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RDC : Le M23 continue sa progression à la veille du dialogue, l’UE sanctionne…

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L’Union européenne a annoncé, ce 17 mars 2025, des sanctions contre plusieurs chefs militaires rwandais et des dirigeants de la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23). Malgré la pression internationale et l’ouverture d’un dialogue direct avec le gouvernement congolais à Luanda, les rebelles continuent d’avancer au Nord et Sud-Kivu, dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), provoquant ainsi le déplacement massif de la population vers Kisangani.
Après avoir promis des mesures restrictives individuelles contre le Rwanda, l’Union européenne a mis sa menace à exécution. Les sanctions ciblent des officiers des Forces de défense rwandaises (RDF) et certains responsables du M23. Du côté de l’armée rwandaise, Ruki Karusisi, commandant des forces spéciales rwandaises déployées en RDC, Eugène Nkubito et Pascal Muhizi ont été frappés par ces mesures restrictives. Elles ciblent également Francis Kamanzi, directeur général de l’Office rwandais des mines, du pétrole et du gaz (RMB), pour son rôle dans le trafic illicite de minerais congolais.

Par ailleurs, la Gasabo Gold Refinery, une entreprise spécialisée dans le raffinage de l’or, est sanctionnée car soupçonnée de raffiner et d’exporter de l’or extrait des zones contrôlées par les rebelles du M23 dans l’Est de la RDC. Du côté des rebelles du M23, les sanctions ciblent Bertrand Bisimwa, président de l’aile politique du M23, qui était déjà sous sanctions des Nations unies. Il y a également Joseph Bahati Musanga, gouverneur du Nord-Kivu nommé par Corneille Nangaa, chef de la coalition Alliance Fleuve Congo/M23, ainsi que Désiré Rukomera, responsable du recrutement et de la propagande du M23, et Jean-Bosco Nzabonimpa, chef adjoint des finances du groupe. Ces mesures restrictives concernent une interdiction de voyage dans l’Union européenne ainsi qu’un gel des avoirs de ces personnalités et entités dans l’espace Schengen.

Avant l’annonce de ces sanctions, le Rwanda a annoncé la rupture des relations diplomatiques avec la Belgique. Tous les diplomates belges présents au Rwanda sont tenus de quitter le pays dans les 48 heures, selon le ministère rwandais des Affaires étrangères. La veille, dimanche 17 mars, le président rwandais Paul Kagame a accusé la Belgique de plaider en faveur de sanctions internationales contre son pays en raison du conflit dans l’Est de la RDC. À en croire le chef de l’État rwandais, Bruxelles avait toujours cherché à affaiblir le Rwanda, l’accusant d’avoir amputé une grande partie du territoire rwandais au profit de la RDC à l’époque coloniale, donnant ainsi au Rwanda une superficie comparable à celle de la Belgique.

Ouverture du dialogue et progression du M23

L’Angola a confirmé l’ouverture des discussions directes entre Kinshasa et le groupe armé M23 pour ce mardi 18 mars. Malgré la volonté des deux camps de participer à ces discussions, les combats continuent sur quasiment toutes les lignes de front. Au Nord-Kivu, précisément à Walikale-centre, chef-lieu du territoire portant le même nom, la population quitte ses habitations suite à l’avancée des rebelles de l’AFC/M23. Ce lundi 17 mars, ces insurgés se sont rapprochés de la localité de Mutakato, dans le groupement Banabangi. Pour fuir des exactions, la population de Walikale se dirige en majorité vers la ville de Kisangani, chef-lieu de la province de la Tshopo. Alors que la rébellion a annoncé une délégation de cinq personnes à Luanda pour prendre part au dialogue direct, les affrontements ne baissent pas d’intensité. Au Sud-Kivu, les affrontements se poursuivent également entre ces rebelles et l’armée congolaise dans les hauts plateaux du territoire de Mwenga, tentant de s’emparer de Minembwe afin de faire jonction avec leurs alliés de Twirwaneho.

Heshima

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Rupture de la coalition CACH-FCC : retour sur une implosion qui a fragilisé la RDC

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Le 24 janvier 2019, Félix Tshisekedi accède à la présidence, marquant une alternance historique. Mais l’alliance qu’il forme avec le FCC de Joseph Kabila, censée garantir la stabilité, se transforme rapidement en un champ de tensions. Blocages institutionnels, luttes d’influence et sabotages politiques minent la coalition. De mars 2019 à décembre 2020, la rupture devient inévitable. Cette fracture, en libérant Tshisekedi de la tutelle du FCC, bouleverse durablement l’équilibre politique. Elle ouvre aussi la voie à des secousses sécuritaires majeures, dont la résurgence du M23, évoquée par Kabila lui-même dans une tribune publiée en février 2025 dans le Sunday Times. Heshima Magazine remonte le fil d’une crise qui a redéfini le pouvoir à Kinshasa et fragilisé le pays dans une certaine mesure.

24 janvier 2019 : la capitale Kinshasa est en ébullition. Au Palais de la Nation, pour la première fois dans l’histoire du pays, le Congo vit sa première passation pacifique du pouvoir. Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo prête serment devant la Cour constitutionnelle. Son prédécesseur, Joseph Kabila, assiste à la cérémonie, marquant ainsi un moment historique : la toute première passation pacifique du pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1960. Les deux présidents, assis côte à côte, sourient, échangent des regards complices et semblent unis dans une volonté commune de stabiliser le pays. Ce jour-là, la scène projette l’image d’un Congo apaisé, brièvement tourné vers l’avenir. »

Les premiers mois du mandat de Tshisekedi renforcent cette impression d’entente cordiale. En 2019, une vidéo virale sur les réseaux sociaux montre Félix Tshisekedi accueillant Joseph Kabila dans sa résidence privée de Nsele. Le déjeuner qu’ils partagent, en présence de certains de leurs proches collaborateurs (Antoine Ghonda, Kazadi Nyembo, Néhémie Mwilanya et François Beya) illustre une entente parfaite et une volonté manifeste de maintenir une collaboration étroite entre les deux sphères du pouvoir. Ce moment, largement relayé par la presse congolaise, est perçu comme un signe de détente politique, voire de partenariat assumé. En apparence, tout est soigné ; mais en profondeur, un équilibre délicat semble s’installer entre l’ancien et le nouveau président.

Pourtant, cette harmonie repose sur des bases institutionnelles fragiles. L’élection de décembre 2018, qui voit Tshisekedi proclamé vainqueur avec 38,57 % des voix par la CENI, est vivement contestée par le clan Martin Fayulu, qui revendique la victoire avec plus de 60 % des suffrages. Beaucoup suspectent alors un accord secret entre Tshisekedi et Kabila, destiné à garantir une transition sans heurts et la préservation des intérêts de ce dernier.

Le Front commun pour le Congo (FCC), la plateforme dirigée par Kabila, a assuré une mainmise sur les institutions : 342 des 500 sièges à l’Assemblée nationale, une domination dans les assemblées provinciales, et un contrôle important du Sénat. Ce déséquilibre politique contraint Félix Tshisekedi à gouverner en coalition avec sa plateforme CACH (Cap pour le changement), fondée avec Vital Kamerhe, dans une cohabitation plus subie que réellement choisie. Avant de quitter ses fonctions, Kabila nomme 26 ambassadeurs, verrouille certains postes clés et maintient ses réseaux dans les services de sécurité et la justice. Comme le souligne le chercheur Roger-Claude Liwanga dans Jeune Afrique, cette stratégie relève de la « tactique du salami » : céder symboliquement le pouvoir tout en conservant les leviers réels du contrôle.

Dans ce contexte, l’apparente complicité entre Tshisekedi et Kabila dissimule des lignes de fracture profondes qui ne tarderont pas à resurgir.

Les premières fissures : élections sénatoriales et gouverneurs

En mars 2019, une rencontre à Kinshasa scelle l’accord de coalition CACH-FCC, censé unir les deux camps. Mais les élections sénatoriales du même mois révèlent des tensions profondes. Le FCC s’adjuge 91 des 108 sièges, consolidant son emprise, mais des accusations de corruption massive éclatent. Le média congolais en ligne, Politico.cd, rapporte des achats de votes à 50 000 dollars, provoquant le retrait de candidats indignés. À Goma, un indépendant dénonce une offre similaire, soulignant l’ampleur des pratiques.

Simultanément, les élections des gouverneurs provinciaux exacerbent les fractures. Dans le Haut-Katanga et le Lualaba, des fraudes similaires provoquent des manifestations. À Lubumbashi, des militants UDPS vandalisent des bureaux de vote, dénonçant des gouverneurs FCC élus par corruption, selon Radio Okapi. Ces incidents, reflétant la mainmise du FCC sur les provinces, amplifient la méfiance de CACH.

Le 18 mars, Tshisekedi suspend l’installation des sénateurs et reporte les élections des gouverneurs, invoquant des enquêtes sur la fraude. Cette décision, saluée par la société civile, déclenche une tempête. Deux jours plus tard, des manifestations UDPS à Kinshasa dégénèrent, causant la mort d’un militant de 24 ans. Les images de pneus brûlés et de gaz lacrymogènes, diffusées sur les réseaux sociaux, illustrent un climat explosif. Le FCC, via Néhémie Mwilanya, rejette toute remise en question des scrutins, amplifiant les tensions. Sous pression, Tshisekedi lève la suspension début avril, un recul perçu comme une concession forcée. Jean-Marc Kabund, président intérimaire de l’UDPS, dénonce un « système corrompu hérité de Kabila ».

Un discours qui secoue Kinshasa

En avril 2019, Tshisekedi s’envole pour Washington, où il prononce un discours retentissant au Council on Foreign Relations. “Je suis là pour déboulonner le système dictatorial qui était en place”, déclare-t-il, accusant le régime de Kabila d’avoir “retardé le pays avec la corruption, la gabegie et l’impunité”. Ce message, applaudi par le secrétaire d’État américain Mike Pompeo, positionne Tshisekedi comme un réformateur audacieux sur la scène internationale. À Kinshasa, cependant, il déclenche une tempête. Le FCC, par la voix de Néhémie Mwilanya, condamne des propos “militants” et “irresponsables” qui, selon lui, rompent l’esprit de la coalition. Le PPRD (parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie), parti phare du FCC, va plus loin, accusant Tshisekedi de rallier des soutiens étrangers, notamment américains, pour marginaliser Kabila. Cette critique trahit la crainte du FCC de voir Tshisekedi s’émanciper grâce à des alliances internationales, d’autant que les États-Unis avaient imposé des sanctions à des proches de Kabila sous l’administration Trump.

Dans les rangs de l’UDPS, le discours est accueilli comme une bouffée d’oxygène. Jean-Marc Kabund déclare : “Le président a dit la vérité que tout le monde connaît. La corruption sous Kabila a asphyxié le Congo.” À Limete, fief historique de l’UDPS, les militants se rassemblent, brandissant des portraits de Tshisekedi et scandant des slogans contre l’héritage kabiliste. Mais cette ferveur accentue la méfiance du FCC, qui y voit une déclaration de guerre implicite. Moins de trois mois après l’investiture, la coalition révèle son incapacité à réconcilier deux visions opposées : Tshisekedi, porté par un élan de rupture, et le FCC, arc-bouté sur la préservation du statu quo.

Une guerre des nominations et tensions économiques

La désignation d’Albert Yuma par Joseph Kabila comme Premier ministre en avril 2019 est rejetée par Félix Tshisekedi. Ce veto, influencé par des pressions internationales dénonçant la gestion opaque de Yuma, entraîne une crise politique. Mwilanya accuse Tshisekedi de céder aux intérêts étrangers, tandis que le PPRD rompt les négociations. À Kinshasa, des militants de l’UDPS manifestent en scandant : « Yuma, dehors ! »  L’UDPS soutient fermement Tshisekedi, Kabund questionnant publiquement pourquoi le Premier ministre ne pourrait pas provenir de CACH. Après des semaines de négociations, Kabila recule, proposant Sylvestre Ilunga, un autre fidèle du FCC, comme Premier ministre. Ce compromis tactique ne masque pas la volonté du FCC de dominer le futur gouvernement.

Parallèlement, des tensions émergent autour des contrats miniers. Tshisekedi pousse pour renégocier les accords signés sous Kabila, notamment avec des firmes chinoises, selon Global Witness (2020). Le FCC, défendant les intérêts de l’élite kabiliste, s’oppose, arguant que ces révisions menacent la stabilité économique. Ces désaccords, bien que moins visibles, alimentent la méfiance.

L’imposition de Jeanine Mabunda à la présidence de l’Assemblée nationale, sans concertation avec CACH, est un autre affront. Mabunda ralentit les réformes, notamment sur la transparence financière, renforçant l’image d’un Tshisekedi entravé. Kabund questionne pourquoi le Premier ministre ne vient pas de CACH, reflétant les frustrations de l’UDPS.

Blocages des ordonnances et gratuité de l’éducation

En juillet 2019, Tshisekedi signe des ordonnances nommant de nouveaux dirigeants à la SNCC et à la Gécamines, dont Gabriel Kyungu wa Kumwanza, proche de Moïse Katumbi. La ministre FCC du Portefeuille, Wivine Mumba, refuse de notifier ces nominations, arguant qu’elles nécessitent le contreseing d’Ilunga. Le PPRD déclare les ordonnances « nulles », humiliant Tshisekedi. Kabund dénonce un « coup contre la Constitution », et des manifestations UDPS éclatent à Kinshasa.

Simultanément, la gratuité de l’éducation, promesse phare de Tshisekedi, rencontre des résistances. Des gouverneurs FCC, notamment dans le Kasaï et le Katanga, critiquent son financement, selon Jeune Afrique (septembre 2019). À Mbuji-Mayi, des grèves d’enseignants non payés dégénèrent en affrontements, reflétant l’incapacité de la coalition à concilier ses priorités. Ces tensions, exacerbées par le contrôle FCC des budgets provinciaux, fragilisent la réforme.

Un gouvernement sous domination FCC et crises régionales

En août 2019, le gouvernement Ilunga est formé, avec le FCC s’arrogeant les ministères stratégiques (défense, justice, finances, mines). Kabund dénonce un « gouvernement FCC déguisé ». À Lubumbashi, des militants CACH manifestent, exigeant un partage équitable. À Kingakati, Kabila appelle ses cadres à préserver ses « acquis », selon Politico.cd.

Dans le Kasaï, des violences intercommunautaires à Kamuesha font des dizaines de morts en juin-juillet 2019. L’UDPS accuse des gouverneurs FCC de manipuler les milices, tandis que le FCC pointe la désorganisation de CACH. Ces conflits, bien que régionaux, illustrent l’échec de la coalition à pacifier le pays.

Les massacres de Beni par les ADF, tuant plus de 600 civils en 2019-2020 (Human Rights Watch), amplifient les tensions. L’UDPS accuse les réseaux FCC dans l’armée de passivité, voire de complicité. Alexis Thambwe Mwamba rejette ces allégations, accusant Tshisekedi de politiser la tragédie. Ces querelles sécuritaires renforcent la méfiance sur le contrôle des FARDC.

Violences, rivalités internes et mobilisations citoyennes

En novembre 2019, Kabund menace de « fouiner » dans les affaires du FCC, déclenchant des violences. À Kolwezi, des manifestants brûlent des effigies de Tshisekedi, dénonçant les retards dans le financement de la gratuité de l’éducation. À Kinshasa, les sièges de l’UDPS et du PPRD sont vandalisés. Ces affrontements traduisent l’échec de la coalition.

Des mouvements citoyens comme Filimbi et Éveil Patriotique, absents des négociations CACH-FCC, organisent des sit-ins à Goma et Bukavu, dénonçant la corruption du FCC et la passivité de Tshisekedi. Réprimées par la police, ces actions amplifient la pression sociale.

Au sein du FCC, des rivalités émergent. Évariste Boshab et Emmanuel Ramazani Shadary critiquent Mwilanya pour sa gestion autoritaire, selon un article de Jeune Afrique publié en octobre 2020,  ces fissures, bien que discrètes, fragilisent le FCC face aux consultations futures de Tshisekedi.

Menace de dissolution et budget 2020

En janvier 2020, lors d’un discours à Londres devant la diaspora congolaise, Tshisekedi lance un ultimatum : il dissoudra l’Assemblée nationale si les ministres FCC continuent de saper son autorité. Cette menace, prononcée alors que le FCC bloque des dossiers comme le financement de l’éducation, reflète sa frustration. Jeanine Mabunda contre-attaque en agitant le spectre d’une “haute trahison”, menaçant à demi-mot une mise en accusation du président Tshisekedi, dans une manœuvre rarissime qui aurait nécessité l’aval des deux chambres du Parlement. De son côté, Alexis Thambwe Mwamba, président du Sénat et figure clé du FCC, balaie la menace d’un revers, la qualifiant de “provocation inutile”. Le PPRD, pilier du camp Kabila, entre en ordre de bataille, mobilisant ses cadres et dénonçant ce qu’il considère comme une “dérive autoritaire” du chef de l’État. À l’opposé, l’UDPS monte en pression, organisant des manifestations dans les rues de Kinshasa, au cri de “Dissolution maintenant !”, galvanisée par la perspective de renverser l’équilibre institutionnel hérité de l’accord FCC-CACH.
Si la dissolution de l’Assemblée nationale ne se matérialise pas immédiatement, l’effet est psychologique : Tshisekedi brise un tabou et montre qu’il est prêt à utiliser toutes les prérogatives présidentielles, y compris les plus explosives, pour desserrer l’étau du FCC. Ce moment marque un tournant : le président n’est plus seulement en cohabitation, il amorce une confrontation.

Le budget 2020, retardé par Mabunda, devient un autre point de friction. Le FCC exige des fonds pour ses provinces, provoquant des manifestations UDPS à Kinshasa en décembre 2019. Kabund dénonce un « sabotage économique », reflétant l’incapacité de la coalition à aligner ses priorités.

La crise du Covid-19 : une bataille politique

En mars 2020, Tshisekedi décrète l’état d’urgence face à la pandémie de COVID-19, isolant Kinshasa et interdisant les rassemblements. Cette mesure, initialement consensuelle, devient un point de friction lorsque Tshisekedi propose de prolonger l’état d’urgence, nécessitant l’approbation du Congrès. Jean-Marc Kabund s’oppose à la convocation du Congrès, estimant son coût à 7 millions de dollars, une somme exorbitante en temps de crise. Le FCC, qui contrôle le Congrès, insiste pour une réunion, voyant une opportunité de réaffirmer son influence. La fermeture temporaire du siège du parlement par le ministre CACH de l’Intérieur et sécurité, justifiée par des motifs sanitaires, est dénoncée par le FCC comme une “atteinte à la démocratie” tendant à l’empêcher de convoquer le congrès. Jeanine Mabunda qualifie la mesure de “tentative de museler le Parlement”, tandis que Kabund rétorque que “la santé des Congolais prime sur les calculs politiques”. Cette crise transforme une urgence sanitaire en bataille institutionnelle.

Destitution de Kabund et grèves publiques

En mai 2020, une pétition déposée par le député Jean-Jacques Mamba, soutenu par le FCC, vise Jean-Marc Kabund, accusé d’avoir terni l’image de l’Assemblée par ses déclarations sur le coût du Congrès. La destitution de Kabund, votée par une majorité écrasante et confirmée par une Cour constitutionnelle proche du FCC, est célébrée par le FCC comme une “victoire de la démocratie”. L’UDPS dénonce un “complot politique” pour affaiblir Tshisekedi. À Kinshasa, des militants de l’UDPS brûlent des pneus et bloquent des artères, dénonçant un “coup parlementaire”. L’arrestation de Mamba pour “faux et usage de faux” dans la collecte des signatures de ladite pétition attise les tensions, chaque camp accusant l’autre d’instrumentaliser la justice.

La même période des grèves de magistrats et de médecins, protestant contre leurs conditions et le blocage des budgets par le FCC, paralysent Kinshasa et Mbuji-Mayi (Radio Okapi, octobre 2019-mai 2020). Ces mouvements, bien que périphériques, reflètent l’incapacité de la coalition à répondre aux attentes sociales.

Justice sous pression et bataille pour le contrôle de la BCC

En juin 2020, alors que la coalition FCC-CACH tangue déjà sur des désaccords profonds, une violente tempête politique s’abat sur le pays autour d’un sujet explosif : l’indépendance de la justice. Le dépôt à l’Assemblée nationale de trois propositions de lois par les députés FCC Aubin Minaku et Gary Sakata, visant à renforcer les pouvoirs du ministre de la Justice sur les magistrats du parquet, met le feu aux poudres. La société civile, le Syndicat autonome des magistrats, la CENCO et des mouvements comme la LUCHA dénoncent unanimement une tentative de mainmise politique, une résurgence rampante de l’autoritarisme kabiliste. Kinshasa s’embrase. À Goma également, des manifestations spontanées se tiennent aux abords du Palais de justice, dans une atmosphère de défi populaire. Des effigies d’Aubin Minaku sont brûlées, des résidences de cadres du FCC ciblées.

Au sein du gouvernement, la tension est électrique. Le 26 juin, lors d’un Conseil des ministres, les membres découvrent, stupéfaits, que le vice-Premier ministre en charge de la Justice, Célestin Tunda Ya Kasende, a déjà transmis un avis favorable sur ces propositions de lois, sans en référer au préalable au gouvernement. Un acte qualifié d’« initiative personnelle » par la Présidence, qui dénonce alors un « manque de sincérité » du ministre. Le chef de l’État, visiblement ulcéré, quitte la réunion pour une conférence de l’Union africaine, mais laisse derrière lui une atmosphère plombée.

Le lendemain, l’affaire prend une tournure spectaculaire. Aux alentours de 14h, des policiers lourdement armés se présentent au domicile de Tunda avec un mandat d’amener. Le ministre résiste, s’enferme chez lui, multiplie les appels. Puis finit par se rendre, après avoir été, selon ses propres mots, « rassuré par la hiérarchie ». Dans la soirée, devant les cadres du PPRD, Tunda confie : « Yemeyi [lui-même] m’a dit : il ne faut pas avoir peur de quoi que ce soit. » Il sera libéré après quelques heures d’audition.

Cette interpellation, très médiatisée, provoque une levée de boucliers dans les rangs du FCC. Emmanuel Ramazani Shadary, furieux, s’adresse à la presse : « Personne ne peut nous intimider. Parce qu’il a défendu sa position de manière démocratique, on l’a traité comme un malfrat. La police a encerclé sa maison, comme si c’était un assassin ! Où allons-nous dans ce pays ? On veut instaurer une dictature plus forte que celle de Mobutu. Mais au PPRD, nous disons non ! »

La réaction du Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba, fidèle au Front Commun pour le Congo (FCC), ne s’est pas fait attendre. Dans une déclaration ferme, il condamne une arrestation jugée « brutale et arbitraire » de son vice-Premier ministre, Célestin Tunda Ya Kasende. Il en appelle directement au président Félix Tshisekedi, l’invitant à veiller scrupuleusement au respect du secret entourant les délibérations du Conseil des ministres. À ses yeux, aucun membre du gouvernement ne devrait être inquiété pour des opinions exprimées dans ce cadre, protégé par le principe de collégialité.

Le chef du gouvernement va plus loin, exigeant l’ouverture d’une action disciplinaire contre les magistrats à l’origine de l’interpellation de Tunda, signe d’un malaise institutionnel profond entre les deux pôles du pouvoir exécutif.

Face à la tempête politique, Célestin Tunda choisit la porte de sortie. Le 11 juillet, il présente sa démission, invoquant la nécessité de « préserver la sérénité » des institutions. Mais derrière cette formulation diplomatique, peu se laissent tromper : ce départ ressemble à une sanction déguisée, infligée après une véritable mise en scène d’humiliation publique.

Quelques jours plus tôt, une déclaration maladroite de Tunda à la télévision avait déjà semé le trouble. En qualifiant le président de la République de « Boss » et de « coach », ses propos avaient suscité des remous au sein de la Présidence, perçus comme une ironie mal placée, voire une provocation à peine voilée.

Dans l’opinion, cet épisode révèle au grand jour les lignes de fracture au sein de la coalition. Le bras de fer autour de la justice devient le symbole d’un affrontement plus large : celui d’un président qui veut marquer son autorité face à un allié devenu encombrant. La fracture est désormais béante.

Parallèlement, la Banque centrale devient un autre champ de bataille. Tshisekedi tente de nommer un gouverneur aligné sur CACH, mais le FCC défend Déogratias Mutombo, retardant les réformes monétaires et exacerbant l’inflation. Ces querelles économiques soulignent les enjeux financiers de la coalition.

Nominations dans l’armée : une lutte pour le contrôle sécuritaire

En juillet 2020, Félix Tshisekedi signe une série d’ordonnances présidentielles procédant à un remaniement majeur au sein des Forces armées de la RDC (FARDC), des services de renseignement et de la police nationale, dans une tentative audacieuse de reprendre le contrôle du secteur sécuritaire, longtemps dominé par les loyalistes de Joseph Kabila. Annoncées le 17 juillet à la télévision nationale, ces nominations incluent des figures clés : le général Gabriel Amisi, surnommé « Tango Four », remplace le général John Numbi, proche de Kabila et sous sanctions internationales pour violations des droits humains, au poste d’inspecteur général des FARDC. Le général Fall Sikabwe Asinda est promu chef d’état-major de l’armée de terre, tandis que Michel Mandiangu prend la tête des renseignements militaires, succédant au général Delphin Kahimbi, décédé dans des circonstances troubles. D’autres officiers, comme le général Jean-Claude Yav, sont placés à des postes stratégiques au sein de la maison militaire du président.

Ces décisions, saluées par des partenaires internationaux comme les États-Unis, Tibor Nagy, assistant du secrétaire d’État, y voyant un engagement pour les droits humains, visent à réduire l’influence des réseaux kabilistes dans l’appareil sécuritaire, tout en consolidant l’autorité de Tshisekedi en tant que commandant suprême des FARDC. Cependant, elles déclenchent une crise institutionnelle majeure du fait qu’elles ne sont pas contresignées par le Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba, membre du FCC. À la place, elles portent la signature du vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, Gilbert Kankonde Malamba, membre de l’UDPS (CACH), qui assure l’intérim d’Ilunga, alors en mission à Lubumbashi du 16 au 19 juillet.

Le recours à Kankonde s’appuie sur une lettre d’Ilunga datée du 16 juillet, confiant l’intérim à Kankonde pour les affaires courantes. Cependant, le FCC conteste la légalité de ce contreseing, arguant que les nominations dans l’armée et les services de sécurité, en raison de leur portée stratégique, requièrent l’aval explicite du Premier ministre titulaire. Le 21 juillet, Ilunga, par la voix de son porte-parole Albert Lieke Milay, exprime sa « stupéfaction » face à des ordonnances qu’il découvre via les médias. Il dénonce une « violation de la Constitution » et demande une rencontre urgente avec Tshisekedi pour « clarifier cette situation préoccupante », soulignant que le contreseing garantit l’équilibre des pouvoirs au sein de la coalition.

Le FCC, par l’entremise de son coordinateur Néhémie Mwilanya, va plus loin, accusant CACH d’avoir orchestré ces nominations dans le dos d’Ilunga, en profitant de son absence pour marginaliser les intérêts du FCC. Dans une conférence de presse à Kinshasa, Mwilanya déclare : « Ces ordonnances, préparées en catimini, sont une tentative de s’emparer des leviers sécuritaires par la force ». Le PPRD, fer de lance du FCC, mobilise ses cadres, dénonçant une « dérive autoritaire » de Tshisekedi, tandis que Jeanine Mabunda et Alexis Thambwe Mwamba, respectivement présidente de l’Assemblée nationale et président du Sénat, boycottent les cérémonies liées aux nominations judiciaires concomitantes, en signe de protestation.

CACH, de son côté, défend la légalité et la nécessité des ordonnances. Gilbert Kankonde affirme avoir agi dans le cadre de son intérim, invoquant un précédent de 2018 où un ministre avait contresigné pour Kabila sans controverse. L’UDPS présente les nominations comme une étape cruciale pour réformer un appareil sécuritaire gangréné par la corruption et l’allégeance à l’ancien régime. Jean-Marc Kabund, soutient l’éviction de figures comme John Numbi, symbole de l’héritage kabiliste. À Kinshasa, des militants de l’UDPS organisent des rassemblements spontanés, scandant « Fatshi, libère l’armée ! », voyant dans ces nominations une affirmation de l’autorité présidentielle.

La crise amplifie les frictions au sein de la coalition. Le FCC perçoit l’éviction de Numbi et le choix de figures comme Amisi comme une tentative de Tshisekedi de construire une base loyale dans l’armée, au détriment des équilibres de la coalition. La non-réunion entre Ilunga et Tshisekedi, malgré les demandes du Premier ministre, traduit une rupture du dialogue. Un conseiller présidentiel, cité par Jeune Afrique, confirme qu’« aucun tête-à-tête hors Conseil des ministres n’est envisagé », signe d’un fossé irréparable. Cette crise, survenant juste avant les nominations controversées à la Cour constitutionnelle, renforce la détermination de Tshisekedi à s’émanciper du FCC, préparant le terrain pour les consultations de l’Union Sacrée lancées en novembre 2020.

La bataille pour la CENI

En juillet 2020, la désignation de Ronsard Malonda, proche de Kabila, à la tête de la CENI par l’Assemblée nationale, alors dominée par le FCC, attise les craintes de manipulation électorale pour 2023. CACH accuse le FCC et la présidente de l’Assemblée nationale Jeanine Mabunda de vouloir verrouiller le processus électoral. Tshisekedi retarde l’entérinement, provoquant des manifestations violentes à Kinshasa et Lubumbashi. Le FCC défend Malonda comme un “choix technique”, mais cette justification peine à convaincre. Kabund évoque alors la possibilité de mobiliser la base militante pour empêcher cette nomination, ce qui se traduit par des manifestations massives à Kinshasa et Lubumbashi. Ces manifestations, qui prennent rapidement une tournure violente, sont marquées par des affrontements avec la police, et font plusieurs blessés. La situation dégénère, illustrant la gravité de la crise politique en cours.

Cette crise illustre la lutte pour le contrôle des élections, un enjeu crucial dans un pays où les scrutins sont souvent contestés.

Une Cour constitutionnelle contestée

La crise institutionnelle qui éclate en juillet 2020 autour de la Cour constitutionnelle trouve son origine dans un épisode aussi discret que déterminant : la démission controversée de son président, Benoît Lwamba. En poste depuis plusieurs années et perçu comme proche du Front Commun pour le Congo (FCC), Lwamba est reçu en toute discrétion par le président Félix Tshisekedi au Palais de la Nation, à la surprise générale. Quelques jours plus tard, une lettre de démission de Lwamba est rendue publique, officiellement pour des raisons de santé. Mais le timing intrigue, tout comme les circonstances opaques de cette démarche. Très vite, des voix s’élèvent au sein du FCC pour contester l’authenticité de cette démission, accusant la Présidence d’avoir exercé des pressions pour obtenir le retrait du magistrat. Lwamba lui-même, dans un courrier ambigu adressé à ses collègues, affirme n’avoir pas encore formellement quitté ses fonctions, semant le doute sur la validité du processus.

Dans ce climat d’incertitude, Tshisekedi prend acte du départ de Lwamba et, sans attendre le contreseing du Premier ministre Sylvestre Ilunga, nomme un nouveau juge en remplacement, ainsi que deux autres magistrats censés combler des postes vacants. Ces ordonnances présidentielles, non contresignées comme l’exige la Constitution, déclenchent une tempête politique. Le FCC y voit un passage en force et parle d’un “coup constitutionnel” destiné à remodeler la Cour pour la rendre favorable à Tshisekedi en prévision des futurs arbitrages politiques et électoraux. Le Premier ministre Ilunga, fidèle à Joseph Kabila, dénonce des actes “nuls et de nul effet” et alerte sur un grave précédent qui remettrait en cause l’équilibre des institutions.

Côté CACH, la défense est tout aussi frontale : les nouvelles nominations sont présentées comme un acte de rupture salutaire avec une justice longtemps inféodée au régime précédent. Jean-Marc Kabund, alors vice-président de l’Assemblée nationale, estime que « la Cour constitutionnelle, sous l’emprise du FCC, n’a cessé de servir les intérêts d’un seul homme ». Pour l’UDPS, il s’agit d’un moment clé dans la refondation de l’État, où le pouvoir judiciaire doit enfin s’émanciper des chaînes politiques.

Le 21 octobre, les trois nouveaux juges prêtent serment lors d’une cérémonie solennelle au Palais du peuple. Les parlementaires FCC boycottent l’événement, dénonçant une “violation flagrante de la Constitution” et une “dérive autoritaire”. Jeanine Mabunda et Alexis Thambwe Mwamba, à l’époque respectivement présidente de l’Assemblée nationale et président du Sénat, publient une déclaration conjointe appelant à une “résistance institutionnelle” face à ce qu’ils perçoivent comme un accaparement des leviers de pouvoir par Tshisekedi.

Dans la rue pourtant, le climat est tout autre. Des partisans du chef de l’État se rassemblent à Kinshasa pour célébrer ce qu’ils considèrent comme une victoire symbolique contre le système Kabila. Les slogans “Justice libre, justice forte” se répandent comme un mot d’ordre populaire. Pour beaucoup, cette recomposition de la Cour constitutionnelle représente l’un des actes fondateurs du tournant post-Kabila. Mais pour l’opposition, elle symbolise une entorse grave à la légalité républicaine, et marque le début d’une concentration inquiétante des pouvoirs autour du président Tshisekedi.

La chute des piliers du FCC

En novembre 2020, la coalition CACH-FCC, minée par deux années de luttes intestines, s’effondre sous le poids de ses contradictions. Félix Tshisekedi, lassé des blocages orchestrés par le FCC de Joseph Kabila, lance les consultations nationales pour l’Union Sacrée de la Nation, une initiative visant à recomposer une majorité sans son ancien partenaire. Ce tournant, préparé par une vague de mécontentement populaire contre l’inertie institutionnelle, s’appuie sur la frustration des Congolais face à la corruption, l’insécurité dans l’est et l’incapacité du gouvernement à concrétiser les promesses de réformes, comme la gratuité de l’éducation. Les consultations, menées avec des leaders politiques, religieux et sociaux, dont l’archevêque Fridolin Ambongo et Moïse Katumbi, fracturent le FCC, attirant des dissidents séduits par la perspective d’un nouveau partage du pouvoir. Dans ce contexte explosif, trois figures emblématiques du FCC Jeanine Mabunda, présidente de l’Assemblée nationale, Alexis Thambwe Mwamba, président du Sénat, et Sylvestre Ilunga, Premier ministre, sont balayées entre décembre 2020 et février 2021, marquant la fin de l’hégémonie kabiliste et l’ascension de Tshisekedi comme maître du jeu politique à Kinshasa.

Jeanine Mabunda : la chute d’un symbole kabiliste

Jeanine Mabunda, élue présidente de l’Assemblée nationale en avril 2019, incarne la mainmise du FCC sur le pouvoir législatif. Fidèle de Kabila et ancienne ministre, elle est perçue par CACH comme un obstacle aux réformes de Tshisekedi, notamment sur la transparence financière et la gratuité de l’éducation. Son boycott des nominations judiciaires de Tshisekedi en juillet 2020, aux côtés du Sénat, exacerbe les tensions, tandis que sa gestion autoritaire de l’Assemblée aliène même certains députés FCC. À l’automne 2020, les consultations de l’Union Sacrée, lancées le 2 novembre, ébranlent la majorité FCC, avec des défections de poids comme celle de Didi Manara, président du groupe parlementaire PPRD à l’époque et ancien gouverneur du Maniema. La grogne populaire, alimentée par des mouvements citoyens comme la LUCHA, s’intensifie, dénonçant une Assemblée inféodée à Kabila et déconnectée des aspirations du peuple.

Le 7 décembre 2020, une pétition pour la destitution de Mabunda soutenue par 237 signatures, dépassant largement les 125 requises, est déposée. Ce document, fruit d’intenses tractations menées par l’Union Sacrée, accuse Mabunda de « gestion opaque », « incompétence » et « sabotage des initiatives présidentielles ». Les dissidents du FCC, jouent un rôle clé, rejoints par des alliés de Katumbi et de Bemba. Le 10 décembre, la session plénière au Palais du Peuple se déroule dans un climat électrique. Des militants de l’UDPS, massés aux abords, scandent « Mabunda, dégage ! », tandis que des échauffourées avec la police éclatent, faisant plusieurs blessés selon Radio Okapi. À l’intérieur, les débats sont houleux : les députés FCC, menés par Néhémie Mwilanya, dénoncent un « coup de force anticonstitutionnel », mais leur camp, miné par les défections, s’effrite. Le vote, retransmis en direct, voit 281 députés, sur 483 présents, approuver la destitution, un résultat écrasant qui sidère le FCC. Mabunda, évincée, quitte l’hémicycle sous les huées des pro-Tshisekedi.

La chute de Mabunda, relayée par Politico.cd comme une « victoire historique » pour Tshisekedi, démantèle le contrôle du FCC sur l’Assemblée. Christophe Mboso, un transfuge du FCC rallié à l’Union Sacrée, doyen des députés, dirige le bureau provisoire dès le 11 décembre, avant d’être élu en février 2021 président de l’Assemblée nationale en remplacement de Mabunda. Cette transition galvanise les militants de l’UDPS, qui organisent des cortèges à Limete, brandissant des portraits de Tshisekedi. Cependant, le FCC, par la voix de Raymond Tshibanda, condamne une « chasse aux sorcières » et accuse Tshisekedi de manipuler les institutions. La destitution, bien que saluée comme un pas vers la réforme, accentue la polarisation, les cadres FCC menaçant de « résister par tous les moyens ».

Alexis Thambwe Mwamba : le Sénat cède sous la pression

Alexis Thambwe Mwamba, président du Sénat depuis juillet 2019, est un pilier du FCC, connu pour son passé de ministre sous Kabila et son rôle dans la consolidation de l’influence kabiliste. Son boycott des nominations judiciaires de Tshisekedi en juillet 2020, aux côtés de Mabunda, et ses déclarations provocatrices, qualifiant la menace de dissolution de Tshisekedi de « provocation inutile », attisent l’hostilité de CACH. En janvier 2021, la chute de Mabunda et la motion contre Ilunga fragilisent le Sénat, dernier bastion du FCC. Les consultations de l’Union Sacrée, prolongées après décembre, attirent des sénateurs FCC, comme Modeste Bahati Lukwebo, séduits par des promesses de pouvoir. La pression populaire s’intensifie, avec des manifestations à Goma et Bukavu dénonçant un Sénat « au service de Kabila ».

Le 2 février 2021, une motion de censure est déposée contre Thambwe Mwamba par 54 sénateurs, dont des dissidents du FCC et des alliés de l’Union Sacrée. La pétition, initiée par le sénateur MLC Valentin Gerengo, reproche à Thambwe Mwamba une « gestion autoritaire », des « irrégularités financières » et un « manque de collaboration » avec les réformes de Tshisekedi. Les débats, prévus pour le 5 février, sont précédés d’une mobilisation massive. À Kinshasa, des jeunes de la LUCHA brûlent des effigies de Thambwe Mwamba, tandis que des vidéos virales sur les réseaux sociaux montrent des pancartes proclamant « Le Sénat au peuple ! ». Conscient de son isolement, Thambwe Mwamba, conseillé par ses proches, anticipe l’humiliation d’un vote défavorable. Le 5 février, il annonce sa démission dans une lettre aux sénateurs, invoquant le besoin de « préserver la dignité du Sénat » face à une « campagne d’acharnement ». Cette capitulation, annoncée sans débat, surprend même ses adversaires, qui s’attendaient à une bataille parlementaire.

La démission de Thambwe Mwamba, couverte par Jeune Afrique comme un « séisme institutionnel », consacre la mainmise de l’Union Sacrée sur le Parlement. Le 2 mars 2021, Modeste Bahati Lukwebo, un ex-FCC rallié à Tshisekedi, est élu président du Sénat avec 78 voix sur 108, confirmant le basculement de la chambre haute. À Lubumbashi, des militants pro-Tshisekedi célèbrent, voyant dans ce changement la fin d’un Sénat « verrouillé par Kabila ». Le FCC, par la voix d’Emmanuel Ramazani Shadary, dénonce une « instrumentalisation des institutions » et appelle à une « résistance légale ». Pour les analystes, comme le politologue congolais Pierre Mbuyi, la chute de Thambwe Mwamba illustre la stratégie de Tshisekedi : exploiter les rivalités internes du FCC pour recomposer les équilibres de pouvoir.

Sylvestre Ilunga : la motion qui brise le gouvernement FCC

Sylvestre Ilunga Ilunkamba, Premier ministre depuis août 2019, est un fidèle de Kabila, imposé par le FCC pour limiter l’influence de Tshisekedi. Son gouvernement, dominé par le FCC, est accusé par CACH de saboter les réformes présidentielles, notamment sur l’éducation et la lutte contre la corruption. Les tensions culminent en 2020 avec le refus d’Ilunga de contresigner les ordonnances de Tshisekedi sur l’armée et la justice, perçu comme une tentative de préserver l’emprise kabiliste. La formation de l’Union Sacrée, qui prive le FCC de sa majorité parlementaire, place Ilunga dans une position intenable. En janvier 2021, la destitution de Mabunda et la défection de dizaines de députés FCC, attirés par les promesses de Tshisekedi, scellent son sort. La crise économique, marquée par l’inflation et l’insécurité croissante dans l’est, alimente la colère populaire contre son gouvernement.

Le 25 janvier 2021, une motion de censure est déposée contre Ilunga par le député Chérubin Okende de Ensemble pour la République de Katumbi, soutenue par 301 signatures, reflet de la nouvelle majorité de l’Union Sacrée. La motion accuse Ilunga d’« incompétence », de « blocage des réformes » et de « mauvaise gestion » face à la crise économique et sécuritaire. Ilunga tente de contrer l’offensive en dénonçant l’illégalité de la session extraordinaire, convoquée hors période parlementaire régulière. Dans une lettre adressée à Tshisekedi le 26 janvier, il argue que la motion viole la Constitution et refuse de se présenter à l’Assemblée. Mais la pression est irrésistible : le 27 janvier, la session plénière, présidée par Christophe Mboso, se tient sous haute tension. À l’extérieur, des milliers de militants de l’UDPS et de mouvements citoyens, rassemblés près du Palais du Peuple, scandent « Ilunga, dehors ! », tandis que la police déploie des gaz lacrymogènes pour disperser la foule. Le vote, retransmis en direct, est sans appel : 367 députés, sur 382 votants, approuvent la censure, un score écrasant qui humilie le FCC. Ilunga, acculé, présente sa démission le 29 janvier, dans une allocution où il défend son bilan tout en fustigeant une « chasse aux sorcières ».

La chute d’Ilunga, relayée par Heshima Magazine comme la « fin du joug FCC », marque la fin du gouvernement kabiliste. Le 15 février 2021, Jean-Michel Sama Lukonde, un jeune cadre du Katanga et membre de l’Union Sacrée, est nommé Premier ministre, incarnant un renouveau aligné sur les priorités de Tshisekedi. À Kinshasa, des scènes de liesse envahissent Gombe et Limete, avec des pancartes proclamant « Fatshi libère le Congo ! ». Le FCC, par la voix de Néhémie Mwilanya, dénonce un « coup d’État parlementaire » et appelle à une mobilisation de ses bases, mais ces appels, relayés timidement, trahissent son affaiblissement. La transition vers un gouvernement Lukonde, formé en avril 2021, ouvre la voie à des réformes, mais la persistance de l’insécurité dans l’est, avec la résurgence du M23, rappelle les limites de cette victoire institutionnelle.

Rupture et création de l’Union sacrée de la nation

Face à l’escalade des tensions entre les deux coalitions alliées, Tshisekedi initie, en novembre 2020, des consultations nationales dans le but de constituer l’Union Sacrée de la Nation, une nouvelle majorité excluant le FCC. À travers des rencontres avec des leaders politiques, religieux et sociaux, tels que l’archevêque Fridolin Ambongo, le représentant légal de l’église Kimbaguiste,… il s’efforce de rallier à sa cause des dissidents FCC et PPRD et des figures de l’opposition, dont Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba.

Le 6 décembre 2020, dans un discours retransmis en direct par plusieurs médias et face à l’indignation grandissante, Tshisekedi, le regard déterminé et le ton ferme, annonce la fin de la coalition CACH-FCC, dénonçant les “blocages systématiques” du FCC. S’adressant ensuite à la population congolaise dans les quatre langues nationales, il l’appelle à l’accompagner dans cette nouvelle décision pour un avenir meilleur. À l’issue de son discours, tel un scénario digne d’un film, sans un regard en arrière, il tourne le dos aux caméras avec une démarche assurée, un homme qui s’affirme et prend ses distances avec la coalition. Ce geste, puissant autant que son discours, marque une rupture nette. Sa décision, perçue comme un acte audacieux, déclenche une tempête politique déjà en gestation. Le FCC riposte, qualifiant la décision de “coup d’État constitutionnel”, mais une grande partie de la population, épuisée par la paralysie, soutient Tshisekedi. La même nuit, des scènes de liesse éclatent partout dans le pays : automobilistes et motards klaxonnent pour manifester leur joie, tandis que d’autres s’entassent dans les rues, chantant la fin de la coalition. « Tshisekedi a courageusement mis fin à une coalition paralysante. Ce vent de renouveau redonne espoir au peuple », a déclaré Léon Vitho wa Vitho, habitant de Kinshasa/Upn.   

Le camp Tshisekedi aboutit à un nouveau gouvernement en 2021, dirigé par Jean-Michel Sama Lukonde, marquant ainsi la fin de l’hégémonie du FCC.

La résurgence du M23, une revanche de Kabila ?

La rupture, bien que libératrice, fragilise l’appareil sécuritaire. Cette instabilité est exploitée par le M23, qui réémerge fin 2021 dans le Nord-Kivu. Soutenu par le Rwanda, selon les rapports de l’ONU, le groupe profite des faiblesses de l’appareil sécuritaire, miné par l’obstructionnisme du FCC sous la coalition. Le contrôle du FCC sur la défense et les services de renseignement avait entravé les réformes de Tshisekedi, laissant l’est vulnérable. La transition vers l’Union Sacrée, bien que nécessaire, crée un vide institutionnel que le M23 exploite, s’emparant de territoires et déplaçant des millions de civils.

Dans sa tribune de février 2025, Kabila lie la crise du M23 à son exclusion du pouvoir, suggérant que son régime maintenait une stabilité fragile via des arrangements opaques avec des acteurs régionaux comme le Rwanda. Cette affirmation, tout en critiquant Tshisekedi, soulève des questions sur son propre rôle. Les liens historiques de Kabila avec le Rwanda, forgés durant la deuxième guerre du Congo, alimentent les soupçons de complicité tacite dans la résurgence du M23. En suggérant que son exclusion a déstabilisé la RDC, Kabila admet implicitement une influence sur les dynamiques rebelles, une admission troublante qui jette une ombre sur son héritage.

Un séisme politique aux conséquences durables

La destitution de Mabunda, Thambwe Mwamba et Ilunga consacre la fin de l’hégémonie du FCC, mais à un coût élevé. Ces événements, orchestrés par l’Union Sacrée et soutenus par une mobilisation populaire sans précédent, permettent à Tshisekedi de s’émanciper de l’ombre de Kabila, mais ils alimentent les accusations de « dérive autoritaire » portées par le FCC. Dans sa tribune de février 2025, publiée dans le Sunday Times, Kabila lie ces bouleversements à une « instabilité institutionnelle » ayant favorisé la résurgence du M23, une affirmation qui, tout en critiquant Tshisekedi, trahit son propre rôle dans l’obstructionnisme passé. Pour la RDC, ce séisme politique ouvre une ère de réformes, mais aussi de vulnérabilités, dans un pays où la quête de pouvoir à Kinshasa se paie souvent au prix du chaos dans l’Est.

Un chapitre clos, des blessures béantes

L’implosion de la coalition CACH-FCC demeure un tournant majeur dans la saga politique tumultueuse de la RDC. La rupture audacieuse de Félix Tshisekedi avec le FCC de Joseph Kabila a libéré sa présidence, ouvrant la voie à des réformes telles que la gratuité de l’éducation et une justice en quête d’indépendance. Mais cette émancipation a eu un coût élevé. Les batailles institutionnelles marquées par des fraudes électorales, des guerres de nominations et des affrontements parlementaires ont révélé la fragilité d’une nation tiraillée entre un élan réformateur et des structures de pouvoir enracinées. La chute des piliers du FCC, comme Jeanine Mabunda, Alexis Thambwe Mwamba et Sylvestre Ilunga, a scellé le triomphe de Tshisekedi, mais les cicatrices de cette fracture persistent. La tribune de Kabila en février 2025 dans le Sunday Times, liant son exclusion à la résurgence du M23, jette une ombre sur son héritage tout en suggérant des liens troubles avec des acteurs régionaux. Alors que la RDC lutte contre l’instabilité persistante dans l’Est, l’épopée CACH-FCC rappelle une vérité amère : le pouvoir conquis dans l’arène politique de Kinshasa se paie souvent au prix du chaos aux frontières fragiles du pays, rendant la quête de stabilité particulièrement ardue dans un pays fracturé.

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RDC : qui est Christophe Bitasimwa, le nouveau visage de l’Inspection générale des finances ?

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L’Inspection générale des finances (IGF) de la République démocratique du Congo a un nouveau patron. Par ordonnance présidentielle lue à la télévision nationale (RTNC) le 7 mai 2025, le président Félix Tshisekedi a nommé Christophe Bitasimwa Bahii au poste d’Inspecteur général, chef de service, en remplacement de Jules Alingete Key, admis à la retraite. Heshima Magazine dresse le portrait de cet ardent défenseur de la justice économique, successeur de Jules Alingete Key, récemment admis à la retraite.

Homme de rigueur et défenseur de la justice sociale, Bitasimwa prend les rênes d’une institution clé dans la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des fonds publics. Son parcours académique solide et son engagement contre les inégalités économiques témoignent d’une volonté affirmée de renforcer la transparence dans la gestion des ressources nationales.

Il sera épaulé par Emmanuel Tshibingu Nsenga, nommé Inspecteur général adjoint. Ce nouveau tandem marque le début d’une ère que les observateurs espèrent aussi efficace que son prédécesseur dans le contrôle des finances publiques en RDC.

Un parcours académique d’exception

Né le 9 novembre 1964 dans la province du Nord-Kivu, Christophe Bitasimwa Bahii affiche un parcours universitaire exemplaire, marqué par une spécialisation pointue en économie du développement. Licencié en économie de l’Université de Kinshasa (UNIKIN), il poursuit ses études à l’Université Catholique du Congo (UCC), où il décroche en 2004 un diplôme spécial en économie du développement.

Il approfondit ensuite ses recherches avec un Diplôme d’Études Approfondies (DEA) en économie et développement, obtenu entre 2014 et 2016, toujours à l’UCC. Sa quête d’excellence culmine en 2022 avec l’obtention d’un doctorat dans la même discipline, sanctionné par la mention « Grande Distinction ». Sa thèse, intitulée « Inégalités économiques et redistribution des revenus et des richesses : approches idoines pour la République démocratique du Congo », propose des pistes concrètes pour une meilleure équité économique dans le pays.

En parallèle de sa carrière à l’Inspection générale des finances, Christophe Bitasimwa enseigne à l’UCC, où il contribue activement à la formation des futurs économistes congolais.

Un parcours professionnel dense au cœur de l’appareil d’État

Avec plus de 25 ans d’expérience dans l’administration publique congolaise, Christophe Bitasimwa Bahii a occupé plusieurs fonctions stratégiques, alliant rigueur technique et sens aigu de la gestion publique. Inspecteur des finances de 1989 à 2000, il interrompt brièvement sa mission de contrôle pour prendre des responsabilités de direction au sein de diverses institutions étatiques.

En 2001, il est nommé Administrateur-Directeur financier de la Régie nationale des approvisionnements et de l’imprimerie (RENAPI), devenue plus tard le Service national des approvisionnements et de l’imprimerie (SENAPI). L’année suivante, il accède à la présidence du Conseil d’administration de la REGIDESO, entreprise publique chargée de la distribution d’eau, un poste qu’il occupe jusqu’en 2005.

Son expertise le conduit ensuite à la COHYDRO (ex-SONAHYDROC), où il assume les fonctions d’Administrateur-Directeur technique. En 2010, il rejoint le Fonds national d’entretien routier (FONER) comme Directeur de l’Audit interne, avant d’être promu, en 2013, Secrétaire général aux Finances.

En juillet 2017, Christophe Bitasimwa intègre le comité de gestion de l’Agence nationale pour la promotion des investissements (ANAPI), consolidant ainsi son profil d’expert des questions économiques et financières à l’échelle nationale.

Un fervent défenseur de la justice économique

À la tête d’une institution désormais emblématique dans la lutte contre les détournements de fonds publics portée par la volonté ferme du président Félix Tshisekedi de combattre la fraude sous toutes ses formes et par le travail rigoureux de Jules Alingete Key, Inspecteur Général- Chef de Service sortant, Christophe Bitasimwa Bahii arrive avec un atout de taille : une conviction profonde en la justice sociale. Son engagement contre les inégalités économiques ne date pas d’hier ; il imprègne tant son parcours académique que ses choix professionnels.

Sa thèse de doctorat en économie et développement, soutenue avec mention « Grande Distinction », dresse un constat accablant sur les inégalités de revenus en RDC. Il y révèle qu’un ménage parmi les plus pauvres survit avec à peine 16 dollars par mois, quand les plus riches atteignent 132 dollars, des chiffres qui traduisent un fossé alarmant. Il y dénonce aussi les inégalités territoriales, notamment dans des provinces comme le Haut-Katanga ou Kinshasa, où les écarts de richesse sont particulièrement criants.

Mais Bitasimwa ne se contente pas de diagnostiquer : dans ses publications, il plaide pour des politiques audacieuses centrées sur la réduction des inégalités. Parmi ses recommandations : investir massivement dans les infrastructures et l’énergie pour stimuler la croissance, développer le capital humain par une éducation de qualité et mettre en œuvre des mesures ciblées à destination des populations rurales et vulnérables.

Son arrivée à la tête de l’IGF marque donc la continuité d’un combat de fond : celui d’un État plus juste, au service de tous.

Bitasimwa, un patriote chevronné au service de l’État

La nomination de Christophe Bitasimwa Bahii à la tête de l’IGF a été saluée avec respect par son prédécesseur, Jules Alingete Key. Ce dernier a exprimé sa « gratitude » au président Félix Tshisekedi pour la confiance accordée durant les cinq années passées à la tête de cette institution stratégique, tout en souhaitant « plein succès » à son successeur dans ses nouvelles fonctions.

Un hommage appuyé est également venu du cercle familial. L’épouse du nouveau chef de l’IGF, Alice Mirimo, a tenu à remercier le chef de l’État et son équipe pour cette nomination, qu’elle qualifie d’« acte fort » en faveur de la compétence et du mérite. À ses yeux, Christophe Bitasimwa est un « digne fils » de la République, un « patriote chevronné, dévoué à la nation », dont la promotion couronne un parcours irréprochable, marqué par une rigueur professionnelle constante et un engagement profond pour le bien commun.

Mme Mirimo souligne que le combat de son mari dépasse les chiffres et les institutions : il s’ancre dans une vision d’égalité des chances, de justice sociale et d’amour de la patrie. C’est porté par ces valeurs que le nouveau patron de l’IGF s’apprête à relever un défi de taille : poursuivre avec fermeté et intégrité, le travail de son prédécesseur dans la lutte contre les détournements de deniers publics, afin que les richesses du pays profitent à l’ensemble de la population.

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RDC : De Sophie Kanza à Judith Suminwa, l’ascension difficile des femmes politiques

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Exclues totalement des sphères de pouvoir sous la période coloniale, les femmes congolaises ont accédé timidement aux droits politiques au lendemain de l’indépendance de la République démocratique du Congo (RDC) en 1960. Leur histoire est marquée par des luttes constantes pour la reconnaissance, la représentation et la participation dans un contexte de patriarcat dominant, d’instabilité politique et de conflits prolongés. Heshima Magazine présente un aperçu historique et thématique de leur engagement politique.

Depuis la création de l’État Indépendant du Congo (EIC) en 1885, les femmes tout comme une large majorité des hommes, étaient marginalisées sur le plan politique. Sous la colonisation belge, les Congolaises n’avaient pratiquement aucun droit politique. Le système colonial, raciste et patriarcal, les excluait totalement des sphères de pouvoir. Cependant, pendant cette période, des formes de résistance informelles ont vu le jour parmi les femmes. Certaines ont joué des rôles notables dans les résistances locales, même si cela demeure rarement documenté officiellement.

Il a fallu attendre six ans après l’indépendance du pays pour voir une femme accéder à un poste ministériel : Sophie Kanza, nommée ministre des Affaires sociales. De cette pionnière à Judith Suminwa, actuelle Première ministre, en passant par Jeanine Mabunda, ancienne présidente de l’Assemblée nationale, la RDC a enregistré des avancées notables. Mais dans une société où le patriarcat reste enraciné, la marche vers une véritable parité demeure un combat de longue haleine.

Sophie Kanza, pionnière des femmes politiques (1940-1999)

Sophie Kanza, également connue sous le nom de Sophie Lihau-N’kanza, est une figure emblématique de l’histoire politique et sociale de la RDC. Née le 8 février 1940 à Léopoldville (actuelle Kinshasa), elle est la première femme congolaise à avoir occupé un poste ministériel et à avoir intégré une école secondaire, marquant ainsi des jalons importants dans la lutte pour l’égalité des genres au pays de Lumumba.

Fille de Daniel Kanza, l’un des pères de l’indépendance et premier gouverneur noir de Kinshasa, et d’Élisabeth Mansangaza, Sophie fut la sixième d’une fratrie de sept enfants. Elle effectua ses études primaires et secondaires à Brazzaville, alors au Congo français. En 1961, elle devient la première femme congolaise diplômée de l’enseignement secondaire. Trois ans plus tard, elle obtient une licence en sociologie à l’Université de Genève, devenant ainsi la première universitaire congolaise. Elle poursuit ensuite ses études à l’Université Harvard, où elle décroche un doctorat en sociologie entre 1973 et 1976.

En 1998, elle est victime d’un grave accident de voiture à Paris qui la rend paraplégique. Elle quitte alors son poste à l’UNESCO pour se consacrer à la défense des droits des personnes handicapées. Elle décède le 2 avril 1999 à Kinshasa, des suites d’un arrêt cardiaque, et repose aujourd’hui à Luozi, au Kongo Central. En 2004, elle est admise au Panthéon de l’histoire congolaise. En Belgique, son nom est proposé parmi ceux appelés à remplacer celui du tunnel Léopold II. En RDC, une association de femmes universitaires rend hommage à son engagement à travers le « Cercle Sophie Kanza ».

Philomène Omatuku, première femme à diriger une institution parlementaire

Madame Philomène Omatuku Atshakawo Akatshi est également une figure incontournable de la politique congolaise. En février 2003, elle est nommée présidente par intérim de l’Assemblée nationale constituante et législative – Parlement de Transition (ACL-PT), devenant ainsi la première femme à diriger une institution parlementaire en RDC. Elle y reste jusqu’en août 2003.

Nommée en 2007 ministre de la Condition féminine dans le gouvernement Gizenga I, puis reconduite dans le gouvernement Gizenga II, elle lance en 2008 la ligne verte « 677 », destinée à informer les victimes de violences sexuelles sur les structures de prise en charge disponibles, dans le cadre d’une campagne nationale de sensibilisation.

Jeanine Mabunda, une des figures de premier plan

Jeanine Mabunda Lioko Mudiayi est une actrice politique majeure. Née le 10 avril 1964 à Kinshasa, elle a étudié le droit à l’Université catholique de Louvain, puis obtenu un master en sciences commerciales à l’ICHEC de Bruxelles.

Nommée ministre du Portefeuille en 2007, elle est ensuite conseillère spéciale du président Joseph Kabila pour la lutte contre les violences sexuelles. Élit députée en 2011, elle est réélue en 2018. Le 24 avril 2019, elle devient la première femme élue à la présidence de l’Assemblée nationale. Durant son mandat, elle se démarque par des initiatives sociales, notamment dans l’accès à l’eau potable et l’énergie. Sa destitution en décembre 2020 signe la rupture entre le FCC et le CACH. Elle reçoit le prix de la Femme d’Influence en 2019 et dirige la « Fondation Briser Le Silence ».

Judith Suminwa Tuluka, Première ministre de la République

Judith Suminwa Tuluka incarne une étape historique dans l’évolution de la représentation féminine en RDC. Le 1er avril 2024, elle est nommée Première ministre par le président Félix Tshisekedi, devenant ainsi la toute première femme à occuper ce poste dans l’histoire du pays. Économiste de formation, elle a fait ses études à l’Université catholique de Louvain en Belgique, où elle a obtenu une licence en économie. Avant sa nomination, elle a occupé le poste de ministre du Plan, se distinguant par sa rigueur et sa capacité à piloter les dossiers complexes liés au développement national.

Sa désignation à la tête du gouvernement constitue un symbole fort dans un contexte politique encore dominé par les hommes. Elle hérite d’un pays confronté à de nombreux défis, dont l’insécurité persistante à l’Est, les tensions sociales et les besoins accrus en gouvernance inclusive. Judith Suminwa représente un espoir renouvelé pour une gouvernance plus sensible aux questions de genre. Sa nomination a été saluée tant au niveau national qu’international, perçue comme une avancée significative dans la lutte pour l’égalité politique en RDC. Elle incarne la continuité de l’engagement de pionnières comme Sophie Kanza, tout en ouvrant une nouvelle ère pour les femmes congolaises.

Engagements des femmes en politique

À l’époque de la Conférence nationale souveraine (1990-1992), de nombreuses femmes s’engagent en politique malgré un terrain difficile. Cette période marque un tournant avec l’émergence d’organisations féminines réclamant plus d’égalité. Toutefois, leur représentativité reste marginale.

Conflits armés et transition (1996-2006)

Les guerres du Congo ont profondément affecté les femmes, mais ont aussi contribué à leur mobilisation politique. Des figures telles que Catherine Nzuzi wa Mbombo ou Marie Madeleine Kalala émergent. Julienne Lusenge, militante des droits humains, devient une figure internationale, notamment reconnue par l’ONU en 2019 parmi les vingt femmes les plus influentes au monde.

La parité homme-femme scellée dans la loi

L’article 14 de la Constitution de 2006 établit la parité hommes-femmes, mais sa mise en œuvre reste incomplète. En 2018, les femmes ne représentaient que 8,8 % de l’Assemblée nationale. Des mesures incitatives ont été introduites dans la loi électorale pour encourager les partis à aligner des femmes. Sous le gouvernement Sama Lukonde, la présence féminine a atteint 28 %, signe d’un progrès lent mais tangible.

Initiatives citoyennes et défis actuels

Des militantes comme Espérance Mawanzo mènent des initiatives pour promouvoir la parité, avec la mise en place d’un observatoire dédié. Les femmes jouent également un rôle important dans les ONG, les associations et la gouvernance locale. Toutefois, le patriarcat, les violences politiques et l’absence de soutien institutionnel continuent de freiner leur progression.

Mais le parcours de femmes comme Sophie Kanza, Jeanine Mabunda, Philomène Omatuku, Julienne Lusenge, Alphonsine Kalume ou encore Judith Suminwa montre que malgré les entraves, les femmes congolaises marquent l’histoire politique de leur empreinte, inspirant ainsi les générations futures.

Heshima

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