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Accords de paix en RDC : le long chemin vers une difficile stabilité
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La redaction
Cinq millions de morts, des dizaines de groupes armés, et des minerais qui valent de l’or. La République démocratique du Congo (RDC), indépendante depuis 1960, porte les stigmates de guerres où se mêlent rivalités ethniques, convoitises transnationales et impuissance de l’État. Trois accords majeurs Lusaka (1999), l’Accord Global de 2002 et Pretoria (2002) ont tenté, en vain, de rompre ce cycle infernal. Actuellement, Kinshasa et la rébellion du M23 sont en pleine négociation sous l’égide du Qatar et des États-Unis. Retour sur des traités qui ont buté sur les mêmes écueils : application partielle et défiance régionale.
La chute de Mobutu Sese Seko en 1997, après la première guerre du Congo, n’a pas sonné l’heure de la stabilité. Bien au contraire. Entre 1998 et 2003, la RDC s’enfonce dans un conflit régional dévastateur : neuf pays africains et des dizaines de milices s’affrontent dans ce qui deviendra la deuxième guerre du Congo, qualifiée par les experts de « guerre mondiale africaine » en raison de son ampleur. Aujourd’hui encore, l’Est du pays, notamment les Kivu, reste un baril de poudre. Le Mouvement du 23 mars (M23), soutenu par le Rwanda, y mène des offensives meurtrières. « Ces guerres ne sont jamais vraiment terminées. Elles se transforment », analyse un rapport de l’United States Institute of Peace (2024), pointant l’échec des mécanismes de désarmement et la persistance des « économies de guerre » liées à l’exploitation illégale des ressources congolaises.
Lusaka 1999 : un cessez-le-feu en trompe-l’œil pour la RDC
La signature de l’accord de cessez-le-feu de Lusaka en juillet 1999 devait marquer la fin de la deuxième guerre du Congo. Pourtant, les armes continueront de parler pendant quatre années supplémentaires. Ce paradoxe résume à lui seul l’échec d’une diplomatie pressée mais incapable de résoudre les causes profondes du conflit.
Tout commence par la rupture entre Laurent-Désiré Kabila et ses anciens parrains rwandais et ougandais. Le président congolais, porté au pouvoir grâce à leur soutien en 1997, cherche à s’émanciper de leur influence. Les rancœurs s’accumulent : Kigali reproche à Kinshasa sa passivité face aux FDLR, ces milices hutues issues du génocide rwandais qui opèrent depuis l’Est congolais. Kampala, de son côté, convoite ouvertement les richesses minières du Kivu.
Lorsque éclate la rébellion en août 1998, le conflit prend immédiatement une dimension régionale. D’un côté, le gouvernement congolais s’appuie sur les troupes angolaises, zimbabwéennes et namibiennes. De l’autre, les mouvements rebelles du RCD et du MLC, soutenus respectivement par le Rwanda et l’Ouganda, progressent vers Kinshasa. La capitale ne doit son salut qu’à l’intervention tardive des alliés de Kabila.
C’est dans ce contexte tendu que le président zambien Frederick Chiluba entre en scène. Médiateur infatigable, il parvient à réunir autour d’une même table belligérants et observateurs internationaux après onze mois de combats acharnés. Les discussions, marathon diplomatique ponctué de menaces et de marchandages, aboutissent finalement à un texte ambitieux signé le 10 juillet 1999.
L’accord prévoit un cessez-le-feu immédiat, le retrait des troupes étrangères et la création d’une commission militaire mixte sous supervision onusienne. Sur le papier, toutes les conditions semblent réunies pour ramener la paix. Mais sur le terrain, les violations commencent avant même l’achèvement du processus de signature. A Gemena comme à Gbadolite, les combats reprennent de plus belle.
Les raisons de cet échec sont multiples. L’exclusion initiale des groupes rebelles des négociations a nourri leur méfiance. Le MLC, dirigé par Jean-Pierre Bemba, refuse de s’engager tant que le RCD n’aura pas fait de même. La MONUC, mission de paix mandatée par l’ONU, tarde à se déployer faute de moyens et de volonté politique. Surtout, aucun des signataires ne semble vraiment prêt à renoncer à ses ambitions.
« Lusaka était un accord négocié dans la mauvaise foi par des acteurs qui n’avaient pas renoncé à la solution militaire », analyse le professeur sud-africain Hussein Solomon dans une étude pour le compte de la World Mediation Organization. Ce constat sévère ne doit pourtant pas occulter l’héritage de cet épisode diplomatique. Pour la première fois, la communauté internationale prenait la mesure de l’ampleur de la crise congolaise. Et le cadre posé à Lusaka servira de base aux négociations ultérieures.
Restait à comprendre pourquoi, malgré cette prise de conscience, les conflits allaient persister dans l’Est de la RDC. Une question que l’Accord Global et Inclusif de 2002 tentera à son tour et sans plus de succès, de résoudre.
2002 : L’Accord Global et Inclusif, ou l’impossible réconciliation
Sun City, février 2002. Le complexe hôtelier sud-africain, habitué aux congrès d’affaires, accueille une négociation autrement plus périlleuse : mettre fin à la plus grande guerre qu’ait connue l’Afrique depuis 1945. Le Dialogue Inter-Congolais s’ouvre dans un climat de défiance mutuelle, un an après l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila et l’arrivée au pouvoir de son fils Joseph, jugé plus malléable par la communauté internationale.
La tâche est herculéenne. Malgré le cessez-le-feu de Lusaka, les combats n’ont jamais vraiment cessé dans l’Est du pays. Les différents belligérants : gouvernement, rébellions soutenues par le Rwanda et l’Ouganda, milices locales, continuent de se disputer le contrôle des richesses minières tout en affichant publiquement leur volonté de paix.
Pendant dix-neuf mois, les négociations vont connaître des avancées et des reculs spectaculaires. A Pretoria puis à Sun City, les délégations se déchirent sur la composition du futur gouvernement de transition. Le RCD de Azarias Ruberwa exige la vice-présidence et des ministères clés. Jean-Pierre Bemba, leader du MLC, campe sur ses positions. La société civile, prise en étau, tente d’imposer des garde-fous démocratiques.
Le 17 décembre 2002, après d’ultimes marchandages, l’Accord Global et Inclusif est enfin signé. Il prévoit un partage du pouvoir inédit : Joseph Kabila reste président, entouré de quatre vice-présidents issus des principales factions. Une nouvelle constitution doit être rédigée, des élections organisées dans un délai de deux ans. Sur le papier, le compromis semble tenir la route.
Mais la réalité est plus âpre. L’intégration des rebelles dans l’armée nationale tourne au fiasco. A Bunia comme à Bukavu, des combats éclatent entre anciens ennemis censés servir sous le même drapeau. Les Mai-Mai, ces milices locales, refusent de rendre les armes. « L’accord de 2002 a réussi à mettre fin à la guerre interétatique, mais il a échoué à construire une paix positive », analysera plus tard le chercheur congolais Freddy Mulumba.
Les élections de 2006, premières consultations démocratiques depuis l’indépendance, marqueront officiellement la fin de la transition. Pourtant, dans les Kivu, la violence persiste. Le M23 émergera quelques années plus tard, prouvant que les racines du conflit, faiblesse de l’Etat, ingérences régionales, exploitation des ressources, n’ont jamais été réellement extirpées.
L’Accord Global et Inclusif restera comme une tentative ambitieuse mais incomplète. Il aura permis de sortir le pays du chaos de la guerre totale, sans pour autant lui offrir les fondations d’une paix durable. Une leçon que les négociateurs de Doha, vingt ans plus tard, auraient peut-être intérêt à méditer.
Pretoria 2002 : un accord bilatéral sous haute tension
Dans l’ombre des négociations inter-congolaises de Sun City, un autre front diplomatique s’ouvre à Pretoria au cœur de l’été 2002. Cette fois, il ne s’agit plus de réconcilier les factions congolaises, mais de désamorcer la bombe régionale que représente l’affrontement entre Kinshasa et Kigali. Le Rwanda, acteur-clé de la deuxième guerre du Congo depuis 1998, campe sur ses positions : sa présence militaire en RDC serait une légitime défense face à la menace des génocidaires hutu réfugiés dans l’Est congolais.
La délégation congolaise, menée par un Joseph Kabila, oppose un contre-argumentaire implacable. Les 20 000 soldats rwandais stationnés sur son territoire ne feraient que masquer une entreprise de pillage systématique des ressources minières, tout en soutenant la rébellion du RCD. Les preuves s’accumulent sur les convois de coltan transitant vers Kigali, tandis que les rapports onusiens documentent les exactions contre les civils.
C’est dans cette atmosphère électrique que Jacob Zuma, alors vice-président sud-africain, tente de jouer les médiateurs. Pendant cinq jours, les pourparlers achoppent sur la question de la chronologie : Kigali exige le démantèlement préalable des FDLR, Kinshasa veut un retrait immédiat des troupes rwandaises. Le compromis final, scellé le 30 juillet sous l’égide de l’ONU et de l’Union Africaine, tient en trois mots : retrait contre désarmement.
Les mois suivants révèlent les limites de cet équilibre précaire. Si le Rwanda semble respecter son engagement en retirant ses troupes avant la fin 2002, le désarmement des FDLR tourne au fiasco. La MONUC, chargée de superviser le processus, se heurte à l’immensité du territoire et à la complexité des alliances locales. Dans les couloirs de l’ONU, on chuchote que certains commandants rwandais n’auraient, en réalité, jamais vraiment quitté l’Est congolais, se contentant de troquer leurs uniformes contre ceux du RCD.
L’accord de Pretoria laisse ainsi un goût amer. En surface, il a réussi à éteindre le volet international du conflit. En profondeur, il n’a rien réglé des contentieux historiques entre les deux pays. La menace des FDLR, brandie comme justification par Kigali, apparaît de plus en plus comme un prétexte commode : ces milices, militairement insignifiantes depuis des années, n’ont jamais constitué une réelle menace pour la sécurité rwandaise. Pendant ce temps, l’Est de la RDC sombre dans une nouvelle ère de violence, où se mêlent conflits et compétition pour les ressources et ingérences étrangères déguisées.
Vingt ans plus tard, le spectre de Pretoria plane toujours sur les négociations actuelles. Les mêmes acteurs, sous des étiquettes renouvelées, continuent de jouer la même partition. Seul le décor a changé : Doha et Washington ont remplacé Sun City et Pretoria, mais la mélodie reste étrangement familière.
L’Accord du 23 mars 2009, un tournant manqué
Goma, mars 2009. Dans un hôtel de la ville en état de siège, le gouvernement congolais et la rébellion du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) signent un accord sous haute pression internationale. L’objectif affiché est clair : mettre fin aux violences dans le Nord-Kivu en intégrant les combattants tutsis du CNDP au sein de l’armée régulière. Mais derrière les promesses de paix, les rancœurs persistent.
Le texte prévoit l’amnistie pour les combattants du CNDP et leur incorporation dans les FARDC (Forces armées de la RDC). En échange, le mouvement rebelle accepte de déposer les armes. Une clause prévoit même la transformation du CNDP en parti politique. « C’était un compromis pragmatique », se souvient un ancien négociateur onusien. « Mais personne n’a vraiment cru à la sincérité des parties. »
Très vite, l’application patine. Les combattants du CNDP, intégrés nominalement à l’armée, conservent leurs structures parallèles. Certains dénoncent des discriminations dans les promotions. D’autres, comme Bosco Ntaganda alias « Terminator », continuent de contrôler des mines d’or au nom du pouvoir tout en préparant leur revanche et en refusant toute mutation en dehors des zones de l’Est.
En 2012, la rupture est consommée. D’anciens cadres du CNDP forment le M23, accusant Kinshasa d’avoir violé l’accord. Les combats reprennent, plus violents que jamais. « Le 23 mars 2009 était une trêve, pas une paix », analyse un officier congolais sous couvert d’anonymat. « On a juste donné trois ans de répit aux belligérants pour se réarmer. »
L’échec de cet accord étale cruellement les limites des solutions purement militaires aux crises congolaises. Il révèle aussi un schéma récurrent : des rébellions recyclées plutôt que démobilisées, des compromis de façade, et une communauté internationale trop pressée de cocher des cases. Des dynamiques qui, en 2025, pèsent encore sur les négociations de Doha.
2025 : Négociations à double étage pour une paix fragile
L’Est de la RDC continue de brûler en 2025. La résurgence du M23, ce groupe rebelle à dominante tutsi, a transformé les Kivu en poudrière. Depuis janvier, l’offensive s’est intensifiée : Goma et Bukavu tombent tour à tour, provoquant un exode massif de populations et une crise humanitaire sans précédent. Dans les coulisses diplomatiques, deux capitales émergent comme scènes de négociations parallèles : Doha et Washington, où se joue peut-être le dernier acte de cette interminable tragédie.
C’est sous les ors des palaces qataris que le gouvernement congolais et le M23 engagent des pourparlers en avril 2025. La rencontre surprise entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame en mars a créé l’électrochoc nécessaire. Le Qatar, nouveau venu dans le jeu congolais mais déjà influent grâce à ses accords économiques avec les deux pays, joue les médiateurs improbables. L’accord du 24 avril, arraché après des nuits blanches de négociation, prévoit un cessez-le-feu immédiat et l’abandon des discours de haine.
Pourtant, sur le terrain, les combats continuent de gronder. « Cette trêve tient du miracle précaire », souffle un diplomate européen présent à Doha. Les observateurs notent surtout l’absence criante des représentants des communautés locales autour de la table, pourtant premières victimes du conflit.
Washington : le poker menteur américain
À 12 000 km de là, le département d’État américain organise sa propre partie d’échecs. Le 25 avril, la ministre congolaise des Affaires étrangères Thérèse Kayikwamba Wagner et son homologue rwandais Olivier Nduhungirehe signent une déclaration de principes sous l’œil satisfait de Marco Rubio. Le texte, aussi vague qu’ambitieux, promet le respect mutuel des souverainetés et l’abandon du soutien aux groupes armés.
Les motivations américaines transparaissent à travers les promesses d’investissements milliardaires dans le secteur minier. « Washington veut sécuriser son approvisionnement en minerais critiques tout en contenant l’influence chinoise dans la région », analyse un expert des questions africaines sous couvert d’anonymat.
Les ombres au tableau
L’histoire récente donne peu d’espoirs. Depuis 2021, pas moins de six cessez-le-feu ont été violés. À Washington, le refus des deux ministres de se serrer la main en dit long sur la défiance persistante. Dans le Sud-Kivu, des combats éclatent encore malgré les déclarations officielles.
« Nous avons toutes les raisons de douter », résume amèrement une habitante de Goma contactée par téléphone. Les experts comme Delphin Ntanyoma de l’Université de Leeds soulignent l’impossible équation : « Comment surveiller un cessez-le-feu dans une région où les frontières entre armée régulière, milices et groupes rebelles sont si poreuses ? »
Un espoir malgré tout ?
L’implication inédite du Qatar et des États-Unis, ajoutée aux pressions croissantes de la SADC et de l’Union Africaine, pourrait marquer un tournant. Les propositions de mécanismes sécuritaires conjoints et d’intégration économique régionale offrent une lueur d’espoir.
Mais comme le rappelle douloureusement l’histoire congolaise, les accords de paix ne valent souvent que par la volonté politique qui les sous-tend. En 2025 comme en 2002, la paix durable se heurte aux mêmes démons : convoitises étrangères, faiblesse de l’État, et cette malédiction des ressources qui transforme l’or et le coltan en sang et en larmes.
La balle est désormais dans le camp des belligérants. Et comme le murmure un vieux proverbe congolais : « On ne construit pas la paix avec des signatures, mais avec des cœurs sincères. »
Heshima
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DGI : focus sur la réforme de la fiscalité directe lancée en RDC
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5 jours agoon
novembre 4, 2025By
La redaction
Depuis le 11 septembre 2025, le gouvernement congolais mène une vaste campagne nationale de sensibilisation et de vulgarisation autour de la réforme de la fiscalité directe. Adoptée par la loi n°25/035 du 30 novembre 2023, cette réforme entrera en application le 1er janvier 2026.Conçue dans une logique de modernisation et de transparence, elle s’inscrit dans la même dynamique que la mise en œuvre de la facture normalisée, qui vise à renforcer l’efficacité du recouvrement de la TVA. Ces deux chantiers stratégiques sont placés sous la conduite de la Direction générale des impôts (DGI). Mais en quoi cette réforme de la fiscalité directe diffère-t-elle réellement de l’ancien système ?
Le système fiscal congolais, longtemps critiqué pour sa complexité et sa fragmentation, s’apprête à connaître une transformation majeure dans deux mois. La République démocratique du Congo mettra en œuvre la réforme issue des lois n° 23/052 et n° 23/053 du 30 novembre 2023, qui réorganisent en profondeur la fiscalité directe.
Au cœur de cette réforme figure un changement de paradigme : le pays abandonne le système d’imposition cédulaire, où chaque catégorie de revenu était taxée séparément selon des règles propres, pour adopter un système global d’imposition. Désormais, l’ensemble des revenus d’un contribuable sera agrégé afin de constituer une base unique soumise à l’impôt, marquant ainsi une étape décisive vers une fiscalité plus cohérente et équitable.
Deux impôts introduits par la réforme
Dans cette nouvelle architecture fiscale, la réforme instaure deux impôts majeurs : l’Impôt sur les sociétés (IS) et l’Impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP). Ces deux prélèvements se substituent à plusieurs taxes existantes, notamment l’impôt sur les revenus locatifs, celui sur les capitaux mobiliers ainsi que l’impôt sur les revenus professionnels couvrant les rémunérations, profits et bénéfices. Selon la DGI, il s’agit d’« une fiscalité plus juste et mieux adaptée à la réalité économique congolaise ».
L’IS portera sur l’ensemble des bénéfices réalisés par les entreprises et autres personnes morales, tandis que l’IRPP concernera le revenu net global de chaque contribuable. Ce dernier correspond à la somme des revenus nets catégoriels perçus par une personne physique au cours d’une année d’imposition.
L’IS vise quelle catégorie d’entreprises ?
D’après la DGI, cette nouvelle fiscalité s’applique aux sociétés anonymes (SA), aux sociétés à responsabilité limitée (SARL) et aux sociétés par actions simplifiées (SAS), en raison de leur forme juridique. Sur le plan de l’activité, elle concerne également les sociétés coopératives, les personnes morales de droit public exerçant une activité lucrative, les sociétés de fait ou créées de fait, les associations momentanées, ainsi que les sociétés civiles menant une activité économique.
Le taux d’imposition est fixé à 30 % des bénéfices nets imposables, avec un minimum de perception de 1 % du chiffre d’affaires déclaré en cas de déficit ou de bénéfices insuffisants. La réforme introduit aussi un encadrement plus rigoureux des charges déductibles, notamment en subordonnant la déductibilité des rémunérations du personnel à leur imposition effective à l’IRPP.
En matière de plus-values, le taux est désormais fixé à 20 % en cas de réévaluation libre et à 5 % en cas de réévaluation légale. Quant au report des pertes, il est désormais limité à trois exercices consécutifs, conformément aux nouvelles dispositions légales.
Pour les entreprises minières soumises au Code minier, la réforme offre deux possibilités : soit appliquer les dispositions du Code minier avec un report des pertes limité à cinq ans, soit opter pour le régime de droit commun instauré par la nouvelle législation fiscale.
La DGI invite désormais les contribuables et opérateurs économiques à s’approprier cette réforme et à participer activement aux sessions de vulgarisation organisées sur l’ensemble du territoire national. Les prochains mois seront déterminants pour la réussite de cette transition, que les autorités considèrent comme un levier essentiel de mobilisation des ressources internes et de renforcement de la gouvernance financière.
En marge de la 10ème édition du Forum ExpoBéton tenue à Kinshasa, le directeur général des impôts, Barnabé Muakadi, a insisté sur la nécessité de mettre en place des régimes fiscaux incitatifs et ciblés afin de stimuler les grands projets structurants, tout en préservant la capacité de l’État à mobiliser des recettes. Il a également profité de cette tribune, en présence de nombreux chefs d’entreprise, pour sensibiliser sur les deux grandes réformes fiscales actuellement mises en œuvre par la DGI : la facture normalisée et la réforme de la fiscalité directe (IS-IRPP), toutes deux destinées à renforcer l’efficacité et l’équité du système fiscal congolais.
Heshima
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RDC : Inga III, le barrage du siècle ou le mirage énergétique ?
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1 semaine agoon
octobre 31, 2025By
La redaction
Annoncé depuis plus de deux décennies comme le projet qui transformera la République démocratique du Congo (RDC) en « géant énergétique de l’Afrique », le barrage Inga III peine à voir le jour. Entre ambitions colossales, retards chroniques, luttes d’intérêts et doutes environnementaux, l’un des plus grands projets hydroélectriques du monde oscille entre rêve de puissance et mirage industriel. Entre-temps, l’Ethiopie concrétise un projet similaire avec le barrage de la Renaissance.
Sur les rives puissantes du fleuve Congo, à 225 kilomètres de Kinshasa, les eaux grondent au pied des chutes d’Inga. C’est ici que devait s’élever Inga III, le plus ambitieux projet hydroélectrique jamais conçu en Afrique. Mais plus de vingt ans après son lancement officiel, le chantier reste une promesse inachevée, symbole des contradictions d’un pays riche en ressources mais pauvre en infrastructures. « Inga III devait changer le destin du Congo », soupire Jean-Pierre Mbayo, ingénieur à la retraite de la Société nationale d’électricité (SNEL). « Aujourd’hui, on parle encore d’études, de financements, de consortiums… mais pas de béton coulé », a-t-il ajouté d’un air dépité.
Un rêve ancien, des promesses répétées
Le complexe hydroélectrique d’Inga ne date pas d’hier. Les deux premiers barrages, Inga I (1972) et Inga II (1982), devaient déjà propulser la RDC dans l’ère de l’électrification continentale. Mais les années de crise politique, de mauvaise gestion et de guerres successives ont freiné toute expansion. L’idée d’Inga III refait surface dans les années 2000, sous Joseph Kabila, avec un objectif colossal : produire 11 000 mégawatts d’électricité, soit de quoi alimenter non seulement la RDC, mais aussi une partie de l’Afrique australe. Le projet est alors rebaptisé « Grand Inga », censé à terme atteindre 40 000 MW, devenant ainsi le plus grand barrage du monde.
« Sur le papier, c’est un Eldorado énergétique », commente Agnès Mboyo, chercheuse à l’Université de Kinshasa. « Mais dans la réalité, la gouvernance, les financements et la planification environnementale n’ont jamais été à la hauteur des ambitions. »
Le projet rencontre également deux types d’opposition : sur le plan environnemental et deuxièmement son intérêt semble limité aux seuls miniers. D’après le reporter d’Africanews télévision, Chris Ocamringa, ce vaste projet hydroélectrique a été critiqué par certains militants de la société civile qui pensent que ce projet répondra plus aux besoins des investisseurs miniers que des Congolais de manière générale. Des populations riveraines craignent également des expropriations mais aussi pour leurs activités champêtres.
Ben Munanga, président du conseil d’administration du géant minier KAMOA Copper S.A, rejette les accusations selon lesquelles la production de l’électricité du projet Inga 3 ira à 100 % aux miniers. « Il est dit nulle part dans le projet que toute la production ira à l’opérateur minier », a-t-il réfuté.
Des partenaires nombreux, mais aucune mise en œuvre concrète
Au fil des ans, Inga III a vu défiler les partenaires : Chine, Espagne, Afrique du Sud, Banque mondiale, Union africaine. Chaque accord semblait marquer un tournant, avant de retomber dans le flou. La Banque mondiale s’est même retirée du projet en 2016, évoquant « un manque de transparence dans la conduite du dossier ». Sous Félix Tshisekedi, les discussions ont repris avec un consortium sino-espagnol, mais les négociations patinent.
Le gouvernement affirme vouloir reconfigurer le projet pour répondre d’abord aux besoins nationaux – un changement stratégique face à l’opinion publique, lassée de voir le courant partir à l’étranger alors que moins de 20 % des Congolais ont accès à l’électricité. « Il est impensable que le Congo exporte l’électricité alors que nos villages vivent encore dans le noir », avait déclaré un coordonnateur d’une ONG de défense de l’environnement. « Inga doit d’abord servir le peuple congolais. »
Un projet pharaonique… et controversé
Derrière les promesses, les critiques se multiplient. Les organisations écologistes redoutent un désastre environnemental sur le fleuve Congo, le deuxième plus puissant du monde après l’Amazone. Les ONG locales, quant à elles, dénoncent un manque de consultation des communautés affectées par les expropriations prévues. « Le discours sur le développement masque souvent la réalité : des familles déplacées, des écosystèmes détruits et des contrats opaques », dénonce Marie-Louise Kebi, militante d’un collectif pour la préservation des eaux du fleuve Congo. « Inga III risque de reproduire les erreurs des grands barrages du passé », estime-t-elle.
Sur le plan financier, les chiffres donnent le vertige : le coût initial, estimé à 12 milliards puis à 14 milliards selon les dernières projections. Dans un contexte de dette publique croissante et de corruption endémique, beaucoup doutent de la viabilité économique du projet.
Le symbole d’un pays à la croisée des chemins
Pour ses défenseurs, Inga III reste une chance historique. « Le Congo ne peut pas renoncer à son rôle de puissance énergétique », plaide Germain Kabeya, économiste. « Si nous réussissons Inga, nous devenons le cœur électrique de l’Afrique. » Mais pour d’autres, ce rêve industriel ne doit pas faire oublier les priorités immédiates : électrification rurale, maintenance des réseaux existants, et lutte contre les pertes massives d’énergie (près de 40 % selon la SNEL).
« L’énergie ne se mesure pas en mégawatts produits, mais en foyers éclairés », rappelle Élodie Manda, une ingénieure électromécanicienne. « Tant que Kinshasa restera éclairée et Kikwit dans le noir, Inga restera un mirage », a-t-elle ajouté. Devant cette réalité amère, l’administration Tshisekedi a changé le fusil d’épaule. En attendant Inga III, le gouvernement a créé ANSER : une Agence nationale de l’électrification et des services énergétiques en milieux rural et périurbain. Elle vise à atteindre 30 % d’électrification des milieux ruraux et périurbains en 2025 et 50 % d’ici à 2030. Grâce à l’énergie solaire, cette structure a déjà apporté de l’électricité à Lodja, au Sankuru. Réputé un des trous noirs du pays, ce chef-lieu de la province a été éclairé avec notamment une partie de Lumumbaville, une nouvelle ville créée en hommage à Patrice Emery Lumumba, à Onalua.
Inga III : le barrage du siècle… ou du siècle prochain ?
En 2025, Inga III n’est encore qu’un projet en attente de financement définitif, malgré des décennies d’études et de promesses politiques. Entre tensions géopolitiques, retards administratifs et défi de gouvernance, le barrage du siècle reste suspendu entre deux réalités : celle du rêve national et celle du doute collectif. « Le fleuve, lui, continue de couler », sourit amèrement un ingénieur qui renvoie ce projet aux calendes grecques suite aux nombreux défis qui se dressent au pays.
Pourtant, dans la Corne de l’Afrique, un pays a décidé et s’est donné les moyens d’y parvenir sans trop attendre l’aide extérieure : l’Ethiopie. Démarrés en 2010, les travaux ont duré 14 ans. Le Grand barrage de la Renaissance est aujourd’hui un projet hydroélectrique majeur construit par l’Éthiopie sur le Nil Bleu. Ce barrage est devenu une source de tensions géopolitiques avec les pays en aval du Nil, notamment l’Égypte et le Soudan. Le barrage est officiellement inauguré en septembre 2025, mais des turbines sont opérationnelles depuis 2022, produisant de l’électricité pour l’Éthiopie et ayant pour objectif l’exportation d’énergie dans la région. L’Égypte et le Soudan craignent que le barrage ne réduise leur approvisionnement en eau et cherchent à trouver un accord avec l’Éthiopie.
Heshima
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RDC : face aux embouteillages, comment bâtir une industrie du rail ?
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2 semaines agoon
octobre 29, 2025By
La redaction
Les villes de la République démocratique du Congo sont confrontées à une croissance démographique rapide, entraînant une urbanisation accélérée avec des défis majeurs comme l’insuffisance des infrastructures routières et des services de base. Des villes comme Kinshasa et Matadi font face à des embouteillages monstres, détériorant ainsi la qualité de vie dans ces métropoles. Le gouvernement a relancé, bon gré mal gré, le train urbain. Mais la qualité des rails laisse à désirer, obligeant l’exécutif national à penser à l’implantation d’une usine d’assemblage et de montage de trains au pays.
L’Office national des transports (ONATRA) a réfectionné certains rails pour permettre la reprise du train urbain entre Kinshasa et Matadi. Dans des quartiers comme Mapela, dans la commune de Masina, cette réfection suscite des réactions contrastées. Si certains saluent la reprise du train, d’autres se montrent inquiets par rapport à la mauvaise qualité du travail réalisé lors de la réfection de ces rails. « La réhabilitation du rail est faite de manière précaire et cela peut causer un déraillement du train. Ils ont posé le rail sur des sacs de sable. Avec le soleil et le retour de la pluie, ces sacs peuvent s’user facilement et provoquer des dégâts au passage du train », explique Jérôme Mabeka, habitant non loin de ce chemin de fer.
Implanter une usine de montage de trains
Vieux de plus d’un siècle, le réseau ferroviaire de la RDC nécessite non seulement une réfection approfondie mais également la construction de nouveaux rails. Pour faire face à ces défis du rail et des locomotives, le pays a lancé le 25 octobre 2025 un appel à manifestation d’intérêt international pour la construction d’une usine d’assemblage et de montage de trains. Le document, signé par le ministre des Transports, Voies de communication et Désenclavement, Jean-Pierre Bemba, recherche des partenaires pour la création d’unités d’assemblage capables de produire plusieurs dizaines de locomotives et wagons par an, tout en assurant un transfert de compétences vers les ingénieurs et techniciens locaux. Le projet sera mis en œuvre sous la forme d’un partenariat public-privé (PPP) d’une durée comprise entre 25 et 30 ans. Il prévoit également la création d’un écosystème de maintenance, la production de pièces détachées et la formation professionnelle.
Ce projet s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale de relance et de modernisation du secteur ferroviaire, en cohérence avec la politique d’industrialisation et d’intégration régionale promue par le gouvernement. Le projet vise aussi à moderniser la voie ferrée congolaise, vieille d’un siècle. Selon le communiqué, la RDC dispose de plus de 5 000 km de voies ferrées, mais son potentiel ferroviaire est sous-exploité en raison du vieillissement du matériel roulant et de l’absence d’industries locales de production ou de réhabilitation. Ce qui a poussé le gouvernement à lancer cet appel à manifestation d’intérêt international afin de trouver des partenaires en mesure d’assurer un réseau ferroviaire local.
Les entités intéressées, telles que des constructeurs ferroviaires, sociétés d’ingénierie, entreprises BTP, investisseurs institutionnels et centres de formation, ont jusqu’au 5 décembre 2025 à 15h00 (heure de Kinshasa) pour soumettre leurs dossiers. Des visites de sites sont prévues à Matadi et Kalemie avant le 25 novembre 2025. Ces deux villes ont été choisies par le gouvernement pour abriter ces usines.
Une fois mis en œuvre, cette usine pourrait renforcer la souveraineté industrielle du pays et réduire la dépendance aux importations de locomotives et wagons, relancer la production locale du matériel roulant adapté aux besoins nationaux et régionaux et créer des emplois qualifiés. Il s’agit également de favoriser le transfert de technologies et de développer un centre de formation ferroviaire national, de soutenir la relance de la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC) et de l’Office national des transports (ONATRA) ainsi que les projets PPP ferroviaires (Corridor de Lobito, Corridor Est-Centre, Kinshasa-Matadi-Banana).
Face aux embouteillages, relancer le train
Pour combattre les embouteillages chroniques en RDC, et plus spécifiquement à Kinshasa, le pays prévoit des projets de train urbain pour réduire ces congestions du trafic. Ce projet, appelé Métrokin, a pour objectif de désengorger la capitale en offrant un transport de masse, même si des investissements colossaux et une réhabilitation du réseau sont nécessaires. Le gouverneur de Kinshasa avait annoncé la construction d’une ligne de métro aérien avec un partenaire malaisien, et des études ont été menées pour sa réalisation. Mais jusqu’ici, les signaux pour concrétiser ce projet restent encore faibles.
Par contre, en septembre 2025, le gouvernement a relancé la ligne Kinshasa-Matadi, longue de 366 km. Cette ligne relie la capitale au principal port maritime du pays, tout en acquérant de nouveaux matériels roulants. À terme, cette ligne doit être prolongée jusqu’au futur port en eau profonde de Banana, actuellement en construction, dans le cadre d’un plan visant à fluidifier les échanges intérieurs et extérieurs. Si ces projets de l’industrie du rail se concrétisent, ils devraient réduire les défis de mobilité dans un contexte où le réseau routier national et le transport fluvial font face à de nombreuses contraintes : routes dégradées, congestion urbaine, embarcations vétustes, voies de navigation non balisées et accidents fréquents. Autant de facteurs qui pèsent sur les coûts logistiques et affectent la compétitivité économique du pays.
Éviter les erreurs du passé
En juin 2015, la RDC avait réhabilité certains tronçons de ses chemins de fer et avait réceptionné 18 locomotives neuves sur 38 commandées. À cette époque, la dernière acquisition d’une locomotive neuve datait de 40 ans. Après environ 15 ans d’interruption, le trafic passager sur la ligne ferroviaire Matadi-Kinshasa avait été inauguré le 2 juillet 2015. Mais faute de maintenance dans une ligne ferroviaire vétuste et de locomotives parfois inadaptées, le trafic Kinshasa-Matadi n’avait pas fait long feu sous Joseph Kabila. En relançant cette ligne sous Félix Tshisekedi, le gouvernement devrait éviter les erreurs du passé en travaillant sur la modernisation du rail congolais afin de pérenniser ce trafic en ajoutant des nouveaux rails sur des lignes existantes. Le sénateur Jean-Bamanisa, qui travaille depuis des années dans le secteur de la construction, conseille au gouvernement d’ajouter des rails modernes sur des servitudes ferroviaires existantes afin de permettre le trafic des locomotives de technologie récente. Sans cette modernisation, l’industrie du rail ne saurait redécoller en RDC.
Avec la réhabilitation des corridors ferroviaires régionaux, notamment celui de Lobito (Angola – Zambie – RDC) et celui du Tanganyika vers la Tanzanie, l’industrie du rail pourrait être boostée. Ce qui augure peut-être un nouveau départ, à condition de remédier à l’absence d’un écosystème industriel complémentaire tel que des sous-traitants locaux, une logistique intégrée et la maintenance. Il faut également résoudre un goulot d’étranglement persistant dans les domaines de l’énergie, des infrastructures ou de la connectivité numérique, facteurs qui risquent aussi de freiner les gains de productivité attendus.
Heshima Magazine
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