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Autopsie des processus électoraux en RDC: La lourde responsabilité de la classe politique et des confessions religieuses dans l’échec.

En jaugeant les différents processus électoraux de la RD Congo, on arrive à la conclusion que les difficultés rencontrées résultent de la volonté des acteurs politiques de caporaliser la CENI. Les confessions religieuses y contribuent malheureusement significativement.

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Il y a fort à craindre que le souci de garantir l’indépendance, la neutralité et l’impartialité de la CENI, de façon à rassurer tous les compétiteurs électoraux de la crédibilité des élections de 2023 ne soit qu’un vœu pieu. Les faits prouvent que la responsabilité de l’échec des processus électoraux est partagée entre les acteurs politiques dont les parlementaires qui n’arrivent pas toujours à voter des lois garantissant l’impartialité, et les chefs religieux. Pourtant, c’est sur le président de la commission électorale que l’on rejette toute la responsabilité après les élections.

L’histoire s’est répétée lors des précédents cycles électoraux et il y a fort à parier qu’elle se répète avec le processus électoral en cours. Depuis la désignation de l’abbé Apollinaire  Malumalu, précurseur et concepteur de l’architecture électorale de la RDC, les choses se déroulent toujours de la même manière. Ce qui arriva au moment de sa désignation, de celle de ses successeurs Daniel Ngoyi Mulunda et Corneille Nangaa ou de  Ronsard Malonda, est en train d’arriver aujourd’hui.  Les mêmes causes produisant les mêmes effets, si en 2006, 2011 et 2018 les élections ont été qualifiées de chaotiques, on se demande si ce ne sera pas pareil en 2023. Entretemps, avec du temps perdu, l’impératif du respect du délai constitutionnel des scrutins devient illusoire.

Plusieurs réformes pour rien

C’est après chaque processus électoral que la question de la réforme refait surface, même si les mêmes tares subsistent. Présentant devant les élus du peuple le 9 avril 2021 le rapport général du processus électoral, Corneille Nangaa avait déclaré ce qui suit au sujet de la réforme électorale : « Tout le monde parle aujourd’hui de réformes électorales. Mais il n’est pas évident que tous ceux qui en parlent en aient la même compréhension ». Le président sortant de la CENI a évidemment raison.

On a beauprocéder au changement de président de la centrale-électorale ou  réviser la loi sur la CENI et la loi électorale,  on est encore loin de sortir de l’ornière. Les velléités de la caporalisation de la CENI subsistent toujours. Du coup, les faiblesses relevées lors des cycles électoraux passés reviennent toujours.

La problématique de la caporalisation de la CENI

Corneille Nangaa et d’autres acteurs politiques ont recommandé la désignation des personnalités indépendantes, mais la démarche reste une équation difficile à résoudre tant les « désignateurs » sont eux-mêmes divisés.   Pour sa part, le Groupe d’étude sur le Congo (GEC) pense qu’au-delà de la désignation des personnalités indépendantes,  le président de la République devrait insuffler la dynamique de réforme du processus électoral ou avoir la volonté d’agir en ce sens. En tant que garant du bon fonctionnement des institutions, le président Félix Antoine Tshisekedi n’a pas à faire litière de la question.

Même, comme l’a suggéré la plateforme Lamuka dans sa proposition de loi, constituer le  bureau de la centrale électorale uniquement avec des membres de la société civile ne résoudra pas le problème. Aussi longtemps que la société civile elle-même sera politisée, la CENI sera toujours caporalisée. Il est ainsi difficile de ne pas transformer la désignation des membres de la CENI  et de son président en un lieu de conquête ou de conservation du pouvoir.

L’impossible dépolitisation de la CENI

Au début de chaque processus électoral, il y a toujours une controverse autour de la dépolitisation de la CENI. Cependant, une fois le projet de loi sur la CENI analysé et adopté par les  députés nationaux, on ne  voit finalement pas le travail de dépolitisation abattu. Encore que certains scientifiques-politiques ne croient même pas que ce soit possible. Tel est le cas du professeur André Mbata, député national de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et président de la commission PAJ de la chambre basse du Parlement, qui estime impossible  la dépolitisation de la CENI.

Le Groupe d’Etudes sur le Congo, lui aussi, pense que la dépolitisation totale de la CENI est pratiquement impossible dans un climat de méfiance entre les acteurs politiques  qui tiennent à avoir leurs délégués à la CENI considérés comme leurs yeux dans l’organe de gestion des élections. L’Accord de Sun City, adopté en 2003, préconisait la mise en place d’une CENI indépendante…Selon le GEC, le compromis politique trouvé portait les germes d’instrumentalisation politique de la commission électorale. Or, tant que la commission électorale ne sera pas réellement indépendante, parler des élections libres et démocratiques sera toujours utopique.   Bien plus, étant donné ce qui s’est passé lors des élections précédentes, il est difficile de dissiper le climat de suspicion, de manque de confiance entre les chefs religieux et de méfiance entre les acteurs politiques.

Les confessions religieuses ont déçu

Le processus ayant conduit à la désignation de Ronsard Malonda et celui qui est en cours, démontrent que les chefs religieux en général sont hypocrites, certains sont cupides et corruptibles.  Les agendas des uns et   des autres se sont finalement étalés au grand jour. Aussi, leur  charte n’encourage que des querelles d’Allemands, car élaborée comme pour ne pas permettre le consensus, ce qui,  inexorablement, renvoie au vote. Et lorsqu’il faut parler vote, chacun connait la suite.

Cette fois-ci encore, les représentants de la plateforme des 8 confessions religieuses (Eglise Catholique, Armée du Salut, Eglise Kimbanguiste, Eglise Indépendante, Eglise Orthodoxe, l’Eglise du Christ au Congo, Eglise du Réveil, musulmane) auxquelles revient la tâche de désignation du président de la CENI ont déçu.

L’indépendance et neutralité du candidat censé les représenter pose toujours problème et l’église catholique évoque un problème d’intégrité. Après plusieurs rounds improductifs, les 6 confessions religieuses ont dare-dare déposé leur PV de désignation du candidat président de la CENI au Bureau de l’Assemblée nationale.  Mais, les représentants de la CENCO et de l’ECC s’en moquent comme de leur première « soutane », estimant comme l’a dit Eric Senga, porte-parole de l’ECC, qu’il n’existe pas juridiquement une plateforme de 6 confessions religieuses.

Pour Donatien Nshole, secrétaire général de CENCO, le candidat qu’il appelle X, présenté par ces 6 confessions religieuses, pèche par rapport à l’intégrité et l’indépendance. En effet, la proposition de loi que Christophe Lutundula a soumise au parlement stipule que les membres de la CENI sont choisis parmi les personnalités indépendantes reconnues pour leur compétence, intégrité morale, probité, honnêteté…

D’aucuns se rappellent  qu’à chaque occurrence la CENCO vient avec son candidat et aucun jusqu’à présent n’a eu la chance de passer. Ses membres ont eu parfois à être en contradiction entre eux, le cas de la désignation de Malu Malu qui avait divisé les évêques en 2013. Contre l’avis de la CENCO, Malu Malu avait accepté de présider la CENI. Il avait le soutien de son évêque, Mgr Sikuli Paluku Melchisédech,  alors que la CENCO s’était opposée à la présence d’un ecclésiastique à ce poste, préférant comme candidat le laïc Botolo Magoza. Les évêques  avaient demandé des sanctions canoniques contre l’abbé Apollinaire Malu Malu et ce dernier avait perdu son poste de directeur général de l’Institut panafricain Cardinal Martino. Aujourd’hui, le candidat Cyrille Ebotoko qui jouit de son soutien, comme en 2020 face à Malonda, Denis Kadima et Sylvain Lumu, continue d’être à l’écart.   

Au terme du tamisage en 2020, les catholiques et les protestants n’avaient été pour le choix de Ronsard Malonda dont le président Tshisekedi avait refusé la validation de mandat après  l’entérinement de l’assemblée nationale.

En définitive, les confessions religieuses passent pour une plateforme fantoche, facilement manipulable par la classe politique. L’abbé Donatien Nshole, sur les ondes d’une radio locale, a eu à exprimer ses regrets par rapport à l’image qu’ils véhiculent tous dans l’opinion. Certainement, cela pousse d’aucuns à dire que, si l’on y prend garde, elles (les confessions religieuses) finiront par se voir déposséder de ce privilège leur reconnu dans l’Accord global et inclusif de Sun City. « Les hommes restent ce qu’ils sont. Qu’ils soient en soutanes, ils ont un cœur humain », conclut Jacques Djoli.

Le choix cornélien de Félix Tshisekedi

Monseigneur Marcel Utembi et le docteur André Bokundoa ne sont pas de ceux qui reculent. Malgré le jusqu’auboutisme de leurs pairs, ils tiennent à épuiser toutes voies nécessaires. Devant la décision implacable du groupe de l’évêque général Dodo Kamba, ils sollicitent l’arbitrage du président Tshisekedi, sous prétexte qu’il s’était adressé à Jeannine Mabunda lorsqu’il y avait mésentente  au tour de la désignation de Ronsard Malonda.  Le 17 juillet 2020, le président Tshisekedi avait effectivement  refusé d’investir Ronsard Malonda, dans un courrier adressé à la présidente de l’assemblée nationale, Jeannine Mabunda, soulignant que ladite désignation était fortement contestée par plusieurs des représentants des confessions religieuses, à savoir l’Eglise catholique, l’Eglise du Christ au Congo et l’Eglise Kimbanguiste.

La « jurisprudence Mabunda » existant, le président Félix Tshisekedi a tout intérêt à trancher pour éviter les manifestations qu’avaient initiées le Comité laïc de coordination (CLC) et Lamuka, lorsque Ronsard Malonda était désigné en 2020, lesquelles manifestations avaient occasionné la mort de plusieurs personnes. Si autre fois Lamuka, le CLC et l’UDPS étaient contre la désignation de Ronsard Malonda, actuellement Lamuka, FCC (PPRD) et les mouvements citoyens comme La Lucha  font un lever de boucliers. 

Des processus électoraux ayant les mêmes caractéristiques.

Ric à ric, tous les processus électoraux suivent ou presque le même schéma. Ainsi, après l’étape de la désignation des animateurs de la CENI, comme lors des autres processus, la classe politique va passer à une autre, celle des tiraillements portant sur la loi électorale dont le manque de compromis sur pas mal de points : mode de scrutin, seuil, machine à voter, enrôlement, fichier électoral, caution non remboursable…

Pour le processus électoral en cours, on peut dire que « les allemands arrivent » : il n’y a plus rien à faire. Autant en emporte le vent. Sinon, les questions demeurent. Devrait-on continuer à parler des élections chaotiques, fraudes massives, bras de fer ou résultat entaché d’irrégularités ? En réalité, les prémisses posées actuellement sont inévitablement celles qui produisent le cafouillage ou le tripatouillage. Comment dans ce cas précis ne pas s’attendre à la violence postélectorale ?

Hubert MWIPATAYI

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Dialogue et réorganisation militaire : Tshisekedi tient deux fers au feu

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La grave crise sécuritaire qui sévit en République démocratique du Congo (RDC) pousse le chef de l’État, Félix Tshisekedi, à opérer de multiples changements, notamment sur le plan sécuritaire. Alors qu’un dialogue se profile à l’horizon avec les rebelles du Mouvement du 23 Mars (M23/AFC), Tshisekedi réorganise son appareil sécuritaire en nommant un nouveau conseiller spécial en matière de sécurité. À ce poste, le professeur Désiré Cashmir Eberande Kolongele succède à un autre universitaire, Jean-Louis Esambo.

Ancien directeur de cabinet intérimaire du chef de l’État et ex-ministre du Numérique, Désiré Cashmir Eberande occupera désormais le poste de conseiller spécial du président en matière de sécurité. L’ordonnance présidentielle le nommant a été lue mercredi 5 février 2025 à la télévision nationale (RTNC). Élu député national dans la circonscription de Bulungu, dans la province du Kwilu, il pilotera le puissant Conseil national de sécurité (CNS), une structure stratégique auparavant dirigée par l’ancien sécurocrate François Beya.

Depuis l’ère de Joseph Kabila, ce poste a vu défiler plusieurs personnalités, telles que Pierre Lumbi, Jean Mbuyu, François Beya, Jean-Louis Esambo, et désormais Désiré Cashmir Eberande. Ce dernier aura la lourde tâche de diriger le Conseil national de sécurité dans un contexte particulièrement critique. Le pays traverse l’une des crises les plus graves de son histoire. Après avoir pris Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, le 27 janvier, les rebelles du M23, soutenus par les troupes rwandaises, ont lancé une nouvelle offensive dans l’Est du pays mercredi 5 février, reprenant leur progression vers Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu. La cité minière de Nyabibwe, située à environ 100 kilomètres de Bukavu, est déjà tombée aux mains des insurgés. Ces derniers visent désormais l’aéroport de Kavumu, avant de tenter d’atteindre Bukavu.

Tshisekedi tient deux fers au feu

Félix Tshisekedi poursuit la réorganisation de l’armée et des autres secteurs de la sécurité, malgré les revers militaires dans l’Est du pays. Parallèlement, le chef de l’État garde deux options ouvertes : l’option militaire et celle du dialogue. Si la première a montré ses limites pour l’instant, la seconde semble être la moins coûteuse en termes de pertes humaines et de préservation des maigres acquis engrangés jusqu’ici. Bien qu’il ait initialement refusé de dialoguer avec les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, Tshisekedi a finalement accepté les pourparlers proposés par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC). Ces discussions, qui s’inscrivent dans le cadre d’un pacte social pour la paix, incluront Corneille Nangaa et d’autres représentants du M23.

Une donne vient compliquer l’équation, c’est que Corneille Nangaa est désormais sous mandat d’arrêt international lancé par la justice militaire.  Comment va-t-il apprécier cette situation ? Comment l’ECC et la CENCO vont-elles prendre langue avec un homme recherché ? C’est là où les romains s’empoigneèrent.

Sur le plan régional, Félix Tshisekedi et son homologue rwandais, Paul Kagame, sont attendus samedi 8 février à un sommet conjoint de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE), prévu à Dar es Salam, en Tanzanie. Le président du Conseil européen, António Costa, a annoncé avoir eu des échanges avec les deux chefs d’État directement concernés par cette crise. « Il faut trouver une solution durable à long terme pour la stabilité de la région », a-t-il déclaré, exprimant son espoir de voir des « discussions constructives » s’engager à Dar es Salam.

De son côté, la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) a salué la tenue de ce sommet conjoint SADC-CAE, prévu les 7 et 8 février. Cette organisation régionale qualifie ces assises d’« occasion cruciale » pour s’attaquer à la crise sécuritaire et humanitaire qui affecte des millions de civils dans la région des Grands Lacs.

Heshima

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RDC : la CENCO confirme l’intention de négocier avec l’AFC/M23

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La Conférence nationale épiscopale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC) ont entamé des consultations avec la classe politique et la société civile. Après avoir rencontré le président de la République, Félix Tshisekedi, l’opposant Martin Fayulu et le président de l’Assemblée nationale, les prélats n’excluent pas de rencontrer l’AFC/M23 dirigée par Corneille Nangaa. Ce dialogue envisagé portera sur quoi ? C’est la grande question.

Après avoir rencontré le chef de l’État, le président de la CENCO, Monseigneur Fulgence Muteba, a échangé, le 3 février, avec le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe. Ce prélat a présenté à son hôte le plan de sortie de crise intitulé « Pacte social pour la paix et le bien-vivre ensemble », préparé par son organisation. Les prélats catholiques et protestants envisagent de faire le tour de la classe politique et de la société civile pour créer une adhésion à ce projet de paix. Ils ont également rencontré, le 4 février, l’opposant Martin Fayulu, président du parti Engagement pour la citoyenneté et le développement (ECIDé). D’après le révérend Eric Nsenga de l’ECC, ces rencontres préparent un « grand forum » à venir, sans donner plus de détails sur le format de ce forum.

De son côté, le secrétaire général de la CENCO, Mgr Donatien Nshole, n’a pas fait mystère de la démarche de ces deux églises : dialoguer avec les rebelles du M23-AFC. « Nous voulons la paix. Nous voulons une solution alternative à la guerre. La guerre est menée par ceux qui ont pris les armes. Ça n’aurait pas de sens de les mettre à côté et d’espérer trouver la paix sans eux. », a déclaré Donatien Nshole, assurant que l’AFC/M23 sera aussi consultée dans le cadre des consultations menées par l’Église catholique et l’ECC.

Sur quoi portera le dialogue ?

Initier une démarche de paix et de cohésion nationale est une chose, trouver les points de divergence et les résoudre en est une autre. Le dialogue initié par les églises va porter sur quel sujet ? La remise en cause de la légitimité de Félix Tshisekedi ? L’application des accords du 23 mars pour le M23 ? L’amnistie après le massacre de près de 3000 Congolais à Goma ? L’entrée des belligérants dans les institutions, y compris l’armée et la police ? Voilà autant de questions complexes qui risquent de compliquer la démarche des prélats. Corneille Nangaa ainsi que ses partenaires du M23 voudront trouver l’absolution des crimes commis tout au long de leur croisade militaire qui les a conduits jusqu’à Goma. Kinshasa, qui risque d’aller à cette table de discussion en position de faiblesse, n’aura pas assez de marge de manœuvre pour imposer de nouvelles lignes rouges après l’occupation de Goma.

Assemblée nationale obligée de se dédire

L’Assemblée nationale, qui a convoqué une session extraordinaire le 4 février, est obligée de se dédire après avoir interdit au gouvernement, en 2022, de négocier avec le M23. L’Assemblée nationale avait déclaré, à son tour, le M23 comme étant un groupe « terroriste » et que le gouvernement ne devrait pas négocier avec eux. Cette décision est contenue dans une note de recommandation prise en novembre 2022 à l’intention du gouvernement. Avant le début des discussions avec l’AFC/M23, la chambre basse du parlement devrait alors délier les mains du gouvernement pour lui permettre de prendre langue avec ce groupe rebelle. Déjà à l’époque, Moïse Nyarugabo, alors député national, prévenait l’Assemblée nationale du risque d’une telle mesure. « Nous sommes un pays en guerre. On ne peut pas fermer toutes les portes de négociation. Ça ne serait pas sage de fermer les portes qui peuvent servir d’issue à un moment donné », avait-il déclaré après le vote d’adoption de cette recommandation. Aujourd’hui, l’évolution de la crise sécuritaire semble lui donner raison. L’enjeu majeur dans ce volet de discussion, c’est de savoir jusqu’où le gouvernement pourrait fléchir pour satisfaire les revendications de l’AFC/M23.

Heshima

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Crise sécuritaire en RDC : la CENCO peut-elle recréer l’unité autour de Tshisekedi ?

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La prise de la ville de Goma par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) et l’armée rwandaise rend quasi inévitables des discussions politiques entre Kinshasa, Kigali et même avec les rebelles. Une délégation de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) pourrait rencontrer le président Félix Tshisekedi, ce lundi 3 février 2025, pour échanger probablement autour de la grave crise sécuritaire qui frappe la République démocratique du Congo (RDC). Est-ce un début de discussion avec l’opposition politique ? Décryptage.

La CENCO pourrait être reçue, ce lundi 3 février, par le président de la République, Félix Tshisekedi. Si la Présidence ne confirme pas la nouvelle, elle ne dément pas non plus l’existence d’une telle rencontre. Monseigneur Fulgence Muteba, évêque du diocèse de Lubumbashi et président de la CENCO, serait déjà à Kinshasa pour ce rendez-vous. Entre Félix Tshisekedi et les évêques catholiques, un seul sujet pourrait dominer la rencontre : la crise sécuritaire qui sévit dans les provinces du Nord-Kivu, Sud-Kivu et de l’Ituri. Après la prise de Goma par les rebelles du M23 avec l’armée rwandaise, des discussions politiques semblent devenues inévitables. Pour le secrétaire général de cette organisation, Mgr Donatien Nshole, la CENCO est prête à répondre à l’appel au dialogue, mais il est nécessaire de commencer par une rencontre avec le chef de l’État avant d’entamer les consultations avec le reste de la classe politique et sociale. « À la demande de Félix Tshisekedi de réunir tout le monde pour un dialogue, nous commencerons par le rencontrer afin de lui exposer la quintessence de notre démarche. Ensuite, nous rencontrerons les autres parties prenantes. C’est une réponse à son appel », a déclaré Mgr Nshole. À cette occasion, la CENCO pourrait exprimer son point de vue par rapport à la crise sécuritaire et évoquer d’éventuelles pistes de solution.

Dialoguer avec qui ?

Le gouvernement congolais avait tracé une ligne rouge à ne pas franchir : celle de dialoguer avec les rebelles du M23. Le président Félix Tshisekedi l’a même répété devant les diplomates, en janvier dernier, lors de la cérémonie d’échange des vœux. Devant sa famille politique de l’Union Sacrée de la Nation, il soutenait que même si les rebelles arrivaient devant sa résidence de la Cité de l’Union africaine, il ne négocierait pas avec eux. Mais face à une percée des rebelles dans le Nord-Kivu, notamment avec la prise de Goma et la menace qui pèse sur Bukavu, la donne pourrait bien changer. Les évêques risquent de se voir revêtus d’une mission plus large, celle de consulter toutes les parties : opposition politique, société civile, y compris les belligérants.

L’autre difficulté, c’est celle de voir le M23 accepter cette offre de dialogue. Alors qu’il réclamait des discussions directes avec Kinshasa, ce mouvement rebelle a, depuis un certain temps, changé de cap. Les rebelles affichent pour objectif de continuer leur offensive militaire dans l’Est de la RDC. Ce qui signifie que l’ouverture d’une négociation directe avec le gouvernement congolais, qui était jusqu’ici une exigence phare des rebelles et de leur protecteur rwandais, n’est apparemment plus considérée comme d’actualité. Corneille Nangaa affiche son désir de marcher sur Kinshasa.

Dialogue après un lourd bilan humain à Goma

Les consultations de la CENCO veulent s’ouvrir après que le pays a perdu des centaines de ses fils et filles, tombés essentiellement entre le 28 et le 30 janvier lors des affrontements entre l’armée rwandaise en appui au M23 et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) pour le contrôle de Goma. Le bilan de ce carnage s’élève jusque-là à 773 morts et 2 880 blessés recensés dans des structures sanitaires, selon le porte-parole du gouvernement. Ces chiffres ont été rendus publics au cours d’un briefing presse co-animé avec le ministre de la Santé, Samuel Roger Kamba. Selon Patrick Muyaya, les corps sont entassés dans les tiroirs des morgues des hôpitaux.

Le ministre de la Communication et des Médias a martelé le fait que ces chiffres représentent le minimum de ce qui s’est passé. « On a enregistré des attaques contre des enfants, des nouveau-nés, la maternité. Les capacités de chirurgie sont réduites et ils reçoivent un nombre plus élevé de malades, sans oublier la coupure d’eau et d’électricité. À côté de cela, la fatigue et le stress dans lequel le personnel médical travaille. Et dans un élan de solidarité, il a été demandé à la population de donner de son sang. Cette campagne de collecte de sang a pour but d’aider ces militaires, des Wazalendo », a-t-il déclaré.

Le pays et sa tradition de dialogue

L’histoire des dialogues politiques en RDC face à la crise sécuritaire ou politique est marquée par une série d’initiatives et de négociations visant à résoudre des conflits internes et à rétablir la paix dans un contexte de violences armées récurrentes. La RDC, avec ses nombreuses régions affectées par des groupes armés, a été le théâtre de multiples dialogues au fil des décennies.

Le dialogue inter-congolais (2002-2003)

Ce dialogue est l’un des plus importants de l’histoire politique récente du pays. Il a été initié après la guerre du Congo (1998-2003) qui a opposé plusieurs factions, soutenues par des puissances étrangères, principalement le Rwanda, l’Ouganda et certaines multinationales. Le dialogue inter-congolais, facilité par l’Organisation des Nations Unies (ONU) et d’autres partenaires internationaux, a abouti à un accord de partage du pouvoir avec la formule d’un président de la République et de quatre vice-présidents (1+4), qui a formé un gouvernement de transition dirigé par le président Joseph Kabila, de 2003 à 2006.

Les Accords de Lusaka (1999)

Bien que précédant le dialogue inter-congolais, ces accords ont été un autre moment clé de l’histoire de la RDC. En réponse à l’intensification des conflits internes, la RDC a signé les Accords de Lusaka avec plusieurs groupes rebelles, dont le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD) dirigé par Azarias Ruberwa, le RCD/KML (Kisangani Mouvement de Libération) d’Antipas Mbusa Nyamwisi et des puissances étrangères impliquées dans le conflit. Ces accords ont cherché à instaurer un cessez-le-feu et ont ouvert la voie à des négociations pour résoudre la crise sécuritaire.

Accords de Nairobi 2013-2014

Face à l’expansion territoriale du groupe rebelle M23 dans l’Est du pays, un nouveau dialogue a été lancé, soutenu par la communauté internationale. Le gouvernement congolais et les rebelles ont négocié à Nairobi, ce qui a permis de mettre fin à la rébellion en 2013, bien que les tensions sécuritaires dans la région soient restées persistantes, marquées par la présence de divers groupes armés. Mais huit ans plus tard, le mouvement a resurgi avec les mêmes parrains.

Le dialogue politique national (2016)

La crise sécuritaire, couplée aux tensions politiques internes concernant la fin du mandat de l’ancien président Joseph Kabila, a conduit à un autre dialogue en 2016. Ce dernier, surnommé « dialogue de la Cité de l’Union africaine » et facilité par l’ancien Premier ministre togolais, Edem Kodjo, visait à résoudre la crise électorale et à trouver un consensus sur la gestion de la transition. Mais l’accord n’avait pas permis de fédérer toute l’opposition. Un autre round a été ouvert, en décembre 2016, sous la médiation de la CENCO. Un accord de transition a été trouvé, permettant de prolonger le mandat de Joseph Kabila jusqu’à l’élection de 2018. La crise sécuritaire, quant à elle, a continué de se renforcer avec les rebelles ADF au Nord-Kivu et en Ituri, mais aussi avec la CODECO. Toutefois, le dialogue a permis de stabiliser la situation politique à court terme.

Les initiatives récentes et le rôle de la MONUSCO

Avec l’intensification des violences dans l’Est de la RDC, des dialogues se poursuivent, mais sont de plus en plus complexes. L’ONU, à travers la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la Stabilisation en RDC (MONUSCO), intervient militairement et diplomatiquement pour essayer d’apaiser les tensions. Le gouvernement congolais et les groupes rebelles continuent de participer à des pourparlers de paix, bien que les résultats restent fragiles. Comme c’est le cas avec le processus de Nairobi, qui avait réuni plusieurs groupes armés, notamment le M23. Mais ce dernier avait quitté la table de discussion pour reprendre les armes jusqu’à ce jour.

Heshima

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