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RDC : un bilan politique en demi-teinte en 2024
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La redaction
L’année 2024 a été marquée par plusieurs événements socio-politiques en République Démocratique du Congo (RDC). En termes de gouvernance, le bilan semble mitigé. En économie, l’inflation a régné en maître. Sur le plan de la sécurité, l’Est du pays n’a pas toujours retrouvé la paix, ce qui a annihilé les efforts réalisés dans d’autres secteurs.
Dans la première moitié de l’année, le pays a d’abord connu un processus complexe d’installation de nouvelles institutions. Après les élections présidentielle et législatives de décembre 2023, l’année 2024 avait démarré par la mise en place de ces institutions issues des urnes. Le président de la République, Félix Tshisekedi, réélu avec 73 % des voix, selon les résultats définitifs proclamés par la Cour Constitutionnelle, a été investi le 20 janvier 2024. Le Parlement, également renouvelé, a élu de nouveaux dirigeants. Vital Kamerhe a retrouvé le perchoir du bureau de l’Assemblée nationale, poste qu’il avait occupé de 2006 à 2009 sous la présidence de l’ancien chef de l’État, Joseph Kabila. Ce renouvellement des institutions s’est poursuivi avec l’élection des gouverneurs de provinces. En août, Jean-Michel Sama Lukonde, après avoir quitté la Primature, a pris la tête du Sénat. Quant au gouvernement, un changement notable s’est opéré à la Primature. Judith Suminwa Tuluka, nommée le 1er avril, est devenue la première femme à occuper le poste de Premier ministre au pays. Son gouvernement a été investi par l’Assemblée nationale le 12 juin.
Un bilan mitigé
En 2024, l’installation des institutions a été lente, malgré l’écrasante majorité obtenue par l’Union sacrée lors des élections de 2023. Ce processus a pris la moitié de l’année 2024, érodant ainsi le temps d’action de Félix Tshisekedi et de son gouvernement. Lors de son investiture, le chef de l’État congolais avait présenté les grandes lignes de son second quinquennat, axé sur six engagements majeurs : la création de six millions d’emplois, la protection du pouvoir d’achat, l’amélioration de la sécurité, la diversification économique, l’accès aux services sociaux de base et l’efficacité des services publics. Pour l’année 2024, ces différents secteurs n’ont pas connu d’avancées majeures.
Protection du pouvoir d’achat
En 2024, comme bien avant, Félix Tshisekedi a fait face à une inflation galopante. Cette érosion de la monnaie nationale a absorbé des efforts économiques réalisés par le président de la République depuis son arrivée à la tête du pays. Parmi ces prouesses, il y a notamment l’accroissement du budget national, passant de 4 milliards à plus de 16 milliards de dollars. Lors de son discours bilan sur l’état de la nation en décembre, il a reconnu que l’inflation en 2024 a dépassé les prévisions. « Je reconnais cependant que l’inflation constitue une préoccupation réelle pour nos concitoyens. Elle a dépassé, au premier semestre, le seuil annuel prévu de 11,3 % », a noté Félix Tshisekedi.
Il a justifié cette situation notamment par la hausse des tarifs de transport, une hausse elle-même liée au rationnement des produits pétroliers, ainsi que l’augmentation du prix des denrées alimentaires et des boissons non alcoolisées. « Le franc congolais a également subi une dépréciation de 4,2 % par rapport au dollar américain depuis la fin décembre 2023, renchérissant le coût des biens importés et accentuant ainsi la pression inflationniste », a-t-il ajouté. Face à ce tableau, l’engagement pris dans son programme sur la protection du pouvoir d’achat des Congolais reste encore un mirage pour la majorité de la population. Pour faire face à la vie chère, due notamment à l’inflation, Félix Tshisekedi a rappelé l’instruction donnée à la Première ministre, Judith Suminwa, pour prendre des mesures sur la baisse des prix des biens de première nécessité afin d’inverser la tendance. Mais les Congolais ont passé les fêtes de fin d’année avec les prix des biens de consommation toujours en hausse. Les négociations avec les importateurs de ces produits n’ont pas abouti à la baisse des prix chez les consommateurs congolais.
Pas d’amélioration de la sécurité
La sécurité au pays a constitué un des problèmes majeurs en 2024. Le bilan dans ce secteur reste très préoccupante. Dans l’Est de la République, les offensives répétées du groupe armé M23, soutenu par le Rwanda, ont aggravé une situation humanitaire déjà désastreuse au Nord-Kivu. Cette insécurité a provoqué le déplacement de près de 7 millions de Congolais, dont la plupart vivent dans des conditions précaires, dans des camps de déplacés. La rencontre entre le président congolais, Félix Tshisekedi, et son homologue rwandais, Paul Kagame, qui avait suscité un espoir de paix, le 15 décembre, a été annulée. Le cessez-le-feu, en vigueur depuis le 4 août, n’est plus respecté par les rebelles qui continuent de bénéficier du soutien militaire de l’armée rwandaise. Au cours de la même année, ces rebelles ont élargi leur zone d’influence, prenant le contrôle d’une partie du territoire de Lubero et de Walikale, après Masisi, Rutshuru et Nyiragongo. Sur ce sujet, Félix Tshisekedi a souligné les efforts des Forces armées de la RDC (FARDC) ainsi que la mission militaire de la SADC (SAMIDRC) dans les efforts de rétablissement de la paix dans cette partie du territoire national. Malgré cette volonté, la RDC fait toujours face à des défis sécuritaires majeurs. L’état de siège dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu reste un sujet de controverse, bien que des efforts soient faits pour ramener la paix, comme en témoignent les visites fréquentes de la Première ministre, Judith Suminwa, dans ces zones.
Dans d’autres parties du pays, la sécurité n’a pas non plus été totale. À Kinshasa, le banditisme urbain a atteint des proportions inquiétantes. Une journaliste de la chaîne nationale a succombé à ses blessures après une violente agression de la part de présumés bandits appelés communément « Kuluna ». La tentative de coup d’État menée par Christian Malanga, en 2024, au Palais de la Nation, a aussi révélé des failles sécuritaires. Cette insécurité n’a pas épargné les villes de Lubumbashi et Kolwezi où la sécurité des personnes et de leurs biens n’a pas été totalement garantie, avec des vols à main armée à répétition.
Création d’emplois
Après avoir pris l’engagement de créer 6 millions d’emplois lors de la campagne électorale, Félix Tshisekedi a changé son langage lors de ses meetings devant les Congolais en provinces. À Tshikapa, chef-lieu de la province du Kasaï, le chef de l’État n’est pas allé par quatre chemins pour appeler les jeunes à se débrouiller pour créer des emplois. « Débrouillez-vous pour créer de l’emploi, l’État ne peut pas en donner à tout le monde », a-t-il balancé. Une phrase qui démontre la difficulté pour son gouvernement de créer les conditions propices à la création d’emplois afin d’atteindre le chiffre de 6 millions d’emplois promis aux Congolais.
Malgré ce défi majeur sur l’emploi des jeunes, Félix Tshisekedi note cependant « des progrès notables » réalisés par le pays. Il a vanté des réalisations économiques en dépit de ce contexte économique difficile. C’est notamment le cas de la construction de la Zone économique spéciale de Maluku, où une usine de fabrication de carreaux emploie plus de 1 000 Congolais et produit environ 50 000 mètres carrés de carreaux. Cela a permis d’arrêter l’importation de ce matériau de construction. Il a aussi évoqué le cas de l’usine de Pepsi qui produit à ce jour 1,2 million de bouteilles de boisson non alcoolisée. Ce qui renforce, selon lui, le concept de « made in RDC ». Il a aussi mis en avant la mine de zinc de Kipushi, dans le Haut-Katanga, qu’il a inaugurée récemment après plus de 30 ans d’arrêt. Cette mine a la capacité de produire 45 000 tonnes de zinc.
Accès aux services sociaux de base
Le gouvernement, sous la présidence de Félix Tshisekedi, a poursuivi ses efforts pour garantir la mise en œuvre du Programme de développement local des 145 territoires (PDL-145T). La mise en œuvre de ce projet a été ralentie notamment suite à l’effort de guerre, les agences habilitées pour l’exécution de ce projet n’ont plus reçu le reste des fonds pour le financement des travaux. Ce programme permet entre autres l’accès aux services sociaux de base, tels que la santé, l’administration et l’éducation, à travers la construction des centres de santé, écoles et bureaux des territoires.
Dans le volet de la santé, il a vanté la construction de 300 centres de santé, dont un à Kalemie, inauguré par lui-même après avoir été équipé. Il y a également la couverture santé universelle, dont le programme de la gratuité de la maternité couvre désormais 13 provinces dans son implémentation. Parallèlement, le gouvernement renforce l’efficacité des services publics avec les réformes au sein de la Fonction publique, notamment avec la maîtrise des effectifs des fonctionnaires et agents de l’État.
Diversification économique
Le pays dépend en majorité des ressources issues des minerais. Félix Tshisekedi s’est battu, en 2024, pour commencer à concrétiser son slogan sur la « revanche du sol sur le sous-sol » afin de diversifier l’économie nationale. En octobre 2024, dans le cadre de la coopération avec la Banque africaine de développement (BAD), la RDC avait lancé, par l’entremise du Fonds social de la RDC (FSRDC), le Programme de transformation de l’Agriculture (PTA-RDC), bénéficiant d’un financement de 6,6 milliards de dollars américains sur dix ans. « L’autosuffisance alimentaire ne doit pas demeurer un slogan. Elle doit devenir une réalité. Et nous avons les moyens », insistait Félix Tshisekedi. Il promet d’engager les moyens supplémentaires pour l’encadrement et l’accompagnement des pêcheurs et des éleveurs. Une campagne agricole 2024-2025 a été lancée au cours du même mois pour permettre d’exploiter d’autres richesses du pays, notamment ses terres arables.
Pour mieux diversifier l’économie, Félix Tshisekedi sait combien les routes sont importantes. Au cours de l’année 2024, des avancées significatives ont été constatées dans les relations sino-congolaises avec la modification du contrat chinois. Une négociation menée avec le concours de l’Inspection générale des finances (IGF). Parmi les points d’accord figure la révision à la hausse du montant d’investissement pour les infrastructures, passant de 3,2 à 7 milliards de dollars supplémentaires. Une grande partie de ce montant est affectée à la construction des routes aussi bien à Kinshasa qu’à l’intérieur du pays. Félix Tshisekedi a d’ailleurs lancé les travaux de construction des rocades dans l’Ouest de la ville de Kinshasa pour notamment mettre fin aux embouteillages grâce aux fonds issus de ce contrat renégocié.
Fayulu dresse un tableau sombre
De son côté, l’opposition peint un tableau sombre de la gestion de Félix Tshisekedi. Le leader de la coalition Lamuka, Martin Fayulu, a dressé un bilan sans complaisance en 2024. Infrastructures inexistantes, situation humanitaire dramatique et une faible diplomatie, l’ancien candidat à la présidentielle de 2018 et 2023 a accusé le régime de Félix Tshisekedi de mauvaise gestion et de complaisance face à la misère des Congolais, alors que, selon lui, le camp au pouvoir vide les caisses de l’État. « La pauvreté explose. L’éducation et la santé s’effondrent, les grèves de fonctionnaires, de médecins et d’enseignants se multiplient. La gratuité de l’enseignement demeure un mirage, le chômage est à son comble, la jeunesse abandonnée à elle-même voit son avenir compromis. », a déclaré Martin Fayulu. Il a aussi mis en garde contre un projet de changement ou de modification de la Constitution initié par Félix Tshisekedi, un débat qui a occupé la seconde moitié de l’année 2024. Pour Fayulu, « un régime incompétent peut changer la Constitution 100 fois, les mêmes maux produiront les mêmes effets ».
Sayiba dénonce des « promesses trompeuses »
Dans son message de vœux, Patient Sayiba, ancien directeur général de l’OGEFREM, paraît choqué par des promesses qu’il qualifie de « trompeuses » de la part du régime de Félix Tshisekedi. « Le peuple congolais, abandonné à son triste sort, vit au rythme des promesses trompeuses et d’une gouvernance centrée sur les intérêts personnels des dirigeants. Les conséquences de cette gestion irresponsable sont nombreuses et tragiques pour le pays et son peuple », a-t-il déclaré. Pour Patient Sayiba, la réalité démontre que la descente aux enfers continue de manière fatale et ce, sur fond d’une incompétence criante et d’un manque flagrant de vision. « Il n’est un secret pour personne que depuis 2019, la situation socio-économique, environnementale, professionnelle, sécuritaire et politique n’a cessé de se détériorer gravement. » Il cite au passage la baisse « drastique » du pouvoir d’achat des populations, des grèves répétées des enseignants et médecins, et une fracture sociale aggravée par « un tribalisme dévastateur jamais vécu dans l’histoire de notre pays. »
Sur le plan sécuritaire, ce proche de Joseph Kabila critique le traitement de faveur réservé aux mercenaires et aux armées étrangères au détriment des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). « L’armée, jadis symbole de fierté et de cohésion nationale, est aujourd’hui humiliée, remplacée par des milices improvisées. Au moment où nos vaillants militaires survivent avec des soldes de misère, les troupes étrangères et les mercenaires du gouvernement bénéficient de traitements indécents, tels des princes dans le palais d’un roi fainéant », a-t-il dénoncé.
En 2025, Kabila veut signer un retour politique
Dans un message adressé aux Congolais, le 4 janvier, Raymond Tshibanda, coordonnateur de la cellule de crise du FCC, la plateforme politique de Joseph Kabila, a déclaré que l’ancien président de la République n’avait jamais pris sa retraite politique, mais qu’il était en « congé sabbatique », prêt à répondre à l’appel du peuple congolais afin de relever les défis de la RDC.
Face à ce qu’il qualifie de « dictature » du régime actuel, Raymond Tshibanda a indiqué que le devoir du Front Commun pour le Congo est de faire de chaque foyer, quartier et village, une « cellule de résistance » afin de rester digne des martyrs de l’indépendance. Il a assuré que l’ancien président reste encore dans le jeu politique malgré son silence. « Que ceux qui prennent le taiseux pour un muet et donnent le lion au repos pour mort se détrompent », a-t-il déclaré.
Heshima
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DGI : focus sur la réforme de la fiscalité directe lancée en RDC
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4 jours agoon
novembre 4, 2025By
La redaction
Depuis le 11 septembre 2025, le gouvernement congolais mène une vaste campagne nationale de sensibilisation et de vulgarisation autour de la réforme de la fiscalité directe. Adoptée par la loi n°25/035 du 30 novembre 2023, cette réforme entrera en application le 1er janvier 2026.Conçue dans une logique de modernisation et de transparence, elle s’inscrit dans la même dynamique que la mise en œuvre de la facture normalisée, qui vise à renforcer l’efficacité du recouvrement de la TVA. Ces deux chantiers stratégiques sont placés sous la conduite de la Direction générale des impôts (DGI). Mais en quoi cette réforme de la fiscalité directe diffère-t-elle réellement de l’ancien système ?
Le système fiscal congolais, longtemps critiqué pour sa complexité et sa fragmentation, s’apprête à connaître une transformation majeure dans deux mois. La République démocratique du Congo mettra en œuvre la réforme issue des lois n° 23/052 et n° 23/053 du 30 novembre 2023, qui réorganisent en profondeur la fiscalité directe.
Au cœur de cette réforme figure un changement de paradigme : le pays abandonne le système d’imposition cédulaire, où chaque catégorie de revenu était taxée séparément selon des règles propres, pour adopter un système global d’imposition. Désormais, l’ensemble des revenus d’un contribuable sera agrégé afin de constituer une base unique soumise à l’impôt, marquant ainsi une étape décisive vers une fiscalité plus cohérente et équitable.
Deux impôts introduits par la réforme
Dans cette nouvelle architecture fiscale, la réforme instaure deux impôts majeurs : l’Impôt sur les sociétés (IS) et l’Impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP). Ces deux prélèvements se substituent à plusieurs taxes existantes, notamment l’impôt sur les revenus locatifs, celui sur les capitaux mobiliers ainsi que l’impôt sur les revenus professionnels couvrant les rémunérations, profits et bénéfices. Selon la DGI, il s’agit d’« une fiscalité plus juste et mieux adaptée à la réalité économique congolaise ».
L’IS portera sur l’ensemble des bénéfices réalisés par les entreprises et autres personnes morales, tandis que l’IRPP concernera le revenu net global de chaque contribuable. Ce dernier correspond à la somme des revenus nets catégoriels perçus par une personne physique au cours d’une année d’imposition.
L’IS vise quelle catégorie d’entreprises ?
D’après la DGI, cette nouvelle fiscalité s’applique aux sociétés anonymes (SA), aux sociétés à responsabilité limitée (SARL) et aux sociétés par actions simplifiées (SAS), en raison de leur forme juridique. Sur le plan de l’activité, elle concerne également les sociétés coopératives, les personnes morales de droit public exerçant une activité lucrative, les sociétés de fait ou créées de fait, les associations momentanées, ainsi que les sociétés civiles menant une activité économique.
Le taux d’imposition est fixé à 30 % des bénéfices nets imposables, avec un minimum de perception de 1 % du chiffre d’affaires déclaré en cas de déficit ou de bénéfices insuffisants. La réforme introduit aussi un encadrement plus rigoureux des charges déductibles, notamment en subordonnant la déductibilité des rémunérations du personnel à leur imposition effective à l’IRPP.
En matière de plus-values, le taux est désormais fixé à 20 % en cas de réévaluation libre et à 5 % en cas de réévaluation légale. Quant au report des pertes, il est désormais limité à trois exercices consécutifs, conformément aux nouvelles dispositions légales.
Pour les entreprises minières soumises au Code minier, la réforme offre deux possibilités : soit appliquer les dispositions du Code minier avec un report des pertes limité à cinq ans, soit opter pour le régime de droit commun instauré par la nouvelle législation fiscale.
La DGI invite désormais les contribuables et opérateurs économiques à s’approprier cette réforme et à participer activement aux sessions de vulgarisation organisées sur l’ensemble du territoire national. Les prochains mois seront déterminants pour la réussite de cette transition, que les autorités considèrent comme un levier essentiel de mobilisation des ressources internes et de renforcement de la gouvernance financière.
En marge de la 10ème édition du Forum ExpoBéton tenue à Kinshasa, le directeur général des impôts, Barnabé Muakadi, a insisté sur la nécessité de mettre en place des régimes fiscaux incitatifs et ciblés afin de stimuler les grands projets structurants, tout en préservant la capacité de l’État à mobiliser des recettes. Il a également profité de cette tribune, en présence de nombreux chefs d’entreprise, pour sensibiliser sur les deux grandes réformes fiscales actuellement mises en œuvre par la DGI : la facture normalisée et la réforme de la fiscalité directe (IS-IRPP), toutes deux destinées à renforcer l’efficacité et l’équité du système fiscal congolais.
Heshima
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RDC : Inga III, le barrage du siècle ou le mirage énergétique ?
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1 semaine agoon
octobre 31, 2025By
La redaction
Annoncé depuis plus de deux décennies comme le projet qui transformera la République démocratique du Congo (RDC) en « géant énergétique de l’Afrique », le barrage Inga III peine à voir le jour. Entre ambitions colossales, retards chroniques, luttes d’intérêts et doutes environnementaux, l’un des plus grands projets hydroélectriques du monde oscille entre rêve de puissance et mirage industriel. Entre-temps, l’Ethiopie concrétise un projet similaire avec le barrage de la Renaissance.
Sur les rives puissantes du fleuve Congo, à 225 kilomètres de Kinshasa, les eaux grondent au pied des chutes d’Inga. C’est ici que devait s’élever Inga III, le plus ambitieux projet hydroélectrique jamais conçu en Afrique. Mais plus de vingt ans après son lancement officiel, le chantier reste une promesse inachevée, symbole des contradictions d’un pays riche en ressources mais pauvre en infrastructures. « Inga III devait changer le destin du Congo », soupire Jean-Pierre Mbayo, ingénieur à la retraite de la Société nationale d’électricité (SNEL). « Aujourd’hui, on parle encore d’études, de financements, de consortiums… mais pas de béton coulé », a-t-il ajouté d’un air dépité.
Un rêve ancien, des promesses répétées
Le complexe hydroélectrique d’Inga ne date pas d’hier. Les deux premiers barrages, Inga I (1972) et Inga II (1982), devaient déjà propulser la RDC dans l’ère de l’électrification continentale. Mais les années de crise politique, de mauvaise gestion et de guerres successives ont freiné toute expansion. L’idée d’Inga III refait surface dans les années 2000, sous Joseph Kabila, avec un objectif colossal : produire 11 000 mégawatts d’électricité, soit de quoi alimenter non seulement la RDC, mais aussi une partie de l’Afrique australe. Le projet est alors rebaptisé « Grand Inga », censé à terme atteindre 40 000 MW, devenant ainsi le plus grand barrage du monde.
« Sur le papier, c’est un Eldorado énergétique », commente Agnès Mboyo, chercheuse à l’Université de Kinshasa. « Mais dans la réalité, la gouvernance, les financements et la planification environnementale n’ont jamais été à la hauteur des ambitions. »
Le projet rencontre également deux types d’opposition : sur le plan environnemental et deuxièmement son intérêt semble limité aux seuls miniers. D’après le reporter d’Africanews télévision, Chris Ocamringa, ce vaste projet hydroélectrique a été critiqué par certains militants de la société civile qui pensent que ce projet répondra plus aux besoins des investisseurs miniers que des Congolais de manière générale. Des populations riveraines craignent également des expropriations mais aussi pour leurs activités champêtres.
Ben Munanga, président du conseil d’administration du géant minier KAMOA Copper S.A, rejette les accusations selon lesquelles la production de l’électricité du projet Inga 3 ira à 100 % aux miniers. « Il est dit nulle part dans le projet que toute la production ira à l’opérateur minier », a-t-il réfuté.
Des partenaires nombreux, mais aucune mise en œuvre concrète
Au fil des ans, Inga III a vu défiler les partenaires : Chine, Espagne, Afrique du Sud, Banque mondiale, Union africaine. Chaque accord semblait marquer un tournant, avant de retomber dans le flou. La Banque mondiale s’est même retirée du projet en 2016, évoquant « un manque de transparence dans la conduite du dossier ». Sous Félix Tshisekedi, les discussions ont repris avec un consortium sino-espagnol, mais les négociations patinent.
Le gouvernement affirme vouloir reconfigurer le projet pour répondre d’abord aux besoins nationaux – un changement stratégique face à l’opinion publique, lassée de voir le courant partir à l’étranger alors que moins de 20 % des Congolais ont accès à l’électricité. « Il est impensable que le Congo exporte l’électricité alors que nos villages vivent encore dans le noir », avait déclaré un coordonnateur d’une ONG de défense de l’environnement. « Inga doit d’abord servir le peuple congolais. »
Un projet pharaonique… et controversé
Derrière les promesses, les critiques se multiplient. Les organisations écologistes redoutent un désastre environnemental sur le fleuve Congo, le deuxième plus puissant du monde après l’Amazone. Les ONG locales, quant à elles, dénoncent un manque de consultation des communautés affectées par les expropriations prévues. « Le discours sur le développement masque souvent la réalité : des familles déplacées, des écosystèmes détruits et des contrats opaques », dénonce Marie-Louise Kebi, militante d’un collectif pour la préservation des eaux du fleuve Congo. « Inga III risque de reproduire les erreurs des grands barrages du passé », estime-t-elle.
Sur le plan financier, les chiffres donnent le vertige : le coût initial, estimé à 12 milliards puis à 14 milliards selon les dernières projections. Dans un contexte de dette publique croissante et de corruption endémique, beaucoup doutent de la viabilité économique du projet.
Le symbole d’un pays à la croisée des chemins
Pour ses défenseurs, Inga III reste une chance historique. « Le Congo ne peut pas renoncer à son rôle de puissance énergétique », plaide Germain Kabeya, économiste. « Si nous réussissons Inga, nous devenons le cœur électrique de l’Afrique. » Mais pour d’autres, ce rêve industriel ne doit pas faire oublier les priorités immédiates : électrification rurale, maintenance des réseaux existants, et lutte contre les pertes massives d’énergie (près de 40 % selon la SNEL).
« L’énergie ne se mesure pas en mégawatts produits, mais en foyers éclairés », rappelle Élodie Manda, une ingénieure électromécanicienne. « Tant que Kinshasa restera éclairée et Kikwit dans le noir, Inga restera un mirage », a-t-elle ajouté. Devant cette réalité amère, l’administration Tshisekedi a changé le fusil d’épaule. En attendant Inga III, le gouvernement a créé ANSER : une Agence nationale de l’électrification et des services énergétiques en milieux rural et périurbain. Elle vise à atteindre 30 % d’électrification des milieux ruraux et périurbains en 2025 et 50 % d’ici à 2030. Grâce à l’énergie solaire, cette structure a déjà apporté de l’électricité à Lodja, au Sankuru. Réputé un des trous noirs du pays, ce chef-lieu de la province a été éclairé avec notamment une partie de Lumumbaville, une nouvelle ville créée en hommage à Patrice Emery Lumumba, à Onalua.
Inga III : le barrage du siècle… ou du siècle prochain ?
En 2025, Inga III n’est encore qu’un projet en attente de financement définitif, malgré des décennies d’études et de promesses politiques. Entre tensions géopolitiques, retards administratifs et défi de gouvernance, le barrage du siècle reste suspendu entre deux réalités : celle du rêve national et celle du doute collectif. « Le fleuve, lui, continue de couler », sourit amèrement un ingénieur qui renvoie ce projet aux calendes grecques suite aux nombreux défis qui se dressent au pays.
Pourtant, dans la Corne de l’Afrique, un pays a décidé et s’est donné les moyens d’y parvenir sans trop attendre l’aide extérieure : l’Ethiopie. Démarrés en 2010, les travaux ont duré 14 ans. Le Grand barrage de la Renaissance est aujourd’hui un projet hydroélectrique majeur construit par l’Éthiopie sur le Nil Bleu. Ce barrage est devenu une source de tensions géopolitiques avec les pays en aval du Nil, notamment l’Égypte et le Soudan. Le barrage est officiellement inauguré en septembre 2025, mais des turbines sont opérationnelles depuis 2022, produisant de l’électricité pour l’Éthiopie et ayant pour objectif l’exportation d’énergie dans la région. L’Égypte et le Soudan craignent que le barrage ne réduise leur approvisionnement en eau et cherchent à trouver un accord avec l’Éthiopie.
Heshima
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RDC : face aux embouteillages, comment bâtir une industrie du rail ?
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1 semaine agoon
octobre 29, 2025By
La redaction
Les villes de la République démocratique du Congo sont confrontées à une croissance démographique rapide, entraînant une urbanisation accélérée avec des défis majeurs comme l’insuffisance des infrastructures routières et des services de base. Des villes comme Kinshasa et Matadi font face à des embouteillages monstres, détériorant ainsi la qualité de vie dans ces métropoles. Le gouvernement a relancé, bon gré mal gré, le train urbain. Mais la qualité des rails laisse à désirer, obligeant l’exécutif national à penser à l’implantation d’une usine d’assemblage et de montage de trains au pays.
L’Office national des transports (ONATRA) a réfectionné certains rails pour permettre la reprise du train urbain entre Kinshasa et Matadi. Dans des quartiers comme Mapela, dans la commune de Masina, cette réfection suscite des réactions contrastées. Si certains saluent la reprise du train, d’autres se montrent inquiets par rapport à la mauvaise qualité du travail réalisé lors de la réfection de ces rails. « La réhabilitation du rail est faite de manière précaire et cela peut causer un déraillement du train. Ils ont posé le rail sur des sacs de sable. Avec le soleil et le retour de la pluie, ces sacs peuvent s’user facilement et provoquer des dégâts au passage du train », explique Jérôme Mabeka, habitant non loin de ce chemin de fer.
Implanter une usine de montage de trains
Vieux de plus d’un siècle, le réseau ferroviaire de la RDC nécessite non seulement une réfection approfondie mais également la construction de nouveaux rails. Pour faire face à ces défis du rail et des locomotives, le pays a lancé le 25 octobre 2025 un appel à manifestation d’intérêt international pour la construction d’une usine d’assemblage et de montage de trains. Le document, signé par le ministre des Transports, Voies de communication et Désenclavement, Jean-Pierre Bemba, recherche des partenaires pour la création d’unités d’assemblage capables de produire plusieurs dizaines de locomotives et wagons par an, tout en assurant un transfert de compétences vers les ingénieurs et techniciens locaux. Le projet sera mis en œuvre sous la forme d’un partenariat public-privé (PPP) d’une durée comprise entre 25 et 30 ans. Il prévoit également la création d’un écosystème de maintenance, la production de pièces détachées et la formation professionnelle.
Ce projet s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale de relance et de modernisation du secteur ferroviaire, en cohérence avec la politique d’industrialisation et d’intégration régionale promue par le gouvernement. Le projet vise aussi à moderniser la voie ferrée congolaise, vieille d’un siècle. Selon le communiqué, la RDC dispose de plus de 5 000 km de voies ferrées, mais son potentiel ferroviaire est sous-exploité en raison du vieillissement du matériel roulant et de l’absence d’industries locales de production ou de réhabilitation. Ce qui a poussé le gouvernement à lancer cet appel à manifestation d’intérêt international afin de trouver des partenaires en mesure d’assurer un réseau ferroviaire local.
Les entités intéressées, telles que des constructeurs ferroviaires, sociétés d’ingénierie, entreprises BTP, investisseurs institutionnels et centres de formation, ont jusqu’au 5 décembre 2025 à 15h00 (heure de Kinshasa) pour soumettre leurs dossiers. Des visites de sites sont prévues à Matadi et Kalemie avant le 25 novembre 2025. Ces deux villes ont été choisies par le gouvernement pour abriter ces usines.
Une fois mis en œuvre, cette usine pourrait renforcer la souveraineté industrielle du pays et réduire la dépendance aux importations de locomotives et wagons, relancer la production locale du matériel roulant adapté aux besoins nationaux et régionaux et créer des emplois qualifiés. Il s’agit également de favoriser le transfert de technologies et de développer un centre de formation ferroviaire national, de soutenir la relance de la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC) et de l’Office national des transports (ONATRA) ainsi que les projets PPP ferroviaires (Corridor de Lobito, Corridor Est-Centre, Kinshasa-Matadi-Banana).
Face aux embouteillages, relancer le train
Pour combattre les embouteillages chroniques en RDC, et plus spécifiquement à Kinshasa, le pays prévoit des projets de train urbain pour réduire ces congestions du trafic. Ce projet, appelé Métrokin, a pour objectif de désengorger la capitale en offrant un transport de masse, même si des investissements colossaux et une réhabilitation du réseau sont nécessaires. Le gouverneur de Kinshasa avait annoncé la construction d’une ligne de métro aérien avec un partenaire malaisien, et des études ont été menées pour sa réalisation. Mais jusqu’ici, les signaux pour concrétiser ce projet restent encore faibles.
Par contre, en septembre 2025, le gouvernement a relancé la ligne Kinshasa-Matadi, longue de 366 km. Cette ligne relie la capitale au principal port maritime du pays, tout en acquérant de nouveaux matériels roulants. À terme, cette ligne doit être prolongée jusqu’au futur port en eau profonde de Banana, actuellement en construction, dans le cadre d’un plan visant à fluidifier les échanges intérieurs et extérieurs. Si ces projets de l’industrie du rail se concrétisent, ils devraient réduire les défis de mobilité dans un contexte où le réseau routier national et le transport fluvial font face à de nombreuses contraintes : routes dégradées, congestion urbaine, embarcations vétustes, voies de navigation non balisées et accidents fréquents. Autant de facteurs qui pèsent sur les coûts logistiques et affectent la compétitivité économique du pays.
Éviter les erreurs du passé
En juin 2015, la RDC avait réhabilité certains tronçons de ses chemins de fer et avait réceptionné 18 locomotives neuves sur 38 commandées. À cette époque, la dernière acquisition d’une locomotive neuve datait de 40 ans. Après environ 15 ans d’interruption, le trafic passager sur la ligne ferroviaire Matadi-Kinshasa avait été inauguré le 2 juillet 2015. Mais faute de maintenance dans une ligne ferroviaire vétuste et de locomotives parfois inadaptées, le trafic Kinshasa-Matadi n’avait pas fait long feu sous Joseph Kabila. En relançant cette ligne sous Félix Tshisekedi, le gouvernement devrait éviter les erreurs du passé en travaillant sur la modernisation du rail congolais afin de pérenniser ce trafic en ajoutant des nouveaux rails sur des lignes existantes. Le sénateur Jean-Bamanisa, qui travaille depuis des années dans le secteur de la construction, conseille au gouvernement d’ajouter des rails modernes sur des servitudes ferroviaires existantes afin de permettre le trafic des locomotives de technologie récente. Sans cette modernisation, l’industrie du rail ne saurait redécoller en RDC.
Avec la réhabilitation des corridors ferroviaires régionaux, notamment celui de Lobito (Angola – Zambie – RDC) et celui du Tanganyika vers la Tanzanie, l’industrie du rail pourrait être boostée. Ce qui augure peut-être un nouveau départ, à condition de remédier à l’absence d’un écosystème industriel complémentaire tel que des sous-traitants locaux, une logistique intégrée et la maintenance. Il faut également résoudre un goulot d’étranglement persistant dans les domaines de l’énergie, des infrastructures ou de la connectivité numérique, facteurs qui risquent aussi de freiner les gains de productivité attendus.
Heshima Magazine
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