel qui est à ses portes. D’ailleurs, Vital Kamerhe, président de l’Assemblée nationale, a demandé de ne pas s’écarter des objectifs. Celui de réunir réellement l’opposition, la majorité et les belligérants dans un processus plus inclusif pour la paix dans l’Est du pays.

Heshima

Continue Reading

Nation

Le M23 au Qatar : Doha s’accapare de la médiation de la crise congolaise

Published

on


La délégation des rebelles de l’Alliance Fleuve Congo alliée au Mouvement du 23 Mars (AFC-M23) est arrivée à Doha ce vendredi 28 mars 2025. Elle est conduite par Bertrand Bisimwa, leader politique du M23. Mais il y a aussi des délégations rwandaise et congolaise sur place. Pendant que la sous-région multiplie des formats de médiation sans réel progrès, le Qatar s’empare de la situation et semble marquer des points…

Sous l’égide de l’émir du Qatar Tamim Ben Hamad Al Thani, les trois délégations vont poursuivre les discussions entamées le 18 mars 2025 entre les présidents congolais et rwandais Félix Tshisekedi et Paul Kagame. Le contenu ou l’agenda des discussions pour ces trois délégations n’a pas été révélé. Mais tout porte à croire qu’après les sanctions infligées au Rwanda, Kigali a bien besoin de négocier l’avenir de son poulain, le M23. Et dans la foulée, l’avenir de l’AFC de Corneille Nangaa, qui s’est greffée au M23 pour régler ses comptes à Félix Tshisekedi, devrait aussi être étudié à Doha.

Le processus de Luanda a été pris de court

Malgré des progrès encourageants réalisés fin 2024, la médiation dirigée par le président angolais, Joao Lourenço a fini par tourner court. Luanda a décidé d’abandonner le processus au lendemain de la rencontre entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame au Qatar. Un échec qui semblait de plus en plus inévitable pour le nouveau président de l’Union africaine face au refus de Paul Kagame de signer, le 15 décembre, un accord de paix avec Félix Tshisekedi puis le refus du M23 de se rendre à Luanda pour des discussions directes entre cette rébellion et le gouvernement congolais.

Après le tête-à-tête de Doha entre les deux dirigeants en conflit, Luanda s’était dit « étonné » de voir cette rencontre alors que le même jour l’Angola attendait les délégations de la RDC et du M23 pour le début des discussions. Le ministre des Affaires étrangères de l’Angola, Téte António, avait rappelé à cette occasion le principe des « solutions africaines » aux problèmes africains sans toutefois contester toute action pouvant mener à la paix dans la région des Grands Lacs.

L’EAC joue le chrono…

Alors que la crise sécuritaire a atteint des proportions inquiétantes, la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) joue le chrono. Au lieu d’encourager le processus de paix existant, cette organisation conjointement avec la SADC a fondu les deux processus de paix (Nairobi et Luanda) en un seul processus. Ces organisations sous-régionales ont même nommé des nouveaux médiateurs pour cette crise. Ce qui risque de retarder la solution alors que l’urgence s’impose sur le terrain, particulièrement dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu.

« L’EAC qui dicte un peu son tempo à la SADC a tendance à tourner autour du pot alors que le Qatar est pragmatique, » résume un analyste. En effet, la force du Qatar dans la médiation des grandes crises à travers le monde n’était plus à démontrer. Même si certains craignent que l’issue d’une telle négociation puisse pencher en faveur du Rwanda compte tenu de l’investissement qatari au Rwanda. Mais du côté congolais, la porte-parole de Félix Tshisekedi, Tina Salama, a indiqué que Doha a aussi des relations privilégiées avec Kinshasa. Ce qui pourrait mettre à l’aise la délégation congolaise.

Burundi soutient un dialogue interne

Partenaire de la République démocratique du Congo, le Burundi participe à l’éradication des forces négatives grâce à ses troupes présentes dans le Sud-Kivu. Lors de la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU tenue jeudi 27 mars 2025, ce pays a préconisé « un dialogue inter congolais inclusif » en vue d’une paix véritable et durable dans le Nord-Kivu et au Sud-Kivu, deux provinces secouées par les rebelles de l’AFC/M23, soutenus par le Rwanda. Selon le représentant du Burundi à l’ONU, Gitega soutient toute initiative de paix sans se substituer aux processus de Luanda et Nairobi, en voie d’être fusionnés. Sur ce point, le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a tenté de rassurer que Doha égale processus de Luanda. Reste à savoir si les résolutions de Doha pourraient refléter l’image du processus de Luanda.

Joseph Kabila hors circuit

Pendant que l’ancien président de la République, Joseph Kabila et ses partisans rêvent d’un dialogue à l’esprit de Sun City pour faire table rase, la ministre des Affaires étrangères de la RDC, Thérèse Kayumba Wagner, a annoncé qu’aucun rôle n’est réservé pour l’instant au prédécesseur de Félix Tshisekedi dans la résolution actuelle de la crise. Considéré comme une main noire derrière la rébellion de l’AFC de Corneille Nangaa, l’ex-Raïs n’a pas la confiance de Kinshasa pour l’instant. « Joseph Kabila n’a pour l’instant aucun rôle prévu pour lui dans les efforts en cours, » a tranché la patronne de la diplomatie congolaise. Mais tout peut toujours évoluer en politique.

Heshima

Continue Reading

Nation

RDC : Joseph Kabila ou le mythe d’un démocrate

Published

on

Ancien président de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila a été perçu souvent comme une énigme de la vie politique congolaise. Si d’aucuns considéraient à juste titre son engagement en faveur de la démocratie depuis la réunification du pays en 2003 jusqu’à l’alternance pacifique en 2019, sa posture face à l’agression rwandaise en cours et ses récentes prises de position semblent bien déconstruire ce mythe de démocrate. Entre ses silences calculés, ses alliances troubles et ses critiques acerbes contre son successeur, l’homme semble décidé à reconquérir le pouvoir, coûte que coûte. Analyse !

À 47 ans, en 2019, Joseph Kabila était encore fougueux et plein d’énergie. Mais l’homme était un peu obligé de passer la main. Il venait de dépasser largement son bail au Palais de la Nation. Il avait réussi à obtenir une prolongation de deux ans après la fin officielle de son second mandat en 2016, un tour de passe-passe qui avait mis le feu aux poudres. Avant ces deux années de sursis, Joseph Kabila avait subi une pression intense de la part de l’Église catholique, de l’opposition et de la société civile. Plusieurs martyrs ont laissé leurs vies dans ce combat citoyen : Rossy Mukendi et Thérèse Kapangala à Kinshasa, Éric Boloko à Mbandaka, sans oublier les dizaines de morts lors des manifestations réprimées dans le sang entre 2015 et 2018. Tous furent des sacrifices pour forcer la main à un homme qui, visiblement, n’avait aucune intention de lâcher les rênes du pouvoir sans y être contraint.

Pendant ce temps, dans sa boîte à stratégies, le Raïs n’avait plus assez de subterfuges. Il fut obligé d’affronter la réalité : organiser des scrutins et passer le témoin à un autre chef d’État. Habitué au pouvoir depuis janvier 2001, lorsqu’il succéda à son père assassiné, Laurent-Désiré Kabila, l’homme eut beaucoup de difficultés à se choisir un dauphin. Pendant que la presse et ses proches se creusaient la tête pour deviner son choix, il surprit une fois de plus l’opinion en sortant de sa cape de magicien un nom inattendu et controversé : Emmanuel Ramazani Shadary. Face à la vague portée par Martin Fayulu et Félix Tshisekedi, l’élection pencha finalement en faveur de l’opposition. Mais le scrutin, entaché de soupçons de fraude, portait déjà les germes d’un arrangement. La veille de la passation du pouvoir à Félix Tshisekedi, Joseph Kabila assura dans un message télévisé : « Je vais passer la main sans regret ni remords ». En disant cela, celui que certains avaient surnommé « le maître du temps » savait que son accord avec Tshisekedi – un partage tacite du pouvoir – lui permettrait de garder un pied dans la porte. Pour la cosmétique, des affiches à sa gloire fusaient de partout où on pouvait lire : « Le père de la démocratie congolaise ». Certains de ses partisans ne faisaient même plus mystère de ses intentions cachées : « Un stratège qui recule pour mieux sauter ».

Une rupture qui met fin au mythe

Depuis 2021, année de la rupture de la coalition FCC-CACH, celui qui avait déclaré quitter ses fonctions « sans regret ni remords » semblait avoir déjà commencé à regretter son départ du pouvoir. Ou du moins, regretté d’avoir passé la main à Félix Tshisekedi, qui mit fin à leur alliance en décembre 2020, annonçant vouloir gouverner seul. Les événements qui ont suivi cette rupture sont riches en enseignements. Dès 2021, moins d’une année après la rupture de la coalition CACH_FCC, le M23 refait surface depuis les hauteurs de Sarambwe, une localité congolaise dans le parc des Virunga jouxtant la Bwindi Impenetrable National Park en Ouganda. À ce moment, Joseph Kabila réside encore au pays, séjournant tantôt à Kingakati ou à Kashamata, ses fermes situées à Kinshasa et dans le Haut-Katanga. Jusque-là, aucun soupçon ne pèse officiellement sur lui. Mais en décembre 2023, Corneille Nangaa, ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) sous Kabila, crée sa rébellion depuis Nairobi et fait jonction avec le M23, qui s’empare de Bunagana et d’autres localités de l’est. Le mois suivant, en janvier 2024, le Raïs quitte le pays « en catimini », selon les mots d’Augustin Kabuya, secrétaire général de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti présidentiel. Plus tard, Jean-Pierre Bemba posera la question à la foule dans un meeting : « Savez-vous pourquoi il a quitté le pays en secret ? C’est parce que nous avons aperçu sa main dans ces histoires ». Bien avant Bemba, Félix Tshisekedi l’avait dit depuis Bruxelles, où il était en convalescence en août 2024 : « L’AFC, c’est lui [Kabila] ».

Au départ, peu de Congolais prêtèrent foi à ces dénonciations. Mais en février 2025, une tribune signée de la main de Joseph Kabila, publiée dans le journal sud-africain Sunday Times, vint scandaliser l’opinion congolaise. Dans cette sortie médiatique, Kabila s’en prend à l’Afrique du Sud, qui soutient militairement la RDC face au M23, déplorant la mort de 14 soldats sud-africains en janvier 2025 comme un « gaspillage » pour soutenir un « régime tyrannique ». Plus troublant encore, il minimise le rôle du M23, affirmant que les troubles dans l’est sont dus à la mauvaise gouvernance de Tshisekedi et non à une rébellion orchestrée. Pour lui, le M23 « n’est ni un groupe anarchiste ni un proxy du Rwanda », mais un mouvement aux « revendications légitimes ». Cette prise de position publique, loin de son silence habituel, marque un tournant : l’homme ne se contente plus de l’ombre, il prépare le terrain.

Une logique d’insurrection ?

Alors qu’il se couvrait jadis d’une image de père de la démocratie, Joseph Kabila et ses partisans semblent désormais lancés dans une reconquête du pouvoir par la force. Une partie de l’opinion pense que l’ex-Raïs est dans une logique d’insurrection pour renverser militairement Félix Tshisekedi. Le soutien militaire de l’Afrique du Sud, qui dérange visiblement ce projet, devient une cible de ses critiques. « Le monde observe attentivement si l’Afrique du Sud – connue pour son humanisme et ses valeurs – continuera d’envoyer des troupes en RDC pour soutenir un régime tyrannique et combattre les aspirations du peuple congolais », avait conclu Kabila dans sa tribune. Ces mots, soigneusement choisis, trahissent une volonté de délégitimer Tshisekedi tout en se posant en défenseur du peuple – une posture qui contraste avec les accusations portées contre lui.

Depuis début 2024, Kabila est absent du pays, poursuivant officiellement un doctorat en relations internationales à l’Université de Johannesburg. Mais son silence et son éloignement alimentent les spéculations. En avril 2024, sa femme, Olive Lembe Kabila, lors d’une visite à Goma, prie publiquement pour son retour, laissant entendre que ses ambitions restent intactes. En mars 2025, un bateau lui appartenant est bloqué sur le lac Tanganyika, soupçonné de transporter des armes pour des groupes alliés au M23, bien que son ancien chef de cabinet, Nehemie Mwilanya, démente ces allégations faute de preuves concrètes. Pendant ce temps, des anciens proches, comme Adam Chalwe, Henri Magie, … sont aperçus aux côtés de Corneille Nangaa lors de réunions du M23, renforçant les soupçons d’une implication de son parti le PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie) dans l’Alliance Fleuve Congo (AFC), une coalition politico-militaire incluant le M23.

L’homme sillonne certaines capitales où se concoctent parfois des projets contre la RDC, notamment à Nairobi, où l’AFC a vu le jour. Des informations non vérifiées évoquent aussi un séjour à Kampala, en Ouganda. Dans un tweet effacé, Muhoozi Kainerugaba, fils de Yoweri Museveni et chef de l’armée ougandaise, qualifie Kabila de « grand frère », ajoutant : « Je peux à nouveau travailler avec lui », alors qu’il menace de prendre le contrôle de Kisangani. Plus inattendu encore, en décembre 2024, Kabila rencontre à Addis-Abeba des figures de l’opposition comme Moise Katumbi et Claudel Lubaya, suggérant une tentative de rallier des forces politiques contre Tshisekedi, au-delà des accusations de soutien aux rebelles. Ces manœuvres multiples – militaires, diplomatiques et politiques – dessinent le portrait d’un stratège prêt à tout pour revenir au pouvoir.

Un démocrate de façade

Si Joseph Kabila a réussi à construire un mythe de démocrate grâce à son ouverture à l’opposition armée en 2003 (RCD, MLC, RCD/K-ML…) après avoir pris le pouvoir en 2001, l’organisation des premières élections générales et pluralistes en 2006, puis le cycle de 2011, sa posture après la perte de contrôle en 2021 démontre le contraire. Même avant 2019, « le père de la démocratie congolaise » avait montré qu’il n’avait pas quitté le Palais de la Nation de son plein gré. Les manifestations réprimées dans le sang – en janvier 2015 (au moins 42 morts), septembre 2016 (17 morts), décembre 2017 et février 2018 – témoignaient déjà d’une volonté farouche de s’accrocher au pouvoir. Son choix de Shadary comme dauphin en 2018, un homme controversé, trahissait une tentative désespérée de garder la mainmise sur le jeu politique.

Aujourd’hui, à 53 ans, Kabila qualifie l’alternance et son soutien à Tshisekedi d’« erreur de la vie », ajoutant qu’il est « plus fort maintenant grâce à ces erreurs ». Cette confession, glissée dans une interview récente, révèle un homme qui n’a jamais digéré son départ. Sa défense implicite du M23, ses liens présumés avec l’AFC et ses critiques publiques contre Tshisekedi dessinent une ambition claire : reprendre le pouvoir, d’une façon ou d’une autre. Le démocrate tant vanté par ses partisans n’est plus qu’un mirage, remplacé par un stratège prêt à plonger la RDC dans le chaos pour assouvir ses desseins. Face à l’agression rwandaise et aux troubles dans l’est, son silence complice – voire sa participation active – achève de déconstruire ce mythe. À 53 ans, Joseph Kabila tient à revenir, à tout prix !

Heshima

Continue Reading

NOUS SOMMES AUSSI SUR FACEBOOK

Trending

You cannot copy content of this page

WeCreativez WhatsApp Support
Notre rédaction est là pour répondre à toutes vos préoccupations. N'hésitez pas !
👋Bonjour, comment puis-je vous aider ?