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Rupture de la coalition CACH-FCC : retour sur une implosion qui a fragilisé la RDC
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La redaction
Le 24 janvier 2019, Félix Tshisekedi accède à la présidence, marquant une alternance historique. Mais l’alliance qu’il forme avec le FCC de Joseph Kabila, censée garantir la stabilité, se transforme rapidement en un champ de tensions. Blocages institutionnels, luttes d’influence et sabotages politiques minent la coalition. De mars 2019 à décembre 2020, la rupture devient inévitable. Cette fracture, en libérant Tshisekedi de la tutelle du FCC, bouleverse durablement l’équilibre politique. Elle ouvre aussi la voie à des secousses sécuritaires majeures, dont la résurgence du M23, évoquée par Kabila lui-même dans une tribune publiée en février 2025 dans le Sunday Times. Heshima Magazine remonte le fil d’une crise qui a redéfini le pouvoir à Kinshasa et fragilisé le pays dans une certaine mesure.
24 janvier 2019 : la capitale Kinshasa est en ébullition. Au Palais de la Nation, pour la première fois dans l’histoire du pays, le Congo vit sa première passation pacifique du pouvoir. Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo prête serment devant la Cour constitutionnelle. Son prédécesseur, Joseph Kabila, assiste à la cérémonie, marquant ainsi un moment historique : la toute première passation pacifique du pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1960. Les deux présidents, assis côte à côte, sourient, échangent des regards complices et semblent unis dans une volonté commune de stabiliser le pays. Ce jour-là, la scène projette l’image d’un Congo apaisé, brièvement tourné vers l’avenir. »
Les premiers mois du mandat de Tshisekedi renforcent cette impression d’entente cordiale. En 2019, une vidéo virale sur les réseaux sociaux montre Félix Tshisekedi accueillant Joseph Kabila dans sa résidence privée de Nsele. Le déjeuner qu’ils partagent, en présence de certains de leurs proches collaborateurs (Antoine Ghonda, Kazadi Nyembo, Néhémie Mwilanya et François Beya) illustre une entente parfaite et une volonté manifeste de maintenir une collaboration étroite entre les deux sphères du pouvoir. Ce moment, largement relayé par la presse congolaise, est perçu comme un signe de détente politique, voire de partenariat assumé. En apparence, tout est soigné ; mais en profondeur, un équilibre délicat semble s’installer entre l’ancien et le nouveau président.
Pourtant, cette harmonie repose sur des bases institutionnelles fragiles. L’élection de décembre 2018, qui voit Tshisekedi proclamé vainqueur avec 38,57 % des voix par la CENI, est vivement contestée par le clan Martin Fayulu, qui revendique la victoire avec plus de 60 % des suffrages. Beaucoup suspectent alors un accord secret entre Tshisekedi et Kabila, destiné à garantir une transition sans heurts et la préservation des intérêts de ce dernier.
Le Front commun pour le Congo (FCC), la plateforme dirigée par Kabila, a assuré une mainmise sur les institutions : 342 des 500 sièges à l’Assemblée nationale, une domination dans les assemblées provinciales, et un contrôle important du Sénat. Ce déséquilibre politique contraint Félix Tshisekedi à gouverner en coalition avec sa plateforme CACH (Cap pour le changement), fondée avec Vital Kamerhe, dans une cohabitation plus subie que réellement choisie. Avant de quitter ses fonctions, Kabila nomme 26 ambassadeurs, verrouille certains postes clés et maintient ses réseaux dans les services de sécurité et la justice. Comme le souligne le chercheur Roger-Claude Liwanga dans Jeune Afrique, cette stratégie relève de la « tactique du salami » : céder symboliquement le pouvoir tout en conservant les leviers réels du contrôle.
Dans ce contexte, l’apparente complicité entre Tshisekedi et Kabila dissimule des lignes de fracture profondes qui ne tarderont pas à resurgir.
Les premières fissures : élections sénatoriales et gouverneurs
En mars 2019, une rencontre à Kinshasa scelle l’accord de coalition CACH-FCC, censé unir les deux camps. Mais les élections sénatoriales du même mois révèlent des tensions profondes. Le FCC s’adjuge 91 des 108 sièges, consolidant son emprise, mais des accusations de corruption massive éclatent. Le média congolais en ligne, Politico.cd, rapporte des achats de votes à 50 000 dollars, provoquant le retrait de candidats indignés. À Goma, un indépendant dénonce une offre similaire, soulignant l’ampleur des pratiques.
Simultanément, les élections des gouverneurs provinciaux exacerbent les fractures. Dans le Haut-Katanga et le Lualaba, des fraudes similaires provoquent des manifestations. À Lubumbashi, des militants UDPS vandalisent des bureaux de vote, dénonçant des gouverneurs FCC élus par corruption, selon Radio Okapi. Ces incidents, reflétant la mainmise du FCC sur les provinces, amplifient la méfiance de CACH.
Le 18 mars, Tshisekedi suspend l’installation des sénateurs et reporte les élections des gouverneurs, invoquant des enquêtes sur la fraude. Cette décision, saluée par la société civile, déclenche une tempête. Deux jours plus tard, des manifestations UDPS à Kinshasa dégénèrent, causant la mort d’un militant de 24 ans. Les images de pneus brûlés et de gaz lacrymogènes, diffusées sur les réseaux sociaux, illustrent un climat explosif. Le FCC, via Néhémie Mwilanya, rejette toute remise en question des scrutins, amplifiant les tensions. Sous pression, Tshisekedi lève la suspension début avril, un recul perçu comme une concession forcée. Jean-Marc Kabund, président intérimaire de l’UDPS, dénonce un « système corrompu hérité de Kabila ».

Un discours qui secoue Kinshasa
En avril 2019, Tshisekedi s’envole pour Washington, où il prononce un discours retentissant au Council on Foreign Relations. “Je suis là pour déboulonner le système dictatorial qui était en place”, déclare-t-il, accusant le régime de Kabila d’avoir “retardé le pays avec la corruption, la gabegie et l’impunité”. Ce message, applaudi par le secrétaire d’État américain Mike Pompeo, positionne Tshisekedi comme un réformateur audacieux sur la scène internationale. À Kinshasa, cependant, il déclenche une tempête. Le FCC, par la voix de Néhémie Mwilanya, condamne des propos “militants” et “irresponsables” qui, selon lui, rompent l’esprit de la coalition. Le PPRD (parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie), parti phare du FCC, va plus loin, accusant Tshisekedi de rallier des soutiens étrangers, notamment américains, pour marginaliser Kabila. Cette critique trahit la crainte du FCC de voir Tshisekedi s’émanciper grâce à des alliances internationales, d’autant que les États-Unis avaient imposé des sanctions à des proches de Kabila sous l’administration Trump.
Dans les rangs de l’UDPS, le discours est accueilli comme une bouffée d’oxygène. Jean-Marc Kabund déclare : “Le président a dit la vérité que tout le monde connaît. La corruption sous Kabila a asphyxié le Congo.” À Limete, fief historique de l’UDPS, les militants se rassemblent, brandissant des portraits de Tshisekedi et scandant des slogans contre l’héritage kabiliste. Mais cette ferveur accentue la méfiance du FCC, qui y voit une déclaration de guerre implicite. Moins de trois mois après l’investiture, la coalition révèle son incapacité à réconcilier deux visions opposées : Tshisekedi, porté par un élan de rupture, et le FCC, arc-bouté sur la préservation du statu quo.
Une guerre des nominations et tensions économiques

La désignation d’Albert Yuma par Joseph Kabila comme Premier ministre en avril 2019 est rejetée par Félix Tshisekedi. Ce veto, influencé par des pressions internationales dénonçant la gestion opaque de Yuma, entraîne une crise politique. Mwilanya accuse Tshisekedi de céder aux intérêts étrangers, tandis que le PPRD rompt les négociations. À Kinshasa, des militants de l’UDPS manifestent en scandant : « Yuma, dehors ! » L’UDPS soutient fermement Tshisekedi, Kabund questionnant publiquement pourquoi le Premier ministre ne pourrait pas provenir de CACH. Après des semaines de négociations, Kabila recule, proposant Sylvestre Ilunga, un autre fidèle du FCC, comme Premier ministre. Ce compromis tactique ne masque pas la volonté du FCC de dominer le futur gouvernement.
Parallèlement, des tensions émergent autour des contrats miniers. Tshisekedi pousse pour renégocier les accords signés sous Kabila, notamment avec des firmes chinoises, selon Global Witness (2020). Le FCC, défendant les intérêts de l’élite kabiliste, s’oppose, arguant que ces révisions menacent la stabilité économique. Ces désaccords, bien que moins visibles, alimentent la méfiance.
L’imposition de Jeanine Mabunda à la présidence de l’Assemblée nationale, sans concertation avec CACH, est un autre affront. Mabunda ralentit les réformes, notamment sur la transparence financière, renforçant l’image d’un Tshisekedi entravé. Kabund questionne pourquoi le Premier ministre ne vient pas de CACH, reflétant les frustrations de l’UDPS.
Blocages des ordonnances et gratuité de l’éducation
En juillet 2019, Tshisekedi signe des ordonnances nommant de nouveaux dirigeants à la SNCC et à la Gécamines, dont Gabriel Kyungu wa Kumwanza, proche de Moïse Katumbi. La ministre FCC du Portefeuille, Wivine Mumba, refuse de notifier ces nominations, arguant qu’elles nécessitent le contreseing d’Ilunga. Le PPRD déclare les ordonnances « nulles », humiliant Tshisekedi. Kabund dénonce un « coup contre la Constitution », et des manifestations UDPS éclatent à Kinshasa.
Simultanément, la gratuité de l’éducation, promesse phare de Tshisekedi, rencontre des résistances. Des gouverneurs FCC, notamment dans le Kasaï et le Katanga, critiquent son financement, selon Jeune Afrique (septembre 2019). À Mbuji-Mayi, des grèves d’enseignants non payés dégénèrent en affrontements, reflétant l’incapacité de la coalition à concilier ses priorités. Ces tensions, exacerbées par le contrôle FCC des budgets provinciaux, fragilisent la réforme.
Un gouvernement sous domination FCC et crises régionales
En août 2019, le gouvernement Ilunga est formé, avec le FCC s’arrogeant les ministères stratégiques (défense, justice, finances, mines). Kabund dénonce un « gouvernement FCC déguisé ». À Lubumbashi, des militants CACH manifestent, exigeant un partage équitable. À Kingakati, Kabila appelle ses cadres à préserver ses « acquis », selon Politico.cd.
Dans le Kasaï, des violences intercommunautaires à Kamuesha font des dizaines de morts en juin-juillet 2019. L’UDPS accuse des gouverneurs FCC de manipuler les milices, tandis que le FCC pointe la désorganisation de CACH. Ces conflits, bien que régionaux, illustrent l’échec de la coalition à pacifier le pays.
Les massacres de Beni par les ADF, tuant plus de 600 civils en 2019-2020 (Human Rights Watch), amplifient les tensions. L’UDPS accuse les réseaux FCC dans l’armée de passivité, voire de complicité. Alexis Thambwe Mwamba rejette ces allégations, accusant Tshisekedi de politiser la tragédie. Ces querelles sécuritaires renforcent la méfiance sur le contrôle des FARDC.
Violences, rivalités internes et mobilisations citoyennes
En novembre 2019, Kabund menace de « fouiner » dans les affaires du FCC, déclenchant des violences. À Kolwezi, des manifestants brûlent des effigies de Tshisekedi, dénonçant les retards dans le financement de la gratuité de l’éducation. À Kinshasa, les sièges de l’UDPS et du PPRD sont vandalisés. Ces affrontements traduisent l’échec de la coalition.
Des mouvements citoyens comme Filimbi et Éveil Patriotique, absents des négociations CACH-FCC, organisent des sit-ins à Goma et Bukavu, dénonçant la corruption du FCC et la passivité de Tshisekedi. Réprimées par la police, ces actions amplifient la pression sociale.
Au sein du FCC, des rivalités émergent. Évariste Boshab et Emmanuel Ramazani Shadary critiquent Mwilanya pour sa gestion autoritaire, selon un article de Jeune Afrique publié en octobre 2020, ces fissures, bien que discrètes, fragilisent le FCC face aux consultations futures de Tshisekedi.
Menace de dissolution et budget 2020
En janvier 2020, lors d’un discours à Londres devant la diaspora congolaise, Tshisekedi lance un ultimatum : il dissoudra l’Assemblée nationale si les ministres FCC continuent de saper son autorité. Cette menace, prononcée alors que le FCC bloque des dossiers comme le financement de l’éducation, reflète sa frustration. Jeanine Mabunda contre-attaque en agitant le spectre d’une “haute trahison”, menaçant à demi-mot une mise en accusation du président Tshisekedi, dans une manœuvre rarissime qui aurait nécessité l’aval des deux chambres du Parlement. De son côté, Alexis Thambwe Mwamba, président du Sénat et figure clé du FCC, balaie la menace d’un revers, la qualifiant de “provocation inutile”. Le PPRD, pilier du camp Kabila, entre en ordre de bataille, mobilisant ses cadres et dénonçant ce qu’il considère comme une “dérive autoritaire” du chef de l’État. À l’opposé, l’UDPS monte en pression, organisant des manifestations dans les rues de Kinshasa, au cri de “Dissolution maintenant !”, galvanisée par la perspective de renverser l’équilibre institutionnel hérité de l’accord FCC-CACH.
Si la dissolution de l’Assemblée nationale ne se matérialise pas immédiatement, l’effet est psychologique : Tshisekedi brise un tabou et montre qu’il est prêt à utiliser toutes les prérogatives présidentielles, y compris les plus explosives, pour desserrer l’étau du FCC. Ce moment marque un tournant : le président n’est plus seulement en cohabitation, il amorce une confrontation.
Le budget 2020, retardé par Mabunda, devient un autre point de friction. Le FCC exige des fonds pour ses provinces, provoquant des manifestations UDPS à Kinshasa en décembre 2019. Kabund dénonce un « sabotage économique », reflétant l’incapacité de la coalition à aligner ses priorités.
La crise du Covid-19 : une bataille politique
En mars 2020, Tshisekedi décrète l’état d’urgence face à la pandémie de COVID-19, isolant Kinshasa et interdisant les rassemblements. Cette mesure, initialement consensuelle, devient un point de friction lorsque Tshisekedi propose de prolonger l’état d’urgence, nécessitant l’approbation du Congrès. Jean-Marc Kabund s’oppose à la convocation du Congrès, estimant son coût à 7 millions de dollars, une somme exorbitante en temps de crise. Le FCC, qui contrôle le Congrès, insiste pour une réunion, voyant une opportunité de réaffirmer son influence. La fermeture temporaire du siège du parlement par le ministre CACH de l’Intérieur et sécurité, justifiée par des motifs sanitaires, est dénoncée par le FCC comme une “atteinte à la démocratie” tendant à l’empêcher de convoquer le congrès. Jeanine Mabunda qualifie la mesure de “tentative de museler le Parlement”, tandis que Kabund rétorque que “la santé des Congolais prime sur les calculs politiques”. Cette crise transforme une urgence sanitaire en bataille institutionnelle.
Destitution de Kabund et grèves publiques

En mai 2020, une pétition déposée par le député Jean-Jacques Mamba, soutenu par le FCC, vise Jean-Marc Kabund, accusé d’avoir terni l’image de l’Assemblée par ses déclarations sur le coût du Congrès. La destitution de Kabund, votée par une majorité écrasante et confirmée par une Cour constitutionnelle proche du FCC, est célébrée par le FCC comme une “victoire de la démocratie”. L’UDPS dénonce un “complot politique” pour affaiblir Tshisekedi. À Kinshasa, des militants de l’UDPS brûlent des pneus et bloquent des artères, dénonçant un “coup parlementaire”. L’arrestation de Mamba pour “faux et usage de faux” dans la collecte des signatures de ladite pétition attise les tensions, chaque camp accusant l’autre d’instrumentaliser la justice.
La même période des grèves de magistrats et de médecins, protestant contre leurs conditions et le blocage des budgets par le FCC, paralysent Kinshasa et Mbuji-Mayi (Radio Okapi, octobre 2019-mai 2020). Ces mouvements, bien que périphériques, reflètent l’incapacité de la coalition à répondre aux attentes sociales.
Justice sous pression et bataille pour le contrôle de la BCC
En juin 2020, alors que la coalition FCC-CACH tangue déjà sur des désaccords profonds, une violente tempête politique s’abat sur le pays autour d’un sujet explosif : l’indépendance de la justice. Le dépôt à l’Assemblée nationale de trois propositions de lois par les députés FCC Aubin Minaku et Gary Sakata, visant à renforcer les pouvoirs du ministre de la Justice sur les magistrats du parquet, met le feu aux poudres. La société civile, le Syndicat autonome des magistrats, la CENCO et des mouvements comme la LUCHA dénoncent unanimement une tentative de mainmise politique, une résurgence rampante de l’autoritarisme kabiliste. Kinshasa s’embrase. À Goma également, des manifestations spontanées se tiennent aux abords du Palais de justice, dans une atmosphère de défi populaire. Des effigies d’Aubin Minaku sont brûlées, des résidences de cadres du FCC ciblées.
Au sein du gouvernement, la tension est électrique. Le 26 juin, lors d’un Conseil des ministres, les membres découvrent, stupéfaits, que le vice-Premier ministre en charge de la Justice, Célestin Tunda Ya Kasende, a déjà transmis un avis favorable sur ces propositions de lois, sans en référer au préalable au gouvernement. Un acte qualifié d’« initiative personnelle » par la Présidence, qui dénonce alors un « manque de sincérité » du ministre. Le chef de l’État, visiblement ulcéré, quitte la réunion pour une conférence de l’Union africaine, mais laisse derrière lui une atmosphère plombée.
Le lendemain, l’affaire prend une tournure spectaculaire. Aux alentours de 14h, des policiers lourdement armés se présentent au domicile de Tunda avec un mandat d’amener. Le ministre résiste, s’enferme chez lui, multiplie les appels. Puis finit par se rendre, après avoir été, selon ses propres mots, « rassuré par la hiérarchie ». Dans la soirée, devant les cadres du PPRD, Tunda confie : « Yemeyi [lui-même] m’a dit : il ne faut pas avoir peur de quoi que ce soit. » Il sera libéré après quelques heures d’audition.
Cette interpellation, très médiatisée, provoque une levée de boucliers dans les rangs du FCC. Emmanuel Ramazani Shadary, furieux, s’adresse à la presse : « Personne ne peut nous intimider. Parce qu’il a défendu sa position de manière démocratique, on l’a traité comme un malfrat. La police a encerclé sa maison, comme si c’était un assassin ! Où allons-nous dans ce pays ? On veut instaurer une dictature plus forte que celle de Mobutu. Mais au PPRD, nous disons non ! »
La réaction du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba, fidèle au Front Commun pour le Congo (FCC), ne s’est pas fait attendre. Dans une déclaration ferme, il condamne une arrestation jugée « brutale et arbitraire » de son vice-Premier ministre, Célestin Tunda Ya Kasende. Il en appelle directement au président Félix Tshisekedi, l’invitant à veiller scrupuleusement au respect du secret entourant les délibérations du Conseil des ministres. À ses yeux, aucun membre du gouvernement ne devrait être inquiété pour des opinions exprimées dans ce cadre, protégé par le principe de collégialité.
Le chef du gouvernement va plus loin, exigeant l’ouverture d’une action disciplinaire contre les magistrats à l’origine de l’interpellation de Tunda, signe d’un malaise institutionnel profond entre les deux pôles du pouvoir exécutif.
Face à la tempête politique, Célestin Tunda choisit la porte de sortie. Le 11 juillet, il présente sa démission, invoquant la nécessité de « préserver la sérénité » des institutions. Mais derrière cette formulation diplomatique, peu se laissent tromper : ce départ ressemble à une sanction déguisée, infligée après une véritable mise en scène d’humiliation publique.
Quelques jours plus tôt, une déclaration maladroite de Tunda à la télévision avait déjà semé le trouble. En qualifiant le président de la République de « Boss » et de « coach », ses propos avaient suscité des remous au sein de la Présidence, perçus comme une ironie mal placée, voire une provocation à peine voilée.
Dans l’opinion, cet épisode révèle au grand jour les lignes de fracture au sein de la coalition. Le bras de fer autour de la justice devient le symbole d’un affrontement plus large : celui d’un président qui veut marquer son autorité face à un allié devenu encombrant. La fracture est désormais béante.
Parallèlement, la Banque centrale devient un autre champ de bataille. Tshisekedi tente de nommer un gouverneur aligné sur CACH, mais le FCC défend Déogratias Mutombo, retardant les réformes monétaires et exacerbant l’inflation. Ces querelles économiques soulignent les enjeux financiers de la coalition.
Nominations dans l’armée : une lutte pour le contrôle sécuritaire
En juillet 2020, Félix Tshisekedi signe une série d’ordonnances présidentielles procédant à un remaniement majeur au sein des Forces armées de la RDC (FARDC), des services de renseignement et de la police nationale, dans une tentative audacieuse de reprendre le contrôle du secteur sécuritaire, longtemps dominé par les loyalistes de Joseph Kabila. Annoncées le 17 juillet à la télévision nationale, ces nominations incluent des figures clés : le général Gabriel Amisi, surnommé « Tango Four », remplace le général John Numbi, proche de Kabila et sous sanctions internationales pour violations des droits humains, au poste d’inspecteur général des FARDC. Le général Fall Sikabwe Asinda est promu chef d’état-major de l’armée de terre, tandis que Michel Mandiangu prend la tête des renseignements militaires, succédant au général Delphin Kahimbi, décédé dans des circonstances troubles. D’autres officiers, comme le général Jean-Claude Yav, sont placés à des postes stratégiques au sein de la maison militaire du président.
Ces décisions, saluées par des partenaires internationaux comme les États-Unis, Tibor Nagy, assistant du secrétaire d’État, y voyant un engagement pour les droits humains, visent à réduire l’influence des réseaux kabilistes dans l’appareil sécuritaire, tout en consolidant l’autorité de Tshisekedi en tant que commandant suprême des FARDC. Cependant, elles déclenchent une crise institutionnelle majeure du fait qu’elles ne sont pas contresignées par le Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba, membre du FCC. À la place, elles portent la signature du vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, Gilbert Kankonde Malamba, membre de l’UDPS (CACH), qui assure l’intérim d’Ilunga, alors en mission à Lubumbashi du 16 au 19 juillet.
Le recours à Kankonde s’appuie sur une lettre d’Ilunga datée du 16 juillet, confiant l’intérim à Kankonde pour les affaires courantes. Cependant, le FCC conteste la légalité de ce contreseing, arguant que les nominations dans l’armée et les services de sécurité, en raison de leur portée stratégique, requièrent l’aval explicite du Premier ministre titulaire. Le 21 juillet, Ilunga, par la voix de son porte-parole Albert Lieke Milay, exprime sa « stupéfaction » face à des ordonnances qu’il découvre via les médias. Il dénonce une « violation de la Constitution » et demande une rencontre urgente avec Tshisekedi pour « clarifier cette situation préoccupante », soulignant que le contreseing garantit l’équilibre des pouvoirs au sein de la coalition.
Le FCC, par l’entremise de son coordinateur Néhémie Mwilanya, va plus loin, accusant CACH d’avoir orchestré ces nominations dans le dos d’Ilunga, en profitant de son absence pour marginaliser les intérêts du FCC. Dans une conférence de presse à Kinshasa, Mwilanya déclare : « Ces ordonnances, préparées en catimini, sont une tentative de s’emparer des leviers sécuritaires par la force ». Le PPRD, fer de lance du FCC, mobilise ses cadres, dénonçant une « dérive autoritaire » de Tshisekedi, tandis que Jeanine Mabunda et Alexis Thambwe Mwamba, respectivement présidente de l’Assemblée nationale et président du Sénat, boycottent les cérémonies liées aux nominations judiciaires concomitantes, en signe de protestation.
CACH, de son côté, défend la légalité et la nécessité des ordonnances. Gilbert Kankonde affirme avoir agi dans le cadre de son intérim, invoquant un précédent de 2018 où un ministre avait contresigné pour Kabila sans controverse. L’UDPS présente les nominations comme une étape cruciale pour réformer un appareil sécuritaire gangréné par la corruption et l’allégeance à l’ancien régime. Jean-Marc Kabund, soutient l’éviction de figures comme John Numbi, symbole de l’héritage kabiliste. À Kinshasa, des militants de l’UDPS organisent des rassemblements spontanés, scandant « Fatshi, libère l’armée ! », voyant dans ces nominations une affirmation de l’autorité présidentielle.
La crise amplifie les frictions au sein de la coalition. Le FCC perçoit l’éviction de Numbi et le choix de figures comme Amisi comme une tentative de Tshisekedi de construire une base loyale dans l’armée, au détriment des équilibres de la coalition. La non-réunion entre Ilunga et Tshisekedi, malgré les demandes du Premier ministre, traduit une rupture du dialogue. Un conseiller présidentiel, cité par Jeune Afrique, confirme qu’« aucun tête-à-tête hors Conseil des ministres n’est envisagé », signe d’un fossé irréparable. Cette crise, survenant juste avant les nominations controversées à la Cour constitutionnelle, renforce la détermination de Tshisekedi à s’émanciper du FCC, préparant le terrain pour les consultations de l’Union Sacrée lancées en novembre 2020.
La bataille pour la CENI
En juillet 2020, la désignation de Ronsard Malonda, proche de Kabila, à la tête de la CENI par l’Assemblée nationale, alors dominée par le FCC, attise les craintes de manipulation électorale pour 2023. CACH accuse le FCC et la présidente de l’Assemblée nationale Jeanine Mabunda de vouloir verrouiller le processus électoral. Tshisekedi retarde l’entérinement, provoquant des manifestations violentes à Kinshasa et Lubumbashi. Le FCC défend Malonda comme un “choix technique”, mais cette justification peine à convaincre. Kabund évoque alors la possibilité de mobiliser la base militante pour empêcher cette nomination, ce qui se traduit par des manifestations massives à Kinshasa et Lubumbashi. Ces manifestations, qui prennent rapidement une tournure violente, sont marquées par des affrontements avec la police, et font plusieurs blessés. La situation dégénère, illustrant la gravité de la crise politique en cours.
Cette crise illustre la lutte pour le contrôle des élections, un enjeu crucial dans un pays où les scrutins sont souvent contestés.
Une Cour constitutionnelle contestée
La crise institutionnelle qui éclate en juillet 2020 autour de la Cour constitutionnelle trouve son origine dans un épisode aussi discret que déterminant : la démission controversée de son président, Benoît Lwamba. En poste depuis plusieurs années et perçu comme proche du Front Commun pour le Congo (FCC), Lwamba est reçu en toute discrétion par le président Félix Tshisekedi au Palais de la Nation, à la surprise générale. Quelques jours plus tard, une lettre de démission de Lwamba est rendue publique, officiellement pour des raisons de santé. Mais le timing intrigue, tout comme les circonstances opaques de cette démarche. Très vite, des voix s’élèvent au sein du FCC pour contester l’authenticité de cette démission, accusant la Présidence d’avoir exercé des pressions pour obtenir le retrait du magistrat. Lwamba lui-même, dans un courrier ambigu adressé à ses collègues, affirme n’avoir pas encore formellement quitté ses fonctions, semant le doute sur la validité du processus.
Dans ce climat d’incertitude, Tshisekedi prend acte du départ de Lwamba et, sans attendre le contreseing du Premier ministre Sylvestre Ilunga, nomme un nouveau juge en remplacement, ainsi que deux autres magistrats censés combler des postes vacants. Ces ordonnances présidentielles, non contresignées comme l’exige la Constitution, déclenchent une tempête politique. Le FCC y voit un passage en force et parle d’un “coup constitutionnel” destiné à remodeler la Cour pour la rendre favorable à Tshisekedi en prévision des futurs arbitrages politiques et électoraux. Le Premier ministre Ilunga, fidèle à Joseph Kabila, dénonce des actes “nuls et de nul effet” et alerte sur un grave précédent qui remettrait en cause l’équilibre des institutions.
Côté CACH, la défense est tout aussi frontale : les nouvelles nominations sont présentées comme un acte de rupture salutaire avec une justice longtemps inféodée au régime précédent. Jean-Marc Kabund, alors vice-président de l’Assemblée nationale, estime que « la Cour constitutionnelle, sous l’emprise du FCC, n’a cessé de servir les intérêts d’un seul homme ». Pour l’UDPS, il s’agit d’un moment clé dans la refondation de l’État, où le pouvoir judiciaire doit enfin s’émanciper des chaînes politiques.
Le 21 octobre, les trois nouveaux juges prêtent serment lors d’une cérémonie solennelle au Palais du peuple. Les parlementaires FCC boycottent l’événement, dénonçant une “violation flagrante de la Constitution” et une “dérive autoritaire”. Jeanine Mabunda et Alexis Thambwe Mwamba, à l’époque respectivement présidente de l’Assemblée nationale et président du Sénat, publient une déclaration conjointe appelant à une “résistance institutionnelle” face à ce qu’ils perçoivent comme un accaparement des leviers de pouvoir par Tshisekedi.
Dans la rue pourtant, le climat est tout autre. Des partisans du chef de l’État se rassemblent à Kinshasa pour célébrer ce qu’ils considèrent comme une victoire symbolique contre le système Kabila. Les slogans “Justice libre, justice forte” se répandent comme un mot d’ordre populaire. Pour beaucoup, cette recomposition de la Cour constitutionnelle représente l’un des actes fondateurs du tournant post-Kabila. Mais pour l’opposition, elle symbolise une entorse grave à la légalité républicaine, et marque le début d’une concentration inquiétante des pouvoirs autour du président Tshisekedi.
La chute des piliers du FCC
En novembre 2020, la coalition CACH-FCC, minée par deux années de luttes intestines, s’effondre sous le poids de ses contradictions. Félix Tshisekedi, lassé des blocages orchestrés par le FCC de Joseph Kabila, lance les consultations nationales pour l’Union Sacrée de la Nation, une initiative visant à recomposer une majorité sans son ancien partenaire. Ce tournant, préparé par une vague de mécontentement populaire contre l’inertie institutionnelle, s’appuie sur la frustration des Congolais face à la corruption, l’insécurité dans l’est et l’incapacité du gouvernement à concrétiser les promesses de réformes, comme la gratuité de l’éducation. Les consultations, menées avec des leaders politiques, religieux et sociaux, dont l’archevêque Fridolin Ambongo et Moïse Katumbi, fracturent le FCC, attirant des dissidents séduits par la perspective d’un nouveau partage du pouvoir. Dans ce contexte explosif, trois figures emblématiques du FCC Jeanine Mabunda, présidente de l’Assemblée nationale, Alexis Thambwe Mwamba, président du Sénat, et Sylvestre Ilunga, Premier ministre, sont balayées entre décembre 2020 et février 2021, marquant la fin de l’hégémonie kabiliste et l’ascension de Tshisekedi comme maître du jeu politique à Kinshasa.
Jeanine Mabunda : la chute d’un symbole kabiliste

Jeanine Mabunda, élue présidente de l’Assemblée nationale en avril 2019, incarne la mainmise du FCC sur le pouvoir législatif. Fidèle de Kabila et ancienne ministre, elle est perçue par CACH comme un obstacle aux réformes de Tshisekedi, notamment sur la transparence financière et la gratuité de l’éducation. Son boycott des nominations judiciaires de Tshisekedi en juillet 2020, aux côtés du Sénat, exacerbe les tensions, tandis que sa gestion autoritaire de l’Assemblée aliène même certains députés FCC. À l’automne 2020, les consultations de l’Union Sacrée, lancées le 2 novembre, ébranlent la majorité FCC, avec des défections de poids comme celle de Didi Manara, président du groupe parlementaire PPRD à l’époque et ancien gouverneur du Maniema. La grogne populaire, alimentée par des mouvements citoyens comme la LUCHA, s’intensifie, dénonçant une Assemblée inféodée à Kabila et déconnectée des aspirations du peuple.
Le 7 décembre 2020, une pétition pour la destitution de Mabunda soutenue par 237 signatures, dépassant largement les 125 requises, est déposée. Ce document, fruit d’intenses tractations menées par l’Union Sacrée, accuse Mabunda de « gestion opaque », « incompétence » et « sabotage des initiatives présidentielles ». Les dissidents du FCC, jouent un rôle clé, rejoints par des alliés de Katumbi et de Bemba. Le 10 décembre, la session plénière au Palais du Peuple se déroule dans un climat électrique. Des militants de l’UDPS, massés aux abords, scandent « Mabunda, dégage ! », tandis que des échauffourées avec la police éclatent, faisant plusieurs blessés selon Radio Okapi. À l’intérieur, les débats sont houleux : les députés FCC, menés par Néhémie Mwilanya, dénoncent un « coup de force anticonstitutionnel », mais leur camp, miné par les défections, s’effrite. Le vote, retransmis en direct, voit 281 députés, sur 483 présents, approuver la destitution, un résultat écrasant qui sidère le FCC. Mabunda, évincée, quitte l’hémicycle sous les huées des pro-Tshisekedi.
La chute de Mabunda, relayée par Politico.cd comme une « victoire historique » pour Tshisekedi, démantèle le contrôle du FCC sur l’Assemblée. Christophe Mboso, un transfuge du FCC rallié à l’Union Sacrée, doyen des députés, dirige le bureau provisoire dès le 11 décembre, avant d’être élu en février 2021 président de l’Assemblée nationale en remplacement de Mabunda. Cette transition galvanise les militants de l’UDPS, qui organisent des cortèges à Limete, brandissant des portraits de Tshisekedi. Cependant, le FCC, par la voix de Raymond Tshibanda, condamne une « chasse aux sorcières » et accuse Tshisekedi de manipuler les institutions. La destitution, bien que saluée comme un pas vers la réforme, accentue la polarisation, les cadres FCC menaçant de « résister par tous les moyens ».
Alexis Thambwe Mwamba : le Sénat cède sous la pression
Alexis Thambwe Mwamba, président du Sénat depuis juillet 2019, est un pilier du FCC, connu pour son passé de ministre sous Kabila et son rôle dans la consolidation de l’influence kabiliste. Son boycott des nominations judiciaires de Tshisekedi en juillet 2020, aux côtés de Mabunda, et ses déclarations provocatrices, qualifiant la menace de dissolution de Tshisekedi de « provocation inutile », attisent l’hostilité de CACH. En janvier 2021, la chute de Mabunda et la motion contre Ilunga fragilisent le Sénat, dernier bastion du FCC. Les consultations de l’Union Sacrée, prolongées après décembre, attirent des sénateurs FCC, comme Modeste Bahati Lukwebo, séduits par des promesses de pouvoir. La pression populaire s’intensifie, avec des manifestations à Goma et Bukavu dénonçant un Sénat « au service de Kabila ».
Le 2 février 2021, une motion de censure est déposée contre Thambwe Mwamba par 54 sénateurs, dont des dissidents du FCC et des alliés de l’Union Sacrée. La pétition, initiée par le sénateur MLC Valentin Gerengo, reproche à Thambwe Mwamba une « gestion autoritaire », des « irrégularités financières » et un « manque de collaboration » avec les réformes de Tshisekedi. Les débats, prévus pour le 5 février, sont précédés d’une mobilisation massive. À Kinshasa, des jeunes de la LUCHA brûlent des effigies de Thambwe Mwamba, tandis que des vidéos virales sur les réseaux sociaux montrent des pancartes proclamant « Le Sénat au peuple ! ». Conscient de son isolement, Thambwe Mwamba, conseillé par ses proches, anticipe l’humiliation d’un vote défavorable. Le 5 février, il annonce sa démission dans une lettre aux sénateurs, invoquant le besoin de « préserver la dignité du Sénat » face à une « campagne d’acharnement ». Cette capitulation, annoncée sans débat, surprend même ses adversaires, qui s’attendaient à une bataille parlementaire.
La démission de Thambwe Mwamba, couverte par Jeune Afrique comme un « séisme institutionnel », consacre la mainmise de l’Union Sacrée sur le Parlement. Le 2 mars 2021, Modeste Bahati Lukwebo, un ex-FCC rallié à Tshisekedi, est élu président du Sénat avec 78 voix sur 108, confirmant le basculement de la chambre haute. À Lubumbashi, des militants pro-Tshisekedi célèbrent, voyant dans ce changement la fin d’un Sénat « verrouillé par Kabila ». Le FCC, par la voix d’Emmanuel Ramazani Shadary, dénonce une « instrumentalisation des institutions » et appelle à une « résistance légale ». Pour les analystes, comme le politologue congolais Pierre Mbuyi, la chute de Thambwe Mwamba illustre la stratégie de Tshisekedi : exploiter les rivalités internes du FCC pour recomposer les équilibres de pouvoir.
Sylvestre Ilunga : la motion qui brise le gouvernement FCC
Sylvestre Ilunga Ilunkamba, Premier ministre depuis août 2019, est un fidèle de Kabila, imposé par le FCC pour limiter l’influence de Tshisekedi. Son gouvernement, dominé par le FCC, est accusé par CACH de saboter les réformes présidentielles, notamment sur l’éducation et la lutte contre la corruption. Les tensions culminent en 2020 avec le refus d’Ilunga de contresigner les ordonnances de Tshisekedi sur l’armée et la justice, perçu comme une tentative de préserver l’emprise kabiliste. La formation de l’Union Sacrée, qui prive le FCC de sa majorité parlementaire, place Ilunga dans une position intenable. En janvier 2021, la destitution de Mabunda et la défection de dizaines de députés FCC, attirés par les promesses de Tshisekedi, scellent son sort. La crise économique, marquée par l’inflation et l’insécurité croissante dans l’est, alimente la colère populaire contre son gouvernement.
Le 25 janvier 2021, une motion de censure est déposée contre Ilunga par le député Chérubin Okende de Ensemble pour la République de Katumbi, soutenue par 301 signatures, reflet de la nouvelle majorité de l’Union Sacrée. La motion accuse Ilunga d’« incompétence », de « blocage des réformes » et de « mauvaise gestion » face à la crise économique et sécuritaire. Ilunga tente de contrer l’offensive en dénonçant l’illégalité de la session extraordinaire, convoquée hors période parlementaire régulière. Dans une lettre adressée à Tshisekedi le 26 janvier, il argue que la motion viole la Constitution et refuse de se présenter à l’Assemblée. Mais la pression est irrésistible : le 27 janvier, la session plénière, présidée par Christophe Mboso, se tient sous haute tension. À l’extérieur, des milliers de militants de l’UDPS et de mouvements citoyens, rassemblés près du Palais du Peuple, scandent « Ilunga, dehors ! », tandis que la police déploie des gaz lacrymogènes pour disperser la foule. Le vote, retransmis en direct, est sans appel : 367 députés, sur 382 votants, approuvent la censure, un score écrasant qui humilie le FCC. Ilunga, acculé, présente sa démission le 29 janvier, dans une allocution où il défend son bilan tout en fustigeant une « chasse aux sorcières ».
La chute d’Ilunga, relayée par Heshima Magazine comme la « fin du joug FCC », marque la fin du gouvernement kabiliste. Le 15 février 2021, Jean-Michel Sama Lukonde, un jeune cadre du Katanga et membre de l’Union Sacrée, est nommé Premier ministre, incarnant un renouveau aligné sur les priorités de Tshisekedi. À Kinshasa, des scènes de liesse envahissent Gombe et Limete, avec des pancartes proclamant « Fatshi libère le Congo ! ». Le FCC, par la voix de Néhémie Mwilanya, dénonce un « coup d’État parlementaire » et appelle à une mobilisation de ses bases, mais ces appels, relayés timidement, trahissent son affaiblissement. La transition vers un gouvernement Lukonde, formé en avril 2021, ouvre la voie à des réformes, mais la persistance de l’insécurité dans l’est, avec la résurgence du M23, rappelle les limites de cette victoire institutionnelle.
Rupture et création de l’Union sacrée de la nation
Face à l’escalade des tensions entre les deux coalitions alliées, Tshisekedi initie, en novembre 2020, des consultations nationales dans le but de constituer l’Union Sacrée de la Nation, une nouvelle majorité excluant le FCC. À travers des rencontres avec des leaders politiques, religieux et sociaux, tels que l’archevêque Fridolin Ambongo, le représentant légal de l’église Kimbaguiste,… il s’efforce de rallier à sa cause des dissidents FCC et PPRD et des figures de l’opposition, dont Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba.
Le 6 décembre 2020, dans un discours retransmis en direct par plusieurs médias et face à l’indignation grandissante, Tshisekedi, le regard déterminé et le ton ferme, annonce la fin de la coalition CACH-FCC, dénonçant les “blocages systématiques” du FCC. S’adressant ensuite à la population congolaise dans les quatre langues nationales, il l’appelle à l’accompagner dans cette nouvelle décision pour un avenir meilleur. À l’issue de son discours, tel un scénario digne d’un film, sans un regard en arrière, il tourne le dos aux caméras avec une démarche assurée, un homme qui s’affirme et prend ses distances avec la coalition. Ce geste, puissant autant que son discours, marque une rupture nette. Sa décision, perçue comme un acte audacieux, déclenche une tempête politique déjà en gestation. Le FCC riposte, qualifiant la décision de “coup d’État constitutionnel”, mais une grande partie de la population, épuisée par la paralysie, soutient Tshisekedi. La même nuit, des scènes de liesse éclatent partout dans le pays : automobilistes et motards klaxonnent pour manifester leur joie, tandis que d’autres s’entassent dans les rues, chantant la fin de la coalition. « Tshisekedi a courageusement mis fin à une coalition paralysante. Ce vent de renouveau redonne espoir au peuple », a déclaré Léon Vitho wa Vitho, habitant de Kinshasa/Upn.
Le camp Tshisekedi aboutit à un nouveau gouvernement en 2021, dirigé par Jean-Michel Sama Lukonde, marquant ainsi la fin de l’hégémonie du FCC.
La résurgence du M23, une revanche de Kabila ?
La rupture, bien que libératrice, fragilise l’appareil sécuritaire. Cette instabilité est exploitée par le M23, qui réémerge fin 2021 dans le Nord-Kivu. Soutenu par le Rwanda, selon les rapports de l’ONU, le groupe profite des faiblesses de l’appareil sécuritaire, miné par l’obstructionnisme du FCC sous la coalition. Le contrôle du FCC sur la défense et les services de renseignement avait entravé les réformes de Tshisekedi, laissant l’est vulnérable. La transition vers l’Union Sacrée, bien que nécessaire, crée un vide institutionnel que le M23 exploite, s’emparant de territoires et déplaçant des millions de civils.
Dans sa tribune de février 2025, Kabila lie la crise du M23 à son exclusion du pouvoir, suggérant que son régime maintenait une stabilité fragile via des arrangements opaques avec des acteurs régionaux comme le Rwanda. Cette affirmation, tout en critiquant Tshisekedi, soulève des questions sur son propre rôle. Les liens historiques de Kabila avec le Rwanda, forgés durant la deuxième guerre du Congo, alimentent les soupçons de complicité tacite dans la résurgence du M23. En suggérant que son exclusion a déstabilisé la RDC, Kabila admet implicitement une influence sur les dynamiques rebelles, une admission troublante qui jette une ombre sur son héritage.
Un séisme politique aux conséquences durables
La destitution de Mabunda, Thambwe Mwamba et Ilunga consacre la fin de l’hégémonie du FCC, mais à un coût élevé. Ces événements, orchestrés par l’Union Sacrée et soutenus par une mobilisation populaire sans précédent, permettent à Tshisekedi de s’émanciper de l’ombre de Kabila, mais ils alimentent les accusations de « dérive autoritaire » portées par le FCC. Dans sa tribune de février 2025, publiée dans le Sunday Times, Kabila lie ces bouleversements à une « instabilité institutionnelle » ayant favorisé la résurgence du M23, une affirmation qui, tout en critiquant Tshisekedi, trahit son propre rôle dans l’obstructionnisme passé. Pour la RDC, ce séisme politique ouvre une ère de réformes, mais aussi de vulnérabilités, dans un pays où la quête de pouvoir à Kinshasa se paie souvent au prix du chaos dans l’Est.
Un chapitre clos, des blessures béantes
L’implosion de la coalition CACH-FCC demeure un tournant majeur dans la saga politique tumultueuse de la RDC. La rupture audacieuse de Félix Tshisekedi avec le FCC de Joseph Kabila a libéré sa présidence, ouvrant la voie à des réformes telles que la gratuité de l’éducation et une justice en quête d’indépendance. Mais cette émancipation a eu un coût élevé. Les batailles institutionnelles marquées par des fraudes électorales, des guerres de nominations et des affrontements parlementaires ont révélé la fragilité d’une nation tiraillée entre un élan réformateur et des structures de pouvoir enracinées. La chute des piliers du FCC, comme Jeanine Mabunda, Alexis Thambwe Mwamba et Sylvestre Ilunga, a scellé le triomphe de Tshisekedi, mais les cicatrices de cette fracture persistent. La tribune de Kabila en février 2025 dans le Sunday Times, liant son exclusion à la résurgence du M23, jette une ombre sur son héritage tout en suggérant des liens troubles avec des acteurs régionaux. Alors que la RDC lutte contre l’instabilité persistante dans l’Est, l’épopée CACH-FCC rappelle une vérité amère : le pouvoir conquis dans l’arène politique de Kinshasa se paie souvent au prix du chaos aux frontières fragiles du pays, rendant la quête de stabilité particulièrement ardue dans un pays fracturé.
Heshima Magazine
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Nation
RDC : les mouvements citoyens LUCHA et Filimbi sont-ils en perte de vitesse ?
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13 heures agoon
mai 15, 2025By
La redaction
Véritables porte-étendards des manifestations citoyennes lors de la dernière décennie en République démocratique du Congo (RDC), les mouvements Lutte pour le changement (LUCHA) et Filimbi, qui signifie « coup de sifflet » en swahili, semblent perdre leur cadence depuis le changement de régime politique à la tête du pays. Pourtant, malgré le départ de Joseph Kabila du pouvoir, les défis sociaux et sécuritaires demeurent. L’occupation de certaines villes du pays par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) a affecté les activités de ces mouvements.
Engagés pour la démocratie, la justice sociale et la bonne gouvernance, les deux mouvements se sont montrés comme des acteurs influents de la société civile lors de la dernière décennie. Fondée en 2012, la LUCHA rassemble plusieurs centaines de jeunes à travers le pays, mais le mouvement a beaucoup fait parler de lui dans les villes de Goma, Beni, Butembo, Lubero et Kinshasa. Malgré les défis sécuritaires et politiques, leur présence et leur action témoignent de leur résilience et de leur détermination à défendre les droits des Congolais.
Cependant, il faut reconnaître que depuis la fin du régime de l’ancien président de la République Joseph Kabila, les actions de ces mouvements ont baissé d’intensité. « Ils avaient focalisé leurs actions notamment sur le départ du pouvoir de Joseph Kabila. Après avoir atteint cet objectif, le reste des actions de la LUCHA et Filimbi n’a pas eu un grand impact », explique un analyste sur les dynamiques politiques en RDC.
LUCHA : un engagement constant pour la démocratie
La LUCHA continue de défendre la dignité humaine, la justice sociale et la démocratie par des actions non violentes. Le mouvement reste actif dans plusieurs provinces, notamment au Nord-Kivu, où il soutient les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et dénonce les violations des droits humains commises par les groupes armés, y compris le M23 soutenu par le Rwanda. Elle n’hésite pas également à critiquer la gouvernance du président Félix Tshisekedi, l’accusant de renforcer un système autoritaire et de ne pas améliorer les conditions de vie des Congolais.
Dialogue entre Kinshasa et AFC/M23, la LUCHA se positionne
Pour continuer à marquer sa présence dans le débat public, la LUCHA a livré sa position au sujet du dialogue entre le gouvernement congolais et les rebelles de l’AFC/M23, qui se tient à Doha, capitale du Qatar. « Nous tenons à mettre en garde contre des ‘‘accords de paix’’ récompensant les criminels au détriment des victimes, démantelant davantage les services de sécurité et compromettant les principes démocratiques », peut-on lire dans sa déclaration du 24 avril 2025. Ce mouvement se dit donc prêt à s’opposer à tout accord de paix qui viendrait consacrer « une amnistie générale » pour tous les responsables des crimes graves, une « intégration collective » des rebelles au sein de l’armée nationale ainsi qu’une représentation des rebelles au sein des instances politiques du pays.
Filimbi, un mouvement né de la colère socio-politique
Le mouvement citoyen Filimbi, dont le nom signifie « coup de sifflet » en swahili, est né le 15 mars 2015 à Kinshasa. Cette structure a été fondée par des jeunes Congolais issus de divers horizons professionnels, dont Floribert Anzuluni, un banquier, Franck Otete, un médecin, et Yangu Kiakwama Kia Kizi, un licencié en droit. Le lancement officiel a été marqué par une conférence de presse à laquelle ont assisté des représentants de mouvements tels que « Y’en a marre » (Sénégal), « Balai Citoyen » (Burkina Faso) et La Lucha (RDC). Trois des fondateurs de ce mouvement ont été exilés en Europe, après s’être cachés pendant plusieurs semaines à Kinshasa pour fuir la répression organisée par le régime de Joseph Kabila. Parmi eux figurait Floribert Anzuluni. Le jour même de son lancement, une quarantaine de personnes présentes à la conférence ont été enlevées par des militaires, dont certaines ne seront libérées que dix-huit mois plus tard. Les fondateurs ont été accusés de « terrorisme » et de vouloir préparer une insurrection violente, bien qu’ils se revendiquent résolument de la non-violence et du respect du cadre légal.
Cofondé par Carbone Beni, Filimbi agit comme un des acteurs clés de la société civile. Ce mouvement se positionne comme une structure non partisane et non violente, visant à stimuler la participation citoyenne, en particulier des jeunes, afin d’améliorer les conditions de vie en influençant les décisions des autorités. Le nom « Filimbi » symbolise un appel à la mobilisation et à la vigilance face aux injustices.
Fred Bauma et Yves Makwambala, des visages devenus iconiques
Toujours en 2015, le jour du lancement de ce mouvement, Fred Bauma et Yves Makwambala, membres de Filimbi, ont été arrêtés lors d’un atelier organisé pour le lancement du mouvement. Ils ont été inculpés de complot contre le chef de l’État et de tentative de destruction ou de changement du régime constitutionnel. Un rapport d’enquête parlementaire a conclu que les militants de Filimbi n’avaient aucune visée terroriste. Malgré cette intervention du parlement, leur procès s’est finalement ouvert le 26 juin de la même année. La justice a repris les mêmes griefs, notamment celui d’avoir comploté contre la vie ou contre la personne du chef de l’État ; d’avoir tenté de détruire ou de changer le régime constitutionnel ; ou d’avoir incité des personnes à s’armer contre l’autorité de l’État. Les autorités ont aussi accusé Fred Bauma d’avoir troublé l’ordre public, et Yves d’avoir publiquement offensé le chef de l’État.
En décembre 2016, Carbone Beni, un des leaders du mouvement, a été arrêté lors de la mobilisation contre le maintien au pouvoir de Joseph Kabila après la fin de son mandat constitutionnel en décembre 2016. Il a été détenu pendant plus de neuf mois avant d’être condamné à douze mois de prison pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’État », « offense au chef de l’État » et « publication et distribution d’écrits subversifs ».
Tshisekedi réchauffe ces mouvements avec le débat sur la Constitution
Comme la LUCHA, Filimbi va perdre son influence après la fin de ce combat politique, consacré par le départ du pouvoir de Joseph Kabila le 24 janvier 2019. Mais Félix Tshisekedi va redonner de l’eau au moulin de ces mouvements en relançant le débat sur la modification ou le changement de la Constitution en octobre 2024. En décembre de la même année, le mouvement s’est opposé fermement à toute modification de la Constitution, dénonçant une tentative de coup d’État masqué et appelant le gouvernement à se concentrer sur les priorités urgentes telles que la sécurité et le bien-être des Congolais. « Nous ne nous laisserons pas faire. Nous sommes prêts à défendre notre Constitution, qui est le fruit de longues luttes et de nombreux sacrifices », avait déclaré Christophe Muyisa, cadre de Filimbi à Goma.
Depuis l’occupation de Goma et de Bukavu par les rebelles du M23, les deux mouvements font face à des menaces, notamment à Goma, où la LUCHA a été explicitement menacée par des partisans de l’AFC/M23, soulignant la pression exercée sur les voix critiques par ces rebelles.
Depuis l’alternance pacifique, Filimbi mène diverses actions, telles que des campagnes de sensibilisation contre l’incivisme, des initiatives d’assainissement urbain, des formations sur la gestion de l’environnement et des mobilisations contre les dépenses publiques excessives. Ce mouvement se consacre maintenant à un autre combat : celui de la réduction significative des dépenses publiques, estimant que 70 % du budget national est consacré au fonctionnement des institutions, au détriment des secteurs essentiels comme l’éducation, la santé et la sécurité. Le mouvement organise des formations pour sensibiliser la jeunesse à la gestion de l’environnement, illustrant ainsi son engagement pour un développement durable.
Heshima
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La Cour constitutionnelle en RDC : arbitre impartial ou relais du pouvoir ?
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18 heures agoon
mai 15, 2025By
La redaction
Dans une République démocratique du Congo (RDC) encore hantée par ses démons institutionnels, la Cour constitutionnelle cristallise à la fois les espoirs d’une démocratie en construction et les soupçons persistants d’un pouvoir sans contrepoids. Théoriquement investie du rôle de gardienne de la Constitution et d’arbitre des contentieux électoraux, cette haute juridiction se trouve au cœur d’une interrogation essentielle : défend-elle réellement l’État de droit ou s’est-elle muée, avec le temps, en auxiliaire de l’exécutif ?
L’origine de la Cour remonte à un tournant historique : l’adoption de la Constitution du 18 février 2006, fruit des accords de paix de Pretoria qui mirent un terme à la seconde guerre du Congo. Plus de cinq millions de morts, des institutions à rebâtir, et la promesse d’un nouvel ordre constitutionnel. L’article 157 crée alors une Cour constitutionnelle distincte, censée rompre avec les pratiques d’une justice inféodée, héritée de l’époque coloniale et prolongée sous le régime Mobutu.
À cette époque, le contrôle de constitutionnalité était confié à la Cour suprême, perçue comme une simple caisse de résonance du pouvoir en place. « Sous Mobutu, elle ne faisait qu’entériner les décisions de l’exécutif », résume Me Thierry Nlandu, avocat et constitutionnaliste. L’effondrement du régime en 1997, suivi d’une transition chaotique, met en lumière la nécessité d’un véritable contre-pouvoir judiciaire.
Mais il faudra attendre sept longues années pour que la Cour devienne réellement opérationnelle. Ce n’est qu’en 2013 qu’elle commence à exercer ses fonctions, révélant les résistances politiques à sa mise en œuvre. « Ce délai anormal témoigne de la méfiance des élites politiques face à toute forme de contrôle institutionnel », analyse le politologue Christian Moleka. Entre-temps, la Cour suprême a continué de trancher les litiges électoraux, notamment en 2006 et 2011 dans un climat de fortes contestations.
Alors que le pays s’avance vers de nouvelles échéances électorales, la Cour demeure sous étroite surveillance. Sur le papier, elle incarne l’équilibre des pouvoirs. Dans les faits, son indépendance continue de diviser.
Un mandat taillé pour l’exécutif ?
Neuf juges, neuf ans de mandat, un renouvellement par tiers tous les trois ans : la Cour constitutionnelle de la République démocratique du Congo affiche, sur le papier, tous les attributs d’une institution indépendante et pérenne. Sa composition tripartite, trois membres nommés par le président de la République, trois par le Parlement en Congrès, trois par le Conseil supérieur de la magistrature, semble garantir un savant équilibre des pouvoirs. La Constitution renforce cette exigence d’expertise en imposant que six des neuf juges soient des juristes chevronnés, dotés d’au moins quinze ans d’expérience.
Pourtant, derrière cette architecture juridique soigneusement calibrée, la réalité institutionnelle révèle des fissures préoccupantes. « Le système congolais de nomination des juges constitutionnels présente une faille majeure : le président conserve un pouvoir de validation finale excessif », analyse Bob Kabamba, professeur de sciences politiques à l’Université de Liège. Un constat partagé par de nombreux observateurs dans un pays où l’exécutif exerce traditionnellement une influence déterminante sur le législatif et où le Conseil supérieur de la magistrature peine à affirmer son autonomie.
Les nominations controversées de 2020 ont mis en lumière ces fragilités structurelles. Quand le président Félix Tshisekedi désigne 3 nouveaux juges Dieudonné Kaluba Dibwa, ancien avocat de la République auprès de la CPI, Alphonsine Kalume Asengo Cheusi et Kamula Badibanga, la réaction ne se fait pas attendre. L’opposition dénonce une « mainmise déguisée » sur l’institution, tandis que des manifestations spontanées, bien que très minimes, éclatent dans la capitale. « Ces nominations respectent strictement la Constitution », se défend l’entourage présidentiel. Un argument qui peine à convaincre sur le terrain politique, tant Kaluba est soupçonné d’être proche de Tshisekedi.
Le piège du renouvellement échelonné
Le système de renouvellement par tiers, conçu pour assurer une sage continuité, révèle ses limites dans la pratique. Retards chroniques dans les remplacements, marchandages politiques opaques, sièges laissés vacants : chaque cycle de nomination devient l’occasion de nouvelles batailles d’influence qui grèvent la crédibilité de l’institution.
Des contentieux électoraux aux décisions controversées
L’ère pré-Constitutionnelle de la justice électorale en RDC reste marquée par des décisions qui continuent de hanter la mémoire collective. Avant l’opérationnalisation de la Cour constitutionnelle, c’est la Cour suprême de justice qui endossait le rôle d’arbitre électoral, avec des verdicts lourds de conséquences.
L’élection présidentielle de 2006, censée tourner la page des conflits, a révélé les failles du système. Lorsque Joseph Kabila est déclaré vainqueur face à Jean-Pierre Bemba avec 58% des voix, les contestations éclatent immédiatement. Le challenger dénonce des irrégularités massives dans le processus de dépouillement. Pourtant, la Cour suprême valide les résultats en un temps record, sans véritable examen des preuves avancées. « C’était une mascarade judiciaire », confie encore aujourd’hui un ancien collaborateur de Bemba, sous couvert d’anonymat.
Cinq ans plus tard, le scénario se répète avec une intensité accrue. Le face-à-face entre Kabila et Étienne Tshisekedi donne lieu à l’un des scrutins les plus controversés de l’histoire du pays. Malgré les rapports accablants des observateurs internationaux, l’Union européenne parlant de résultats « non crédibles », le Centre Carter dénonçant un processus « dépourvu de transparence », la Cour suprême confirme une nouvelle fois la victoire du sortant. Les violences qui s’ensuivent à Kinshasa et dans d’autres régions marquent durablement les esprits et sonnent le glas de la crédibilité de l’institution.
Ces épisodes douloureux ont pesé comme une chape de plomb sur les épaules de la nouvelle Cour constitutionnelle lors de sa mise en service en 2013. « Nous héritions d’une défiance systémique envers la justice électorale », reconnaît un ancien membre de l’institution. La tâche était immense : il fallait à la fois se démarquer des pratiques passées et imposer une nouvelle culture de l’indépendance judiciaire dans un paysage politique encore marqué par les réflexes autoritaires.
2018 : La Cour constitutionnelle face au test décisif
L’élection présidentielle de décembre 2018 devint le banc d’essai tant redouté pour la jeune Cour constitutionnelle. Après des années de reports sous Joseph Kabila, ce scrutin historique opposait trois figures emblématiques : Félix Tshisekedi, héritier politique de l’opposant historique Étienne Tshisekedi ; Martin Fayulu, candidat d’une coalition hétéroclite ; et Emmanuel Shadary, dauphin de Kabila.
La proclamation des résultats par la CENI le 10 janvier 2019 déclencha une onde de choc. Alors que Tshisekedi est annoncé vainqueur avec 38,57% des voix, des fuites publiées par le Financial Times révèlent des chiffres radicalement différents, allant jusqu’à attribuer près de 60% des suffrages à Fayulu.
Fayulu saisit immédiatement la Cour constitutionnelle, dénonçant un « coup d’État électoral » et exigeant un recomptage complet. Le 20 janvier, après dix jours d’audiences tendues, la Cour rendit sa décision. D’une voix ferme, elle rejeta toutes les requêtes de Fayulu, validant l’élection de Tshisekedi. Le verdict, rédigé dans un jargon juridique impeccable, ne parvint pas à masquer le malaise ambiant. Dans les coulisses, des sources judiciaires confièrent à Jeune Afrique que plusieurs juges avaient exprimé des réserves, mais s’étaient finalement rangés à l’avis majoritaire.
Bien qu’il y ait eu des scènes de liesse parmi la population congolaise à la suite de la confirmation de la victoire de Félix Tshisekedi, l’onde de choc de cette décision s’est propagée bien au-delà des frontières congolaises. Tandis que Fayulu qualifiait la Cour d’« instrument de légitimation d’une mascarade », certains partenaires internationaux ont adopté une position ambiguë, reconnaissant officiellement la victoire de Tshisekedi tout en exprimant des « préoccupations sérieuses ».
L’ombre de 2018 continue de planer sur la Cour constitutionnelle. Si l’institution a depuis rendu d’autres arrêts notables, c’est bien ce jugement qui reste gravé dans la mémoire collective comme son heure de vérité, ou son occasion manquée. Alors que le pays s’achemine vers de nouvelles échéances électorales, nombreux sont ceux qui s’interrogent : la Cour saura-t-elle tirer les leçons de ce passé récent, ou reproduira-t-elle les mêmes schémas qui ont entaché sa crédibilité ?
2023 : La Cour constitutionnelle face au paradoxe de la légitimité
Le dernier scrutin présidentiel de décembre 2023 a placé la Cour constitutionnelle face à un dilemme familier. La réélection de Félix Tshisekedi, avec un score sans appel (73,47 %) face à Moïse Katumbi (18 %) et Martin Fayulu (4,9 %), a ravivé le débat sur le rôle de l’institution dans la validation des processus électoraux.
Le jour du scrutin, certains bureaux de vote n’ont pas ouvert à l’heure et de nombreux électeurs ont peiné à retrouver leurs noms sur les listes. En réponse, la CENI a prolongé le vote sur plusieurs jours dans certaines circonscriptions, une décision vivement critiquée par des missions d’observation.
Félix Tshisekedi est déclaré vainqueur de l’élection présidentielle avec plus de 73 % des suffrages, distançant largement ses principaux concurrents, Moïse Katumbi et Martin Fayulu.
Lorsque Théodore Ngoy, un candidat marginal, dépose un recours détaillant des irrégularités, la Cour adopte une position nuancée. Tout en reconnaissant la réalité de certaines anomalies, elle estime dans son arrêt du 9 janvier 2024 que celles-ci n’étaient pas « d’une ampleur susceptible d’influer sur l’issue globale du scrutin ».
Cette décision en demi-teinte n’a pas convaincu l’opposition. Le boycott judiciaire de Katumbi témoigne de la défiance ambiante : « Plutôt que de recourir à une Cour complice, nous choisissons de dénoncer par d’autres moyens », déclare-t-il à RFI, dans un cinglant désaveu de l’institution.
Cependant, contrairement à 2018, la Cour a fait des efforts notables de transparence. Son jugement de 2023 s’appuie sur un dispositif argumenté détaillant méthodiquement chaque grief, citant les rapports d’observation et fournissant des analyses statistiques. « C’est une évolution positive dans la forme, même si le fond reste discutable », admet un expert électoral sous couvert d’anonymat.
Toutefois, cette victoire écrasante, bien que marquée par des irrégularités localisées relevées par les observateurs, n’a pas suscité de contestation majeure quant à la légitimité du résultat final. Les missions d’observation, tant nationales qu’internationales, y compris le monitoring conjoint de la CENCO et de l’ECC, ont certes signalé des cas de bourrages d’urnes et des dysfonctionnements organisationnels, mais sans remettre en cause l’issue globale du scrutin. Aucune institution internationale ni capitale étrangère n’a émis de doute sérieux sur la proclamation du vainqueur, ni avancé de résultats alternatifs, confirmant ainsi une acceptation générale du verdict des urnes malgré les imperfections du processus.
Les défis dans le contexte des élections
Le rôle de la Cour constitutionnelle est central dans le traitement des recours électoraux. Pourtant, cette fonction se révèle problématique, notamment à cause des délais prolongés dans la prise de décision, de l’absence de transparence dans les délibérations, et du manque d’explications détaillées concernant les jugements rendus. Par exemple, lors des élections de 2011 et 2018, la Cour a été accusée de ne pas avoir pris en compte les préoccupations relatives aux fraudes électorales et aux irrégularités constatées durant le scrutin.
De plus, la Cour constitutionnelle est souvent accusée de manquer de l’indépendance nécessaire pour garantir une justice équitable. L’absence de diversité dans la composition de ses membres, et l’influence perçue du pouvoir exécutif, sont autant de facteurs qui renforcent la perception d’une institution partiellement alignée sur les intérêts politiques en place. Dans un contexte aussi chargé politiquement, les décisions de la Cour doivent impérativement être perçues comme transparentes et crédibles pour que la démocratie puisse se renforcer.
Nécessité d’une réforme
Face à ces multiples critiques, une réforme de la Cour constitutionnelle s’avère essentielle pour redonner confiance au peuple congolais. Plusieurs réformes sont envisagées pour renforcer l’indépendance et la transparence de cette institution. Parmi celles-ci, le renouvellement du mode de nomination des juges semble crucial. Actuellement, les membres de la Cour sont nommés par le Président de la République, ce qui suscite des inquiétudes quant à leur impartialité. Un processus de nomination plus inclusif, impliquant plusieurs institutions et acteurs de la société civile, pourrait garantir une plus grande légitimité.
Il est également nécessaire de revoir les processus décisionnels au sein de la Cour. La transparence des délibérations et la publication des motifs des décisions sont des mesures qui pourraient aider à apaiser les tensions et à renforcer la confiance du public. Lorsque la Cour rend une décision sur un recours électoral, il est crucial que celle-ci soit accompagnée d’explications claires et détaillées afin que la population comprenne les raisons qui ont conduit à un jugement spécifique, surtout lorsqu’il s’agit de résultats électoraux hautement contestés.
Rôle crucial dans la stabilité politique
Le rôle de la Cour constitutionnelle va au-delà de la simple validation des élections. Elle incarne également un gage de stabilité politique en période postélectorale, lorsque les tensions sont exacerbées et que les résultats sont remis en cause. Si la Cour prend des décisions éclairées et justifiées, elle peut contribuer à apaiser les tensions politiques et à éviter les dérives violentes qui ont marqué le passé du pays.
Cependant, cette fonction de régulateur de la vie politique n’est possible que si la Cour joue pleinement son rôle d’arbitre impartial. Si les décisions rendues sont perçues comme étant motivées par des intérêts politiques, cela risque d’aggraver les conflits et de déstabiliser davantage le pays. En ce sens, une réforme de la Cour constitutionnelle est une condition sine qua non pour renforcer l’état de droit en RDC et garantir un climat politique apaisé.
Vers une réforme nécessaire
La Cour constitutionnelle de la RDC doit se réinventer pour répondre aux attentes des Congolais et garantir le bon fonctionnement de la démocratie. Les réformes envisagées, tant au niveau de la composition de l’institution que de son fonctionnement interne, doivent permettre de restaurer sa crédibilité et son indépendance. Le renforcement de la transparence dans ses décisions et la promotion de l’intégrité de ses juges seront des éléments-clés pour assurer une justice électorale fiable.
En fin de compte, la confiance en la Cour constitutionnelle est essentielle pour la consolidation de la démocratie en RDC. C’est en garantissant l’indépendance de cette institution et en redonnant à ses décisions une légitimité incontestée que la RDC pourra espérer avancer sur la voie de la stabilité politique et du progrès démocratique. Les réformes de la Cour ne sont pas seulement une question de politique intérieure, mais une nécessité pour l’avenir du pays.
Heshima Magazine
Nation
Entre vitrine internationale et réalités locales, le pari risqué de « Visit DRC »
Published
2 jours agoon
mai 14, 2025By
La redaction
La République démocratique du Congo (RDC) cherche à renforcer sa visibilité internationale en s’associant à un club de football européen reconnu. L’affichage du nom de la RDC sur les maillots de l’AS Monaco lors des matchs officiels constitue un vecteur de promotion touristique et culturelle. Cependant, le pays de Félix Tshisekedi peine à réunir les prérequis pour un meilleur accueil des touristes. L’état des services aéroportuaires, le manque de sécurité, l’état impraticable du réseau routier et surtout l’insalubrité constituent des problèmes à résoudre avant de lancer un tel partenariat.
Le 10 mai, le ministre des Sports et Loisirs, Didier Budimbu, a signé un protocole d’accord avec Thiago Scuro, directeur général de l’AS Monaco, portant sur la promotion du football congolais et du tourisme. Ce contrat, d’une valeur de 1,6 million de dollars par saison, devrait concerner le développement du football congolais, avec un accent particulier sur le football. Il s’agit notamment de la formation d’entraîneurs, l’exécution de programmes de développement des jeunes talents, l’amélioration des infrastructures sportives et le renforcement des ligues locales. Une part du contrat est consacrée à la visibilité de la RDC à travers ce club de la principauté. Un autre aspect de cet accord est la contribution financière additionnelle de 200 000 euros prévue pour couvrir les frais de déplacement et de coordination de l’AS Monaco dans le cadre de ses interventions en RDC.
Sur le plan de la visibilité, le gouvernement tente d’imiter la politique rwandaise dur le tourisme avec Visit Rwanda. Une stratégie jugée mimétique par certains observateurs congolais, qui y voient une copie mal adaptée du modèle rwandais. « Ils veulent ‘‘Visit Congo’’ pendant qu’ici, routes, sécurité et aéroport sont à l’agonie. On vend une vitrine sans boutique, un rêve sans socle. Avant d’acheter des slogans, qu’on construise un pays. Sinon, c’est inviter au festin dans une maison en feu », a réagi un Congolais sur X. Beaucoup voient dans ce mimétisme du gouvernement une volonté de mettre la charrue avant les bœufs. « Ces touristes qu’on invite vont atterrir à l’aéroport de N’djili avec toutes les tracasseries qui caractérisent cette frontière ? Un travail d’image du pays devrait être fait en amont avant de signer de tels partenariats », a déclaré Sylvestre Kabongo, un analyste sportif. « Nous serons témoins de l’échec de ce partenariat. », ajoute un autre Congolais, estimant que le gouvernement devrait commencer par rendre le pays attractif avant d’inciter les touristes à venir visiter la RDC. L’insalubrité persistante, la corruption endémique et les embouteillages chroniques sont autant d’obstacles évoqués à ce projet de soft power.
De son côté, le gouvernement tente de tempérer. « Il ne s’agit pas forcément d’un contrat de visibilité mais plutôt d’un contrat de transfert de compétences pour l’amélioration du football en RDC et non Visit DRC », a déclaré une source citée par 7SUR7.CD.
Entre coopération sportive et image de marque

Ce partenariat s’inscrit dans une volonté de renforcer les relations entre la RDC et la France, en particulier dans le domaine du sport. Il ouvre la voie à de futures collaborations dans d’autres secteurs tels que l’éducation, la santé et la culture. Le succès de ce partenariat, selon certains, pourrait inciter d’autres clubs européens à collaborer avec la RDC, favorisant ainsi une diplomatie sportive active. Certaines sources au sein du ministère des Sports évoquent déjà des contacts avec des clubs espagnols majeurs comme le Real Madrid et le FC Barcelone. Avec ce partenariat, il est envisagé d’étendre ce type de projets sportifs à d’autres provinces de la RDC et de pérenniser les événements sportifs organisés.
Cette collaboration a été initiée par l’ancien international congolais Distel Zola, un ancien joueur de l’AS Monaco et fondateur de la Fondation « Bana Zola », qui œuvre en faveur des enfants défavorisés en RDC. En 2022, l’AS Monaco avait soutenu un tournoi de football organisé à Kinshasa, fournissant des tenues de match et du matériel sportif. Cet événement, soutenu par le Programme Alimentaire Mondial (PAM), visait à sensibiliser les jeunes à l’importance d’une alimentation équilibrée tout en leur offrant un moment d’évasion à travers le sport.
Une stratégie de marketing du Rwanda
Le Rwanda a établi des partenariats stratégiques avec plusieurs clubs de football européens dans le cadre de sa campagne de promotion touristique « Visit Rwanda ». Ces accords visent à renforcer la visibilité internationale du pays et à stimuler son secteur touristique. Depuis 2018, le Rwanda est le premier sponsor de la manche du maillot d’Arsenal, avec un contrat d’une valeur de 10 millions de livres sterling par an. Ce partenariat a été prolongé en 2021 pour quatre années supplémentaires. Il en est de même pour le club français du Paris Saint-Germain (PSG).
En août 2023, Kigali a signé un partenariat de cinq ans avec le Bayern Munich, axé sur le développement du football des jeunes et la promotion du tourisme. Ce partenariat comprend la création d’une académie de football FC Bayern au Rwanda. Début mai 2025, Kigali a conquis aussi l’Atletico Madrid, troisième club espagnol au classement actuel de la Liga.
Heshima
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