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Lancement de la campagne agricole en RDC : une gesticulation de plus ?

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Le Vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, sécurité, décentralisation et affaires coutumières, Jacquemain Shabani, ainsi que son collègue ministre de l’Agriculture et sécurité alimentaire, Grégoire Mutshail, ont lancé le 17 octobre la campagne agricole 2024-2025. Cet événement vise à contribuer à la diversification de l’économie et à améliorer les conditions de vie des Congolais. Cependant, pour certains, cette initiative est perçue comme une politique « superficielle » et dépourvue de lendemain.

Environ 5 millions de semences, des tracteurs, des pesticides, des masques de protection, des fertilisants, des imperméables, des boutures de manioc, ainsi que des motos et des vélos ont été distribués dans les différentes provinces de la République Démocratique du Congo (RDC). Grégoire Mutshail a souligné que dix provinces avaient déjà bénéficié d’un approvisionnement anticipé en raison des besoins urgents dans certains bassins de production.

Parmi les contributions notables figurent 2 000 sacs d’engrais NPK et d’urée pour la province de l’Équateur, ainsi que 2 000 sacs d’engrais et 500 kg de semences pour la province du Kasaï. En outre, 1 000 kits comprenant 26 outils et matériels agricoles, ainsi que divers intrants, ont été distribués. L’appui au labour et au hersage a été prévu sur 100 hectares pour la production de piments, au bénéfice de l’Association des femmes productrices et de l’Association des maraîchers de Kingabwa et de N’djili SECOMAF à Kinshasa.

Concernant les semences, le ministre a précisé qu’un lot de 5 085 000 variétés avait été commandé et réparti dans les 26 provinces. De plus, 58 800 litres de pesticides, accompagnés de pulvérisateurs et d’équipements de protection tels que des imperméables et des masques, ainsi que 400 tonnes de fertilisants minéraux, ont été mis à disposition. Avec ces matériels, le ministère ambitionne d’aménager au moins 60 000 hectares de cultures à travers la République, soit entre 2 000 et 3 000 hectares par province.

Une gesticulation de plus ?

Pour certains Congolais, cette initiative ne semble pas suffisamment approfondie. Beni Lukombo, ingénieur agronome, déclare : « C’est une gesticulation de plus. Une campagne sans lendemain. » Il critique le manque de réflexion sur le choix des cultures en fonction du calendrier agricole, l’absence de techniques de rotation des cultures pour maintenir la fertilité des sols, ainsi que la planification des irrigations en lien avec les prévisions météorologiques. Selon lui, ces aspects cruciaux n’ont pas été intégrés de manière adéquate.

Christian Nyamabo, analyste en politique et développement, souligne un autre problème : le manque d’entretien des tracteurs agricoles. « En RDC, un tracteur ne reste opérationnel qu’une seule saison agricole, principalement à cause du manque d’entretien et de l’indisponibilité des pièces de rechange, qu’elles soient pneumatiques ou mécaniques », a-t-il déclaré sur son compte X. Il rappelle que la distribution d’intrants agricoles par le gouvernement, en partenariat avec divers acteurs internationaux, n’est pas une nouveauté. « Toutes les initiatives précédentes ont été des promesses non tenues, comparables à des montagnes accouchant d’une souris. Notre agriculture a besoin de programmes ciblés et adaptés, plutôt que de mesures superficielles qui relèvent davantage du marketing politique que d’un véritable soutien au secteur », a-t-il ajouté. Il déplore que ces initiatives se contentent de « disperser de manière inefficace les maigres ressources publiques. »

Le ministre de l’Agriculture a tenté de rassurer en affirmant qu’un suivi des intrants et semences distribués à travers le pays serait mis en place pour garantir l’efficacité de la production agricole. Grégoire Mutshail a déclaré que l’aménagement de près de 60 000 hectares de cultures constituait un défi pour son ministère. En d’autres termes, ces terres ne sont pas encore prêtes à être cultivées au moment du lancement de cette campagne agricole.

Heshima

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RDC : un trésor de plus de 24 000 milliards de dollars qui attend toujours ses investisseurs

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La République démocratique du Congo (RDC) possède un potentiel économique qui donne le vertige : ses réserves de minerais critiques sont estimées à 24 000 milliards de dollars selon un récent rapport de la Banque mondiale. Premier producteur mondial de cobalt, regorgeant de cuivre, d’or, de diamants et de terres rares essentielles à la transition énergétique, le pays dispose d’atouts considérables pour devenir une puissance économique africaine. Pourtant, cette richesse extraordinaire contraste cruellement avec la réalité quotidienne des Congolais, dont plus de 70% vivent avec moins de 2 dollars par jour.

« Nous marchons littéralement sur des trésors, mais nos enfants n’ont pas d’écoles décentes et nos hôpitaux manquent de tout », confie Jeanne Mabika, commerçante à Kinshasa. « Comment expliquer ce paradoxe sinon par la corruption qui gangrène notre pays à tous les niveaux ? »

Ce paradoxe s’explique en grande partie par un climat des affaires défavorable qui dissuade les investisseurs privés. Selon l’Indice de Perception de la Corruption (IPC) 2023 de Transparency International, la RDC se maintient à un score de 20/100, la classant 162ᵉ sur 180 pays. Bien qu’il s’agisse d’une légère amélioration par rapport à 2022 (166ᵉ), cette stagnation confirme que la corruption reste endémique et structurelle, freinant le développement économique et décourageant les investissements.

Une bureaucratie paralysante

Le système judiciaire inefficace, la bureaucratie excessive, le faible accès au crédit et l’instabilité politique constituent les principales entraves au développement du secteur privé en RDC. La Banque africaine de développement (BAD) a identifié ces contraintes lors d’un atelier organisé à Kinshasa, soulignant également le déficit en infrastructures et une fiscalité complexe et peu transparente.

« Pour obtenir un simple permis d’exploitation, j’ai dû verser des pots-de-vin à sept fonctionnaires différents et attendre huit mois », témoigne Pascal Kilapi, entrepreneur dans le secteur agricole à Lubumbashi. « Comment voulez-vous développer une activité rentable dans ces conditions ? Les tracasseries administratives découragent même les plus motivés d’entre nous. »

Les affaires de corruption touchent régulièrement les plus hautes sphères de l’État. En juin 2025, le ministre de la Justice, Constant Mutamba, a été contraint de démissionner suite à des accusations de tentative de détournement d’argent public dans un projet de construction d’une prison à Kisangani, pour un montant d’environ 19 millions de dollars. Cette affaire n’est que la partie émergée de l’iceberg. En 2020, Vital Kamerhe, alors directeur de cabinet du président Félix Tshisekedi, avait été condamné pour avoir détourné près de 50 millions de dollars destinés à un projet de logement social, avant d’être acquitté deux ans plus tard et de réintégrer le gouvernement.

L’impact dévastateur sur l’économie et la population

La corruption systémique a des conséquences directes sur le développement économique du pays. Elle détourne les ressources qui devraient servir à construire des infrastructures essentielles, à améliorer les services publics et à créer des emplois. Elle renforce également les inégalités sociales et nourrit les conflits, notamment dans l’Est du pays.

L’économiste congolais Emmanuel Patela, analyse : « La corruption en RDC n’est pas un simple dysfonctionnement, c’est un système parallèle de gouvernance qui capte les ressources au profit d’une minorité. Les investisseurs étrangers hésitent à s’engager dans un environnement où les règles du jeu sont constamment faussées et où la sécurité juridique est inexistante. »

Cette situation explique pourquoi, malgré son potentiel extraordinaire, la RDC ne figure pas parmi les dix pays africains attirant le plus d’investissements privés. L’Afrique du Sud (5,07 milliards de dollars), le Nigeria (3,96 milliards) et l’Égypte (3,37 milliards) occupent le podium, tandis que des pays aux ressources bien moindres comme la Côte d’Ivoire (2,18 milliards) ou le Kenya (1,7 milliard) surpassent largement la RDC en termes d’attractivité pour les capitaux privés.

Des réformes prometteuses mais insuffisantes

Face à ce constat alarmant, le gouvernement congolais a entrepris plusieurs réformes pour améliorer le climat des affaires. Le 15 novembre 2024, sous l’égide de l’Agence nationale pour la promotion des investissements (ANAPI), une feuille de route des mesures et réformes gouvernementales a été validée lors d’une réunion du comité de pilotage présidée par le Vice-Premier ministre, ministre du Plan, Guylain Nyembo.

Cette feuille de route comprend notamment la digitalisation des procédures administratives et fiscales, la réduction des délais de traitement des actes administratifs et la simplification du cadre réglementaire. Des ateliers de formation ont également été organisés dans plusieurs provinces, comme au Kongo-Central en février 2025, pour outiller les cellules provinciales du climat des affaires.

« Ces initiatives sont encourageantes. Nous félicitons le gouvernement pour les progrès réalisés. La Feuille de route est un atout que nous pourrons promouvoir auprès de nos entrepreneurs et gouvernements », a déclaré Jennifer Imperator, Chargée d’Affaires de l’Ambassade des Pays-Bas.

Cependant, ces réformes se heurtent à la résistance d’une administration habituée aux pratiques de corruption. « Malgré le volontarisme dont il fait preuve, le président Tshisekedi aura difficile à réaliser son engagement d’assainir l’environnement des affaires en RDC, avec une administration publique et un système judiciaire remplis de fonctionnaires et de magistrats qui baignent dans la corruption jusqu’à la moelle », analyse le politologue Isidore Kwandja Ngembo.

Les modèles inspirants : quand l’absence de ressources devient un atout

Pour sortir de cette impasse, la RDC pourrait s’inspirer de pays qui ont réussi à transformer leur économie malgré des ressources naturelles limitées, voire inexistantes. Ces exemples démontrent que la gouvernance, l’innovation et la vision stratégique peuvent largement compenser l’absence de richesses minières.

LeSingapour constitue l’exemple le plus frappant de réussite économique sans ressources naturelles. Totalement dépourvu de ressources naturelles et agricoles, ce petit pays est devenu l’une des économies les plus prospères au monde avec un PIB par habitant d’environ 73 000 dollars, se classant au 2ème rang mondial derrière le Luxembourg.

« Singapour est sans doute la plus grande réussite économique d’après-guerre, dans un contexte au départ hostile », souligne le magazine d’actualité L’Express. Quand Lee Kuan Yew est devenu président en 1965, l’île accueillait une population hétérogène sans accès aux ressources naturelles. Le modèle économique singapourien repose sur une forte ouverture au commerce international et aux investissements étrangers, avec un environnement des affaires et une fiscalité très attractive.

La stratégie économique proactive du gouvernement a organisé la montée en gamme de l’industrie et des services en attirant le commerce (égal à environ trois fois le PIB), les investissements étrangers (quatre fois le PIB en stock d’IDE) et la main d’œuvre étrangère (un tiers de la population active). Près de la moitié (46%) des sièges régionaux asiatiques se trouvent aujourd’hui à Singapour.

La Corée du Sud offre un autre exemple remarquable de transformation économique. Selon les statistiques, le PNB par habitant est resté presque stagnant entre 1953 et 1960 (de 56 à 60 dollars), alors que la Corée du Nord avait quasiment quadruplé le sien sur la même période.

Le modèle de développement sud-coréen s’est basé sur des liens étroits entre le gouvernement et les milieux d’affaires, incluant le crédit dirigé, les restrictions aux importations, le financement de certaines industries, et un gros effort de travail. Le gouvernement a favorisé l’importation des matières premières et de la technologie aux dépens des biens de consommation et a encouragé l’épargne et l’investissement au détriment de la consommation.

Aujourd’hui, la Corée du Sud tient sa force économique de son industrie manufacturière, qui représente 25% du PIB coréen, soit l’une des parts les plus importantes parmi les pays développés. Le pays est devenu le 4ème marché mondial de la robotique, avec des ventes qui devraient atteindre 4,5 milliards d’euros en 2024.

Le Vietnam est aussi un autre exemple qui illustre parfaitement comment un pays peut fonder son développement sur l’ouverture économique. Avec une croissance moyenne supérieure à 6% sur les vingt dernières années, et un PIB par tête qui dépasse maintenant celui des Philippines et de l’Indonésie, le Vietnam se place parmi les économies les plus dynamiques d’Asie du Sud-Est.

Le Vietnam a fondé son développement sur l’ouverture de sa balance des paiements, par le biais du commerce extérieur et des investissements directs étrangers (IDE). Les investisseurs étrangers plébiscitent surtout la stabilité politique du pays, son degré d’ouverture aux IDE, son appartenance à un réseau dense d’accords de libre-échange et le coût réduit de sa main d’œuvre assez bien formée.

Le cas le plus fascinant de transformation est sans doute économique est sans doute l’Irlande. Jusqu’aux années 1980, l’Irlande était l’un des pays les moins développés d’Europe occidentale, avec une économie largement basée sur l’agriculture, avec une majorité d’exploitation familiale, un taux de chômage élevé et une émigration massive.

Le « Programme de redressement national » lancé en 1987 visait à réduire le déficit budgétaire par des coupes dans les dépenses publiques, une modération salariale et des réformes fiscales. L’un des principaux moteurs de la croissance économique irlandaise a été l’attraction d’investissements étrangers, notamment des entreprises américaines, grâce à des taux d’imposition sur les sociétés très bas, une main-d’œuvre anglophone et bien éduquée, ainsi qu’un accès privilégié au marché européen.

Aujourd’hui, la croissance du PIB réel devrait s’établir à 3,7% en 2025, et l’Irlande a accompli des progrès impressionnants en matière de résultats économiques et de qualité de niveau de vie parmi les meilleurs.

L’exemple de la République d’Estonie montre comment la transformation numérique peut servir de catalyseur au développement économique. Ce petit pays d’environ 1,3 million d’habitants a fait des progrès incroyables dans sa transformation numérique, cultivant un environnement favorable à l’innovation qui a abouti à la création de dix entreprises technologiques d’un milliard de dollars au point d’être qualifiée par le Forum économique mondial de « pays le plus entrepreneurial d’Europe ». La première version des principes de la politique estonienne de l’information a été établie en 1994, autorisant l’allocation d’un pourcentage du PIB spécifiquement aux technologies de l’information. Elle a été la première nation à offrir la citoyenneté numérique, permettant aux entrepreneurs du monde entier de créer et de gérer des entreprises en ligne. En 2023, plus de 80% des services gouvernementaux sont accessibles en ligne, et le payement des impôts se fait en quelques minutes grâce à une interface simplifiée.

Le cas particulier du Botswana : la bonne gouvernance des ressources

Bien que le Botswana dispose de ressources naturelles (principalement des diamants), son modèle de développement offre des leçons précieuses sur la bonne gouvernance. C’est l’un des rares pays africains à avoir connu une transformation économique impressionnante depuis son indépendance en 1966.

Contrairement à d’autres nations riches en matières premières mais freinées par la mauvaise gouvernance comme la RDC, le Botswana a su éviter « la malédiction des ressources naturelles ». Toutes les mines de diamants du Botswana sont exploitées dans le cadre d’un accord de licence avec le gouvernement, en vertu duquel 80% des recettes liées aux diamants sont réinjectées dans l’économie du pays.

Le pays affiche une croissance soutenue depuis son indépendance, atteignant parfois plus de 10% par an grâce à une politique budgétaire rigoureuse qui limite le gaspillage des ressources publiques, des investissements dans les infrastructures et une gestion transparente des revenus miniers évitant la fuite des capitaux.

Les réformes indispensables pour transformer l’économie congolaise

Pour renforcer la confiance des investisseurs et libérer le potentiel économique de la RDC, plusieurs réformes structurelles s’imposent. Lors du Annual Investment Meeting Congress 2025 à Abu Dhabi, la délégation gouvernementale congolaise, conduite par la Première ministre Judith Suminwa Tuluka, a présenté une stratégie de diversification économique articulée autour de trois secteurs prioritaires : les infrastructures et BTP, l’énergie et l’industrialisation, et le numérique.

Parmi les mesures déjà mises en œuvre figurent la réduction des délais d’enregistrement des entreprises à 72 heures et l’adoption d’un nouveau code des investissements. Ces réformes s’accompagnent d’incitations fiscales pour les secteurs prioritaires et d’un programme ambitieux de développement des infrastructures.

« Le pays doit absolument renforcer son système judiciaire pour garantir la sécurité juridique des investissements que recherche tout investisseur », souligne Me Bernardine Kongolo, avocate spécialisée en droit des affaires. « Sans un État de droit fonctionnel, toutes les autres réformes resteront lettre morte. Les investisseurs ont besoin de savoir que leurs contrats seront respectés et que les différends seront réglés de manière équitable sans interférences politiques. »

La lutte contre la corruption doit également s’accompagner d’une sensibilisation et d’une éducation de la jeunesse. « Il faut sensibiliser et éduquer la jeunesse congolaise aux méfaits de la corruption », plaide Saidi Mugunda, entrepreneur agricole à Goma. « Dans certains secteurs, les entrepreneurs s’approvisionnent auprès de sources peu sûres et corrompent les agents du service public de certification pour obtenir des autorisations malgré la qualité douteuse de leurs produits. »

Les bénéfices potentiels pour l’État et la population

Si la RDC parvenait à améliorer significativement son climat des affaires et à attirer davantage d’investissements privés, les bénéfices seraient considérables tant pour l’État que pour la population. Selon Nicolas Kazadi, ancien ministre des Finances, en termes d’opportunités d’affaires, il y a très peu de pays en Afrique et dans le monde qui ont autant d’opportunités d’investissement que la RDC.

L’afflux de capitaux privés permettrait de développer les infrastructures essentielles, de créer des emplois formels et de diversifier l’économie, actuellement trop dépendante du secteur minier. La Société américaine de financement du développement international (DFC) pourrait plus que doubler ses investissements dans le secteur minier en RDC pour atteindre environ 1,4 milliard de dollars, contre 750 millions de dollars investis en 2023.

« Nous nous appuyons sur nos propres financements, non seulement dans le secteur minier mais aussi dans des pays comme la RDC, dans l’espoir de pouvoir réduire les risques et attirer davantage de capitaux privés », a déclaré Nisha Biswal, directrice générale adjointe de la DFC.

La diversification économique est cruciale pour réduire la vulnérabilité du pays aux fluctuations des cours des matières premières. Comme souligné par l’ancien premier Ministre Jean-Michel Sama Lukonde, l’effort du gouvernement pour améliorer non seulement notre climat des affaires, mais surtout notre potentiel d’investissement va dans le sens de répondre à une question sociale du plus haut niveau, celle de la création des emplois et de la création des richesses.

Un tournant décisif pour l’avenir du Congo

La RDC se trouve à un moment charnière de son histoire. Avec ses ressources naturelles exceptionnelles et une population jeune et dynamique, le pays possède tous les atouts pour devenir une puissance économique africaine. Cependant, la corruption endémique et un climat des affaires défavorable continuent de freiner son développement.

Les réformes engagées par le gouvernement vont dans la bonne direction, mais leur mise en œuvre effective nécessitera une volonté politique très forte et un changement profond des mentalités. Comme l’affirmait Paul Nsapu, alors vice-président de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), « la corruption doit être érigée en crime économique, et crime contre l’humanité. Si le président Tshisekedi ose combattre cette corruption, nous serons là pour le soutenir ».

L’exemple de pays comme Singapour, la Corée du Sud, le Vietnam, l’Irlande ou l’Estonie montre qu’une transformation rapide est possible avec des politiques appropriées et une gouvernance transparente. Ces nations ont prouvé que l’absence de ressources naturelles peut même constituer un avantage, forçant les dirigeants à miser sur l’innovation, l’éducation et la création de valeur ajoutée.

Pour la RDC, l’enjeu est désormais de transformer ses immenses richesses naturelles en prospérité partagée pour l’ensemble de sa population. Le chemin sera long et semé d’embûches, mais l’avenir du Congo en dépend.

« Notre pays est comme un géant endormi », conclut Jean Mutomb, professeur d’économie. « Il est temps de le réveiller en libérant les énergies entrepreneuriales et en mettant fin à la corruption qui nous paralyse. Nos enfants méritent mieux que la pauvreté au milieu de tant de richesses. »

Heshima Magazine

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Isolé à Doha et à Washington : Kabila attend la carte de la CENCO-ECC

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L’ancien président de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, ne semble plus avoir les cartes en main. Revenu au pays via Goma, ville congolaise contrôlée par les rebelles du Mouvement du 23 mars (AFC/M23), soutenus par le Rwanda, l’ancien président s’est retrouvé isolé dans cette ville volcanique alors que Kinshasa et Kigali sont en passe de signer un accord de paix à Washington, aux États-Unis. Pendant ce temps, à Doha, capitale du Qatar, où se déroulent les discussions entre le gouvernement congolais et les rebelles, Kabila reste absent. Son entourage espère désormais jouer la carte du dialogue interne initié par les chefs religieux de la CENCO et de l’ECC.

Joseph Kabila est toujours à Goma. Après avoir consulté les rebelles de l’Alliance Fleuve Congo (AFC) plateforme dans laquelle se trouve le M23, puis la société civile locale et des chefs coutumiers de la zone environnante, Joseph Kabila n’a plus entrepris d’actions visibles à Goma. Les négociations officielles qui se déroulent aux États-Unis et au Qatar continuent de se dérouler sans lui. Pendant que Kinshasa se rapproche d’un accord minier avec Washington et d’un accord de paix avec Kigali, l’ancien président a dépêché son émissaire à Washington DC pour tenter de porter sa voix.

Envoyé dans la capitale américaine, son ancien conseiller diplomatique, Barnabé Kikaya Bin Karubi, a déclaré au journaliste Stanis Bujakera que son camp politique était parvenu à susciter des réserves parmi les facilitateurs de ces discussions. « Résoudre la crise congolaise par un simple accord avec le Rwanda serait une erreur. Il faut à tout prix aborder la question congolaise, interne, par un dialogue pacifique. Monsieur Kabila, c’est un homme de paix, un homme de dialogue », a déclaré Barnabé Kikaya.

Pour l’heure, la vision de la crise défendue par Joseph Kabila n’a pas été prise en compte par le gouvernement congolais. Kinshasa l’accuse d’avoir refusé de participer aux dernières élections (en 2023) pour « préparer une insurrection » avec la rébellion de l’AFC coordonnée par l’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Corneille Nangaa. D’où son isolation par le gouvernement congolais dans les discussions en cours. Interrogée en mars dernier en Afrique du Sud sur la participation de l’ancien chef de l’État au processus de paix en cours, la ministre d’État aux Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba Wagner avait répondu qu’aucun rôle n’avait été prévu pour Joseph Kabila dans les discussions de paix.

La CENCO-ECC reçue par Tshisekedi, Kabila attend ce dialogue

Le samedi 21 juin 2025, le président de la République, Félix Tshisekedi, a reçu la délégation des chefs religieux de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et de l’Église du Christ au Congo (ECC). Après avoir longtemps attendu cette audience, ces hommes d’église lui ont remis le rapport de leur mission relative au Pacte social, qui s’inscrit dans le cadre de la recherche de la paix dans la région de Grands Lacs, en général, et en RDC, en particulier.

Ce projet évoque un dialogue national inclusif entre tous les acteurs de la crise, une initiative qui a suscité la polémique, notamment en raison des soupçons de partialité des évêques dans cette crise. Ce rapport fait état de la mission effectuée tant au pays qu’à l’étranger à l’initiative des évêques de ces deux confessions religieuses. Félix Tshisekedi a mis en place une équipe de travail pour réfléchir autour de ce rapport. Ce dialogue – s’il se tient – pourrait être le dernier rempart pour Joseph Kabila afin d’influencer à nouveau le cours de la politique congolaise.

Kabila supporte mal sa marginalisation sur la scène politique, alors qu’il avait joué un rôle central dans l’alternance pacifique au pouvoir en 2019. « Toute tentative de résolution de cette crise qui ignorerait ses causes profondes – en premier lieu la gouvernance actuelle de la RDC – ne pourra pas apporter une paix durable », avait écrit Joseph Kabila dans une tribune publiée par Sunday Times, un journal sud-africain.

Pour lui, les innombrables violations de la constitution ne prendront pas fin « après une simple négociation entre la RDC et le Rwanda ou une défaite militaire du M23 ». Après avoir été exclu des processus de Doha et de Washington, Joseph Kabila espère se rattraper avec l’initiative de la CENCO-ECC qui pourrait inclure plusieurs acteurs politiques. « Il faut qu’il y ait une structure qui organise ce dialogue. Les évêques ont essayé. Le président Kabila, dans son discours, a applaudi cette initiative », a déclaré Kikaya Bin Karubi, faisant allusion aux consultations menées ces trois derniers mois par les Églises catholique et protestante en RDC et à l’étranger. « Si l’initiative des évêques aboutissait demain, vous verrez M. Kabila autour de la table », a-t-il annoncé.

Kabila a-t-il été l’objet de pression de Kigali ?

Étant passé par le Rwanda avant d’atteindre Goma – quartier général des rebelles – Joseph Kabila avait fait de la fin de la « tyrannie » de Félix Tshisekedi son objectif numéro un lors de son allocution à la nation congolaise le 23 mai 2025. Ayant passé par le Rwanda avant d’atteindre Goma, l’ancien « raïs » semblait peut-être compter sur ce pays agresseur de la RDC pour réaliser son plan à 12 recommandations. Mais la perception du Rwanda de l’action de Joseph Kabila semble tout autre. Selon François Soudan, rédacteur en chef de Jeune Afrique, l’ancien président semble « bien décidé à obtenir un changement de régime à Kinshasa », alors que ses alliés sont dans une « logique de contrôle des deux Kivu comme zone tampon sécuritaire pour le Rwanda, et comme zone d’influence communautaire pour le M23 ». D’après François Soudan, « dans le jeu de Kigali, Joseph Kabila apparaît comme une carte pour faire pression sur Félix Tshisekedi, rien de plus. »

Selon Jeune Afrique, Félix Tshisekedi « est en train de compenser, sur les plans diplomatique et politique, les revers de son armée sur le plan militaire ». Outre l’obtention de la résolution de l’ONU demandant le retrait du M23, le chef de l’État congolais a pu se présenter en rassembleur par le biais d’une « accolade spectaculaire avec Martin Fayulu », pourtant l’un de ses opposants les plus acharnés. Cette ouverture montrée avec Martin Fayulu peut amener à décrisper les rivalités au sein de la classe politique et faire le lit à un dialogue politique interne. Dans ces discussions, Joseph Kabila aurait pu avoir une place de choix compte tenu de son statut d’ancien président de la République et de sénateur à vie. Mais son possible soutien à la rébellion, qui a entraîné la levée de ses immunités au Sénat, lui nuit actuellement. Dans un tel contexte, la carte du dialogue de la CENCO-ECC reste sa seule planche de salut, sauf un coup de théâtre…

Heshima

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En RDC, l’accès à l’électricité reste un luxe malgré le potentiel du pays

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Malgré son incroyable potentiel hydrique, la République démocratique du Congo (RDC) fait partie des pays africains qui ont un faible accès à l’électricité. Selon les chiffres de la Banque mondiale, moins de 22% de la population congolaise a accès à cette énergie, avec des disparités importantes entre zones urbaines (35%) et rurales (moins de 1%). Des solutions envisagées pour combler ce déficit traînent encore…

La RDC est à la traîne en matière d’accès à l’électricité sur le continent africain. Le pays représente un des taux d’électrification les plus bas d’Afrique subsaharienne, avec seulement 21,5% en 2022, comparé à une moyenne de 51,5% dans la région. Ce taux de 21,5 % est jugé exagéré par d’autres experts locaux qui nivèlent à 9% la desserte nationale en électricité. Dans ces chiffres, la ville de Kinshasa seule a 50% et moins de 1% pour le milieu rural. Le gouvernement congolais essaie de combler ce déficit mais les solutions proposées peinent à porter leurs fruits. La Banque mondiale travaille avec la RDC pour améliorer cet accès à l’électricité et prévoit d’augmenter le taux d’électrification à 62% d’ici 2030, avec un taux de croissance annuel de 6%.

Le potentiel congolais et ses paradoxes

La RDC reste un grand paradoxe pour ceux qui l’observent au regard du potentiel naturel que possède le pays. Situé au cœur du continent africain, la RDC compte plus de 50% des réserves d’eau douce de l’Afrique. Le pays est traversé par des cours d’eau avec des chutes et des rapides propices à la construction des barrages hydroélectriques. Mais le pays de Lumumba reste l’un des derniers pays dans la région africaine en termes d’électrification. Si des efforts ont été fournis ces dernières années, ils restent bien marginaux par rapport au potentiel et aux possibilités existantes. « J’ai demandé que l’accès à l’électricité soit inscrit comme la première priorité économique de mon quinquennat », avait rappelé Félix Tshisekedi à l’ouverture du premier forum national sur l‘électricité en RDC. Mais lors du deuxième forum, en août 2024, plus de 300 participants, réunis pour réfléchir à l’accès à l’électricité en RDC, dix ans après la promulgation de la loi N°14/011 du 17 juin 2014 relative au secteur de l’électricité, ont dressé un bilan largement négatif.

Malgré la libéralisation du secteur ainsi que le cadre légal et institutionnel mis en place, les avancées semblent maigres. Ces participants ont même estimé que le pays « naviguait à vue, sans planification rigoureuse ». La loi n’a pas permis l’essor du secteur de l’électricité en RDC. « Depuis sa promulgation en 2014, le taux de desserte a régressé, passant de 9 % à 7,14 %, au lieu de progresser », d’après les participants venus de toutes les provinces du pays. Quand une turbine tombe longtemps en panne ou un poste électrique est hors service, les statistiques aussi bougent.

Dans le diagnostic, des experts relèvent aussi plusieurs facteurs qui contribuent à cette situation de déficit énergétique. Il y a notamment des infrastructures vieillissantes, le manque d’investissements, et des défis liés à la distribution et à la gestion du réseau. Produire de l’énergie est un fait, mais l’acheminer dans des postes puis assurer sa distribution constitue aussi un autre problème. Par exemple, le barrage de Zongo, au Kongo Central, produit de l’électricité qui n’avait jamais été distribuée faute d’un réseau de transport.

Le gouvernement veut connecter 14 villes

En mars 2025, le ministre des Ressources hydrauliques et de l’électricité Teddy Lwamba avait lancé le projet d’Accès, de Gouvernance et de Réforme des Secteurs de l’Électricité et de l’Eau (AGREE). Financé à 600 millions de dollars par la Banque mondiale, ce projet vise à accroître l’accès à l’électricité et à l’eau potable à base d’énergie renouvelable dans 14 villes ciblées dans les zones d’intervention de la Banque mondiale. Il s’agit des villes de Kinshasa, Kikwit, Bandundu, Tshikapa, Kananga, Mbuji-Mayi, Mwene-Ditu, Kabinda, Bukavu, Goma, Butembo, Beni, Bunia et Boma. Ce projet pourrait renforcer la fourniture de l’électricité dans les milieux urbains.

Réduire le déficit entre milieu urbain et rural

Dans le cadre de la réduction de la fracture entre le milieu urbain et rural, Félix Tshisekedi avait créé l’Agence nationale pour la promotion et le suivi de l’électrification rurale (ANSER). Cette structure est impliquée dans l’électrification de quelques entités décentralisées telles que la ville de Lodja, dans la province du Sankuru. Dans cette entité, l’ANSER travaille à la construction d’une centrale solaire photovoltaïque de 400 kWc, dans le cadre de son programme de développement local et de projets d’électrification rurale.

Dans ce projet, les agents de l’ANSER ont procédé à l’électrification de Lumumbaville, autrefois appelé Wembonyama, le village natal de Patrice Emery Lumumba, le premier Premier ministre du Congo indépendant. « Nous avons connecté la maison familiale de Patrice Lumumba. C’était la première maison à être connectée à ce réseau électrique. C’est tout un symbole », a déclaré un ingénieur de ce service déployé dans cette partie du pays. En dehors de Lumumbaville, plusieurs entités de cet espace continuent à souffrir d’un manque d’électricité, notamment à Kabinda, chef-lieu de la province de Lomami et dans plusieurs territoires de l’espace Kasaï tels que Mueka, Lwiza, Lubefu et Lwebo où l’électricité demeure encore un luxe.

Pour essayer de changer la donne, l’ANSER mène des projets pilotes d’électrification dans ces milieux de l’espace Kasaï. Ces projets, tel que celui mené à Lodja, pourraient servir de modèle pour d’autres régions du pays. Mais parallèlement à ces projets de mini-barrages solaires, la construction de la centrale hydroélectrique de Katende, dans le Kasaï Central, pourrait booster l’approvisionnement en électricité de la région. Les travaux sont en cours et la centrale devrait fournir 32 mégawatts dans sa deuxième phase et 16 mégawatts dans la troisième.

Dans les Kivu, le défi reste le même

Comme d’autres régions du pays, les Nord et le Sud-Kivu n’échappent pas aux difficultés d’accès à l’électricité. Le taux d’électrification reste très faible, mais des projets de centrales solaires, hydroélectriques et à gaz méthane sont en développement pour augmenter l’accès à l’électricité. Certaines villes du Kivu telles que Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, est alimentée en grande partie par des sociétés privées, Virunga Energie alimente une bonne partie de la ville. Les centrales hydroélectriques existantes, comme Ruzizi 1 et 2, souffrent parfois de la baisse du niveau d’eau du lac Kivu. La Société Nationale d’Électricité (SNEL) est le principal opérateur, mais elle fait face à des difficultés de production et de distribution.

D’autres projets sont explorés pour augmenter la production avec une ligne à moyenne tension reliant Kamanyola à Luvungi, puis vers Uvira et Fizi dans la province du Sud-Kivu. L’exploitation du gaz méthane du lac Kivu pour produire de l’électricité reste également une solution potentielle à la faible production hydroélectrique pour cette province.

Projet Inga 3, un espoir pour le pays

Conçu pour la première fois dans les années 1920, le projet Grand Inga compte la construction de huit barrages sur le fleuve Congo. Lancé à la fin des années 50, ce projet pharaonique a connu seulement l’inauguration de deux barrages, l’un en 1972 et l’autre en 1982. Inga est à l’étude depuis les années 1990. Longtemps mis en suspens, ce projet du barrage a été relancé. La Banque mondiale a annoncé début juin 2025 un premier financement de 250 millions de dollars pour permettre de réaliser les études préalables de faisabilité ainsi que les différentes projections. Objectif : passer de 21% de taux d’électrification de la RDC à plus de 60% d’ici à 2030. Cette enveloppe pourra atteindre jusqu’à plus de 1 milliard de dollars. La production énergétique projetée pourrait atteindre entre 2 et 11 gigawatts, suffisant pour alimenter le Kongo-Central, Kinshasa, et même exporter vers des pays comme l’Afrique du Sud, selon Radio Okapi.

D’après le média Africanews, la capacité de production d’Inga 3 devrait être l‘équivalent de la production de trois réacteurs nucléaires de troisième génération. Il y a plus d’une année, la RDC avait demandé à des consortiums rivaux, l’un dirigé par la société chinoise Three Gorges Corporation et l’autre regroupée sous la bannière de la société de construction espagnole ACS, de s’associer et de présenter une offre commune pour financer ce barrage prometteur. Mais ce projet semblait encore piétiner jusqu’à l’annonce du financement de la Banque mondiale.

Face à son potentiel extraordinaire, la RDC reste un géant énergétique endormi. La réalité est marquée par une injustice énergétique profonde. Tant que les réformes structurelles ne seront pas accélérées, et que l’accès ne sera pas démocratisé au-delà des grandes villes, le faible taux d’électrification continuera d’entraver le progrès social et économique du pays.

Heshima

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