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RDC : Tshisekedi et les réalisations qui pourront marquer son passage à la tête du pays
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La redaction
Le président de la République démocratique du Congo (RDC) est à 3 ans et demi de la fin officielle de son mandat. Si le secteur de la sécurité continue d’être son plus grand goulot d’étranglement pour l’instant, Félix Tshisekedi a cependant des réalisations qui pourraient marquer à vie son passage à la tête du pays. Heshima Magazine fait un focus sur les projets qui auront un impact non négligeable après son passage à la tête du pays.
Le 24 janvier 2019, Félix Tshisekedi Tshilombo prête serment comme président de la RDC. Il a remplacé à ce poste Joseph Kabila qui était au pouvoir depuis 2001. En janvier 2024, le fils de l’opposant historique, Étienne Tshisekedi, rempile pour un second mandat. Mais ce nouveau bail au Palais de la Nation rencontre de graves problèmes sécuritaires. Le Mouvement du 23 mars (M23), soutenu par l’armée rwandaise, a pris le contrôle de deux villes clés des provinces du Nord-Kivu et Sud-Kivu. Cette situation sécuritaire perturbe les efforts économiques et politiques déployés durant ses 6 années au pouvoir. Mais à côté de ce problème de sécurité, Félix Tshisekedi est en passe d’accomplir certains projets majeurs qui pourraient rester mémorables dans l’histoire du pays.
Gratuité de l’enseignement de base
Sous le mandat de Félix Tshisekedi, la RDC a instauré la gratuité de l’enseignement primaire, permettant à entre 3,5 et 4 millions d’enfants d’accéder à l’école. Cette initiative a été soutenue par un financement de la Banque mondiale. Bien que consignée dans la Constitution du pays, la gratuité de l’enseignement n’était pas appliquée sous le règne du président Joseph Kabila. Sa matérialisation rapide par Félix Tshisekedi avait suscité une certaine hostilité dans le camp politique de son prédécesseur. « Quand vous écoutez qu’on parle de la gratuité de l’enseignement, sachez que c’est notre programme, le programme de Joseph Kabila. La gratuité de l’enseignement est reconnue dans la Constitution. Et la Constitution a été promulguée par Joseph Kabila », avait déclaré en octobre 2019, Emmanuel Ramazani Shadary, secrétaire permanent de l’ex-parti présidentiel.
Cette gratuité de l’enseignement de base demeure une mesure phare du gouvernement. Même si son application rencontre des défis persistants, cette mesure pourrait réduire sensiblement l’analphabétisme dans le pays. Dans la prochaine décennie, il y aura très peu de jeunes sans éducation de base. Ce qui pourrait rehausser le niveau d’alphabétisme. Près de 4 millions d’enfants ont rejoint l’école en cinq ans grâce à la gratuité, portant le nombre total d’enfants scolarisés à plus de 6 millions, selon les chiffres partagés notamment par la Banque mondiale. Cette réforme capitale a suscité d’autres besoins, notamment celui du nombre d’écoles et de salles de classe pour accueillir les nouveaux élèves de plus en plus nombreux dans des salles surchargées.
Le gouvernement a alors entrepris une extension du réseau scolaire. Le nombre d’écoles publiques prises en charge par l’État a augmenté de 55 %, passant de 41 739 à 64 889. Il s’est ensuite posé le défi de l’amélioration des salaires des enseignants. Après plusieurs travaux avec les syndicats des enseignants, le salaire moyen d’un enseignant est passé de près de 160 000 à près de 409 000 francs, soit une augmentation mensuelle de 238 %. Mais le travail reste encore à faire quant à la rémunération de ces professionnels de la craie qui estiment toujours que leurs salaires sont insuffisants et que les conditions de travail sont encore difficiles. Mais dans l’ensemble, cette réforme majeure marquera le passage de Félix Tshisekedi à la tête de ce pays, pourvu que cette gratuité de l’école soit pérennisée après son mandat.
Gratuité de la maternité, un projet à pérenniser
La gratuité de la maternité a été instaurée en septembre 2023 dans le cadre de la Couverture Santé Universelle (CSU), avec pour objectif de réduire la mortalité maternelle et infantile. Près de deux ans après son lancement, le bilan présente des avancées notables, mais aussi plusieurs défis à surmonter, notamment celui de l’accessibilité de ce service sur l’ensemble du territoire de la RDC. Cette gratuité des accouchements est désormais effective dans 13 provinces, avec une extension prévue à l’ensemble du pays d’ici fin 2025. D’après le bilan à mi-parcours de ce projet présenté par Félix Tshisekedi dans son discours sur l’état de la Nation en décembre 2024, plus de 1,3 million de femmes ont accouché gratuitement dans 4 300 établissements de santé, dont 1 155 ont été équipés pour améliorer la qualité des soins. Dans des hôpitaux qui appliquent le programme de gratuité de la maternité à Mbuji-Mayi, dans la province du Kasaï-Oriental, le nombre d’accouchements est passé de 12 en janvier à 80 en mars 2024, illustrant une demande accrue liée à la gratuité.
Le PDL-145T, un immense projet pour la postérité
Depuis l’indépendance du pays en 1960, aucun projet de développement n’a eu l’envergure du Programme de Développement Local des 145 Territoires (PDL-145T) lancé par le cinquième président de l’histoire de ce pays. Ce projet, en cours de réalisation avec un budget de 1,6 milliard de dollars, vise à améliorer le cadre de vie des populations rurales en rapprochant l’administration des administrés avec en toile de fond : construction des bureaux des administrateurs des territoires, construction des écoles publiques dans chaque territoire et construction des centres de santé. Avec ce budget d’environ 1,6 milliard de dollars, ce programme projette de sortir 25 millions de Congolais de la pauvreté et de la précarité en créant notamment des routes de desserte agricole pour permettre d’évacuer les produits vivriers partant des zones rurales vers les grands centres de consommation.
Au 25 mars 2025, lors d’une réunion d’évaluation présidée par le ministre des Finances, Doudou Fwamba Likunde Li-Botayi, il a été rapporté que plus de 40 % des infrastructures prévues avaient été achevées. Le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) a livré 334 écoles, 54 bâtiments administratifs et 245 centres de santé, soit un total de 631 infrastructures sur les 764 prévues. Le Bureau Central de Coordination (BCeCo) a également réalisé 190 écoles, 112 centres de santé et 16 bâtiments administratifs, atteignant un taux d’exécution de 82 %. La Cellule d’Exécution des Financements en Faveur des États Fragiles (CFEF) a également atteint un taux d’exécution de 82 %. Le gouvernement devrait se battre pour atteindre les 60 % de réalisation qui restent. Pour l’instant, des défis sécuritaires freinent également l’exécution totale de ce programme. Dans des provinces telles que l’Ituri, les travaux ont été suspendus pendant plus de trois mois en raison des conflits armés. Dans le territoire de Djugu, plusieurs infrastructures ont été détruites, retardant ainsi les projets. Dans la province de Tanganyika, bien que 77 infrastructures soient en cours de construction, des retards ont été observés, nécessitant une supervision accrue pour assurer le respect des délais. Le coût initial du programme, estimé à 1,66 milliard USD, a augmenté à 2,138 milliards USD, soit une hausse de 28,79 %, en raison de l’extension des travaux et de certaines contraintes liées à leur mise en œuvre. « Il y a beaucoup d’ouvrages qui ont été réceptionnés. Je peux dire que nous sommes à plus de 40 % des ouvrages dans leur ensemble », a résumé Doudou Fwamba, ministre des Finances, soulignant que plusieurs contraintes sur le terrain sont en voie d’être surmontées.
En 2025, le gouvernement congolais a identifié la réhabilitation de 38 000 km de routes agricoles comme une priorité dans le cadre de la deuxième phase du programme. Cette initiative vise à améliorer l’accès aux marchés pour les produits agricoles, stimulant ainsi la croissance économique locale. Ce projet, une fois qu’il crée des centres d’intérêt locaux, pourrait freiner l’exode rural aggravé par la précarité et les mauvaises conditions socio-économiques dans les milieux ruraux.
Port en eau profonde de Banana, un projet historique concrétisé
En posant la première pierre pour la construction de ce port, le 31 janvier 2022, Félix Tshisekedi a ainsi lancé la matérialisation d’un projet historique. Depuis 1863, l’idée de l’érection d’un port en eau profonde à Banana avait germé. Sous la colonisation, les Belges nourrissaient la même idée. Mais ce projet n’avait pas bénéficié de grandes avancées en termes d’études de faisabilité. En 1972, le gouvernement, sous le régime du maréchal Mobutu, mettra en place l’Organisation pour l’Équipement de Banana-Kinshasa (OEBK), un organisme pour, entre autres, assurer le développement d’un port en eau profonde à Banana, étudier la possibilité de construire un chemin de fer et un pont sur le fleuve Congo au niveau de Matadi. Mais ce port n’avait toujours pas vu le jour. Sous Joseph Kabila, l’idée de cette infrastructure avait été évoquée sans toutefois la concrétiser.
À son arrivée au pouvoir, Félix Tshisekedi a cherché des partenaires aux Émirats arabes unis pour financer ce projet. C’est DP World, une société des Émirats arabes unis, qui est à l’œuvre. Cela, pour un coût d’un peu plus d’un milliard de dollars de manière globale. Malgré la lenteur observée, les travaux de construction évoluent. Une fois réalisé, ce port sera donc une nouvelle porte d’entrée au continent africain. La première phase du projet prévoit la construction d’un quai de 600 mètres de long et d’une plateforme de stockage de 25 hectares. Celle-ci aura une capacité annuelle de plus de 300 000 conteneurs, soit plus de 1,3 million de tonnes de marchandises. DP World se chargera non seulement de la construction du port, mais aussi des zones industrielles associées.
Heshima
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« Camp de la patrie » face à l’agression rwandaise : Tshisekedi et Fayulu surpassent leur ego
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juin 6, 2025By
La redaction
Quatre jours après son adresse à la nation congolaise, l’opposant Martin Fayulu a été reçu, le 5 juin 2025, au Palais de la Nation, par le président de la République démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi. Pendant près de deux heures, les deux personnalités ont abordé la crise sécuritaire qui secoue la partie orientale du pays. Pour y faire face, Martin Fayulu propose la création d’un « camp de la patrie » et demande au chef de l’Etat de recevoir la délégation de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et de l’Eglise du Christ au Congo (ECC), porteurs du « Pacte social » pour la paix dans le pays et la région. En opposition depuis 2018, ces deux anciens compagnons de lutte brisent enfin la glace au nom de ce Congo agressé par le Rwanda et ses supplétifs de l’Alliance Fleuve Congo dont fait partie le Mouvement du 23 mars (M23).
Martin Fayulu a décidé de faire bouger les lignes face à la crise multiforme que traverse la RDC. L’opposant a pris son courage à deux mains pour rencontrer son adversaire politique, Félix Tshisekedi. « Le pays est dans une passe très difficile. Nous sommes attaqués de partout. Nous avons besoin de cohésion nationale. Je suis venu pour lui dire que nous n’avons pas 36 solutions. », a d’emblée lancé Martin Fayulu en restituant à la presse le contenu de ses échanges avec le chef de l’Etat. Pour le président de l’Engagement pour la citoyenneté et le développement (ECIDé), « Nous devons créer un camp de la patrie, c’est-à-dire des personnes qui luttent pour leur pays. Et donc pour cela avec toutes ces crises que nous avons : crise sécuritaire, crise sociale, crise politique, la solution, c’est un dialogue », a-t-il ajouté. Avant d’organiser ce dialogue, Martin Fayulu demande à Félix Tshisekedi de recevoir les évêques de la CENCO et les révérends de l’ECC. « Je lui ai demandé de tout faire pour rencontrer les évêques de la CENCO et les pasteurs de l’ECC pour discuter afin de voir ce Pacte social qu’ils proposent comment est-ce que nous pouvons le mettre en avant. Il m’a compris et il va donner sa réponse très rapidement », a proposé Martin Fayulu.
Rejoindre le « camp de la patrie » face à l’agression
Le message de Martin Fayulu ainsi que son pas vers Tshisekedi ont été salués par une bonne partie de l’opinion publique et même des politiques. Le leader de LAMUKA a fait preuve d’une lecture claire de la situation en faisant le distinguo entre son opposition à Félix Tshisekedi et le danger existentiel que court la RDC. Fiyou Ndondoboni, président du Parti Orange, a salué « l’esprit hautement patriotique » de Martin Fayulu. Ce membre de l’Union sacrée de la Nation estime que Fayulu a su faire preuve de courage en privilégiant l’intérêt national au détriment de considérations personnelles. « Nous pensons que d’autres acteurs politiques, membres de la société civile et représentants de l’Église peuvent suivre cet exemple pour bâtir une véritable paix durable pour le Congo de nos enfants », a-t-il suggéré. D’autres Congolais voient dans la démarche de Martin Fayulu un début de cohésion nationale tant souhaitée pour faire face à la crise sécuritaire dans l’Est du pays. « Martin Fayulu a fait preuve de patriotisme. Il a refusé de pactiser avec le Rwanda par pur opportunisme dans l’espoir de prendre le pouvoir à Kinshasa. Il faut séparer une opposition à Tshisekedi et une complicité d’une agression contre son propre pays. C’est cela le camp de la patrie », note le politologue Edgard Nlevo. Ce dernier pense que ce « grand pas » franchi par Fayulu peut enclencher une dynamique nationale autour de Félix Tshisekedi menant vers un dialogue national inclusif.
Deux ennemis d’hier qui surpassent leur ego…
L’opposition entre Martin Fayulu et Félix Tshisekedi s’est longtemps cristallisée autour de vives contestations et d’accusations de fraude électorale liées à la présidentielle de décembre 2018. Fayulu n’a cessé d’accuser Tshisekedi de lui avoir usurpé la victoire à l’issue de ce scrutin. À cette période, le président Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001, devait se retirer à la fin de son mandat constitutionnel en 2016. Mais le report répété des élections a plongé le pays dans une crise politique, marquée par des tensions croissantes et des manifestations. Sous la pression nationale et internationale, les élections sont finalement organisées le 30 décembre 2018. Kabila, écarté de la course, désigne Emmanuel Ramazani Shadary comme son dauphin. Trois figures dominent alors la compétition : Félix Tshisekedi, Martin Fayulu et Emmanuel Ramazani Shadary.
Président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et fils de l’opposant historique Étienne Tshisekedi, Félix Tshisekedi apparaissait comme le mieux placé pour incarner l’unité de l’opposition à la veille de la présidentielle de 2018. Pourtant, cet avantage lui échappe au profit de Martin Fayulu, désigné candidat commun par plusieurs leaders de l’opposition réunis à Genève. Quelques heures après la signature de l’accord, Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe s’en retirent, dénonçant un choix imposé. Ils s’allient ensuite à Nairobi pour créer une nouvelle coalition : le Cap pour le changement (CACH). Face à eux, la plateforme LAMUKA se structure autour de Martin Fayulu, soutenu par des figures de poids comme Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi.
Le 10 janvier 2019, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) proclame Félix Tshisekedi vainqueur avec environ 38 % des suffrages. Martin Fayulu, officiellement crédité de 34 %, rejette ces résultats, dénonce une fraude électorale massive et se proclame véritable gagnant avec plus de 60 % des voix. Les deux hommes resteront en opposition jusqu’à leur première rencontre officielle, le jeudi 5 juin dernier.
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Proches à l’origine, Félix Tshisekedi et Martin Fayulu ont vécu une rupture politique profonde qui aura duré près de sept ans. Fayulu est resté l’un des opposants les plus virulents du régime, fustigeant la corruption, l’inefficacité du gouvernement et les irrégularités électorales. Cependant, face à l’agression armée attribuée au Rwanda, les deux hommes ont mis de côté leurs différends pour répondre à l’urgence nationale. La rencontre au Palais de la Nation marque ainsi leur second face-à-face depuis leur rupture, après celui organisé par la CENI à l’intention des candidats à la présidentielle, à la veille de la campagne électorale de 2023.
Une possible alliance pour le futur
Après ce rapprochement, une alliance entre Martin Fayulu et Félix Tshisekedi à l’issue de la crise actuelle n’est pas à exclure. « Il n’y a pas d’ennemi éternel en politique », estime Edgard Nlevo, pour qui cette convergence offre aux deux hommes l’occasion de solder leurs différends passés et d’envisager des perspectives communes.
Félix Tshisekedi, dont le second mandat s’achèvera en 2028, ne pourra plus briguer la magistrature suprême. À ce jour, l’UDPS ne dispose pas encore d’un successeur naturel à la stature nationale. Un rapprochement stratégique avec Fayulu pourrait donc s’inscrire dans une logique de recomposition politique en vue des prochaines échéances.
« Quand Fayulu finira de discuter avec Tshisekedi, quelle sera la deuxième étape ? » s’interroge Mike Mukebayi, cadre du parti de Moïse Katumbi, qui soupçonne l’amorce d’un accord politique entre les deux figures longtemps opposées.
Interrogé après la rencontre de jeudi sur une éventuelle entrée de son parti dans les institutions, Martin Fayulu a toutefois précisé que cette question n’avait pas été évoquée avec Félix Tshisekedi. Pour l’instant, affirme-t-il, sa priorité reste la défense de l’intégrité territoriale face à l’agression rwandaise.
Heshima
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RDC : l’économie face aux risques d’instabilité politique et de surendettement
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20 heures agoon
juin 5, 2025By
La redaction
La République démocratique du Congo (RDC) est confrontée à une dette publique significative, tant au niveau intérieur qu’extérieur. Réduite de 14 à 3 milliards de dollars en 2010 et maintenue à ce montant jusqu’en 2019, l’encours de la dette a explosé ces dernières années, dépassant la barre de 10 milliards de dollars en 2023. Les résultats des projets liés à ces fonds empruntés restent encore mitigés. Ce qui alimente des soupçons de gabegie et interroge sur les retombées d’un tel endettement dans un pays menacé par une instabilité politique.
Depuis 2019, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ont augmenté leur contribution financière dans la gouvernance en RDC. Le 3 mai 2025, la Banque mondiale a annoncé avoir approuvé un financement global de 1,49 milliard de dollars pour quatre projets dont celui du barrage hydroélectrique Inga 3 longtemps resté dans le tiroir des projets faute de financement. Dans ce montant global, 200 millions de dollars serviront à la résilience aux inondations dans les villes de Kinshasa et Kalemie ; un montant de 600 millions sera affecté à la gouvernance, transparence et résilience économique ; 440 millions sont prévus pour la construction de 200 km d’autoroute et un pont de 700 mètres à construire sur la rivière Lualaba et enfin 250 millions pour le projet Inga 3. Pour bien implémenter ce quatrième projet, la Banque mondiale a mené des consultations auprès des populations locales pour le volet développement communautaire du programme Inga 3. Pour ce faire, cette institution financière prévoit une enveloppe de 100 millions de dollars destinée à assurer un soutien aux habitants vivant à proximité du site hydroélectrique d’Inga, sur le fleuve Congo.
En dehors de cette enveloppe débloquée par la Banque mondiale, une autre institution financière internationale, le FMI, apporte énormément de liquidités à la RDC depuis 2020. Cet apport se matérialise par divers programmes de financement et d’assistance technique, visant à stabiliser l’économie, promouvoir une croissance durable et améliorer la gouvernance. Depuis l’établissement du programme avec le gouvernement congolais en 2020, le FMI a approuvé des accords de crédit pour un montant total de près de 3 milliards de dollars en faveur de la RDC. Ces accords, notamment la Facilité Elargie de Crédit (FEC) et la Facilité pour la Résilience et la Durabilité (FRD), visent à soutenir la stabilité macroéconomique et à financer des réformes structurelles. Ces fonds sont octroyés sous forme d’aide, mais aussi de dettes que l’État congolais devra rembourser.
En janvier 2025, le Conseil d’administration du FMI a approuvé un accord de 1,729 milliard de dollars au titre de la Facilité Elargie de Crédit. La principale inquiétude concernant ces financements massifs des institutions financières internationales est la capacité de solvabilité du pays, ainsi que l’utilisation de ces fonds par le gouvernement. Plusieurs rapports de l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) accusent le gouvernement de gabegie financière.
Dans une étude sur la gouvernance de Félix Tshisekedi entre 2022 et 2024, cette ONG spécialisée dans les finances publiques note une mauvaise gouvernance budgétaire qui n’a permis ni de créer des richesses, ni d’améliorer les conditions sociales de la population, et encore moins d’être susceptible de rendre effective la décentralisation telle que prévue par la Constitution. Selon cette structure, cette mauvaise gouvernance ne place pas le pays sur la voie de l’émergence.
Les craintes d’un surendettement du pays
La RDC est encore classée parmi des pays à risque modéré de surendettement extérieur et global. Le FMI estime que les perspectives économiques du pays sont encore favorables, mais sujettes à des risques significatifs orientés à la baisse. Ces risques incluent notamment l’aggravation des conflits armés dans l’Est, les pressions inflationnistes et un ralentissement brusque de l’économie surtout pour un pays qui n’a pour principale source de revenu que ses mines. Un choc dans ce secteur pourrait immédiatement paralyser l’économie du pays.
Les tenants du pouvoir actuel rassurent au sujet de la dette publique, selon eux, est contrôlable. Le député national Flory Mapomboli, ancien cadre au ministère des Finances, avait estimé que la dette publique qui aurait été stabilisée en 2010, représentait 26% du PIB. Ce ratio est de près de 16% en 2024. « Où se trouve le surendettement entre les deux périodes susmentionnées ? Personne ne pourra me contredire sur ces chiffres avec lesquels il est presque impossible de faire du populisme. », précisait-il quand il répondait aux accusations de surendettement du pays lancées par l’ancien président de la République, Joseph Kabila. Selon Flory Mapamboli, le niveau de vie de la population congolaise a augmenté, progressant de 24% en dollars entre 2018 et 2024. Concrètement, ce PIB est passé respectivement de 557 à 693 dollars.
Si au niveau du gouvernement central l’endettement est encore contrôlé, en provinces, les entités sombrent dans le surendettement. La Direction générale de la dette publique (DGDP), qui a la mission de proposer la politique nationale d’endettement, avait noté dans un rapport publié en juin 2022 que certaines provinces du pays négociaient des accords d’emprunt sans la garantie de l’Etat (DGDP), se mettant ainsi dans un état de surendettement. Une situation qui entrave le décollage de ces entités ainsi que la réalisation de leurs projets de développement. C’est le cas de la ville de Kinshasa. Selon l’état des lieux dressé par l’ancien gouverneur Gentiny Ngobila, son prédécesseur (André Kimbuta) avait laissé des dettes dans toutes les banques, sauf à la BCDC. « Des dettes de plus de 60 millions de dollars. La plus grande de dettes que nous connaissons c’est à l’UBA, à quelques jours des élections présidentielle et législative nationale de 2018. André Kimbuta a contracté une dette de 14 millions de dollars. Là où cet argent est parti, on ne sait pas », déclarait-il en faisant le bilan de l’an un de sa gestion à la tête de la capitale.
Lui-même avant de partir, il a contacté une dette de plusieurs décennies pour la construction du Marché central de Kinshasa. Il en est de même pour certaines autres provinces comme le Maï-Ndombe. Ce surendettement de certaines provinces peut aussi affecter l’économie du gouvernement central car l’État central est censé être aussi responsable des dettes contractées ou garanties par les provinces, d’après la DGDP. Selon plusieurs rapports de cette structure publique, certaines provinces négocient des accords d’emprunt sans la garantie de l’Etat, se mettant ainsi dans un état de surendettement.
Les risques d’instabilité politique
Malgré l’embellie économique actuelle, la RDC n’est pas totalement sortie de zones de risques. La plus crainte, c’est le risque lié à l’instabilité politique, notamment en raison de conflits armés et de la crise humanitaire. L’instabilité politique a un impact négatif sur les entreprises et l’économie, tandis que les conflits armés et la crise humanitaire exacerbent les difficultés économiques. Malgré le budget national 2025 de 18 milliards de dollars, plus de 26 millions de Congolais sont atteints par une faim aigue, selon les chiffres publiés en octobre 2024 par le Programme alimentaire mondial (PAM). Cette famine a été accentuée par les conflits armés dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu, du Maï-Ndombe et de l’Ituri. Dans les Kivus, la présence des rebelles de l’AFC/M23 constitue une menace directe pour la stabilité des institutions du pays. Ces rebelles ont carrément créé une administration parallèle dans les zones occupées dont les villes de Goma et Bukavu.
Cette situation sécuritaire a provoqué une explosion des dépenses militaires et un creusement du déficit budgétaire. Mais malgré ces problèmes sécuritaires, l’économie congolaise a fait preuve de résilience, avec une croissance économique atteignant 6,5 % en 2024.
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Go-Pass en RDC : 15 ans de ponction pour des aéroports toujours en ruine
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1 jour agoon
juin 5, 2025By
La redaction
Depuis son instauration en janvier 2009, la taxe Go-Pass, officiellement nommée Redevance de développement des infrastructures aéroportuaires (IDEF), pèse sur chaque billet d’avion en République démocratique du Congo (RDC). Présentée comme un levier pour moderniser des aéroports vétustes, cette redevance devait transformer des infrastructures défaillantes en hubs modernes, capables de soutenir l’économie d’un pays vaste et riche en ressources. Quinze ans plus tard, les pistes dégradées, les équipements obsolètes et l’opacité persistante dans la gestion des fonds suscitent indignation et interrogations. Où est passé l’argent du Go-Pass ? Heshima Magazine dresse un état des lieux exhaustif de ce scandale qui illustre les défis de gouvernance en RDC.
Lancée le 1er janvier 2009, la taxe Go-Pass impose une redevance de 50 dollars pour les vols internationaux et 10 dollars pour les vols domestiques, perçue par la Régie des voies aériennes (RVA), un établissement public sous la tutelle du ministère des Transports. À l’époque, l’objectif était ambitieux : collecter 2 milliards de dollars pour réhabiliter des aéroports comme N’Djili à Kinshasa, Lubumbashi, Goma ou encore Mbuji-Mayi, dont les infrastructures souffraient de vétusté, avec des pistes mal entretenues, des tours de contrôle défaillantes et des normes de sécurité aérienne souvent ignorées. Selon un article de Zoom Eco publié en 2019, la taxe devait permettre de hisser les aéroports congolais au niveau des standards internationaux, renforçant ainsi la connectivité essentielle pour le commerce des minerais et le tourisme.
Dès son lancement, le Go-Pass a suscité des critiques. Pourquoi imposer une nouvelle taxe dans un pays où le coût des billets d’avion figure déjà parmi les plus élevés d’Afrique centrale ? Les autorités justifiaient cette mesure par l’absence de subventions étatiques suffisantes et le manque de financements internationaux pour moderniser les infrastructures. Pourtant, ce qui était présenté comme une solution temporaire s’est institutionnalisé, devenant une charge quasi permanente pour les voyageurs, sans résultats tangibles à la hauteur des attentes.
Une collecte massive, des résultats dérisoires
Les chiffres révèlent l’ampleur du décalage entre les promesses et la réalité. Selon un rapport confidentiel du ministère des Finances de 2022, près de 470 millions de dollars auraient été collectés entre 2009 et 2021. Un rapport du Groupe d’étude sur le Congo (GEC), relayé par Media Congo, estime quant à lui que 225 millions de dollars ont été perçus entre 2009 et 2019, tandis que RFI rapporte en mai 2021 que seulement 200 millions de dollars ont été collectés jusqu’en 2021, soit à peine 10 % de l’objectif initial de 2 milliards. Ces écarts dans les estimations soulignent déjà un manque de transparence dans la gestion des fonds.
Sur le terrain, les améliorations sont quasi invisibles. À l’aéroport international de N’Djili, vitrine du pays, quelques travaux ont été réalisés : un scanner a été installé, la salle d’embarquement légèrement agrandie, et une réhabilitation partielle de la piste entreprise. Une nouvelle aérogare modulaire, ouverte en juin 2015 et capable d’accueillir un million de passagers par an, a été financée à 85 % par un prêt chinois, comme l’a indiqué Radio Okapi. Cependant, ces efforts restent marginaux face à l’état général de l’aéroport, toujours marqué par des équipements obsolètes et des services inadéquats. Des travaux de réhabilitation plus ambitieux sont annoncés pour début 2025, mais ils suscitent un scepticisme légitime après des années de promesses non tenues.
Les aéroports secondaires, comme ceux de Goma, Kindu, Kalemie, Mbandaka, Gemena, Isiro, Mbuji-Mayi ou Kananga, sont dans un état encore plus préoccupant. À Mbandaka, le bâtiment principal n’a pas été rénové depuis l’époque de Mobutu, selon des témoignages locaux. À Kananga, les passagers embarquent sous la pluie, faute d’abris fonctionnels. À Mbuji-Mayi, des pannes récurrentes de radio-navigation obligent parfois les pilotes à se poser à vue. Quelques exceptions notables, Goma a bénéficié du Projet d’amélioration de la sécurité à l’aéroport de Goma (PASAG), financé par la Banque mondiale, avec une piste réhabilitée, une tour de contrôle modernisée et un balisage amélioré, inaugurés en novembre 2021. Ces travaux ont permis une augmentation de 10 % du trafic annuel de fret et de passagers, même pendant la pandémie de Covid-19, selon la Banque mondiale. À Kisangani, l’aéroport de Bangoka a été rénové mais toujours pas avec les revenus générés par Go-Pass. C’est un financement de la Banque africaine de développement (BAD) dans le cadre du projet prioritaire de sécurité aérienne phase 2. Actuellement, la salle d’embarquement de cet aéroport peut prendre en charge plus de 300 passagers en heure de pointe. Sa piste d’atterrissage a été aussi rénovée. Ces avancées, financées par des partenaires extérieurs, ne doivent rien au Go-Pass.
Une gestion opaque et des détournements avérés
La gestion des fonds Go-Pass est un scandale en soi. En 2023, le directeur général de la RVA, a admis devant la Commission économique, financière et budgétaire de l’Assemblée nationale que les recettes « n’ont pas toujours été utilisées exclusivement pour les investissements ». Selon un audit partiel de la Cour des comptes en 2021, plus de 60 % des fonds ont été affectés à des dépenses courantes (salaires, frais de fonctionnement, missions de contrôle) sans traçabilité claire. Le GEC, dans son rapport de 2021, précise que 37 millions de dollars ont servi à construire un pavillon présidentiel à N’Djili, 6 millions ont été injectés dans le capital de Congo Airways, et une autre partie a couvert les charges salariales de la RVA, au lieu de financer des projets d’infrastructure. RFI rapporte également le cas d’Abdallah Bilenge, ancien directeur de la RVA, condamné en janvier 2021 à 20 ans de prison pour détournement de fonds, bien que les charges portaient principalement sur des cotisations sociales. Les investigations du GEC suggèrent que les recettes du Go-Pass ont été affectées par des écarts comptables inexpliqués.
La RVA, qui gère seule la collecte et l’utilisation des fonds, est lourdement endettée, avec un passif de 60 à 130 millions de dollars selon les sources. Aucun compte séquestre, comme prévu en théorie pour sécuriser les recettes, n’a jamais été mis en place. Le ministère des Transports, chargé de la supervision, se limite à des rapports annuels lacunaires, tandis que le ministère des Finances se désengage, arguant que la taxe n’est pas sous sa gestion fiscale. En 2024, une mission conjointe de l’Inspection générale des finances (IGF) et de la Cour des comptes a pointé une gestion anarchique, marquée par l’absence d’appels d’offres et des soupçons de rétrocommissions et de surfacturations.
Cette opacité a alimenté la colère populaire. En 2023, le Programme Multisectoriel de Vulgarisation et Sensibilisation (PMVS) a organisé des sit-in à Kinshasa pour exiger la suppression du Go-Pass, qualifié d’« usurpateur et injuste ». Les citoyens dénoncent une taxe qui ponctionne sans offrir de services en retour, dans un pays où les vols restent essentiels pour relier des régions enclavées.
Un impact économique et social désastreux
L’absence de modernisation des aéroports a des conséquences profondes. Dans un pays de 2, 345 millions de kilomètres carrés, où les routes sont souvent impraticables, le transport aérien est une bouée de sauvetage pour le commerce, l’administration et les urgences humanitaires. Pourtant, les infrastructures vétustes limitent la capacité des compagnies aériennes à opérer efficacement. Selon Businessday NG, la RDC compte 272 aéroports « utilisables », mais leur état freine leur compétitivité face à des hubs comme Nairobi ou Johannesburg. Concrètement, sur ce nombre d’aéroports et aérodromes, seuls 38 sont opérationnels et seulement 20 reçoivent régulièrement des vols. Cette situation entrave les exportations minières, décourage les investisseurs et limite le potentiel touristique, malgré les richesses naturelles du pays.
La sécurité aérienne est un autre point noir. Les avis de voyage, comme ceux du gouvernement britannique, soulignent les risques liés à l’état des infrastructures et à l’absence de normes fiables. À Kisangani ou Mbuji-Mayi, les pannes de radio-navigation exposent les passagers à des dangers inutiles. Cette insécurité, couplée à des coûts élevés de transport aérien, renforce l’isolement de certaines régions et freine le développement économique.
Sur le plan social, le Go-Pass est devenu un symbole de défiance envers les institutions. « On paie 10 dollars à Bangoka, mais l’aéroport n’a ni électricité ni toilettes décentes », témoigne un commerçant de Kisangani. À Goma, un cadre de la RVA, sous couvert d’anonymat, confie au téléphone : « Les lampes solaires viennent d’un don, le balisage d’un projet japonais. Le Go-Pass n’a rien financé ici. » Ces témoignages reflètent une frustration croissante, exacerbée par l’absence de transparence et de résultats concrets.
Vers une réforme ou la fin du Go-Pass ?
Face à ce fiasco, les appels à la réforme se multiplient. Certains, comme Me Armand Mikadi, avocat à Lubumbashi, plaident pour la suppression pure et simple de la taxe : « La RDC est le seul pays où l’on paie une surtaxe pour des services inexistants. » D’autres, comme le Syndicat des travailleurs de l’aviation civile, proposent une refonte : réduction du montant, création d’un compte public supervisé par la Cour des comptes, publication annuelle des recettes et des projets financés, et implication des usagers dans le suivi. « Tant que la RVA est en quasi-faillite et sans audit indépendant, le Go-Pass restera un puits sans fond », résume Bernard, consultant en transport aérien.
Des initiatives récentes laissent entrevoir un espoir timide. Les travaux prévus à N’Djili pour 2025 et la modernisation de Mbuji-Mayi, financée par la Chine, pourraient marquer un tournant, à condition que les fonds soient gérés avec rigueur. Mais sans une volonté politique forte pour imposer des audits indépendants, des appels d’offres transparents et des sanctions en cas de détournement, ces projets risquent de rester des annonces sans lendemain.
Le Go-Pass, conçu comme un outil de progrès, s’est transformé en un symbole des dérives de la gouvernance congolaise. Dans un pays où l’avion est souvent le seul lien entre les provinces, la modernisation des aéroports ne devrait pas être une chimère. Quinze ans après, les Congolais attendent toujours des infrastructures dignes de leurs contributions. La balle est dans le camp des autorités : restaurer la confiance passe par des actes, pas par des promesses.
Heshima Magazine
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