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LA CENI AU CENTRE D’UN CONGO BASHING DE HAUT VOL

C’est une volée de bois verts qui s’est abattue sur la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à un mois de la tenue des élections générales. L’institution dirigée par Denis Kadima a essuyé les critiques les plus acerbes sur la conduite du processus électoral devant déboucher sur les élections présidentielle, législatives nationales et provinciales qui ont eu lieu le 20 décembre 2023.

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S ’appuyant sur des données pourtant fournies par la CENI, mais dont ils faisaient une lecture partielle pour ne pas dire biaisée, nombreux sont ceux qui criaient déjà à la préparation de la fraude, qualifiant le processus de « opaque ». Outre des problèmes financiers pourtant reconnus par  Denis Kadima, les sceptiques passaient à l’offensive et ne juraient que par l’échec du processus et le report des élections. Un FCC, passé maître dans des posts incendiaires sur X (anciennement Twitter) ne jurait que sur la tête de ses ancêtres, que « les élections n’auraient pas lieu ».

 Des opposants pourtant engagés dans le processus, s’illustraient par des virulentes attaques ad hominem. D’autres, qui avaient choisi librement de ne pas s’engager dans le processus électoral attendaient de pied ferme l’échec pour revenir au-devant de la scène à travers un nouveau dialogue, qui déboucherait sur le sempiternel « partage équitable et équilibré du pouvoir ». Englués dans la politique de la chaise vide, ils auraient bien voulu voir le processus être arrêté net par un coup de force militaire ; ce qui permettrait de remettre tout à plat, quitte à voir le pays entrer dans une zone de turbulences sans fin. 

Des observateurs sérieux, avaient noté cependant que ce narratif combatif et non moins négativiste qui s’apparentait à une sorte de volonté de tout mettre sens dessus dessous ne faisait pas partie de la sémantique usitée par le président de la CENI , qui répétait à l’envie que les élections auront bel et bien lieu le 20 décembre 2023. 

Bien que le site web de la CENI regorgeait d’informations ouvertes sur le processus électoral, notamment la cartographie des bureaux de vote, force était de constater la mauvaise foi manifeste d’une opinion chauffée à blanc par des troubadours, qui envahissaient les médias audiovisuels et en ligne ainsi que les réseaux sociaux. Des chaines YouTube diffusaient des inepties parfois basées sur des ouï-dire; des vidéos truffées de contre-vérités sur le non-déploiement des matériels de vote envahissaient les réseaux sociaux, créant inutilement la psychose au sein de la population. Ce, malgré les assurances renouvelées de la CENI. 

Pour crédibiliser des accusations parfois loufoques, personne ne lisait en entièreté les dispositions de l’article 8 de la loi électorale sur la publication de la liste électorale, qui doit être disponibilisée au plus tard 15 jours avant la date du scrutin ; tandis que le fichier électoral était rendu disponible sur le site internet de la CENI suivant les modalités définies par elle-même. 

Pour ces pourfendeurs, la CENI ne serait plus indépendante et devrait suivre à la lettre leurs diktats, où se retrouvent même des gamineries. Si des élites préféraient ne pas lire les lois de la République ou s’abstenaient d’en faire allusion quand cela ne confortait pas leurs idées funestes, on était à des années-lumière de la vérité. Mais, on devrait néanmoins leur rappeler l’adage « nul n’est censé ignorer la loi », même si cela n’égratigne pas des politiciens sourds à tout.

Pourtant, tout homme sensé et de bonne foi, aurait reconnu les efforts indéniables fournis par la centrale électorale en si peu de temps afin de respecter les dispositions contraignantes de la constitution sur l’organisation des élections présidentielle et législatives. À l’opposé de la situation vécue en 2018, Denis Kadima peut même être considéré comme un enfant de chœur.

 Le processus de 2023 a, au moins ceci de particulier, qu’il est marqué par le sceau de l’inclusion. Tous les ambitieux ayant déposé leurs dossiers selon les normes édictées par la loi ont été sur les starting-blocks. À eux de se battre en toute dignité pour convaincre les électeurs de se déplacer le 20 décembre et de voter pour eux.

Ce ne sont pas les candidats président de la République Adolphe Muzito, Marie-Josée Ifoku et Moïse Katumbi, martyrisés par la CENI Nangaa en 2018 et donc invalidés, qui auraient dit le contraire. JeanPierre Bemba, Samy Badibanga et Antoine Gizenga avaient été aussi invalidés par la CENI pour diverses raisons. Denis Kadima, lui, n’a pas voulu jouer à ce jeu, préférant faire une lecture non-partisane et donc non-politicienne de la loi. La Cour constitutionnelle l’a du reste suivi dans cette voie, confirmant la justesse de l’analyse de la CENI/Kadima, loin des embrouilles de la CENI/Nangaa.

Malgré cette volonté assumée d’assurer l’inclusivité du scrutin, des jusqu’auboutistes extrémistes lui ont cherché des poux sur sa tête de plus en plus dégarnie. Alors quoi ? Est-ce juste une façon de mettre la pression sur la CENI pour qu’elle se montre encore plus ouverte et transparente ? Ou était-ce une stratégie bien pensée pour faire capoter les choses et tirer de la confusion un gain politique loin des urnes ? Au-delà de tout, jamais on n’avait atteint un si haut niveau du Congo bashing. Des tonnes de termes négatifs ont fait craindre un véritable chaos.

Mais à l’analyse, certaines critiques tendaient à conforter le constat d’une certaine impréparation dans le chef de nombreux candidats. À part des attaques ciblées dans les médias traditionnels et sur les réseaux sociaux, aucune affiche, aucune banderole, aucun rassemblement. La loi du moindre effort semblait être sans doute la nouvelle méthode de conquête de l’électorat. Pendant qu’ils peaufinaient des stratégies pour couler la CENI, Denis Kadima s’évertuait au moins de ne pas être médiocre et offrir au pays de bonnes élections.

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Opposition au changement de la Constitution : Kabilistes, Fayulistes et Katumbistes en union de façade ?

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Le 20 novembre 2024, au siège de la CENCO à Kinshasa, l’opposition a formé une coalition sans précédent. Le Front commun pour le Congo (FCC) de l’ancien président Joseph Kabila s’est allié aux hommes de Martin Fayulu et de Moïse Katumbi pour s’opposer au changement constitutionnel envisagé par Félix Tshisekedi. Une union qui, au vu des parcours politiques des acteurs impliqués, semble avant tout stratégique.  

Plusieurs organisations politiques, dont le FCC, Ensemble pour la République de Moïse Katumbi, Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD) de Matata Ponyo, et LAMUKA de Martin Fayulu ont franchi une étape significative dans leur lutte pour défendre les principes démocratiques en République démocratique du Congo (RDC). Elles se sont unies pour bloquer tout projet visant à modifier la Constitution et à ouvrir la voie à un éventuel troisième mandat de Félix Tshisekedi.

Dans une déclaration commune publiée le 20 novembre, les signataires ont dénoncé un « plan diabolique » visant à modifier la Constitution de 2006 pour permettre à Félix Tshisekedi de briguer un troisième mandat, en violation des articles 70 et 220 de la loi fondamentale. « Pas de changement de Constitution, pas de troisième mandat pour Monsieur [Tshisekedi] Tshilombo ou quiconque, pas de présidence à vie en RDC », ont-ils martelé, tout en appelant les Congolais, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, à défendre la Constitution de 2006, qu’ils qualifient de « symbole de souveraineté nationale ».

Une union qui fait débat

C’est une première en RDC de voir les Kabilistes et les Fayulistes, ennemis jurés d’hier, unir leurs forces contre Félix Tshisekedi. Cette alliance contre nature suscite des interrogations, notamment en raison des antécédents des Kabilistes. « Ils ne sont pas des modèles en matière de défense de la Constitution », note un analyste. En 2016, le régime de Joseph Kabila avait réprimé violemment les manifestations des opposants à un projet de modification constitutionnelle visant à prolonger son pouvoir. Cette répression avait fait plusieurs victimes, dont des militants de mouvements citoyens comme Rossy Mukendi et Luc Nkulula, ou encore une aspirante religieuse, Thérèse Kapangala. À la lumière de ce passé controversé, la présence des Kabilistes dans cette union soulève des questions d’ordre moral.

Fayulu et sa dent contre Kabila

Martin Fayulu n’a jamais digéré sa défaite à la présidentielle de décembre 2018, qu’il attribue à un « coup monté » orchestré par Joseph Kabila. Si, en 2019, il semblait ménager Félix Tshisekedi, il ne manquait pas une occasion d’accuser l’ex-président de la République de manipulations politiques ayant permis l’accession de Tshisekedi au pouvoir. « Je n’ai pas de problème avec Félix Tshisekedi. C’est mon frère. Ce n’est pas lui le problème, ce sont ceux qui l’ont nommé et qui vont à l’encontre de la volonté du peuple », avait-il déclaré en février 2019, lors d’un meeting à la place Sainte-Thérèse, dans l’est de Kinshasa.

Une alliance de circonstances

Depuis l’échec de l’unité de l’opposition à Genève en 2018, les leaders congolais n’ont jamais réussi à former un front uni. Lors de la présidentielle de 2023, aucun d’entre eux n’a accepté de se rallier à un autre pour constituer un bloc solide contre Félix Tshisekedi. Denis Mukwege, Martin Fayulu, Adolphe Muzito et Moïse Katumbi ont mené des campagnes en ordre dispersé. Le camp de Katumbi a bénéficié de quelques ralliements, mais ceux-ci étaient de faible portée. Par ailleurs, des tensions internes ont éclaté : Martin Fayulu avait accusé Moïse Katumbi de corruption, tandis que Denis Mukwege refusait catégoriquement de soutenir la candidature de l’ancien gouverneur de l’ex-Katanga.

Face à ce contexte, l’actuelle alliance semble être une union de circonstance. Les divergences idéologiques, les objectifs distincts, les visions incompatibles et les intérêts personnels éloignent profondément ces acteurs.

Heshima

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RDC : le dilemme du Présidium de l’Union sacrée face au projet de changement de la constitution

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Le projet de changement constitutionnel initié par Félix Tshisekedi place les membres du présidium de l’Union sacrée face à un dilemme politique crucial. Les prises de position ou le silence de figures clés comme Augustin Kabuya, Jean-Pierre Bemba, Vital Kamerhe, Sama Lukonde, Bahati Lukwebo et Christophe Mboso révèlent les tensions internes et les stratégies variées qui façonnent cette coalition, chacune poursuivant ses propres ambitions politiques.

Augustin Kabuya : le chantre du changement constitutionnel

Augustin Kabuya, Secrétaire général de l’UDPS et membre influent du présidium de l’Union sacrée, est l’un des plus fervents partisans du projet de changement de la Constitution porté par Félix Tshisekedi. En tant que défenseur principal de cette initiative, il a rapidement pris une position centrale, lançant des actions concrètes pour mobiliser l’opinion publique en faveur d’une réforme majeure de la Constitution.

Kabuya soutient que cette modification, loin d’être un simple changement formel, offrirait des perspectives de stabilité politique et renforcerait la gouvernance en RDC. Il a qualifié l’actuelle Constitution de « malédiction », précisant à tort qu’elle évoque la possibilité de céder une partie du territoire national à des Etats voisins pour favoriser l’unité africaine, un aspect qu’il défend particulièrement.

À travers des interventions médiatiques et des déplacements à travers le pays, il répond aux critiques de l’opposition et de certaines factions internes de l’Union sacrée, les accusant de freiner le progrès national par des intérêts partisans. Son rôle de « porte-voix » de Félix Tshisekedi lui confère une visibilité accrue, consolidant son statut de défenseur du changement constitutionnel.

Ce soutien pourrait permettre à Kabuya de renforcer sa position politique, avec l’espoir d’obtenir des responsabilités ministérielles et de consolider sa base au sein de l’UDPS. Cependant, son engagement comporte des risques. Il s’expose à des critiques internes et externes, notamment de l’opposition qui voit ce projet de changement de constitution comme une tentative de prolonger le pouvoir de Tshisekedi. Des dissensions internes à l’Union sacrée pourraient aussi fragiliser sa position et celle du camp présidentiel.

Ainsi, bien que Kabuya ait tout à gagner en soutenant la réforme, il court également le risque de s’isoler politiquement, surtout si la réforme échoue ou si des divisions irréparables apparaissent au sein du gouvernement. La réussite de ce projet pourrait décider de son avenir politique, tandis que son échec pourrait entacher sa crédibilité et sceller son destin politique.

Jean-Pierre Bemba : entre prudence et ambitions politiques

Vice-premier ministre en charge des Transports, voies de communication et désenclavement, Jean-Pierre Bemba est une figure majeure de la politique congolaise. Ancien chef de guerre, ancien Vice-président de la République et ex-candidat à la présidence, Bemba reste un acteur clé, avec une forte base électorale dans l’ouest du pays.

Face au projet de modification constitutionnelle, Bemba adopte une posture prudente. S’il soutenait ouvertement une telle initiative, il risquerait d’aliéner une partie de son électorat, sensible aux questions de respect des principes démocratiques. Toutefois, son ambition personnelle de revenir sur le devant de la scène politique pourrait le pousser à négocier des garanties bien plus importantes avec Tshisekedi en échange de son soutien.

Bemba pourrait utiliser son influence pour réclamer des concessions, telles qu’un renforcement de son portefeuille ministériel ou des garanties sur son rôle futur dans le dispositif gouvernemental. En cas de refus ou de marginalisation, il pourrait également se rapprocher des opposants au projet, renforçant ainsi son image d’homme politique indépendant et défenseur de la démocratie.

Vital Kamerhe : entre loyauté et revanche 

Vital Kamerhe, président actuel de l’Assemblée nationale, est aussi une figure clé de l’Union sacrée de la nation et un acteur incontournable de la politique congolaise. Son parcours politique au sein du régime actuel est marqué par une alliance stratégique avec Félix Tshisekedi, scellée par l’accord de Nairobi en 2018. Cet accord prévoyait non seulement une collaboration électorale, mais également une alternance concertée des ambitions présidentielles.

Cependant, cet accord a rapidement été mis à mal. Après la victoire de Tshisekedi en 2018, Kamerhe, qui s’attendait à être nommé Premier ministre, s’est vu attribuer le poste de directeur de cabinet, limitant ainsi son influence et contrarié dans ses aspirations. La situation s’est aggravée avec son arrestation et sa condamnation pour détournement de fonds dans l’ « affaire des 100 jours ». Condamné à 20 ans de prison en première instance, une peine réduite à 13 ans en appel, il a passé un an et demi en prison avant d’être acquitté par la Cour de Cassation. Ce passage en détention a terni durablement son image publique, une humiliation que certains estiment qu’il n’a jamais complètement pardonnée à son allié Tshisekedi. Des slogans hostiles tels que « Kamerhe moyibi » (« Kamerhe voleur ») résonnaient encore dans des vidéos virales même durant la campagne de 2023, illustrant les stigmates persistants de cette épreuve. Peut-être nourrit-il un esprit de vengeance qu’il a enfoui et qu’il pourrait ressortir au moment opportun.

Après son acquittement, Kamerhe a entrepris de reconstruire sa carrière politique. Il occupa brièvement le poste de Vice-premier ministre de l’Économie avant de s’imposer, en 2023, comme président de l’Assemblée nationale. Mais ce succès a été précédé d’une compétition interne ardue. Pour être désigné candidat officiel de l’Union sacrée à ce poste, il a été contraint de participer à des primaires internes face à deux poids lourds : Christophe Mboso, président sortant, et Bahati Lukwebo, ancien président du Sénat. Cette exigence, imposée par la coalition, a été perçue par certains comme un moyen de freiner son ascension.

Kamerhe a dû mobiliser toutes ses ressources stratégiques pour sortir vainqueur de cette épreuve. Cette étape a probablement laissé des traces. A-t-il bien digéré le fait qu’on lui ait imposé de passer par des primaires, alors qu’il est l’un des piliers de l’Union sacrée ? Certains analystes y voient une volonté de Tshisekedi de limiter l’influence de son ancien allié, voire une preuve manifeste d’un manque de confiance. Cette situation nourrit des interrogations sur la sincérité de leurs relations et pourrait influencer le choix de Kamerhe face au projet de changement constitutionnel.

En contrepartie de son soutien, Kamerhe accepterait-il une nouvelle promesse de Tshisekedi, comme un poste de Premier ministre ? Mais une telle promesse serait-elle crédible, alors que l’accord de Nairobi, qui devait déjà le hisser à cette position, a été bafoué ?

Le projet de modification de la Constitution, qui ouvrirait la voie à un possible troisième mandat pour Tshisekedi, place Kamerhe dans une position délicate. En tant que Président de l’Assemblée nationale, institution centrale dans ce processus, il occupe un poste clé. S’il décide de soutenir cette initiative, ce serait en échange de garanties solides. Cependant, une telle posture risque de l’exposer à des critiques, notamment de ses partisans qui pourraient voir en lui un acteur trop conciliant et incapable de défendre ses ambitions. À l’inverse, s’il s’y oppose, Kamerhe pourrait renforcer sa crédibilité en tant qu’alternative politique, mais il risquerait également de s’isoler au sein de l’Union sacrée, et de perdre le perchoir de l’Assemblée nationale.

Les frustrations accumulées, qu’il s’agisse de l’humiliation publique liée à son procès aussi populaire qu’un match de foot, du non-respect de l’accord de Nairobi, ou de l’obligation de passer par des primaires pour décrocher un poste qui semblait lui être promis, constituent autant de raisons qui pourraient le pousser à adopter une posture plus indépendante vis-à-vis de Tshisekedi. Kamerhe, en fin stratège, devra peser chaque choix avec soin, car il sait que ces décisions détermineront non seulement son avenir politique, mais aussi les dynamiques de pouvoir au sein de l’Union sacrée.

Sama Lukonde : allié stratégique ou acteur ambigu

Président du Sénat, Sama Lukonde se retrouve dans un poste stratégique à un moment où le débat sur le changement constitutionnel prend de l’ampleur. Souvent perçu comme un technocrate discret plutôt qu’un politicien ambitieux, son parcours récent démontre pourtant une capacité à manœuvrer habilement dans des contextes complexes. Sa présence au sein du présidium de l’Union sacrée de la nation est liée au poste de Premier ministre qu’il occupait lors de la création de cette coalition. Mais son ascension à la tête du Sénat n’a pas été un long fleuve tranquille.

La désignation de Sama Lukonde pour briguer la présidence du Sénat a suscité de vives contestations, même au sein de l’UDPS. Certains élus, notamment ceux du Grand Katanga issus de l’UDPS, auraient préféré un autre candidat de leur parti. Face à ces résistances, Sama Lukonde n’est pas resté passif. Il a su mobiliser des soutiens influents au sein de l’Union sacrée. Des personnalités de poids, comme Danny Banza, se sont impliquées activement pour défendre sa candidature, utilisant parfois des discours au ton ferme afin de garantir sa désignation. Cela a été interprété par certains comme des mises en garde et chantages indirectes à l’attention du Président de la République.

Ces interventions, combinées à un lobbying visiblement efficace, ont permis à Lukonde de surmonter les oppositions internes et de s’imposer comme président du Sénat.

Sama Lukonde pourrait jouer un rôle clé dans le projet de changement constitutionnel. En soutenant cette initiative, il consoliderait sa position auprès de Tshisekedi et renforcerait son influence au sein de l’Union sacrée, tout en se solidifiant dans son fief du Grand Katanga, où il reste respecté mais contesté.

Cependant, un alignement trop marqué sur Tshisekedi pourrait affaiblir son indépendance politique, notamment dans une région où le président ne fait pas l’unanimité. Cette proximité pourrait aussi être exploitée par ses adversaires pour remettre en question sa légitimité locale.

Sama Lukonde devra donc trouver un équilibre entre fidélité au pouvoir et maintien de ses appuis régionaux. Son habileté politique, déjà démontrée, sera mise à l’épreuve dans cette phase délicate.

Bahati Lukwebo : nouvelle opportunité ?

Bahati Lukwebo, leader de l’AFDC-A (Alliance des Forces Démocratiques du Congo et Alliés) et deuxième Vice-président du Sénat, demeure une figure complexe dans la politique congolaise. Sa position au sein du présidium de l’Union sacrée de la nation est marquée par des alliances stratégiques, mais aussi par des tensions internes, particulièrement liées à la répartition des rôles au sein du gouvernement. Après la réélection de Félix Tshisekedi, il a déclaré que son regroupement AFDC-A est marginalisé, n’obtenant que peu de ministères, sans accès aux portefeuilles clés, ce qui a alimenté un sentiment de frustration au sein de son regroupement.

Bahati a exprimé son mécontentement concernant la gestion de la coalition, soulignant que les sacrifices de l’AFDC-A lors des élections de 2023 n’avaient pas été reconnus. Il a dénoncé ce qu’il appelle « l’acharnement politique » et a réclamé une place plus importante pour son regroupement dans les institutions du pays. Ce sentiment de marginalisation a renforcé les tensions au sein de l’Union sacrée.

Le soutien à cette révision pourrait lui permettre de renforcer ses relations avec le pouvoir en place, mais cela comporte également des risques. En s’alignant sur ce projet, Modeste Bahati pourrait espérer obtenir des garanties concernant des postes clés, compensant ainsi les marges réduites de son groupe. Ce serait peut-être pour lui l’occasion de revenir finalement en force, lui qui dirigeait encore récemment le Sénat, occupe aujourd’hui la place de troisième personnalité au sein de la même institution.

Cependant, cette position pourrait également fragiliser son image auprès de ses partisans et des autres factions de l’Union sacrée qui s’opposent au changement de la Constitution. Le soutien à ce projet pourrait être vu comme une trahison des principes démocratiques, compromettant ainsi ses aspirations à long terme.

Ainsi, Bahati Lukwebo se trouve dans une position délicate, où il devra naviguer entre ses intérêts personnels, les attentes de ses partisans et ses alliances stratégiques. Le soutien ou non au changement de la Constitution sera déterminant pour son avenir politique. Mais le natif de Kabare a annoncé ses couleurs en marge des états généraux de la Justice. Pour lui, la RDC n’a pas un problème de textes mais plutôt des hommes. 

Christophe Mboso : entre adaptation politique et opportunisme

Christophe Mboso, actuel deuxième Vice-président de l’Assemblée nationale, s’est hissé au sommet du régime Tshisekedi grâce à une succession d’opportunités politiques plutôt qu’à un réel poids électoral ou une ambition personnelle marquée. Sa trajectoire politique au sein du pouvoir de Tshisekedi, marquée par des retournements de situation, illustre sa capacité à s’adapter aux évolutions du paysage politique congolais.

Lors des tensions politiques entre le CACH (Cap pour le Changement) et le FCC (Front Commun pour le Congo) qui ont débouché sur la rupture entre les deux alliances, Mboso, alors simple député national de la troisième législature, était un soutien affiché de Jeanine Mabunda, présidente de l’Assemblée nationale pour le compte du FCC de Joseph Kabila. Pendant cette période, il s’opposait fermement aux velléités des députés pro-Tshisekedi de destituer Mabunda. On se souvient de son apparition publique, brandissant une feuille où l’on pouvait lire « Ne touche pas à Mabunda, ne touche pas à mon bureau ». Ironiquement, la chute de Mabunda deviendra le tremplin qui le propulsera sur le devant de la scène.

Après la destitution du ureau Mabunda, Christophe Mboso fut désigné président du bureau provisoire en raison de son statut de doyen d’âge parmi les députés. Cette position transitoire lui a permis de superviser l’élection du bureau définitif, dans laquelle il se porta candidat et fut soutenu par l’UDPS, le parti présidentiel. Il fut élu président de l’Assemblée nationale, un poste qu’il occupa jusqu’aux élections générales de 2023.

Ces élections marqueront un nouveau tournant. Désigné une fois de plus président du bureau provisoire grâce à son âge, il organisa les élections du bureau définitif, où il se porta à nouveau candidat à la présidence de l’Assemblée nationale. Cette fois, il affronta deux poids lourds de l’Union sacrée, Vital Kamerhe et Bahati Lukwebo, dans une élection primaire interne. Christophe Mboso perdit face à Kamerhe, plébiscité candidat président de l’Assemblée nationale. Refusant de se laisser éclipser, Mboso manœuvra pour conserver une place au bureau, acceptant le poste de deuxième vice-président, une position bien inférieure à celle de speaker qu’il occupait précédemment.

Son inclusion dans le présidium de l’Union sacrée de la nation s’explique davantage par sa fonction de président de l’Assemblée nationale au moment de sa création que par un véritable poids politique ou une base électorale. Mboso, loin de nourrir des ambitions présidentielles, semble surtout motivé par le désir de maintenir une position confortable dans le régime en place.

Face au projet de changement de la Constitution, Mboso a, jusqu’à présent, gardé un silence prudent. Cependant, son historique capacité d’adaptation et de fidélité au pouvoir laisse peu de doute sur son positionnement futur. Il est fort probable qu’il soutiendra sans réserve ce projet de changement de constitution, dès lors qu’il y trouvera une garantie de maintien dans l’appareil étatique. Mboso incarne un pragmatisme politique poussé à l’extrême, prêt à s’aligner sur toute initiative qui lui assure une place au soleil dans la configuration du pouvoir.

Une alliance sous tensions croissantes

L’attitude des membres du présidium face au projet de modification constitutionnelle met en lumière les tensions internes de l’Union sacrée. Bien qu’ils partagent une alliance de circonstance, leurs ambitions personnelles et leurs calculs politiques risquent de fracturer cette plateforme à mesure que le débat avance.

Le président Félix Tshisekedi devra déployer une stratégie habile pour rallier ces figures influentes sans accentuer les divisions. Ce projet controversé pourrait soit consolider le pouvoir actuel, soit révéler des fissures profondes qui fragiliseront l’Union sacrée à l’approche des élections de 2028.

Heshima

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La situation sécuritaire en RDC au cœur d’un sommet de la SADC au Zimbabwe

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À un mois de l’expiration du mandat des forces de la SADC déployées dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC), la situation sécuritaire du pays fait l’objet d’une évaluation ce mercredi 20 novembre 2024 à Harare, au Zimbabwe. Pourtant, sur le terrain, le statu quo persiste.

Un sommet extraordinaire des Chefs d’État et des gouvernements de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe (SADC) s’ouvre à Harare ce 20 novembre. Il sera dirigé par le président du Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa, également président en exercice de la SADC.

Lors de cette rencontre, les discussions porteront sur la situation sécuritaire dans la région, avec un accent particulier sur la partie Est de la République Démocratique du Congo. « Le sommet sera l’occasion de faire le point sur les progrès de la Mission de la SADC en République Démocratique du Congo (SAMIR-DRC) », indique le communiqué de la SADC.

Le mandat de cette force expire le 15 décembre 2024. En octobre dernier, une mission de la SADC s’est rendue au Nord-Kivu pour évaluer l’opération de maintien de la paix menée en RDC (SAMIR-DRC). « Nous avons mené des opérations, mais notre mandat touche déjà à sa fin. Les autorités ont jugé urgent de procéder à une évaluation. L’objectif est de déterminer ce qui a fonctionné et ce qui n’a pas fonctionné, afin qu’en renouvelant notre mandat d’un an, nous sachions quelles mesures prendre pour plus d’efficacité », a déclaré le général-major Ibrahim Muhona, chef de la délégation envoyée par la SADC.

Soutien de l’ONU

Face aux difficultés rencontrées par cette force régionale, le Conseil de sécurité des Nations Unies a ordonné à la MONUSCO d’apporter son soutien à la SADC. Lors de sa visite en RDC en septembre, Jean-Pierre Lacroix, secrétaire général adjoint de l’ONU en charge des opérations de maintien de la paix, a échangé avec le commandant de cette force pour accélérer cette collaboration, conformément à la dernière résolution de l’ONU.

La résolution 2746 autorise un soutien renforcé de la MONUSCO aux opérations de la Mission de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe en RDC (SAMIDRC). Selon cette résolution, la force onusienne est mandatée pour fournir une assistance à la SAMIDRC, notamment à travers une meilleure coordination, un partage accru d’informations, ainsi qu’un soutien technique et logistique. Ce soutien vise à renforcer les capacités de la SAMIDRC, tout en garantissant le respect des normes internationales en matière de droit international humanitaire et de droits de l’homme.

Statu quo dans le processus de Luanda

Pendant ce temps, à Luanda, les négociations entre les deux pays n’ont pas suffisamment progressé. Le Rwanda conditionne toujours son retrait du sol congolais à la neutralisation des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), tandis que la ministre des Affaires étrangères de la RDC, Thérèse Kayikwamba Wagner, plaide pour un retrait simultané des forces rwandaises, en même temps que la traque des FDLR. Pour Kigali, « la levée des mesures défensives du Rwanda », une formulation politique désignant le retrait de l’armée rwandaise du sol congolais, ne pourra intervenir qu’après des résultats significatifs dans la lutte contre les FDLR, soit dans un second temps.

Sur le terrain, les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, poursuivent leurs combats malgré le cessez-le-feu en vigueur depuis le 4 août. Ils ont gagné du terrain dans le territoire de Walikale et continuent de progresser dans celui de Lubero, dans la province du Nord-Kivu.

Heshima

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