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RDC : Quand Kamitatu réveille les démons du fédéralisme
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La redaction
Un débat sur le fédéralisme, vieux de plus de 60 ans, a refait surface depuis le 11 avril 2025 en République démocratique du Congo (RDC). Dans une tribune publiée par un média belge et signée de la main d’Olivier Kamitatu, porte-parole de l’opposant Moïse Katumbi, l’auteur a plaidé pour un dialogue national inclusif en vue de l’adoption de réformes constitutionnelles pouvant aboutir à un État fédéral. Une réflexion qui a suscité une levée de boucliers même dans le camp des opposants au président Félix Tshisekedi. Heshima Magazine revient sur les raisons qui motivent le rejet d’une telle réforme et les risques de balkanisation qui en résultent.
Olivier Kamitatu Etsu a jeté le pavé dans la mare en soulevant un débat qui, au fil des années, a pris la forme d’un tabou en RDC. Et ce n’est pas pour rien ! Les Congolais gardent encore un souvenir amer du fédéralisme des années 60. Aujourd’hui, ceux qui sont âgés de 80 ans ou plus peuvent encore se souvenir des tumultes politiques qui ont suivi l’indépendance du pays. Soixante-cinq ans après la sécession katangaise, Olivier Kamitatu pense que le fédéralisme représente une voie réaliste et nécessaire pour construire un Congo uni, prospère et pacifique, où chaque région jouerait un rôle actif dans le destin commun. L’ancien président de l’Assemblée nationale constate également que la centralisation excessive de la gouvernance freine le développement du pays, malgré ses immenses richesses naturelles et culturelles.
Le porte-parole de Katumbi note que la décentralisation promise par la Constitution de 2006 est restée inefficace. Les provinces dépendent toujours de Kinshasa pour leurs ressources et décisions. Face à un tel échec du modèle unitaire, il propose une fédéralisation basée sur six grandes régions historiques : Orientale, Équateur, Kongo, Kasaï, Katanga et Kivu. Selon lui, ce système offrirait une autonomie constitutionnelle avec des institutions régionales robustes, permettant une meilleure gestion des ressources et une gouvernance adaptée aux réalités locales. Kamitatu soutient que ce modèle valoriserait la diversité culturelle du pays, avec ses 250 groupes ethniques et 400 dialectes, tout en garantissant une répartition équitable des revenus : 60 % pour les régions, 30 % pour l’État fédéral et 10 % pour un fonds d’égalisation.
Mais son argumentaire n’a pas tenu le temps d’un seul week-end, avant d’être battu en brèche par d’autres Congolais. La première à allumer la mèche, c’est une Kabiliste : Marie-Ange Mushobekwa. À travers une réflexion publiée sur les réseaux sociaux, le dimanche 13 avril, elle a fait savoir que la RDC devrait conserver son système actuel d’État unitaire fortement décentralisé, tel que défini par la Constitution. La présidente du Mouvement pour la cohésion nationale (MCN) et cadre du Front commun pour le Congo (FCC) de l’ancien président Joseph Kabila pense que la situation actuelle du pays n’est pas due à la forme de l’État, mais plutôt au non-respect de la Constitution et à la mauvaise gestion des institutions. « Nous ne sommes pas encore assez mûrs pour le fédéralisme. Celui-ci va consacrer la balkanisation de notre pays », a averti Marie-Ange Mushobekwa. En faisant cette intervention, l’ancienne ministre des Droits humains lâche un mot tout aussi vieux dans le vocabulaire politique en RDC : la balkanisation. Un mot qui réveille les démons des années sécessionnistes.
Quand Lumumba alertait contre le fédéralisme…
Au lendemain de l’indépendance de la RDC, le pays fonctionnait pourtant avec un système fédéral. Le pays était régi ainsi avant l’adoption d’une constitution propre au Congo indépendant, celle de Luluabourg (adoptée en août 1964). Mais le communautarisme qui caractérisait déjà les leaders politiques de l’époque et le repli identitaire ont été perçus comme un ferment pour la balkanisation du pays au cas où le fédéralisme était gardé comme forme de l’État. Celui qui deviendra le tout premier Premier ministre du pays, Patrice Emery Lumumba, voyait déjà ce danger venir. Avant même l’indépendance du pays, le Sud-Kasaï a fait sécession le 14 juin 1960. Le Katanga emboîtera le pas quelques jours plus tard après l’indépendance, soit le 11 juillet 1960. « Lumumba avait observé le pays et trouvait qu’il n’y avait que des organisations tribales comme la CONAKAT ou l’ABAKO [Alliance des Bakongo]. Il n’y avait pas vraiment des partis nationalistes. C’est ainsi qu’il avait créé le Mouvement national Congolais (MNC) pour réunir tous les Congolais et éviter le risque de partition de la RDC », avait expliqué Barthélemy Okito, président de la Ligue nationale des Anamongo. Ce que craignait Lumumba avait fini par arriver avec ces deux sécessions, surtout celle du Katanga menée par Moïse Tshombe, leader de la Confédération des associations tribales du Katanga (CONAKAT). « Sous le camouflage du mot fédéralisme, on veut opposer les populations du Congo […]. Ce que nous voyons aujourd’hui, c’est que ceux qui préconisent le fédéralisme, préconisent en réalité le séparatisme », avait déclaré Patrice Emery Lumumba.
Moïse Tshombe vaincu mais pas son fédéralisme
Après la mort de Lumumba, la liquidation du Katanga sécessionniste était devenue la priorité du gouvernement du nouveau Premier ministre Cyril Adoula. Moïse Tshombe, qui trônait à la tête d’un État sécessionniste riche en minerais et protégé par des mercenaires européens, bénéficiait encore du soutien tacite de la Belgique et des grandes compagnies minières. En novembre 1961, le Conseil de sécurité de l’ONU adopte la résolution 169, autorisant l’usage de la force pour rétablir l’unité du Congo. Les Casques bleus de l’ONUC mènent plusieurs opérations. Après des combats intenses, les forces katangaises sont vaincues, et Tshombe capitule le 15 janvier 1963, mettant fin à 28 mois de sécession. Malgré sa capitulation, Tshombe n’abandonnera pas ses idéaux sécessionnistes. Devenu Premier ministre du gouvernement central, il fera tout pour patronner les assises de Luluabourg ayant conduit à la rédaction de la Constitution d’août 1964. Cette Constitution, dite de « Luluabourg », a repris la forme d’un État fédéral au régime parlementaire, le multipartisme et un Parlement à deux chambres. Ce qui était pour Tshombe une forme légale et pudique de rechercher encore l’autonomie de son Katanga. Mais avec le coup d’État opéré par le maréchal Mobutu, le 24 novembre 1965, ce projet d’État fédéral mourra avec la suspension de la Constitution de Luluabourg par le nouveau maître du lieu.
Olivier Kamitatu dépoussière un vieux débat
Ce vieux débat autour du fédéralisme avait continué à exister avec notamment la génération de 13 parlementaires dont Gabriel Kyungu Wa Kumwanza et Etienne Tshisekedi. Ce dernier, après avoir observé plusieurs replis identitaires dans le pays surtout chez certains partisans du fédéralisme, estimera que le pays n’était pas encore prêt pour une telle option, disant même avoir « peur de ce mot ». Après la génération de Kyungu, Olivier Kamitatu vient dépoussiérer ce débat, réveillant des vieux démons. Pourtant, le pacte républicain actuel issu du dialogue de Sun City a traité cette question du fédéralisme. La Constitution actuelle a pris en compte les aspirations du fédéralisme et celles de l’unitarisme pour créer une forme de l’État « hybride », conciliant les deux tendances. C’est « le juste milieu pour tout le monde », estime Marie-Ange Mushobekwa, mettant en valeur le côté fortement décentralisé de l’État comme un élément du fédéralisme intégré dans la constitution qu’il faut simplement respecter et « appliquer pleinement ».
La crainte d’un membre du PPRD
De son côté, Patrick Nkanga s’oppose aussi à l’idée du fédéralisme. Ce rapporteur du bureau politique du PPRD, le parti de Joseph Kabila, craint que le fédéralisme engendre la balkanisation du pays, estimant que le peuple congolais n’est pas encore mature pour cette forme de l’État. « Si la décentralisation a été perçue à tort, dans notre société, comme la politique du ‘chacun chez soi’ qu’en sera-t-il du fédéralisme ? », s’est-il interrogé. Pour lui, le niveau de maturité de la société congolaise « ne permet aucunement une telle option à ce stade ». Il pense que la forme actuelle de l’État est la résultante du Pacte républicain de Sun City qui, selon lui, est « profondément altéré » par des dirigeants. Patrick Nkanga pense qu’il faut juste respecter cette Constitution.
Les risques de l’éclatement du Congo
Si le fédéralisme peut présenter certains avantages en termes de gestion des entités, il est cependant perçu comme la porte d’à côté de l’éclatement d’un pays surtout si les fondements de la nation sont encore fragiles. Et la RDC est encore sur la liste des pays qui présentent de tels risques. Pour Teddy Mfitu, chercheur et consultant sénior au cabinet Congo Investissement Consulting Partners (CICPAR), le fédéralisme peut être une route tracée vers la partition dans le cas du Congo. Ce chercheur énumère des pays qui ont opté pour le fédéralisme et ont fini par disparaître les années qui ont suivi un tel choix de gouvernance.
Le fédéralisme soviétique (URSS), loin d’être un trophée, s’est révélé comme un fardeau qui a accéléré la désintégration de l’empire des Tsars, a-t-il rappelé. La Yougoslavie, ajoute-t-il, avait établi un système fédéral complexe. Cette nation dirigée par Josip Broz Tito a opté pour un État fédéré avec six républiques et deux provinces autonomes. Ce système, conçu pour gérer la diversité ethnique et nationale, s’est transformé en une machine à fragmenter lorsque les contrôles centraux se sont relâchés après la mort de Tito. Aujourd’hui, la Yougoslavie appartient au passé.
Selon ce chercheur, la Tchécoslovaquie a adopté un système fédéral en 1969, divisant le pays en deux républiques fédérées (Tchèque et Slovaque). Ce système, conçu pour apaiser les tensions entre les deux entités, a, en réalité, institutionnalisé leurs différences et créé des structures politiques parallèles qui ont rendu la partition de 1993 (« le divorce de velours ») presque inévitable. Là encore, le fédéralisme a été un prélude à la dislocation.
S’agissant des risques de l’éclatement du Congo, Teddy Mfitu prend l’exemple des mouvements comme le Bundu dia Kongo (BDK) qui s’inscrit déjà « dans une tradition ethno-messianiste », cela pourrait être exacerbée par un système fédéral. Il en est de même pour les Bakata Katanga. Ces quelques exemples historiques montrent que le fédéralisme, loin d’être une panacée, peut se transformer en fardeau insupportable pour des États fragiles. « L’état actuel de la nation congolaise ne permet pas de prendre un risque inconsidéré », a-t-il prévenu.
Un débat qui divise profondément
Le débat relancé par Kamitatu a suscité des réactions virulentes, révélant des fractures profondes au sein de la classe politique et de la société congolaise. Patrick Muyaya, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, a qualifié la proposition de Kamitatu de « distraction » dans le contexte actuel, marqué par des crises sécuritaires et humanitaires, notamment dans l’est du pays. Il a suggéré que le débat sur le fédéralisme pourrait dissimuler des intentions de balkanisation, accusant ses promoteurs de vouloir « diviser le pays au moment où il a besoin d’unité ». Muyaya a insisté sur le fait que la Constitution actuelle, avec sa décentralisation, offre un cadre suffisant si elle est correctement appliquée.
Eugène Diomi Ndongala, président du parti Démocratie Chrétienne, a rejeté catégoriquement l’idée du fédéralisme, estimant qu’elle violerait l’article 220 de la Constitution, qui protège les principes fondamentaux de l’État unitaire. « Le fédéralisme, dans le contexte actuel, est une chimère qui risque de consacrer la partition du pays », a-t-il déclaré, appelant à une réforme de la gouvernance dans le cadre unitaire existant.
À Kinshasa, les habitants interrogés par Actualité.cd expriment des avis partagés. Certains, comme Mireille N., une commerçante, soutiennent l’idée d’une meilleure gestion locale des ressources, mais craignent que le fédéralisme n’accentue les divisions ethniques. D’autres, comme Joseph K., un enseignant, rejettent l’idée, affirmant que « le Congo a besoin d’unité, pas de fragmentation ». Ces réactions montrent que le débat dépasse les cercles politiques et touche le vécu quotidien des Congolais.
Jean-Thierry Monsenepwo, dans une tribune publiée sur Dépêche.cd, va plus loin en accusant les partisans du fédéralisme de « faire le jeu des puissances étrangères » qui chercheraient à affaiblir la RDC. Il soutient que l’État unitaire, malgré ses imperfections, reste le meilleur rempart contre les velléités séparatistes, surtout dans un contexte où l’est du pays est sous la menace du M23 et du Rwanda voisin. Monsenepwo appelle à une réforme profonde de l’État unitaire, avec une décentralisation effective, plutôt qu’un saut risqué vers le fédéralisme.
Christian Malamba, dans une tribune pour Le Potentiel, qualifie le fédéralisme de « fausse solution » à un vrai problème congolais. Il argue que les défis de la RDC – pauvreté, insécurité, mauvaise gouvernance – ne découlent pas de la forme de l’État, mais d’un manque de volonté politique et de respect des lois. « Le fédéralisme, dans un pays où l’unité nationale est encore fragile, risque de transformer chaque région en un fief autonome, minant la cohésion nationale », écrit-il.
Rodrigue Ramazani, président de la Nouvelle société civile congolaise, met en garde contre les « chimères fédéralistes », affirmant que la RDC n’a pas les infrastructures ni la maturité politique pour un tel système. Il plaide pour une décentralisation mieux appliquée, avec un transfert réel de compétences et de ressources aux provinces, comme prévu par la Constitution.
René Mayilukila, analyste politique, souligne les dangers d’une décentralisation mal maîtrisée, qui pourrait servir de tremplin au fédéralisme. Il cite l’exemple du découpage territorial de 2015, qui a multiplié les provinces sans leur donner les moyens de fonctionner, créant des entités administratives faibles et dépendantes de Kinshasa. « Passer au fédéralisme sans une préparation rigoureuse, c’est ouvrir la voie à l’instabilité », prévient-il.
Un timing controversé
Le choix de Kamitatu de relancer ce débat en pleine crise sécuritaire dans l’est du pays, où le M23 contrôle des pans entiers du Nord-Kivu, est perçu comme maladroit, voire suspect. Prince Epenge, de la coalition LAMUKA, a qualifié l’initiative de « provocatrice », accusant ses promoteurs de vouloir « consacrer la balkanisation » au moment où la RDC lutte pour restaurer sa souveraineté. « Parler de fédéralisme alors que nous perdons le contrôle du Kivu, c’est danser sur les tombes des martyrs de l’unité nationale », a-t-il déclaré.
En réalité, la plupart des chantres du fédéralisme cachent mal un sentiment séparatiste. Olivier Kamitatu, voulant peut-être faire plaisir à son leader, Moïse Katumbi, a ressuscité un débat qui porte les germes de la décrépitude du Congo. Cela, au moment où le pays a perdu une partie de sa souveraineté dans les Kivu. Le timing choisi par ce fils d’un des pionniers de l’indépendance n’est donc pas innocent. Les Congolais, marqués par leur histoire tumultueuse, restent méfiants face à une proposition qui, sous des airs de modernité, pourrait raviver les blessures du passé et menacer l’unité d’un pays déjà fragilisé.
Heshima
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RDC : les mouvements citoyens LUCHA et Filimbi sont-ils en perte de vitesse ?
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14 heures agoon
mai 15, 2025By
La redaction
Véritables porte-étendards des manifestations citoyennes lors de la dernière décennie en République démocratique du Congo (RDC), les mouvements Lutte pour le changement (LUCHA) et Filimbi, qui signifie « coup de sifflet » en swahili, semblent perdre leur cadence depuis le changement de régime politique à la tête du pays. Pourtant, malgré le départ de Joseph Kabila du pouvoir, les défis sociaux et sécuritaires demeurent. L’occupation de certaines villes du pays par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) a affecté les activités de ces mouvements.
Engagés pour la démocratie, la justice sociale et la bonne gouvernance, les deux mouvements se sont montrés comme des acteurs influents de la société civile lors de la dernière décennie. Fondée en 2012, la LUCHA rassemble plusieurs centaines de jeunes à travers le pays, mais le mouvement a beaucoup fait parler de lui dans les villes de Goma, Beni, Butembo, Lubero et Kinshasa. Malgré les défis sécuritaires et politiques, leur présence et leur action témoignent de leur résilience et de leur détermination à défendre les droits des Congolais.
Cependant, il faut reconnaître que depuis la fin du régime de l’ancien président de la République Joseph Kabila, les actions de ces mouvements ont baissé d’intensité. « Ils avaient focalisé leurs actions notamment sur le départ du pouvoir de Joseph Kabila. Après avoir atteint cet objectif, le reste des actions de la LUCHA et Filimbi n’a pas eu un grand impact », explique un analyste sur les dynamiques politiques en RDC.
LUCHA : un engagement constant pour la démocratie
La LUCHA continue de défendre la dignité humaine, la justice sociale et la démocratie par des actions non violentes. Le mouvement reste actif dans plusieurs provinces, notamment au Nord-Kivu, où il soutient les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et dénonce les violations des droits humains commises par les groupes armés, y compris le M23 soutenu par le Rwanda. Elle n’hésite pas également à critiquer la gouvernance du président Félix Tshisekedi, l’accusant de renforcer un système autoritaire et de ne pas améliorer les conditions de vie des Congolais.
Dialogue entre Kinshasa et AFC/M23, la LUCHA se positionne
Pour continuer à marquer sa présence dans le débat public, la LUCHA a livré sa position au sujet du dialogue entre le gouvernement congolais et les rebelles de l’AFC/M23, qui se tient à Doha, capitale du Qatar. « Nous tenons à mettre en garde contre des ‘‘accords de paix’’ récompensant les criminels au détriment des victimes, démantelant davantage les services de sécurité et compromettant les principes démocratiques », peut-on lire dans sa déclaration du 24 avril 2025. Ce mouvement se dit donc prêt à s’opposer à tout accord de paix qui viendrait consacrer « une amnistie générale » pour tous les responsables des crimes graves, une « intégration collective » des rebelles au sein de l’armée nationale ainsi qu’une représentation des rebelles au sein des instances politiques du pays.
Filimbi, un mouvement né de la colère socio-politique
Le mouvement citoyen Filimbi, dont le nom signifie « coup de sifflet » en swahili, est né le 15 mars 2015 à Kinshasa. Cette structure a été fondée par des jeunes Congolais issus de divers horizons professionnels, dont Floribert Anzuluni, un banquier, Franck Otete, un médecin, et Yangu Kiakwama Kia Kizi, un licencié en droit. Le lancement officiel a été marqué par une conférence de presse à laquelle ont assisté des représentants de mouvements tels que « Y’en a marre » (Sénégal), « Balai Citoyen » (Burkina Faso) et La Lucha (RDC). Trois des fondateurs de ce mouvement ont été exilés en Europe, après s’être cachés pendant plusieurs semaines à Kinshasa pour fuir la répression organisée par le régime de Joseph Kabila. Parmi eux figurait Floribert Anzuluni. Le jour même de son lancement, une quarantaine de personnes présentes à la conférence ont été enlevées par des militaires, dont certaines ne seront libérées que dix-huit mois plus tard. Les fondateurs ont été accusés de « terrorisme » et de vouloir préparer une insurrection violente, bien qu’ils se revendiquent résolument de la non-violence et du respect du cadre légal.
Cofondé par Carbone Beni, Filimbi agit comme un des acteurs clés de la société civile. Ce mouvement se positionne comme une structure non partisane et non violente, visant à stimuler la participation citoyenne, en particulier des jeunes, afin d’améliorer les conditions de vie en influençant les décisions des autorités. Le nom « Filimbi » symbolise un appel à la mobilisation et à la vigilance face aux injustices.
Fred Bauma et Yves Makwambala, des visages devenus iconiques
Toujours en 2015, le jour du lancement de ce mouvement, Fred Bauma et Yves Makwambala, membres de Filimbi, ont été arrêtés lors d’un atelier organisé pour le lancement du mouvement. Ils ont été inculpés de complot contre le chef de l’État et de tentative de destruction ou de changement du régime constitutionnel. Un rapport d’enquête parlementaire a conclu que les militants de Filimbi n’avaient aucune visée terroriste. Malgré cette intervention du parlement, leur procès s’est finalement ouvert le 26 juin de la même année. La justice a repris les mêmes griefs, notamment celui d’avoir comploté contre la vie ou contre la personne du chef de l’État ; d’avoir tenté de détruire ou de changer le régime constitutionnel ; ou d’avoir incité des personnes à s’armer contre l’autorité de l’État. Les autorités ont aussi accusé Fred Bauma d’avoir troublé l’ordre public, et Yves d’avoir publiquement offensé le chef de l’État.
En décembre 2016, Carbone Beni, un des leaders du mouvement, a été arrêté lors de la mobilisation contre le maintien au pouvoir de Joseph Kabila après la fin de son mandat constitutionnel en décembre 2016. Il a été détenu pendant plus de neuf mois avant d’être condamné à douze mois de prison pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’État », « offense au chef de l’État » et « publication et distribution d’écrits subversifs ».
Tshisekedi réchauffe ces mouvements avec le débat sur la Constitution
Comme la LUCHA, Filimbi va perdre son influence après la fin de ce combat politique, consacré par le départ du pouvoir de Joseph Kabila le 24 janvier 2019. Mais Félix Tshisekedi va redonner de l’eau au moulin de ces mouvements en relançant le débat sur la modification ou le changement de la Constitution en octobre 2024. En décembre de la même année, le mouvement s’est opposé fermement à toute modification de la Constitution, dénonçant une tentative de coup d’État masqué et appelant le gouvernement à se concentrer sur les priorités urgentes telles que la sécurité et le bien-être des Congolais. « Nous ne nous laisserons pas faire. Nous sommes prêts à défendre notre Constitution, qui est le fruit de longues luttes et de nombreux sacrifices », avait déclaré Christophe Muyisa, cadre de Filimbi à Goma.
Depuis l’occupation de Goma et de Bukavu par les rebelles du M23, les deux mouvements font face à des menaces, notamment à Goma, où la LUCHA a été explicitement menacée par des partisans de l’AFC/M23, soulignant la pression exercée sur les voix critiques par ces rebelles.
Depuis l’alternance pacifique, Filimbi mène diverses actions, telles que des campagnes de sensibilisation contre l’incivisme, des initiatives d’assainissement urbain, des formations sur la gestion de l’environnement et des mobilisations contre les dépenses publiques excessives. Ce mouvement se consacre maintenant à un autre combat : celui de la réduction significative des dépenses publiques, estimant que 70 % du budget national est consacré au fonctionnement des institutions, au détriment des secteurs essentiels comme l’éducation, la santé et la sécurité. Le mouvement organise des formations pour sensibiliser la jeunesse à la gestion de l’environnement, illustrant ainsi son engagement pour un développement durable.
Heshima
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La Cour constitutionnelle en RDC : arbitre impartial ou relais du pouvoir ?
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20 heures agoon
mai 15, 2025By
La redaction
Dans une République démocratique du Congo (RDC) encore hantée par ses démons institutionnels, la Cour constitutionnelle cristallise à la fois les espoirs d’une démocratie en construction et les soupçons persistants d’un pouvoir sans contrepoids. Théoriquement investie du rôle de gardienne de la Constitution et d’arbitre des contentieux électoraux, cette haute juridiction se trouve au cœur d’une interrogation essentielle : défend-elle réellement l’État de droit ou s’est-elle muée, avec le temps, en auxiliaire de l’exécutif ?
L’origine de la Cour remonte à un tournant historique : l’adoption de la Constitution du 18 février 2006, fruit des accords de paix de Pretoria qui mirent un terme à la seconde guerre du Congo. Plus de cinq millions de morts, des institutions à rebâtir, et la promesse d’un nouvel ordre constitutionnel. L’article 157 crée alors une Cour constitutionnelle distincte, censée rompre avec les pratiques d’une justice inféodée, héritée de l’époque coloniale et prolongée sous le régime Mobutu.
À cette époque, le contrôle de constitutionnalité était confié à la Cour suprême, perçue comme une simple caisse de résonance du pouvoir en place. « Sous Mobutu, elle ne faisait qu’entériner les décisions de l’exécutif », résume Me Thierry Nlandu, avocat et constitutionnaliste. L’effondrement du régime en 1997, suivi d’une transition chaotique, met en lumière la nécessité d’un véritable contre-pouvoir judiciaire.
Mais il faudra attendre sept longues années pour que la Cour devienne réellement opérationnelle. Ce n’est qu’en 2013 qu’elle commence à exercer ses fonctions, révélant les résistances politiques à sa mise en œuvre. « Ce délai anormal témoigne de la méfiance des élites politiques face à toute forme de contrôle institutionnel », analyse le politologue Christian Moleka. Entre-temps, la Cour suprême a continué de trancher les litiges électoraux, notamment en 2006 et 2011 dans un climat de fortes contestations.
Alors que le pays s’avance vers de nouvelles échéances électorales, la Cour demeure sous étroite surveillance. Sur le papier, elle incarne l’équilibre des pouvoirs. Dans les faits, son indépendance continue de diviser.
Un mandat taillé pour l’exécutif ?
Neuf juges, neuf ans de mandat, un renouvellement par tiers tous les trois ans : la Cour constitutionnelle de la République démocratique du Congo affiche, sur le papier, tous les attributs d’une institution indépendante et pérenne. Sa composition tripartite, trois membres nommés par le président de la République, trois par le Parlement en Congrès, trois par le Conseil supérieur de la magistrature, semble garantir un savant équilibre des pouvoirs. La Constitution renforce cette exigence d’expertise en imposant que six des neuf juges soient des juristes chevronnés, dotés d’au moins quinze ans d’expérience.
Pourtant, derrière cette architecture juridique soigneusement calibrée, la réalité institutionnelle révèle des fissures préoccupantes. « Le système congolais de nomination des juges constitutionnels présente une faille majeure : le président conserve un pouvoir de validation finale excessif », analyse Bob Kabamba, professeur de sciences politiques à l’Université de Liège. Un constat partagé par de nombreux observateurs dans un pays où l’exécutif exerce traditionnellement une influence déterminante sur le législatif et où le Conseil supérieur de la magistrature peine à affirmer son autonomie.
Les nominations controversées de 2020 ont mis en lumière ces fragilités structurelles. Quand le président Félix Tshisekedi désigne 3 nouveaux juges Dieudonné Kaluba Dibwa, ancien avocat de la République auprès de la CPI, Alphonsine Kalume Asengo Cheusi et Kamula Badibanga, la réaction ne se fait pas attendre. L’opposition dénonce une « mainmise déguisée » sur l’institution, tandis que des manifestations spontanées, bien que très minimes, éclatent dans la capitale. « Ces nominations respectent strictement la Constitution », se défend l’entourage présidentiel. Un argument qui peine à convaincre sur le terrain politique, tant Kaluba est soupçonné d’être proche de Tshisekedi.
Le piège du renouvellement échelonné
Le système de renouvellement par tiers, conçu pour assurer une sage continuité, révèle ses limites dans la pratique. Retards chroniques dans les remplacements, marchandages politiques opaques, sièges laissés vacants : chaque cycle de nomination devient l’occasion de nouvelles batailles d’influence qui grèvent la crédibilité de l’institution.
Des contentieux électoraux aux décisions controversées
L’ère pré-Constitutionnelle de la justice électorale en RDC reste marquée par des décisions qui continuent de hanter la mémoire collective. Avant l’opérationnalisation de la Cour constitutionnelle, c’est la Cour suprême de justice qui endossait le rôle d’arbitre électoral, avec des verdicts lourds de conséquences.
L’élection présidentielle de 2006, censée tourner la page des conflits, a révélé les failles du système. Lorsque Joseph Kabila est déclaré vainqueur face à Jean-Pierre Bemba avec 58% des voix, les contestations éclatent immédiatement. Le challenger dénonce des irrégularités massives dans le processus de dépouillement. Pourtant, la Cour suprême valide les résultats en un temps record, sans véritable examen des preuves avancées. « C’était une mascarade judiciaire », confie encore aujourd’hui un ancien collaborateur de Bemba, sous couvert d’anonymat.
Cinq ans plus tard, le scénario se répète avec une intensité accrue. Le face-à-face entre Kabila et Étienne Tshisekedi donne lieu à l’un des scrutins les plus controversés de l’histoire du pays. Malgré les rapports accablants des observateurs internationaux, l’Union européenne parlant de résultats « non crédibles », le Centre Carter dénonçant un processus « dépourvu de transparence », la Cour suprême confirme une nouvelle fois la victoire du sortant. Les violences qui s’ensuivent à Kinshasa et dans d’autres régions marquent durablement les esprits et sonnent le glas de la crédibilité de l’institution.
Ces épisodes douloureux ont pesé comme une chape de plomb sur les épaules de la nouvelle Cour constitutionnelle lors de sa mise en service en 2013. « Nous héritions d’une défiance systémique envers la justice électorale », reconnaît un ancien membre de l’institution. La tâche était immense : il fallait à la fois se démarquer des pratiques passées et imposer une nouvelle culture de l’indépendance judiciaire dans un paysage politique encore marqué par les réflexes autoritaires.
2018 : La Cour constitutionnelle face au test décisif
L’élection présidentielle de décembre 2018 devint le banc d’essai tant redouté pour la jeune Cour constitutionnelle. Après des années de reports sous Joseph Kabila, ce scrutin historique opposait trois figures emblématiques : Félix Tshisekedi, héritier politique de l’opposant historique Étienne Tshisekedi ; Martin Fayulu, candidat d’une coalition hétéroclite ; et Emmanuel Shadary, dauphin de Kabila.
La proclamation des résultats par la CENI le 10 janvier 2019 déclencha une onde de choc. Alors que Tshisekedi est annoncé vainqueur avec 38,57% des voix, des fuites publiées par le Financial Times révèlent des chiffres radicalement différents, allant jusqu’à attribuer près de 60% des suffrages à Fayulu.
Fayulu saisit immédiatement la Cour constitutionnelle, dénonçant un « coup d’État électoral » et exigeant un recomptage complet. Le 20 janvier, après dix jours d’audiences tendues, la Cour rendit sa décision. D’une voix ferme, elle rejeta toutes les requêtes de Fayulu, validant l’élection de Tshisekedi. Le verdict, rédigé dans un jargon juridique impeccable, ne parvint pas à masquer le malaise ambiant. Dans les coulisses, des sources judiciaires confièrent à Jeune Afrique que plusieurs juges avaient exprimé des réserves, mais s’étaient finalement rangés à l’avis majoritaire.
Bien qu’il y ait eu des scènes de liesse parmi la population congolaise à la suite de la confirmation de la victoire de Félix Tshisekedi, l’onde de choc de cette décision s’est propagée bien au-delà des frontières congolaises. Tandis que Fayulu qualifiait la Cour d’« instrument de légitimation d’une mascarade », certains partenaires internationaux ont adopté une position ambiguë, reconnaissant officiellement la victoire de Tshisekedi tout en exprimant des « préoccupations sérieuses ».
L’ombre de 2018 continue de planer sur la Cour constitutionnelle. Si l’institution a depuis rendu d’autres arrêts notables, c’est bien ce jugement qui reste gravé dans la mémoire collective comme son heure de vérité, ou son occasion manquée. Alors que le pays s’achemine vers de nouvelles échéances électorales, nombreux sont ceux qui s’interrogent : la Cour saura-t-elle tirer les leçons de ce passé récent, ou reproduira-t-elle les mêmes schémas qui ont entaché sa crédibilité ?
2023 : La Cour constitutionnelle face au paradoxe de la légitimité
Le dernier scrutin présidentiel de décembre 2023 a placé la Cour constitutionnelle face à un dilemme familier. La réélection de Félix Tshisekedi, avec un score sans appel (73,47 %) face à Moïse Katumbi (18 %) et Martin Fayulu (4,9 %), a ravivé le débat sur le rôle de l’institution dans la validation des processus électoraux.
Le jour du scrutin, certains bureaux de vote n’ont pas ouvert à l’heure et de nombreux électeurs ont peiné à retrouver leurs noms sur les listes. En réponse, la CENI a prolongé le vote sur plusieurs jours dans certaines circonscriptions, une décision vivement critiquée par des missions d’observation.
Félix Tshisekedi est déclaré vainqueur de l’élection présidentielle avec plus de 73 % des suffrages, distançant largement ses principaux concurrents, Moïse Katumbi et Martin Fayulu.
Lorsque Théodore Ngoy, un candidat marginal, dépose un recours détaillant des irrégularités, la Cour adopte une position nuancée. Tout en reconnaissant la réalité de certaines anomalies, elle estime dans son arrêt du 9 janvier 2024 que celles-ci n’étaient pas « d’une ampleur susceptible d’influer sur l’issue globale du scrutin ».
Cette décision en demi-teinte n’a pas convaincu l’opposition. Le boycott judiciaire de Katumbi témoigne de la défiance ambiante : « Plutôt que de recourir à une Cour complice, nous choisissons de dénoncer par d’autres moyens », déclare-t-il à RFI, dans un cinglant désaveu de l’institution.
Cependant, contrairement à 2018, la Cour a fait des efforts notables de transparence. Son jugement de 2023 s’appuie sur un dispositif argumenté détaillant méthodiquement chaque grief, citant les rapports d’observation et fournissant des analyses statistiques. « C’est une évolution positive dans la forme, même si le fond reste discutable », admet un expert électoral sous couvert d’anonymat.
Toutefois, cette victoire écrasante, bien que marquée par des irrégularités localisées relevées par les observateurs, n’a pas suscité de contestation majeure quant à la légitimité du résultat final. Les missions d’observation, tant nationales qu’internationales, y compris le monitoring conjoint de la CENCO et de l’ECC, ont certes signalé des cas de bourrages d’urnes et des dysfonctionnements organisationnels, mais sans remettre en cause l’issue globale du scrutin. Aucune institution internationale ni capitale étrangère n’a émis de doute sérieux sur la proclamation du vainqueur, ni avancé de résultats alternatifs, confirmant ainsi une acceptation générale du verdict des urnes malgré les imperfections du processus.
Les défis dans le contexte des élections
Le rôle de la Cour constitutionnelle est central dans le traitement des recours électoraux. Pourtant, cette fonction se révèle problématique, notamment à cause des délais prolongés dans la prise de décision, de l’absence de transparence dans les délibérations, et du manque d’explications détaillées concernant les jugements rendus. Par exemple, lors des élections de 2011 et 2018, la Cour a été accusée de ne pas avoir pris en compte les préoccupations relatives aux fraudes électorales et aux irrégularités constatées durant le scrutin.
De plus, la Cour constitutionnelle est souvent accusée de manquer de l’indépendance nécessaire pour garantir une justice équitable. L’absence de diversité dans la composition de ses membres, et l’influence perçue du pouvoir exécutif, sont autant de facteurs qui renforcent la perception d’une institution partiellement alignée sur les intérêts politiques en place. Dans un contexte aussi chargé politiquement, les décisions de la Cour doivent impérativement être perçues comme transparentes et crédibles pour que la démocratie puisse se renforcer.
Nécessité d’une réforme
Face à ces multiples critiques, une réforme de la Cour constitutionnelle s’avère essentielle pour redonner confiance au peuple congolais. Plusieurs réformes sont envisagées pour renforcer l’indépendance et la transparence de cette institution. Parmi celles-ci, le renouvellement du mode de nomination des juges semble crucial. Actuellement, les membres de la Cour sont nommés par le Président de la République, ce qui suscite des inquiétudes quant à leur impartialité. Un processus de nomination plus inclusif, impliquant plusieurs institutions et acteurs de la société civile, pourrait garantir une plus grande légitimité.
Il est également nécessaire de revoir les processus décisionnels au sein de la Cour. La transparence des délibérations et la publication des motifs des décisions sont des mesures qui pourraient aider à apaiser les tensions et à renforcer la confiance du public. Lorsque la Cour rend une décision sur un recours électoral, il est crucial que celle-ci soit accompagnée d’explications claires et détaillées afin que la population comprenne les raisons qui ont conduit à un jugement spécifique, surtout lorsqu’il s’agit de résultats électoraux hautement contestés.
Rôle crucial dans la stabilité politique
Le rôle de la Cour constitutionnelle va au-delà de la simple validation des élections. Elle incarne également un gage de stabilité politique en période postélectorale, lorsque les tensions sont exacerbées et que les résultats sont remis en cause. Si la Cour prend des décisions éclairées et justifiées, elle peut contribuer à apaiser les tensions politiques et à éviter les dérives violentes qui ont marqué le passé du pays.
Cependant, cette fonction de régulateur de la vie politique n’est possible que si la Cour joue pleinement son rôle d’arbitre impartial. Si les décisions rendues sont perçues comme étant motivées par des intérêts politiques, cela risque d’aggraver les conflits et de déstabiliser davantage le pays. En ce sens, une réforme de la Cour constitutionnelle est une condition sine qua non pour renforcer l’état de droit en RDC et garantir un climat politique apaisé.
Vers une réforme nécessaire
La Cour constitutionnelle de la RDC doit se réinventer pour répondre aux attentes des Congolais et garantir le bon fonctionnement de la démocratie. Les réformes envisagées, tant au niveau de la composition de l’institution que de son fonctionnement interne, doivent permettre de restaurer sa crédibilité et son indépendance. Le renforcement de la transparence dans ses décisions et la promotion de l’intégrité de ses juges seront des éléments-clés pour assurer une justice électorale fiable.
En fin de compte, la confiance en la Cour constitutionnelle est essentielle pour la consolidation de la démocratie en RDC. C’est en garantissant l’indépendance de cette institution et en redonnant à ses décisions une légitimité incontestée que la RDC pourra espérer avancer sur la voie de la stabilité politique et du progrès démocratique. Les réformes de la Cour ne sont pas seulement une question de politique intérieure, mais une nécessité pour l’avenir du pays.
Heshima Magazine
Nation
Entre vitrine internationale et réalités locales, le pari risqué de « Visit DRC »
Published
2 jours agoon
mai 14, 2025By
La redaction
La République démocratique du Congo (RDC) cherche à renforcer sa visibilité internationale en s’associant à un club de football européen reconnu. L’affichage du nom de la RDC sur les maillots de l’AS Monaco lors des matchs officiels constitue un vecteur de promotion touristique et culturelle. Cependant, le pays de Félix Tshisekedi peine à réunir les prérequis pour un meilleur accueil des touristes. L’état des services aéroportuaires, le manque de sécurité, l’état impraticable du réseau routier et surtout l’insalubrité constituent des problèmes à résoudre avant de lancer un tel partenariat.
Le 10 mai, le ministre des Sports et Loisirs, Didier Budimbu, a signé un protocole d’accord avec Thiago Scuro, directeur général de l’AS Monaco, portant sur la promotion du football congolais et du tourisme. Ce contrat, d’une valeur de 1,6 million de dollars par saison, devrait concerner le développement du football congolais, avec un accent particulier sur le football. Il s’agit notamment de la formation d’entraîneurs, l’exécution de programmes de développement des jeunes talents, l’amélioration des infrastructures sportives et le renforcement des ligues locales. Une part du contrat est consacrée à la visibilité de la RDC à travers ce club de la principauté. Un autre aspect de cet accord est la contribution financière additionnelle de 200 000 euros prévue pour couvrir les frais de déplacement et de coordination de l’AS Monaco dans le cadre de ses interventions en RDC.
Sur le plan de la visibilité, le gouvernement tente d’imiter la politique rwandaise dur le tourisme avec Visit Rwanda. Une stratégie jugée mimétique par certains observateurs congolais, qui y voient une copie mal adaptée du modèle rwandais. « Ils veulent ‘‘Visit Congo’’ pendant qu’ici, routes, sécurité et aéroport sont à l’agonie. On vend une vitrine sans boutique, un rêve sans socle. Avant d’acheter des slogans, qu’on construise un pays. Sinon, c’est inviter au festin dans une maison en feu », a réagi un Congolais sur X. Beaucoup voient dans ce mimétisme du gouvernement une volonté de mettre la charrue avant les bœufs. « Ces touristes qu’on invite vont atterrir à l’aéroport de N’djili avec toutes les tracasseries qui caractérisent cette frontière ? Un travail d’image du pays devrait être fait en amont avant de signer de tels partenariats », a déclaré Sylvestre Kabongo, un analyste sportif. « Nous serons témoins de l’échec de ce partenariat. », ajoute un autre Congolais, estimant que le gouvernement devrait commencer par rendre le pays attractif avant d’inciter les touristes à venir visiter la RDC. L’insalubrité persistante, la corruption endémique et les embouteillages chroniques sont autant d’obstacles évoqués à ce projet de soft power.
De son côté, le gouvernement tente de tempérer. « Il ne s’agit pas forcément d’un contrat de visibilité mais plutôt d’un contrat de transfert de compétences pour l’amélioration du football en RDC et non Visit DRC », a déclaré une source citée par 7SUR7.CD.
Entre coopération sportive et image de marque

Ce partenariat s’inscrit dans une volonté de renforcer les relations entre la RDC et la France, en particulier dans le domaine du sport. Il ouvre la voie à de futures collaborations dans d’autres secteurs tels que l’éducation, la santé et la culture. Le succès de ce partenariat, selon certains, pourrait inciter d’autres clubs européens à collaborer avec la RDC, favorisant ainsi une diplomatie sportive active. Certaines sources au sein du ministère des Sports évoquent déjà des contacts avec des clubs espagnols majeurs comme le Real Madrid et le FC Barcelone. Avec ce partenariat, il est envisagé d’étendre ce type de projets sportifs à d’autres provinces de la RDC et de pérenniser les événements sportifs organisés.
Cette collaboration a été initiée par l’ancien international congolais Distel Zola, un ancien joueur de l’AS Monaco et fondateur de la Fondation « Bana Zola », qui œuvre en faveur des enfants défavorisés en RDC. En 2022, l’AS Monaco avait soutenu un tournoi de football organisé à Kinshasa, fournissant des tenues de match et du matériel sportif. Cet événement, soutenu par le Programme Alimentaire Mondial (PAM), visait à sensibiliser les jeunes à l’importance d’une alimentation équilibrée tout en leur offrant un moment d’évasion à travers le sport.
Une stratégie de marketing du Rwanda
Le Rwanda a établi des partenariats stratégiques avec plusieurs clubs de football européens dans le cadre de sa campagne de promotion touristique « Visit Rwanda ». Ces accords visent à renforcer la visibilité internationale du pays et à stimuler son secteur touristique. Depuis 2018, le Rwanda est le premier sponsor de la manche du maillot d’Arsenal, avec un contrat d’une valeur de 10 millions de livres sterling par an. Ce partenariat a été prolongé en 2021 pour quatre années supplémentaires. Il en est de même pour le club français du Paris Saint-Germain (PSG).
En août 2023, Kigali a signé un partenariat de cinq ans avec le Bayern Munich, axé sur le développement du football des jeunes et la promotion du tourisme. Ce partenariat comprend la création d’une académie de football FC Bayern au Rwanda. Début mai 2025, Kigali a conquis aussi l’Atletico Madrid, troisième club espagnol au classement actuel de la Liga.
Heshima
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