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Crise en RDC : Tshisekedi et Kagame attendus en Tanzanie, un cessez-le-feu observé ce mardi

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La présidence kényane a annoncé, le 3 janvier 2025, la présence du président congolais Félix Tshisekedi et de son homologue rwandais, Paul Kagame, au sommet extraordinaire « conjoint » de la Communauté des États de l’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe (SADC), prévu le samedi 8 février à Dar es Salaam, en Tanzanie. Dans la foulée, les rebelles du M23 ont décrété un cessez-le-feu unilatéral, qu’ils justifient par des raisons humanitaires.

Les dirigeants des 16 pays membres de la SADC et des huit autres de l’EAC vont se rencontrer pour évoquer la crise sécuritaire majeure qui sévit en République Démocratique du Congo (RDC). Ces dirigeants cherchent à éviter un embrasement régional de cette situation sécuritaire déjà explosive. Le gouvernement rwandais a confirmé la participation de Paul Kagame à ce sommet conjoint, et Félix Tshisekedi pourrait également y prendre part.

Depuis la prise de Goma, le 28 janvier, et son lourd bilan humain lors des violents affrontements, le M23 et ses alliés rwandais ont également progressé vers le Sud-Kivu. Lors d’une conférence de presse du coordonnateur de l’AFC-M23, Corneille Nangaa, tenue jeudi dernier, ce chef rebelle a révélé son intention de « rester » à Goma mais aussi de « marcher » jusqu’à Kinshasa. Après des pressions internationales sur leur principal parrain, le Rwanda, l’AFC-M23 a changé de ton. Un cessez-le-feu unilatéral a été décrété, entrant en vigueur ce mardi 4 février 2025, dans l’est de la République Démocratique du Congo. Le mouvement a également nié son intention de prendre la ville de Bukavu et d’autres localités, alors que l’armée a perdu son commandant de la 12e brigade, Alexis Rugabisha, qui repoussaient justement l’armée rwandaise et le M23 dans leur progression sur le territoire de Kalehe, au Sud-Kivu.

La CENCO-ECC et son plan de sortie de crise

Le lundi 3 février, les délégations de l’Église catholique et de l’Église du Christ au Congo (ECC), conduites par le cardinal Fridolin Ambongo et le Révérend André-Gédéon Bokundoa, ont été reçues par le président de la République, à Kinshasa. Ces délégations ont présenté à Félix Tshisekedi le projet « Pacte social pour la paix et le bien-vivre ensemble en RDC et dans les Grands Lacs » afin de mobiliser la population en faveur de la paix. D’après Mgr Donatien Nshole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), leur démarche vise à renforcer la cohésion nationale dans le pays. « L’approche qui est la nôtre n’est pas de savoir qui est le démon et qui est l’ange. Mais de voir comment nous construirons sur la base de nos valeurs », a ajouté le pasteur Eric Nsenga de l’ECC.

Crise humanitaire et au moins 900 morts à Goma

La situation sécuritaire et humanitaire à Goma, dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), est extrêmement préoccupante. Les affrontements qui ont eu lieu fin janvier entre les Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) et l’armée rwandaise, qui appuie les rebelles du M23, ont conduit à la prise de cette ville. Bien que le M23 ait annoncé un cessez-le-feu unilatéral pour des raisons humanitaires, il n’a pas l’intention de se retirer de la ville.

Les combats ont entraîné la mort d’au moins 900 personnes et blessé près de 3 000 autres depuis le 26 janvier 2025. Sur place, dans la ville, les hôpitaux sont débordés. Ces établissements hospitaliers manquent de fournitures médicales essentielles et peinent à fournir des soins adéquats aux victimes. « Les corps sont en décomposition dans les morgues à cause du manque d’électricité », annonce le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya.

La population civile est confrontée à des conditions de vie extrêmement difficiles, avec des pénuries d’eau, d’électricité et de services de base. De plus, environ 4 000 détenus se sont évadés de prison, dont beaucoup sont responsables d’atrocités, exacerbant ainsi l’insécurité dans la ville. Les déplacements massifs de populations fuyant les violences ont conduit à une crise humanitaire majeure. Même à Nyiragongo, les camps des déplacés de Kanyaruchinya sont complètement vides suite à l’occupation de Goma par les rebelles et l’armée rwandaise. Certains déplacés n’ont eu d’autre choix que de rentrer chez eux, faute de prise en charge par les humanitaires et le gouvernement après l’occupation rebelle.

La communauté internationale, y compris les Nations unies, appelle à une cessation immédiate des hostilités et à la reprise des négociations pour éviter une escalade du conflit qui pourrait entraîner des conséquences dévastatrices pour la population civile. L’Allemagne a suspendu les discussions prévues ce mois avec Kigali, qui devaient porter sur une nouvelle aide financière au Rwanda. Le Royaume-Uni, principal soutien du Rwanda, a appelé au retrait immédiat des forces rwandaises du sol congolais et à l’arrêt de tout soutien au groupe rebelle M23. « Le Royaume-Uni étudie activement les prochaines étapes, aux côtés de ses partenaires internationaux, y compris la possibilité de réexaminer l’ensemble de son soutien au Rwanda », rapporte en substance le communiqué du ministère britannique des Affaires étrangères, du Commonwealth et du Développement.

De son côté, le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a réitéré, le 3 février, son soutien « au peuple de la RDC », en réponse à des critiques dans le pays de Nelson Mandela concernant la participation de l’Afrique du Sud à la mission de la SADC, déployée depuis 2023 dans le Nord-Kivu où 14 soldats sud-africains ont été tués.

Heshima

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La RDC, carrefour naturel du ciel africain, peine à décoller

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La République démocratique du Congo dispose d’un atout majeur encore largement sous-exploité : sa position géographique centrale au cœur du continent africain. Alors que l’Éthiopie a démontré comment transformer cette centralité en machine à revenus grâce à Ethiopian Airlines et ses 7 milliards de dollars de chiffre d’affaires annuel, la RDC semble enfin prendre conscience de son potentiel aéronautique exceptionnel. Les projets de modernisation d’aéroports pourraient transformer le pays en véritable hub continental, générant des revenus colossaux.

La RDC occupe une position géographique exceptionnelle qui en fait le candidat naturel pour devenir le principal hub aérien du continent africain. Située au centre géographique de l’Afrique, la RDC partage ses frontières avec neuf pays, créant un réseau de connexions naturelles vers toutes les régions du continent. Cette centralité géographique représente un avantage concurrentiel considérable que peu de pays africains peuvent revendiquer.

« La RDC est littéralement le carrefour naturel de l’Afrique », explique Dr. Mukendi Kalala, économiste spécialisé dans les transports à l’Université de Kinshasa. « Un voyageur souhaitant se rendre du Caire à Cape Town, ou de Lagos à Nairobi, passerait logiquement par le territoire congolais si nous disposions des infrastructures adéquates. C’est exactement ce que fait l’Éthiopie depuis des décennies. », a-t-il déclaré.  

Cette position stratégique prend une dimension encore plus importante quand on considère que le transport aérien intra-africain reste largement déficitaire. Selon l’article de Jeune Afrique sur les défis du transport aérien en Afrique centrale, les liaisons durables font cruellement défaut dans la région. La RDC pourrait combler ce vide en devenant le point de convergence naturel des flux aériens continentaux.

Une dynamique de modernisation enfin enclenchée

Les autorités congolaises semblent avoir pris conscience de cet enjeu stratégique. Le lancement des travaux de modernisation de l’aéroport de Luano par le président Félix Tshisekedi en avril marque une étape symbolique importante. Cette plateforme située près de Lubumbashi verra la construction d’une nouvelle aérogare d’une capacité d’un million de voyageurs, l’élargissement de la piste d’atterrissage et le renouvellement complet des équipements de navigation.

Mais l’ambition va bien au-delà de Luano. Comme l’a révélé Jean-Pierre Bemba Gombo, Vice-Premier ministre et ministre des Transports, en octobre 2024, le gouvernement a signé un mémorandum d’entente avec China First Highway Engineering Co., Ltd. pour la mise en œuvre de projets de construction et de modernisation de onze aéroports à travers le pays. Cette liste ambitieuse inclut les aéroports de Kalemie, Moba, Buta, Kenge, Mbandaka, Bumba, Moanda, Kikwit, Lodja, Gemena et Munkamba.

« Nous assistons à une véritable révolution infrastructurelle », commente Josephine Mambeko, analyste en aviation civile basée à Kinshasa. « Pour la première fois depuis des décennies, la RDC se donne les moyens de ses ambitions dans le secteur aérien. »

L’exemple éthiopien : une feuille de route éprouvée

L’Éthiopie constitue un modèle particulièrement éclairant pour comprendre le potentiel de la RDC. Ethiopian Airlines, créée en 1946, a su capitaliser sur la position géographique stratégique d’Addis-Abeba dans la région de la corne de l’Afrique pour devenir le leader continental. Avec une flotte de plus de 150 appareils modernes d’un âge moyen inférieur à sept ans, la compagnie dessert 142 destinations internationales, dont 70 villes africaines.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : Ethiopian Airlines a généré un chiffre d’affaires de 7 milliards de dollars lors de l’exercice 2023-2024, contre 6,1 milliards l’année précédente. Cette performance exceptionnelle s’appuie sur un réseau qui fait d’Addis-Abeba le principal hub de connexion pour les voyages intra-africains et entre l’Afrique et le reste du monde.

L’Éthiopie ne s’arrête pas là. Le nouveau projet d’aéroport d’Abusera, situé à 70 kilomètres d’Addis-Abeba, prévoit une capacité annuelle de 110 millions de passagers à terme, ce qui en ferait l’un des plus grands aéroports du monde. La première phase devrait ouvrir en 2029, complétant l’aéroport international Bole qui atteindra bientôt sa capacité maximale de 25 millions de passagers annuels.

« L’Éthiopie a démontré qu’un pays africain peut devenir un acteur majeur du transport aérien mondial », souligne un cadre de Congo Airways. « Mais la RDC présente des avantages géographiques encore plus importants. Nous sommes au centre exact du continent, là où l’Éthiopie est plutôt en périphérie orientale. »

Des retombées économiques en cascade

Au-delà des revenus directs du transport aérien, la transformation de la RDC en hub continental déclencherait un cercle vertueux économique. Le tourisme, secteur actuellement marginal malgré la richesse exceptionnelle du patrimoine naturel congolais, connaîtrait un essor considérable. Les 9 parcs nationaux du pays, la forêt équatoriale du bassin du Congo, l’Okapi, les chutes d’Inga ou encore la biodiversité unique du pays constituent des atouts touristiques de classe mondiale.

« Imaginez l’impact d’une connexion aérienne fluide entre Kinshasa et les grands parcs du pays », projette Thomas Kimbangu, consultant en développement touristique. « Nous pourrions rivaliser avec le Kenya ou la Tanzanie en termes d’attractivité touristique voire plus, simplement en rendant nos joyaux naturels accessibles. », estime-t-il.

L’effet multiplicateur toucherait également l’hôtellerie, la restauration, les services financiers et la logistique. L’exemple d’Addis-Abeba, devenue un centre d’affaires continental grâce à sa connectivité aérienne, illustre parfaitement ce phénomène. Les organisations internationales, les multinationales et les investisseurs privilégient systématiquement les destinations bien connectées pour leurs implantations régionales.

La création d’emplois directs et indirects serait massive. Le secteur aérien éthiopien emploie aujourd’hui plus de 100 000 personnes, de la maintenance des appareils aux services au sol, en passant par les métiers de l’hôtellerie et du commerce. La RDC, avec sa population jeune et nombreuse, pourrait absorber facilement une main-d’œuvre similaire, contribuant significativement à la réduction du chômage.

Les défis à relever pour concrétiser cette vision

Malgré ce potentiel exceptionnel, plusieurs défis majeurs subsistent. La création ou la restructuration d’une compagnie aérienne nationale fiable et compétitive constitue un préalable indispensable. L’expérience malheureuse de nombreuses compagnies africaines, évoquée dans l’analyse de Jeune Afrique sur les échecs en série du secteur en Afrique centrale, rappelle que la gestion rigoureuse et la vision à long terme sont cruciales. « Nous devons apprendre des erreurs du passé », insiste Jean Mundele, ancien cadre de l’aviation civile congolaise. « Une compagnie nationale ne peut réussir que si elle est gérée selon des critères commerciaux stricts, avec des partenariats techniques solides et une gouvernance transparente. », a-t-il ajouté.

L’investissement initial requis est considérable. Les infrastructures aéroportuaires modernes nécessitent plusieurs milliards de dollars, sans compter l’acquisition d’une flotte aérienne moderne. Cependant, l’exemple éthiopien démontre que ces investissements sont rapidement rentabilisés par les revenus générés.

Vers une transformation économique structurelle

La RDC se trouve aujourd’hui à un tournant historique. Les projets annoncés en 2024 et 2025 marqueraient une prise de conscience politique du potentiel extraordinaire que représente la position géographique centrale du Congo. Si cette dynamique se confirme et s’accompagne d’une vision stratégique cohérente avec une détermination à toutes épreuves, le pays pourrait opérer une transformation économique majeure.

« Nous avons l’opportunité unique de diversifier notre économie en capitalisant sur un atout naturel inépuisable : notre géographie », résume Dr. Kalala. « L’Éthiopie nous a montré la voie, mais nous pouvons faire encore mieux grâce à notre centralité géographique supérieure. », conclut-il.

Cette transformation ne se fera pas du jour au lendemain, mais les fondations sont peut-être en train d’être posées. Les investissements massifs prévus dans les infrastructures aéroportuaires, combinés à une volonté politique affirmée, créent les conditions d’une réussite à la hauteur des ambitions. La RDC pourrait ainsi rejoindre le club très fermé des pays africains qui ont su transformer leur position géographique en levier économique durable, ouvrant une nouvelle page de son développement économique.

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RDC : Un nouveau dialogue inclusif interne est-il encore possible ?

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La République démocratique du Congo (RDC) traverse une crise multidimensionnelle où les violences dans l’Est, les divisions politiques et une catastrophe humanitaire sans précédent s’entrelacent pour menacer l’avenir du pays. L’idée d’un dialogue national inclusif, portée par des voix politiques, religieuses et civiles, ressurgit comme une tentative de réponse à ce chaos. Mais dans un contexte où les fractures internes s’aggravent, où les ingérences régionales brouillent les cartes et où les exigences des parties prenantes divergent radicalement, un tel processus peut-il encore voir le jour ? Entre l’offensive brutale du M23, les ambitions troubles de Joseph Kabila, les dissensions de l’opposition et les efforts laborieux de médiation, le chemin vers la réconciliation semble plus incertain que jamais. Pourtant, l’urgence d’un dialogue pour éviter l’irréparable n’a jamais été aussi criante.

Le M23 et l’ombre rwandaise : un conflit régionalisé

Dans l’Est de la RDC, la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23) continue de semer la terreur et de déstabiliser une région déjà fragile. En janvier 2025, le groupe a capturé Goma, suivi de Bukavu en février, marquant une escalade dramatique du conflit. Cette offensive a aggravé une crise humanitaire colossale : des millions de personnes, déracinées, vivent dans des camps surpeuplés, confrontées à des pénuries alimentaires, à un manque d’accès aux soins et à des épidémies croissantes de choléra, comme le rapporte l’Organisation mondiale de la santé. Les témoignages relayés sur les réseaux sociaux, notamment par des observateurs locaux, décrivent une population épuisée, prise en étau entre les combats et l’absence de perspectives.

L’implication du Rwanda dans ce conflit est désormais indéniable. De nombreux rapports, tant du Gouvernement congolais que des Nations unies, ainsi que les sanctions américaines visant l’Alliance Fleuve Congo (AFC), une coalition incluant le M23, accusent explicitement Kigali de fournir un soutien militaire direct, comprenant armes, soldats, renseignements et assistance logistique. Les preuves s’accumulent : témoignages d’anciens combattants, images satellites et analyses d’experts confirment la présence de troupes rwandaises en milliers aux côtés des rebelles. Cette ingérence régionale est une crise géopolitique majeure, où les enjeux économiques, notamment liés à l’exploitation des minerais congolais, rendent toute tentative de résolution d’autant plus complexe.

Les efforts internationaux pour désamorcer la crise ont jusqu’ici échoué à produire des résultats durables. Les pourparlers de Doha, initiés en avril 2025 sous médiation qatarie, ont permis un cessez-le-feu temporaire, mais les négociations piétinent. Le M23 exige des garanties politiques, comme une reconnaissance de ses revendications territoriales et une amnistie pour ses leaders, des conditions jugées inacceptables par Kinshasa. Parallèlement, des discussions menées à Washington autour d’un possible « deal minerais contre sécurité », un accord économique pour l’exploitation exclusive des minerais rares contre le retrait des troupes rwandaises sur le sol congolais et également la sécurisation des zones minières de l’Est demeurent floues faute de communication à ce sujet, alimentant ainsi la méfiance de l’opposition politique, qui redoute une mainmise étrangère sur les ressources du pays. Sur le terrain, la population semble toutefois soutenir cette démarche, à condition qu’elle mette définitivement fin aux conflits récurrents et que l’État congolais y joue un rôle central.

Les accusations de crimes de guerre viennent encore compliquer la donne. Un rapport d’Amnesty International publié en mai 2025 documente des atrocités commises par le M23 à Goma et Bukavu : exécutions sommaires, tortures systématiques, disparitions forcées. Des témoignages glaçants décrivent l’usage de marteaux, de câbles électriques et de crosses de fusil pour infliger des sévices aux congolais, souvent ciblés sur des zones sensibles du corps. Des familles sont contraintes de payer des rançons exorbitantes pour libérer leurs proches, tandis que d’autres pleurent des milliers de disparus, sans nouvelles de leur sort. Ces exactions, perpétrées sous l’égide de Kigali, renforcent les appels à une intervention internationale plus musclée, mais surout les réticences à inclure le M23 dans un dialogue sans justice préalable.

Joseph Kabila : un retour calculé dans un climat explosif

L’ombre de Joseph Kabila, président de la RDC de 2001 à 2019, plane sur la crise actuelle. En « retrait officielle » de la scène politique depuis son départ du pouvoir selon ses proches, il reste une figure polarisante, accusée par Kinshasa et de nombreux organisations de la société civile de soutenir la rébellion soutenue par Paul Kagame, l’AFC/M23. Le 22 mai courant, le Sénat congolais a levé son immunité parlementaire, ouvrant la voie à des poursuites pour trahison et insurrection. L’arrivée de kabila à Goma, une ville pourtant sous contrôle rebelle, où il a lancé des « consultations » est mal perçue par le pouvoir.

Lors de son discours en ligne du 23 mai dernier, Kabila a multiplié les déclarations incendiaires, conditionnant toute perspective de dialogue au départ, sans négociations aucunes, du Président Félix Tshisekedi. Il a présenté sa « solution globale » à la guerre menée contre la RDC, articulée autour de douze recommandations, en insistant sur la nécessité d’un « dialogue inclusif » et d’une « refondation de l’État ».

Ses proches, dont Kikaya Bin Karubi, justifient ses démarches en affirmant qu’un dialogue avec l’AFC et le M23 est nécessaire pour « sauver le Congo ». Mais ces prises de position creusent le fossé avec Kinshasa, qui y voit une menace directe à l’unité nationale. Pour le gouvernement congolais, il est impératif de prendre en compte les crimes commis et d’en assurer la justice. La condamnation à mort pour trahison et insurrection de Corneille Nangaa, proche de Kabila, ancien président de la commission électorale et leader de l’AFC, illustre l’ampleur des fractures. Le jeudi 29 mai, Joseph Kabila est apparu pour la première fois en public depuis son arrivée à Goma. Dans son entourage, certaines figures politiques étaient présentes : Moise Nyarugabo, Kikaya Bin Karubi, Patient Sayiba et le porte-parole du M23, Lawrence Kanyuka.  

Kabila, par ses silences et ses interventions ciblées, incarne une énigme. Est-il un acteur de l’ombre soutenant la rébellion pour déstabiliser le pouvoir, ou un opportuniste cherchant à capitaliser sur le chaos ? Sa présence à Goma, saluée par les rebelles, a exacerbé les tensions, transformant chaque geste en un symbole de division. Pour beaucoup, son rôle compromet les chances d’un dialogue véritable, tant il cristallise les méfiances mutuelles.

Une opposition fragmentée : entre ambitions et désunion

Martin Fayulu, Moïse Katumbi et leurs partis respectifs jouent un rôle central dans la crise politique actuelle. Leurs positions et alliances pourraient peser sur l’issue des tensions. S’ils soutiennent tous deux l’initiative de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC), leurs exigences et attentes divergent, ce qui risque de compliquer les négociations. Par ailleurs, la condamnation des opposants Augustin Matata Ponyo et Corneille Nangaa, ainsi que la demande de dissolution des partis politiques de Joseph Kabila, Nangaa, Franck Diongo et Thomas Lubanga pour participation à des rébellions armées, ajoutent une couche supplémentaire de complexité à une situation déjà explosive.

La volonté de Félix Tshisekedi de former un gouvernement d’union nationale à travers des consultations menées par son conseiller spécial en matière de sécurité, Eberande Kolongele, a suscité davantage de méfiance que d’adhésion. L’opposition y a vu une tentative de légitimer le statu quo, tandis que le pouvoir a catégoriquement refusé d’inclure des figures liées aux rébellions dans ces consultations, clôturées le 8 avril 2025. Un député du parti présidentiel résume l’impasse : « Comment dialoguer avec ceux qui orchestrent des massacres dans l’Est du pays ? » Une question qui résonne avec les accusations visant Corneille Nangaa et ses alliés, et met en lumière le cœur du dilemme : bâtir un dialogue inclusif sans sacrifier l’exigence de justice.

La CENCO et l’ECC : des médiateurs sous pression

Les institutions religieuses, notamment la CENCO et l’ECC, tentent de jouer un rôle de médiation à travers leur Pacte social pour la paix, lancé en janvier 2025. Leur initiative vise à créer un cadre « neutre » pour un dialogue inclusif, incluant l’opposition politique et l’AFC/M23. Elle a reçu le soutien non seulement de Fayulu et Katumbi, comme mentionné précédemment, mais aussi celui de Kabila, ainsi que d’une partie de la société civile.

En février 2025, une délégation de ces institutions a rencontré, entre autres, des représentants du M23 à Goma, les présidents rwandais, ougandais, congolais (Brazzaville) et angolais, ainsi que l’ancien président Joseph Kabila. Cette démarche audacieuse avait pour but de promouvoir une feuille de route vers la paix.

Cependant, leur crédibilité est mise à l’épreuve. Des voix, notamment au sein du parti Le Centre, les accusent de partialité, leur reprochant une proximité avec l’opposition radicale. À ces critiques s’ajoute la révélation embarrassante de leur financement partiel par le Rwanda et certains acteurs de l’opposition, un aveu qui a jeté le doute sur leur neutralité affichée. Ces éléments, largement relayés par les médias locaux, sapent leur légitimité et leur capacité à fédérer. Les contradictions entre la volonté affichée d’apaisement et les lignes rouges du pouvoir illustrent la complexité de la tâche des médiateurs.

Les efforts internationaux : une lueur d’espoir fragile

À l’échelle internationale, plusieurs initiatives tentent de contenir la crise. La médiation angolaise, soutenue par l’Union africaine, a permis des discussions régionales, tandis qu’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies en février 2025 a appelé à un cessez-le-feu durable et à des sanctions renforcées contre les soutiens du M23. Les pourparlers de Doha, bien que prometteurs, n’ont pour le moment, abouti qu’à des accords précaires, souvent violés sur le terrain. Des observateurs internationaux notent que ces cessez-le-feu fragiles ne résistent pas aux ambitions territoriales des rebelles et aux ingérences extérieures.

Les discussions à Washington, axées sur un échange « minerais contre sécurité » censées mettre fin définitivement aux centaines de groupes armés en RDC, suscitent autant d’espoir que d’inquiétudes.

« C’est une opportunité historique de stabilisation de la région », défend un diplomate occidental à Kinshasa sous couvert d’anonymat. « Les USA veulent une place de choix dans les mines du Congo et la RDC a besoin de paix pour développer son pays. Tout le monde y gagne. »

La crainte d’une internationalisation excessive du conflit persiste est aussi là. Des puissances comme la Chine, très présente dans le secteur minier congolais, observent la situation de près, alimentant les inquiétudes d’une nouvelle forme de conflit en RDC. « Les solutions imposées de l’extérieur ne feront que prolonger notre souffrance », tonne un activiste de Goma, résumant le sentiment de nombreux Congolais qui y voient une menace de déstabilisation sous une autre forme.

Un dialogue inclusif : illusion ou ultime recours ?

La question de la faisabilité d’un dialogue inclusif repose sur une équation presque insoluble. D’un côté, Kabila et ses alliés exigent une transition politique et le départ de Tshisekedi comme préalable à toute discussion. De l’autre, le pouvoir refuse tout dialogue avec des acteurs liés aux rebellions, invoquant la nécessité de justice pour les victimes de Nord-Kivu et Sud-Kivu. Entre ces positions irréconciliables, la CENCO et l’ECC tentent de tracer une voie médiane, mais leur influence reste limitée face aux méfiances accumulées.

Les atrocités documentées par Amnesty International, combinées aux ingérences régionales, rendent l’inclusion du M23 dans un dialogue politiquement et moralement problématique si justice n’est pas faite. Pourtant, exclure les rebelles risque de prolonger le conflit armé, au détriment d’une population déjà à bout. Les sanctions internationales, les pourparlers de Doha et les discussions de Washingtons pourraient offrir un levier, mais leur impact dépendra de la volonté des protagonistes et acteurs congolais de faire des compromis.

L’étau se resserre, l’urgence s’impose

En RDC, le temps joue contre la paix. Chaque jour renforce l’enracinement des crises sécuritaire, politique, humanitaire, tandis que les acteurs, englués dans leurs rivalités, semblent incapables de saisir l’urgence. Un dialogue inclusif, s’il devait émerger, devra surmonter des défis titanesques : apaiser les revendications contradictoires, répondre aux exigences de justice pour les victimes des crimes de guerre, neutraliser les ingérences régionales et, surtout, restaurer une confiance érodée par des décennies de trahisons.

Entre les ambitions politiques affirmées de Kabila, la guerre menée par le Rwanda, les divisions au sein de l’opposition, les pressions internationales, la lassitude d’une population exsangue et la détermination du gouvernement congolais à mettre définitivement fin aux crises sécuritaires, la fenêtre d’opportunité se rétrécit. La réponse à la question : un nouveau dialogue inclusif est-il encore possible ? dépendra de la capacité des Congolais à transcender leurs fractures. Faute d’un sursaut national, la RDC pourrait plonger plus profond encore dans le chaos, abandonnant un peuple résilient mais épuisé par trois décennies de violences récurrentes, assoiffé d’une paix tant promise.

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RDC : les mouvements citoyens LUCHA et Filimbi sont-ils en perte de vitesse ?

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Véritables porte-étendards des manifestations citoyennes lors de la dernière décennie en République démocratique du Congo (RDC), les mouvements Lutte pour le changement (LUCHA) et Filimbi, qui signifie « coup de sifflet » en swahili, semblent perdre leur cadence depuis le changement de régime politique à la tête du pays. Pourtant, malgré le départ de Joseph Kabila du pouvoir, les défis sociaux et sécuritaires demeurent. L’occupation de certaines villes du pays par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) a affecté les activités de ces mouvements.

Engagés pour la démocratie, la justice sociale et la bonne gouvernance, les deux mouvements se sont montrés comme des acteurs influents de la société civile lors de la dernière décennie. Fondée en 2012, la LUCHA rassemble plusieurs centaines de jeunes à travers le pays, mais le mouvement a beaucoup fait parler de lui dans les villes de Goma, Beni, Butembo, Lubero et Kinshasa. Malgré les défis sécuritaires et politiques, leur présence et leur action témoignent de leur résilience et de leur détermination à défendre les droits des Congolais.

Cependant, il faut reconnaître que depuis la fin du régime de l’ancien président de la République Joseph Kabila, les actions de ces mouvements ont baissé d’intensité. « Ils avaient focalisé leurs actions notamment sur le départ du pouvoir de Joseph Kabila. Après avoir atteint cet objectif, le reste des actions de la LUCHA et Filimbi n’a pas eu un grand impact », explique un analyste sur les dynamiques politiques en RDC.

LUCHA : un engagement constant pour la démocratie

La LUCHA continue de défendre la dignité humaine, la justice sociale et la démocratie par des actions non violentes. Le mouvement reste actif dans plusieurs provinces, notamment au Nord-Kivu, où il soutient les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et dénonce les violations des droits humains commises par les groupes armés, y compris le M23 soutenu par le Rwanda. Elle n’hésite pas également à critiquer la gouvernance du président Félix Tshisekedi, l’accusant de renforcer un système autoritaire et de ne pas améliorer les conditions de vie des Congolais.

Dialogue entre Kinshasa et AFC/M23, la LUCHA se positionne

Pour continuer à marquer sa présence dans le débat public, la LUCHA a livré sa position au sujet du dialogue entre le gouvernement congolais et les rebelles de l’AFC/M23, qui se tient à Doha, capitale du Qatar. « Nous tenons à mettre en garde contre des ‘‘accords de paix’’ récompensant les criminels au détriment des victimes, démantelant davantage les services de sécurité et compromettant les principes démocratiques », peut-on lire dans sa déclaration du 24 avril 2025. Ce mouvement se dit donc prêt à s’opposer à tout accord de paix qui viendrait consacrer « une amnistie générale » pour tous les responsables des crimes graves, une « intégration collective » des rebelles au sein de l’armée nationale ainsi qu’une représentation des rebelles au sein des instances politiques du pays.

Filimbi, un mouvement né de la colère socio-politique

Le mouvement citoyen Filimbi, dont le nom signifie « coup de sifflet » en swahili, est né le 15 mars 2015 à Kinshasa. Cette structure a été fondée par des jeunes Congolais issus de divers horizons professionnels, dont Floribert Anzuluni, un banquier, Franck Otete, un médecin, et Yangu Kiakwama Kia Kizi, un licencié en droit. Le lancement officiel a été marqué par une conférence de presse à laquelle ont assisté des représentants de mouvements tels que « Y’en a marre » (Sénégal), « Balai Citoyen » (Burkina Faso) et La Lucha (RDC). Trois des fondateurs de ce mouvement ont été exilés en Europe, après s’être cachés pendant plusieurs semaines à Kinshasa pour fuir la répression organisée par le régime de Joseph Kabila. Parmi eux figurait Floribert Anzuluni. Le jour même de son lancement, une quarantaine de personnes présentes à la conférence ont été enlevées par des militaires, dont certaines ne seront libérées que dix-huit mois plus tard. Les fondateurs ont été accusés de « terrorisme » et de vouloir préparer une insurrection violente, bien qu’ils se revendiquent résolument de la non-violence et du respect du cadre légal.

Cofondé par Carbone Beni, Filimbi agit comme un des acteurs clés de la société civile. Ce mouvement se positionne comme une structure non partisane et non violente, visant à stimuler la participation citoyenne, en particulier des jeunes, afin d’améliorer les conditions de vie en influençant les décisions des autorités. Le nom « Filimbi » symbolise un appel à la mobilisation et à la vigilance face aux injustices.

Fred Bauma et Yves Makwambala, des visages devenus iconiques

Toujours en 2015, le jour du lancement de ce mouvement, Fred Bauma et Yves Makwambala, membres de Filimbi, ont été arrêtés lors d’un atelier organisé pour le lancement du mouvement. Ils ont été inculpés de complot contre le chef de l’État et de tentative de destruction ou de changement du régime constitutionnel. Un rapport d’enquête parlementaire a conclu que les militants de Filimbi n’avaient aucune visée terroriste. Malgré cette intervention du parlement, leur procès s’est finalement ouvert le 26 juin de la même année. La justice a repris les mêmes griefs, notamment celui d’avoir comploté contre la vie ou contre la personne du chef de l’État ; d’avoir tenté de détruire ou de changer le régime constitutionnel ; ou d’avoir incité des personnes à s’armer contre l’autorité de l’État. Les autorités ont aussi accusé Fred Bauma d’avoir troublé l’ordre public, et Yves d’avoir publiquement offensé le chef de l’État.

En décembre 2016, Carbone Beni, un des leaders du mouvement, a été arrêté lors de la mobilisation contre le maintien au pouvoir de Joseph Kabila après la fin de son mandat constitutionnel en décembre 2016. Il a été détenu pendant plus de neuf mois avant d’être condamné à douze mois de prison pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’État », « offense au chef de l’État » et « publication et distribution d’écrits subversifs ».

Tshisekedi réchauffe ces mouvements avec le débat sur la Constitution

Comme la LUCHA, Filimbi va perdre son influence après la fin de ce combat politique, consacré par le départ du pouvoir de Joseph Kabila le 24 janvier 2019. Mais Félix Tshisekedi va redonner de l’eau au moulin de ces mouvements en relançant le débat sur la modification ou le changement de la Constitution en octobre 2024. En décembre de la même année, le mouvement s’est opposé fermement à toute modification de la Constitution, dénonçant une tentative de coup d’État masqué et appelant le gouvernement à se concentrer sur les priorités urgentes telles que la sécurité et le bien-être des Congolais. « Nous ne nous laisserons pas faire. Nous sommes prêts à défendre notre Constitution, qui est le fruit de longues luttes et de nombreux sacrifices », avait déclaré Christophe Muyisa, cadre de Filimbi à Goma.

Depuis l’occupation de Goma et de Bukavu par les rebelles du M23, les deux mouvements font face à des menaces, notamment à Goma, où la LUCHA a été explicitement menacée par des partisans de l’AFC/M23, soulignant la pression exercée sur les voix critiques par ces rebelles.

Depuis l’alternance pacifique, Filimbi mène diverses actions, telles que des campagnes de sensibilisation contre l’incivisme, des initiatives d’assainissement urbain, des formations sur la gestion de l’environnement et des mobilisations contre les dépenses publiques excessives. Ce mouvement se consacre maintenant à un autre combat : celui de la réduction significative des dépenses publiques, estimant que 70 % du budget national est consacré au fonctionnement des institutions, au détriment des secteurs essentiels comme l’éducation, la santé et la sécurité. Le mouvement organise des formations pour sensibiliser la jeunesse à la gestion de l’environnement, illustrant ainsi son engagement pour un développement durable.

Heshima

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