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Histoire

Les doctrines en Afrique

En fonction de son histoire et de ses réalités socio-économiques, l’Afrique a généré des doctrines qui peuvent d’une manière générale se caractériser par le communautarisme qui finira par devoir prendre le contrepied de celles provenant de l’extérieur, cherchant à s’imposer sur elle.

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De tout temps, chaque société en fonction des réalités vécues, érige une ou plusieurs doctrines qui se confrontent les unes aux autres. En tant qu’être pensant, l’homme élabore en effet un ensemble d’idées, d’opinions et des croyances issues de son environnement.

 Ainsi la doctrine est en mesure d’embrasser la globalité des facettes de la société en étant d’ordre politique, économique, philosophique, religieux, voire artistique…

Elle a ainsi pour visée de guider l’action ou d’aider à interpréter les faits. Dans cet ordre d’idées, partant d’un ensemble d’enseignement, elle finit par être admise par la plus grande frange de la société comme une vérité et son utilité se ressent au travers d’une idéologie qui conscientise les masses avec un impact plus ou moins conséquent.

Le défaut d’écriture caractéristique de l’Afrique, dont la primauté reconnue à l’oralité est notoire, donne à cerner ses doctrines originelles sous le prisme du communautarisme, legs de l’instinct grégaire qui caractérise le genre humain au sein de cet espace. Les valeurs en vigueur sont la solidarité et la recherche d’une forme relative d’égalité, car celle-ci n’est pas toujours de mise ainsi qu’une forme de démocratie à l’africaine qui se déroule sous l’arbre à palabres.

Dans cette conception du monde, l’existence d’un individu ne se conçoit pas en dehors de son appartenance à une communauté de manière endogène et homogène et ce, du point de vue ethnique, religieux, social, culturel. Pareille approche suppose qu’il y ait généralement peu d’oppositions et de liberté d’initiatives avec l’obligation de se soumettre à l’entendement commun.

Toutefois, la réalité du vécu historique de l’Afrique voit ce communautarisme être confronté aux doctrines des puissances extérieures envahissantes, voulant se prévaloir à tout prix sur lui, méconnaissant la valeur du mode de vie des populations, taxé (à tort) de sauvage.

Au regard de ce contexte historique, les doctrines africaines prônent dans leur ensemble la libération des peuples face aux puissances extérieures. Ces modes de pensées se répartissent pour l’essentiel en deux grandes catégories, à savoir d’une part l’affirmation culturelle et d’autre part le combat politique, la ligne de démarcation entre les deux n’étant pas nécessairement figée. Ces doctrines peuvent être la résultante d’un mouvement de pensée spontané, diffusé dans la globalité de la société comme elles peuvent être rattachées à un individu qui conscientise ses semblables.

Les doctrines identitaires

Pour ce qui concerne l’affirmation identitaire, elle consiste à faire valoir la culture intrinsèque d’une communauté par rapport à la doctrine étrangère qui chercherait à l’éliminer par la force ou de manière insidieuse.

C’est ainsi que dans un domaine déterminant comme la religion, présente dans la vie de l’homme, la doctrine est issue de la confrontation entre les croyances locales et celles importées. Sur ce point, la société africaine dans laquelle la connaissance d’un être supérieur est bien réelle se trouve envahie d’abord par la culture islamique surtout à l’Est et au Nord du continent, puis face à la culture religieuse judéo-chrétienne.

Si l’islam a su revêtir plus ou moins bien les couleurs locales, la religion chrétienne a fait l’objet, à certains endroits, d’une adaptation spécifique. A ce sujet, on peut citer comme cas emblématique le kimbanguisme, doctrine associée à son initiateur Simon Kimbangu. L’Eglise kimbanguiste, fondée le 6 avril 1921 – soit centenaire à ce jour -, se présente comme une église africaine chrétienne de type prophétique. La doctrine de cette église a pour support la Sainte Bible de laquelle est tirée la pratique des bonnes œuvres et l’amour du prochain. Cependant, pour elle Simon Kimbangu est proclamé Dieu le Saint-Esprit tandis que Jésus Christ considéré comme le Rédempteur de l’humanité est réincarné en la personne du fils du prophète Paul Salomon Dialungana Kiangani, dont la date de naissance le 25 mai est depuis 2000 adopté comme jour de Noël à la place du 25 décembre. Sa cité sainte est située à Nkamba dans la province du Kongo Central et elle est aussi appelée la Nouvelle Jérusalem.

Grâce à l’ampleur de cette doctrine, l’Eglise kimbanguiste prétend compter plus de 30 millions de fidèles à travers le monde.

Toujours sous l’angle de l’affirmation identitaire mais cette fois-ci sous un angle plus sociologique, on peut citer la doctrine de la négritude initiée par le président Léopold Sédar Senghor du Sénégal et le recours à l’authenticité prôné par le président Mobutu Sese Seko du Zaïre de l’époque. Ces doctrines se préoccupent au lendemain des indépendances de réussir la décolonisation culturelle et mentale des peuples africains, indispensable pour relever le pari du développement. Selon un style propre à chacune d’elles, les deux doctrines revendiquent la promotion des valeurs culturelles du Noir et l’africanité. La négritude penche plus sur une approche intellectualiste que sur les questions sociales. Le recours à l’authenticité porte parfois sur ce que d’aucuns jugeront comme des aspects superficiels, notamment le changement du nom du pays de « Congo » en « Zaïre » ou l’imposition du port vestimentaire des hommes à côté d’autres actions positives.

 Les doctrines de combat politique

Par contre, les doctrines à caractère socio-économique ou politique s’inscrivent dans le cadre du combat politique d’abord pour l’obtention de l’indépendance et ensuite, une fois celle-ci acquise, pour la consolidation de la souveraineté nationale. Ici aussi, l’Afrique dispose dès l’origine de sa formation, d’une doctrine qui se caractérise essentiellement par la spécificité de son communautarisme. Toutefois, l’oralité de la société africaine ne laisse pas de trace pour toujours approfondir davantage le contenu.

Il n’empêche que cette tradition communautaire va inspirer les doctrines modernes africaines lesquelles s’appuieront sur des théories comme le marxisme, surtout le maoïsme pratiqué en Chine, en raison de nombreuses similitudes avec ce pays entre autres par rapport à la ruralité en Afrique comme là-bas. Sous l’angle socio-économique le socialisme africain dominera la vie politique du continent.

 Ce terme comprend des doctrines politiques conçues par des dirigeants africains qui ont ainsi pris appui sur la tradition locale, parfois idéalisée, compilée avec les théories en vigueur dans les pays socialistes. En prolongement de l’esprit de solidarité africaine, ce socialisme se propose de s’étendre au-delà des différents pays du continent par la valorisation du panafricanisme. Ceux qui en seront les chantres sont en Afrique de l’Ouest, les présidents Léopold Sédar Senghor du Sénégal, Ahmed Sékou Touré de Guinée-Conakry, Kwame Nkrumah du Ghana tandis que la même doctrine se retrouve en Afrique de l’Est à l’instigation de Kenneth Kaunda de la Zambie et de Julius Nyerere de la Tanzanie dont le nom sera attaché à l’initiative des villages Ujamaa, genre de coopérative agricole signifiant fraternité en swahili.

Quelles que soient les approches de ces doctrines socio-économiques, elles espèrent atteindre le développement du continent en s’imposant face au système économique mondial jugé impérialiste et accusé de plomber sa progression.

 Malheureusement dans leur contenu, ces doctrines se distinguent par des méthodes autoritaires et bureaucratiques exercées sous le diktat d’un parti unique au sein duquel le culte de personnalité règne en faveur de son initiateur qui n’est autre que le chef de l’Etat, par ailleurs jaloux de son autonomie vis-à-vis de ses pairs africains qui recommandent le panafricanisme. Dans ces conditions, le décollage de l’Afrique n’est pas au rendez-vous. En réaction, de nouvelles doctrines, sans encore vraiment s’imposer jusqu’à présent, commencent à voir le jour, orientées vers une vision libérale. A leur tour, cette dernière qui encourage le volontarisme et l’entrepreneuriat, parce qu’elle a su faire ses preuves en Occident ne manquera certainement pas d’inspirer un nouveau courant d’idées adapté à l’Afrique afin d’entrevoir les possibilités de soutenir son progrès .

Noël NTETE

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Histoire

Stanley Pool, site de naissance des villes de Kinshasa et Brazzaville

Le Pool Malebo, anciennement appelé Stanley Pool, est un lac situé au sud du fleuve Congo. Il sépare de part et d’autre Brazzaville et Kinshasa. Ce lac ou bassin d’une longueur de 35 km et une largeur de 23 km est considéré comme le berceau des deux capitales les plus rapprochées au monde.

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Ce bassin abrite dans son centre une île nommée M’bamou. Il est aussi appelé Lac Nkunda, Lac Ngobila, Malebo Pool ou Stanley Pool, Mpumbu, lac Nkuna. Par étymologie, le nom Malebo est le pluriel de lilebo et désigne, en lingala, le borasse, un grand palmier qui arborait abondamment les rives et les îles du pool. « Pool » est un terme anglais, et signifie « bassin » et parfois « lac ».

À l’époque coloniale, c’est-à-dire de 1885 à 1960, le Pool est connu sous le nom de « Stanley Pool », en l’honneur del’explorateur Henry Morton Stanley qui cartographia et travailla une bonne partie de sa vie dans cette région du monde. Géographiquement, les capitales des deux Congo, Kinshasa et Brazzaville, sont situées de part et d’autre, en aval du Pool. Maluku se trouve à l’entrée amont du lac. Vers l’amont, le Pool Malebo marque le début du Congo navigable jusqu’à Kisangani, via Mbandaka et Makanza. Vers l’aval, au-delà de la baie de Ngaliema, plusieurs ensembles de rapides (connus sous le nom de Chutes Livingstone) se succèdent sur un dénivelé d’environ 300 mètres jusqu’au port de Matadi.

Le 12 mars 1877, l’expédition conduite par Henry Morton Stanley atteignit le Stanley Pool (aujourd’hui Pool Malebo). Ici, Stanley a rencontré Mankoneh, le chef Bateke et Itsi, chef des Ntamo, formant une fraternité de sang. C’est le site des villes actuelles de Kinshasa et Brazzaville, capitales de la République démocratique du Congo et de la République du Congo.

Stanley – Brazza

Avant peu à Léopoldville, un monument à la mémoire de Stanley et un autre, sur la rive française, à Savorgnan de Brazza, se feront vis-à-vis le long du fleuve Congo. Emouvante confrontation ! L’intrépide Gallois, dont Léopold II se fit un précieux auxiliaire, Stanley, celui que les indigènes du Bas-Congo appelèrent Boula-Matari, le « briseur de rocs », a été le rival de Savorgnan de Brazza, cet Italien devenu Français qui d’abord incompris, rongé de fièvres, commença dès 1875 d’explorer l’Afrique équatoriale pour finalement conclure en 1880 avec le roi Makoko un traité qui assurait à la France le protectorat sur la rive droite du Pool.

Entre les deux hommes, une course de vitesse s’engagea. Les choses faillirent même à un moment donné tourner mal. L’Acte de Berlin devait finalement consacrer les droits respectifs de la France et du nouvel Etat indépendant du Congo, de chaque côté du grand fleuve. 

Aujourd’hui, il ne peut être en aucun cas question d’une rivalité, d’une inimitié quelconque entre le Congo belge et l’A.-E.F. Il faut parler plutôt d’une saine et fructueuse émulation. La collaboration étroite entre la France et la Belgique que de tous nos vœux nous appelons en Europe il faut qu’elle s’institue également en Afrique. En moins d’un quart d’heure, les vedettes rapides vous transportent du beachde Léopoldville au débarcadère central de Brazzaville !… 

On ne comprendrait pas que les deux gouvernements, les deux administrations, ne s’entendissent point pour se prêter mutuellement aide et assistance. Déjà en ce qui concerne l’énergie électrique, on assiste à un fructueux échange. Le pont qui doit être jeté entre les deux rives des capitales les plus rapprochées au monde pourrait davantage accroitre les échanges commerciaux et même culturels. 

Raymond OKESELEKE

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Dossier

Mpolo et Okito, toujours dans l’ombre de Lumumba…

L’histoire de l’assassinat de Patrice Emery Lumumba est collée à deux autres martyrs : Maurice Mpolo et Joseph Okito. Le premier fut ministre de la Jeunesse et chef d’état-major de l’armée congolaise et le second président du Sénat. Mais l’imposant personnage de Lumumba continue de faire ombrage à ses compagnons de lutte pourtant morts dans les mêmes circonstances.

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Au cœur des hommages que la nation organise depuis le 21 juin dernier, deux familles se sentent oubliées. Celles de Maurice Mpolo et Joseph Okito. Ces deux compagnons de Patrice Emery Lumumba ont été assassinés ensemble avec le tout premier Premier ministre de la République démocratique du Congo le 17 janvier 1961, dans l’actuelle province du Haut-Katanga, au sud-est du pays. Après plusieurs années de réclamation d’une reconnaissance, les deux personnalités ont été admises, le 14 juin dernier, dans l’Ordre national des héros nationaux Kabila-Lumumba.

Mais les familles de ces deux infortunés ne sentent pas toujours considérées dans les cérémonies d’hommages qui se déroulent actuellement en République démocratique du Congo. Dans une interview accordée à la presse, le 24 juin 2022, la fille aînée de Maurice Mpolo ne s’explique pas le fait que son géniteur ainsi que Joseph Okito restent dans les oubliettes alors que les deux sont morts le même jour et dans les mêmes circonstances que Lumumba. Jacqueline Mpolo a exprimé son regret de constater que les deux familles n’ont été ni de près ni de loin associées à ces différentes funérailles. 

« On est choqués. C’est comme si on est en train de remuer le couteau dans nos cœurs. Ça nous fait mal de voir qu’il y avait 3 personnes qui sont mortes pour les mêmes causes, le même idéal et qui ont terminé leur vie ensemble. Les sangs et chairs fusionnés. Maintenant, on doit les détacher. Même les bourreaux, les assassins ne les ont pas séparés […]. Si cela vient du sommet de l’État, c’est scandaleux. Nous n’avons pas été invités. Même au moment où je vous parle, nous n’avons pas de programme de tout ce qui se passe. », a affirmé Jacqueline Mpolo. 

La fille de l’ancien ministre de la Jeunesse et chef d’état-major de l’armée congolaise porte aussi des critiques sur la dernière décoration faite aux deux compagnons de Lumumba.  « […] Il y a Kengo Wa Dondo et Papa Wemba qui ont été élevés au rang de Grand Cordon des ordres des héros nationaux Kabila-Lumumba. Joseph Okito et Maurice Mpolo toujours admis dans l’ordre national de Héros nationaux Kabila-Lumumba aux grades de grands officiers ? Le président de la République qui a signé cette ordonnance, je lui demande de la réexaminer. Nous avons fait une lettre de recours pour qu’il puisse revoir cette ordonnance », a-t-elle enchainé.

Si la famille Lumumba est en première loge et a pu récupérer une relique du corps de l’héros national congolais, les deux familles restantes n’ont demandé pas plus que de retrouver le sol de Shilatembo, dans le Haut-Katanga où leurs pères ont été assassinés ensemble avec Lumumba.

« Pour le premier ministre Patrice Lumumba, il y a la dent. Pour Okito et Mpolo, il n’y a rien. Est-ce que nous ne pouvons pas aller là où ils étaient assassinés prendre ne fût-ce que la terre, comme on s’est convenu et faire aussi notre deuil ? L’échangeur de Limete se trouve dans la ville de Kinshasa, comment ne pouvons-nous pas avoir une place pour Okito et Mpolo ? Je demande l’implication de tout le monde. Ils ne sont pas morts pour leurs familles. Ils n’ont pas accepté la corruption des Belges », insiste Jacqueline Mpolo.

Ces regrets de la famille Mpolo qui relaient aussi les frustrations de la famille Okito démontrent que ce deuil national en mémoire du héros national n’est pas forcément vécu de la même manière par les descendants de ces martyrs de l’indépendance. Un petit-fils de Mpolo, son homonyme, Maurice, pensait que l’Etat congolais allait lier le sort de ces trois hommes jusqu’aux hommages nationaux. « De façon symbolique, mettre en exergue deux cercueils avec leurs images, ça aurait été une image forte non seulement pour la famille, mais aussi pour la nation. », a-t-il souhaité au micro de RFI.

Dans ce voyage funéraire de la relique de Lumumba, l’étape de Shilatembo, dans le Haut-Katanga, a semblé rétablir la mémoire de ces deux compagnons de Patrice Lumumba. Sur la devanture du Mausolée de Lumumba, deux bustes de Maurice Mpolo et Joseph Okito ont été aussi construits. Et le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde a déposé des gerbes de fleurs devant ces bustes lors de la cérémonie d’hommages à Lumumba dans cette contrée du pays. Pour ces hommages nationaux à Lumumba, un deuil national de 4 jours a été décrété de lundi 27 juin à jeudi 30 juin 2022.         

Heshima     

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Histoire

Réparation du passé colonial en RDC : toujours un gout d’inachevé…

Le roi Philippe a effectué une visite de 6 jours en République démocratique du Congo. Du 6 au 11 juin, le souverain belge a été dans 3 villes congolaises. Quant au lourd passé colonial, le descendant de Léopold II n’a pas vraiment exprimé ce que plusieurs Congolais attendaient de lui. Analyse.

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Mercredi 8 juin, à Kinshasa, le roi Philippe a réaffirmé ses « plus profonds regrets pour les blessures du passé » infligées à l’ex-Congo belge durant la période coloniale, espérant marquer ainsi un nouveau départ dans les relations entre la Belgique et la République démocratique du Congo. Ainsi, pour son premier voyage dans ce que fut la colonie belge, le roi Philippe a rappelé le passé du régime colonial. Ce régime « basé sur l’exploitation et la domination », était « celui d’une relation inégale, en soi injustifiable, marqué par le paternalisme, les discriminations et le racisme. Il a donné lieu à des exactions et des humiliations », a rappelé le souverain belge dans un discours prononcé à Kinshasa, sur l’esplanade du Parlement, devant plusieurs Congolais.

Ces regrets, le roi Philippe les avait déjà formulés, par écrit, dans une lettre au président Félix Tshisekedi il y a deux ans, à l’occasion du 60ème anniversaire de l’indépendance de la République Démocratique du Congo. Pour plusieurs Congolais, ce discours du roi Philippe a laissé un goût d’inachevé. Le roi n’a pas pu évoluer dans ses mots depuis sa lettre adressée à Félix Tshisekedi. Et dans une lettre ouverte adressée au souverain, des intellectuels, des militants syndicaux et associatifs congolais pointent les limites des « regrets » exprimés par le roi des Belges. Pour eux, « exprimer des regrets, c’est également annihiler toute chance de questionner certes la Belgique d’hier, mais également la Belgique d’aujourd’hui qui s’est installée dans une relation néocoloniale avec le Congo depuis son indépendance et qui a travaillé à rigoureusement miner toute possibilité d’éclosion d’une réelle démocratie au cœur de l’Afrique en mettant à mal sa souveraineté comme à l’époque ».

Ces Congolais dont de membres de la LUCHA (Lutte pour le changement) demandent au roi des Belges d’avoir ce courage que n’ont pas eu (ses) prédécesseurs et qui permettra à sa Nation de construire son avenir en se regardant dans le miroir de l’Histoire. Cela, en lui demandant de « faire une déclaration publique en faveur de la justice et des réparations pour les conséquences de la terreur initiée par votre famille sur nos terres ».  

Ce qui démontre pour eux que « des regrets » ne suffisent pas. D’autres réclament des excuses et réparations pour les souffrances endurées et les « pillages » des richesses de la République Démocratique du Congo. Mais le roi ne semble pas prêt à évoluer. Son discours, d’après certaines analyses, était destiné à mettre un trait à ce passé douloureux et revoir autrement des relations entre les deux pays.

Des œuvres d’arts emportées…  

Le roi Philippe, dans sa visite, s’est ensuite rendu au Musée national de la RDC (MNRDC), où a été abordée la question de la restitution des objets d’art à l’ex-colonie, pour laquelle le gouvernement belge a défini une feuille de route en 2021. Là encore, le souverain a prononcé des mots qui ont laissé certains Congolais perplexes. En remettant au musée un masque géant « Kakuungu », qui était utilisé pour des rites d’initiation de l’ethnie Suku, le roi évoque que cet objet est « prêté » pour une durée « illimitée » au Musée congolais par le Musée royal de l’Afrique centrale de Tervuren, près de Bruxelles. Certains Congolais voulaient entendre parler de la restitution tout court et non d’un prêt. Ils veulent voir aussi d’autres objets traditionnels regagner le pays.  

Souvenir des mains coupées…

Le roi Léopold II de Belgique s’est vu attribuer d’immenses territoires autour du bassin du fleuve Congo par les dirigeants européens lors de la conférence de Berlin en 1885, lorsqu’ils se sont partagé les territoires du continent dans le cadre de ce que l’on a appelé la ruée vers l’Afrique. Le roi a appelé son territoire l’État libre du Congo – une colonie personnelle où il avait la liberté de faire ce qu’il voulait.

Les souvenirs des atrocités commises sous cette colonisation ne sont pas encore oubliés. Et des excuses ouvertes de la Belgique qui trainent à arriver ne permettent pas de refermer les plaies définitivement. Villages rasés, asservissement, massacres de masse, tortures et châtiments corporels, rien ne fut épargné aux indigènes congolais qui cherchaient à se soustraire au travail forcé ou ceux qui ne récoltaient pas assez de caoutchouc ou ne rapportaient pas suffisamment de pointes d’ivoire au colonisateur. Ces atrocités commises entre 1885 et 1908 au Congo par l’administration belge du roi Léopold II auraient réduit de moitié la population congolaise de l’époque. Certaines sources évoquent 10 millions d’Africains tués dans certaines des pires atrocités de l’ère coloniale. Après la cession du Congo à la Belgique par Léopold II, certains de ces traitements dégradants ont pu continuer sous la colonie de l’Etat belge entre 1908 et 1960.        

A ce jour, après la visite historique de Kinshasa, Lubumbashi et Bukavu par le roi Philippe et le contentement de son discours de regrets, la réparation du passé colonial a toujours ce goût d’inachevé. Et cela, pendant que d’autres pays comme l’Allemagne ont fait des pas dans la réparation de ce lourd passé. L’Allemagne a reconnu officiellement avoir commis un génocide pendant son occupation de la Namibie à l’époque coloniale et accepté de verser une compensation financière.

Les colons allemands y ont tué des dizaines de milliers de Herero et de Nama lors de massacres au début du XXe siècle. Face à cette tragédie, Le ministre des Affaires étrangères, Heiko Maas, a reconnu que ces meurtres constituent un génocide. « À la lumière de la responsabilité historique et morale de l’Allemagne, nous demanderons pardon à la Namibie et aux descendants des victimes », avait-il déclaré.

Heshima  

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