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PROCESSUS ÉLECTORAL LES RECORDS DE KADIMA

En dépit de certaines irrégularités liées notamment à la logistique, la République démocratique du Congo pourrait avoir vécu l’un de ses cycles électoraux les plus exceptionnels de son histoire récente. Avec un peu de recul, des Congolais pourront bien se rendre compte qu’il s’agit d’un processus électoral de tous les records. Décryptage.

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Malgré de sérieux problèmes survenus le jour du vote notamment liés au déploiement tardif de la logistique électorale, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a abattu un travail dans la transparence. Dès le 20 décembre, certains candidats de l’opposition évoquaient déjà un chaos électoral – également une bonne partie de la presse internationale. Mais l’émotion liée notamment à un vote tardif a – petit à petit – laissé la place à des mots équilibrés.

Après le 20 décembre, le journal belge, Le Soir, commençait déjà à reconnaitre que « malgré de sérieux retards à l’allumage, les opérations de vote se sont, à Kinshasa, déroulées sans trop d’encombres. » Il en était ainsi dans l’ensemble du pays, excepté certains coins où le vote a dû être prolongé pour diverses raisons. « C’est faux de dire qu’il y eu du chaos.

Il y a eu de la lenteur, c’est vrai, c’est normal, c’est une entreprise difficile dans un pays énorme où il faut déplacer les matériels (…). Le problème logistique n’est pas une surprise. Les électeurs ont été patients pour voter. Il n’y a rien à redire sur le processus de vote. Ce que j’ai vu à Kinshasa, c’était très bien», avait déclaré la journaliste Colette Braeckman.

Une élection exceptionnelle

A y regarder de près, ce processus s’est distingué de tous ceux intervenus auparavant. Le président de la CENI, Denis Kadima Kazadi ne s’est pas privé de le mentionner dans son discours précédant la publication des résultats provisoires de la présidentielle le 31 décembre dernier, à Kinshasa. « Les élections du 20 décembre ont été de tous les records : organisation de 4 scrutins simultanés ; 44 millions d’électeurs enrôlés en quatre mois ; 101.000 candidats à tous les niveaux qui ont battu campagne dans un climat apaisé ; tenue des élections dans 5 autres pays en phase pilote : Afrique du Sud, Belgique, Canada, Etats-Unis, France », a-t-il souligné. Au-delà de ces records, un autre point important est à retenir : ces élections ont été ordonnancées dans le délai constitutionnel.

« Évidemment, cela n’a pas été sans mal, mais nous avons été tenaces ; nombreux ont été ceux qui ne croyaient pas que nous relèverions le défi d’un scrutin tenu à bonne date, dans les délais constitutionnels et conformément aux objectifs inscrits dans notre plan stratégique adopté en janvier 2022, soit seulement 3 mois après l’installation de l’équipe dirigeante de la CENI. », a rappelé Denis Kadima.

Ces élections ont été également les plus inclusives possibles. Même le candidat président de la République, Moïse Katumbi, l’avait reconnu après la validation de sa candidature par la CENI puis sa confirmation par la Cour constitutionnelle. Aucun candidat possédant un dossier complet n’a été privé ni de la présidentielle, ni des législatives nationales et provinciales encore moins de l’élection des conseillers municipaux.

Une rigueur systématique

L’autre fait inédit du déroulement du dépouillement est celui de la suspension des suf frages de 82 candidats fraudeurs, sous réserve d’autres suspicions. Une première pour le processus électoral au sujet duquel des Congolais se plaignaient toujours de se voir imposés des députés nommés à la place de ceux qu’ils élisaient dans les urnes.

La CENI de Denis Kadima a inscrit un autre record, à savoir celui de la formule régulièrement exigée de la publication des résultats par bureau de vote. « Notre Centre BOSOLO, en français « Vérité », a été une grande première en RDC et en Afrique francophone.

Ce centre des opérations et des résultats a pour unique rôle d’assurer la ‘‘Vérité des Urnes’’ », a souligné le président de la CENI. D’ailleurs, ces résultats affichés de façon électronique au centre « Bosolo » sont publiés sur le site de la CENI où quiconque peut vérifier les résultats bureau de vote par bureau de vote. Ce qui permet à chaque Congolais ou témoin de ces scrutins de vérifier les résultats et de faire ou refaire des calculs pour authentifier les suffrages accordés à chaque candidat.

Bien qu’il y ait poursuite du processus électoral avec notamment les sénatoriales et l’élection des gouverneurs et vice-gouverneurs de province, la CENI s’est acquittée des scrutins les plus mouvementés, ceux du président de la République, des députés nationaux et provinciaux. « Sans avoir la prétention de m’ériger en donneur de leçons, j’aimerais rappeler que le succès d’une consultation électorale dépend non seulement du rôle de la CENI, mais de l’implication effective de toutes les parties prenantes.

La CENI a, quant à elle, joué son rôle en mettant tout en œuvre pour faire de ces élections une compétition et un libre choix entre formations politiques, et non pas un affrontement entre individus. », a noté Denis Kadima. Tirant les leçons des cycles précédents, la CENI a voulu des élections inclusives pour les candidats, et surtout pour les électeurs.

Ce qui a poussé son patron à déplorer l’impossibilité pour des Congolais de Masisi, Rutshuru et Kwamouth de participer aux différents votes. « Nous leur promettons que nous sommes déjà prêts à les enrôler et à organiser le scrutin dans leurs entités et n’attendons plus que la restauration de la paix pour nous y déployer », a-t-il lancé.

D’ailleurs, la CENI a fixé les élections législatives nationales et provinciales dans ces territoires à problème. Malgré les multiples irrégularités décriées, les missions d’observation de la SADC, de l’Union Africaine et de la CEEAC ont rapporté que ces élections se sont déroulées dans une atmosphère calme et avec un grand engouement des électeurs.

Heshima

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RDC : du parti-État à 910 partis plus tard, où va la démocratie ?

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La République démocratique du Congo (RDC) est un kaléidoscope politique où s’entremêlent ambitions, identités et luttes de pouvoir. Avec 910 partis politiques enregistrés en 2023, selon le ministère de l’Intérieur, le pays détient un record qui fascine autant qu’il interroge. Cette profusion, loin d’être un simple chiffre, raconte une histoire tumultueuse, entre ferveur démocratique et fragmentation chaotique.

Sous la tutelle belge, les Congolais étaient privés de voix politique, mais des associations culturelles et des cercles d’ « évolués » ont jeté les bases d’une résistance discrète. En 1957, les réformes coloniales ouvrent la porte à la création de partis, et à l’aube de l’indépendance en 1960, plus de 200 formations émergent, souvent ancrées dans des identités ethniques. Le Mouvement national congolais (MNC) de Patrice Lumumba et l’Alliance des Bakongo (ABAKO) de Joseph Kasa-Vubu incarnent cette lutte pour l’émancipation. Malgré leur fragmentation, ces partis galvanisent la population, canalisant l’aspiration à la liberté face à l’oppression coloniale. Leur diversité reflète déjà la complexité d’un pays aux 200 groupes ethniques, mais aussi les germes d’une instabilité future.

Les premières années : un pluralisme explosif

L’indépendance de 1960 marque l’entrée dans une ère de foisonnement politique. Environ 250 partis se disputent 137 sièges lors des élections de cette année-là, un chiffre qui illustre l’effervescence mais aussi la fragilité de la jeune démocratie. Les rivalités ethniques et les luttes de pouvoir, comme la sécession du Katanga portée par Moïse Tshombe, plongent le pays dans le chaos. En 1965, 233 partis se présentent pour 167 sièges, mais cette surabondance paralyse la gouvernance. L’incapacité à forger un consensus ouvre la voie au coup d’État de Joseph-Désiré Mobutu, qui met fin à ce multipartisme désordonné, révélant les limites d’un pluralisme mal structuré.

Sous Mobutu : l’ombre du parti unique

En 1966, Mobutu fonde le Mouvement populaire de la révolution (MPR), qui devient en 1970 le seul parti autorisé. Chaque citoyen est membre d’office, et l’opposition est étouffée. Cette centralisation impose une stabilité de façade, mais au prix d’une liberté politique sacrifiée. En 1990, sous la pression internationale et des mouvements internes, Mobutu cède à une ouverture partielle, autorisant des partis comme l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Cette transition timide marque le retour d’une pluralité politique, mais dans un climat de méfiance et de répression persistante.

L’ère Kabila : une démocratie fragmentée

Après la chute de Mobutu en 1997, l’arrivée de Laurent-Désiré Kabila, puis de son fils Joseph en 2001, ravive le multipartisme. En 2006, 278 partis sont officiellement enregistrés auprès du ministère de l’Intérieur, un nombre qui grimpe à 599 en 2011, selon les données de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Les élections de 2011, marquées par 98 partis représentés à l’Assemblée nationale, illustrent cette fragmentation : 45 partis n’obtiennent qu’un seul siège, et 74 en ont moins de cinq. Les élections de 2018, toujours sous Joseph Kabila, confirment cette tendance, avec des tensions et des accusations d’irrégularités, soulignant les défis d’une démocratie encore fragile.

Sous Tshisekedi : une inflation record

Depuis l’arrivée de Félix Tshisekedi en 2019, le nombre de partis a explosé, atteignant 910 en 2023, selon le ministère de l’Intérieur. Les élections de décembre 2023, où Tshisekedi est réélu avec 73 % des voix, voient une participation massive de partis, mais beaucoup sont des « partis de tiroir » ou « mallettes », sans ancrage populaire. La coalition de l’Union sacrée de la nation domine l’Assemblée nationale, mais la gouvernance reste entravée par les conflits dans l’Est du pays et une fragmentation politique persistante. Ce chiffre de 910 partis, comparé aux 278 de 2006 et 599 de 2011, traduit une dynamique où la quantité l’emporte souvent sur la qualité.

Une profusion qui interroge

Plusieurs facteurs alimentent cette multiplication des partis. La diversité ethnique, avec plus de 200 groupes, favorise l’émergence de formations régionales ou communautaires. La loi n° 04/002 de 2004, qui régit l’enregistrement des partis, impose des exigences minimales, facilitant ainsi la création de nouvelles entités. L’opportunisme politique prospère également : certains partis naissent pour capter des financements publics ou négocier des alliances lucratives. La fragmentation de l’opposition, où les leaders préfèrent créer leur propre structure plutôt que de s’unir, accentue cette tendance. À l’approche des scrutins, comme en 2011, 2018 ou 2023, cette prolifération s’intensifie, chaque acteur cherchant à se positionner dans le jeu politique.

Un fardeau pour le pays

Cette abondance de partis a des conséquences profondes. Politiquement, elle complique la formation de gouvernements stables, obligeant à des coalitions précaires. Les électeurs, confrontés à des centaines de choix, sont souvent désorientés, ce qui se traduit par une participation en baisse : de 67 % en 2018 à 43 % en 2023. Économiquement, l’instabilité décourage les investissements, freinant le développement d’un pays riche en ressources. Sur le plan sécuritaire, la fragmentation politique peut exacerber les tensions, notamment dans l’Est, où les conflits armés persistent. Socialement, les partis ethniques risquent de creuser les divisions, menaçant la cohésion nationale avec risque de balkanisation. Ce paysage surchargé affaiblit la légitimité démocratique, les « partis mallettes » diluant la crédibilité des processus électoraux.

Dynamique démocratique ou chaos organisé ?

La profusion des partis peut sembler témoigner d’une liberté d’expression et d’une diversité d’idées, piliers d’une démocratie vivante. Mais dans le contexte de la RDC, marquée par des institutions fragiles et des conflits persistants, elle s’apparente davantage à un chaos organisé. Comparée à d’autres pays africains, la RDC se distingue par un nombre exceptionnel de partis : le Nigeria en compte 18, le Kenya 90, et l’Afrique du Sud 52 en 2024. À l’échelle mondiale, des démocraties comme les États-Unis, dominées par deux partis, ou le Royaume-Uni, avec une poignée de formations influentes malgré 393 enregistrées, montrent qu’un système resserré favorise la stabilité. En RDC, la multiplicité des partis, souvent sans programme clair, entrave la gouvernance et alimente la méfiance envers les institutions comme la CENI.

Un chaos à maîtriser d’urgence

Loin de traduire une vitalité démocratique, la prolifération incontrôlée des partis politiques en RDC fragilise les institutions, fragmente les suffrages et nourrit un clientélisme endémique. À ce jour, plus de 900 partis sont enregistrés, pour une poignée seulement disposant d’une réelle assise nationale. Un tel éclatement mine la cohérence des coalitions, rend le parlement ingouvernable, et pousse de plus en plus de voix à appeler à une réforme profonde du système.

Parmi les pistes les plus sérieusement évoquées : le durcissement des critères de reconnaissance des partis. Il s’agirait notamment d’exiger une implantation nationale avérée et continue. Une commission indépendante, composée de magistrats et de représentants de la société civile, pourrait être instituée pour auditer régulièrement l’activité et la conformité des partis existants. À la clé, des radiations automatiques en cas d’infractions ou d’inactivité prolongée.

Autre levier essentiel mais encore inexploité : le financement public. Bien que prévu par la loi de 2008, celui-ci n’a jamais été appliqué, laissant les partis dans une précarité structurelle qui alimente les logiques d’allégeance au pouvoir ou de survie clientéliste. Mettre enfin en œuvre ce financement, selon des critères de représentativité mesurables, inciterait les formations les plus fragiles à se regrouper ou à se retirer, et récompenserait les projets enracinés dans la population. Il conviendrait, par ailleurs, d’exiger qu’un parti ayant présenté des candidats obtienne au moins un siège pour demeurer légalement reconnu, sous peine de radiation.

Pour rompre avec la personnalisation excessive des formations politiques, la loi devrait également imposer des élections internes régulières : tous les cinq ans, sous supervision indépendante. Nul ne devrait pouvoir diriger un parti plus de dix ans d’affilée. Limiter la longévité des présidences internes contribuerait à faire émerger de nouvelles générations de cadres et à renforcer la démocratie interne.

Le mode de scrutin lui-même est sur la sellette. Le système proportionnel intégral actuellement en vigueur favorise l’émiettement du paysage politique et rend la formation de majorités stables quasi impossible. Une réforme instaurant un scrutin mixte, combinant uninominal majoritaire à un tour et proportionnelle avec un seuil d’éligibilité de 5 %, permettrait de rationaliser la représentation, de favoriser des coalitions durables et de recentrer le débat sur les idées plutôt que sur les individus.

Enfin, le maintien de la mesure symbolique : la perte automatique du mandat pour tout élu qui changerait de parti en cours de législature, afin d’en finir avec l’opportunisme et l’instabilité parlementaire chronique.

Mais la régulation juridique, aussi rigoureuse soit-elle, ne suffira pas. C’est une culture politique nouvelle qu’il faut bâtir. Cela passe par l’imposition de la transparence financière, l’obligation de rendre publics les comptes des partis, mais aussi par une éducation civique intégrée dès le cursus scolaire et soutenue par les médias. Redonner du sens à l’engagement politique passe par l’assainissement du système, mais aussi par une prise de conscience collective des dérives d’un multipartisme devenu incontrôlé.

Vers un avenir politique apaisé

L’histoire des partis politiques en RDC reflète les aspirations et les défis d’une nation en quête de stabilité. De la ferveur anticoloniale des années 1950 à l’explosion actuelle de 910 partis, le pays navigue entre pluralisme et désordre. Si cette diversité peut symboliser une vitalité démocratique, elle constitue en réalité un frein à une gouvernance efficace. En adoptant des réformes audacieuses et en s’appuyant sur une vision collective, la RDC peut transformer ce foisonnement en une force, bâtissant une démocratie plus cohérente et inclusive, au service de ses citoyens et de son avenir.

Heshima Magazine

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Impunité du Rwanda : Une garantie de répétition de ses crimes en RDC

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Impliqué dans plusieurs massacres dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) depuis près de 30 ans, le Rwanda s’est toujours tiré d’affaire sans aucune sanction judiciaire. Alors qu’une enquête publiée par la chaîne américaine NBC News démontre la présence de 5000 soldats rwandais combattant aux côtés des rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) à l’intérieur des frontières congolaises, Kigali est de nouveau en passe de sortir de ce conflit sans justice grâce aux négociations de Washington et de Doha, au Qatar. Cette situation tolérée par la communauté internationale fait craindre des accords de paix sans lendemain. Une « posture tolérée » que Kinshasa appelle à mettre fin définitivement.

Plus de 7 000 morts. Des centaines de personnes ont été violées. Des enfants ont été exécutés sommairement à Bukavu. Des camps de déplacés ont été rasés dans le Nord-Kivu et des centres-villes pillés. Des prisons ont été incendiées. Des entreprises ont fait faillite. Près de 5 millions de personnes déplacées de leur milieu naturel. C’est le bilan partiel des exactions de l’armée rwandaise et de ses supplétifs du M23 commises depuis la résurgence de ce mouvement dans l’Est de la RDC. Depuis janvier et février, les Forces de défense rwandaises (RDF) se sont emparées des villes de Goma et Bukavu, dans les provinces du Nord et Sud-Kivu, provoquant la mort de milliers de civils surtout lors du siège – fin janvier – de cette ville volcanique.

Dans le reportage diffusé la semaine dernière par NBC News, ce média américain a relayé plusieurs éléments, dont certains avaient déjà été épinglés, notamment par le journal britannique The Guardian. Mais l’enquête de NBC News a le mérite d’avoir croisé plusieurs sources y compris des militaires rwandais qui ont participé à cette discrète agression contre la RDC. Ce média table sur un examen de trois années de rapports confidentiels des services de renseignements et plusieurs heures d’images de drones et satellites, combiné à des entretiens avec des militaires congolais et rwandais, des responsables d’agences des Nations Unies, des travailleurs humanitaires, des diplomates et des résidents mais aussi des mercenaires occidentaux qui travaillaient pour le compte du gouvernement congolais. Toutes ces preuves et témoignages révèlent une opération « soigneusement dissimulée » et une guerre d’agression menée avec des matériels de haute technologie.

Kigali envoie plus de 5000 soldats sur le sol congolais

D’après NBC, ces éléments démontrent que le Rwanda a non seulement soutenu logistiquement le M23, mais il a également déployé plus de 5 000 soldats sur le sol congolais. Les images analysées par la chaîne révèlent la présence de bases rwandaises à l’intérieur de la RDC, utilisées pour armer, entraîner et commander les troupes du M23. « Nous avons découvert des preuves montrant que le Rwanda a armé, commandé et entraîné le M23 et engagé des milliers de ses propres soldats dans les combats », relate le reportage, estimant que cette « guerre clandestine » a permis au Rwanda de prendre le contrôle d’un territoire qui recèle des gisements de terres rares les plus riches au monde.

Des bases militaires rwandaises installées en RDC

Les preuves démontrent que le Rwanda a installé ses bases militaires très loin des frontières communes, soit près de 65 kilomètres à l’intérieur de la RDC. Cette base servait à impliquer directement ses militaires dans les combats. Toute une organisation a été développée par les militaires rwandais sur le sol congolais : réseau de tranchées, des mortiers guidés, des systèmes de défense aérienne blindés, des positions fortifiées ayant permis aux soldats rwandais de participer directement aux combats. En 2022, deux soldats rwandais – portant des écussons et tenues militaires du Rwanda – avaient été arrêtés par l’armée congolaise (FARDC) alors qu’ils participaient à une attaque des rebelles du M23 contre le camp de l’armée loyaliste à Rumangabo. Après cet incident, un rapport interne au sein de la hiérarchie militaire rwandaise avait recommandé une « punition » à l’encontre du commandant qui avait laissé ces militaires combattre avec des insignes de l’armée rwandaise. À partir de ce moment, Kigali avait décidé d’équiper ses militaires et les rebelles du M23 des uniformes et équipements identiques pour dissimuler leur présence.

Une récompense financière pour Kagame sans une justice

Un accord minier entre la RDC et les États-Unis est actuellement en négociation. Mais Washington a créé une trilogie en associant le Rwanda à ce deal minier. Les terres rares de la RDC, qui attirent la convoitise du monde, intéressent l’administration Trump. Mais le contrat tel que voulu par Washington, présente des avantages pour Kigali qui a déjà des infrastructures notamment pour le raffinage de certaines matières premières. D’après NBC, l’offre financière proposée par Washington au président Paul Kagame dans cet accord est intéressante. Kagame profiterait donc de cet investissement minier et « sortirait du conflit sans avoir à rendre des comptes pour sa guerre secrète », conclut ce reportage. Une impunité qui compromet toute garantie de non-répétition de la part du pouvoir rwandais par rapport à cette guerre qu’elle mène depuis près de 30 ans dans l’Est de la RDC.

Lors de la Deuxième guerre du Congo, Kigali n’avait toujours pas été sanctionné suite aux milliers de morts causées pendant la « guerre des six jours » qui avait eu lieu du 5 au 10 juin 2000. Ces affrontements avaient opposé l’armée ougandaise à celle du Rwanda à Kisangani, dans le nord-est de la RDC. Ces violences armées avaient causé environ 1 000 morts et au moins 3 000 blessés, dont la majorité étaient des civils. Jusqu’à ce jour, la justice internationale n’a jamais inquiété le Rwanda. Le pays prospère dans l’impunité et perpétue des actes de violences dans l’Est du Congo.

La CEEAC hausse le ton contre Kigali

Habitué à l’impunité, le Rwanda a été surpris, le 7 juin en Guinée Équatoriale, par la fermeté de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). Alors que le Rwanda s’attendait à prendre la présidence tournante de cette organisation régionale comme il est de coutume, les chefs d’État et de gouvernement ont décidé de reconduire à la tête de la CEEAC le président équato-guinéen sortant, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo. Le Rwanda a vu sa candidature mise en suspens. Une décision qui a ulcéré le Rwanda, provocant son retrait de l’organisation. « Le Rwanda dénonce l’instrumentalisation de la CEEAC par la République démocratique du Congo, avec le soutien de certains États membres. En conséquence, le Rwanda ne voit aucune justification pour demeurer au sein d’une organisation dont le fonctionnement actuel va à l’encontre de ses propres principes fondateurs », peut-on lire dans le communiqué du ministère rwandais des Affaires étrangères.

Dans un post sur son compte X, le chef de la diplomatie rwandaise Olivier Nduhungirehe juge « incroyable et inacceptable » de constater qu’après une réunion « fructueuse » à Doha, au Qatar, le 18 mars 2025, entre le président Tshisekedi et le président Kagame ainsi que les pourparlers de Washington, la RDC continue toujours à appeler à des sanctions contre son pays. Comme si les accords de paix en cours de négociation effaçaient automatiquement les crimes commis par son pays en RDC. D’ailleurs, la réaction du ministère des Affaires étrangères congolais ne s’est pas faite attendre. Kinshasa a dénoncé une tendance inquiétante du Rwanda consistant à se « retirer d’un traité ou bloquer un processus dès qu’une exigence de responsabilité est évoquée ». La diplomatie congolaise fait allusion à l’exigence de « retrait immédiat » des troupes rwandaises du sol congolais exigé par les chefs d’État de la CEEAC. « Cette posture, tolérée trop longtemps, a mené à des accords sans redevabilité, donc sans durabilité. Participer à un processus de paix ne saurait signifier effacement du passé ni immunité pour des crimes graves », a recadré le ministère des Affaires étrangères de la RDC.

Heshima

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« Camp de la patrie » face à l’agression rwandaise : Tshisekedi et Fayulu surpassent leur ego

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Quatre jours après son adresse à la nation congolaise, l’opposant Martin Fayulu a été reçu, le 5 juin 2025, au Palais de la Nation, par le président de la République démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi. Pendant près de deux heures, les deux personnalités ont abordé la crise sécuritaire qui secoue la partie orientale du pays. Pour y faire face, Martin Fayulu propose la création d’un « camp de la patrie » et demande au chef de l’Etat de recevoir la délégation de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et de l’Eglise du Christ au Congo (ECC), porteurs du « Pacte social » pour la paix dans le pays et la région. En opposition depuis 2018, ces deux anciens compagnons de lutte brisent enfin la glace au nom de ce Congo agressé par le Rwanda et ses supplétifs de l’Alliance Fleuve Congo dont fait partie le Mouvement du 23 mars (M23).

Martin Fayulu a décidé de faire bouger les lignes face à la crise multiforme que traverse la RDC. L’opposant a pris son courage à deux mains pour rencontrer son adversaire politique, Félix Tshisekedi. « Le pays est dans une passe très difficile. Nous sommes attaqués de partout. Nous avons besoin de cohésion nationale. Je suis venu pour lui dire que nous n’avons pas 36 solutions. », a d’emblée lancé Martin Fayulu en restituant à la presse le contenu de ses échanges avec le chef de l’Etat. Pour le président de l’Engagement pour la citoyenneté et le développement (ECIDé), « Nous devons créer un camp de la patrie, c’est-à-dire des personnes qui luttent pour leur pays. Et donc pour cela avec toutes ces crises que nous avons : crise sécuritaire, crise sociale, crise politique, la solution, c’est un dialogue », a-t-il ajouté. Avant d’organiser ce dialogue, Martin Fayulu demande à Félix Tshisekedi de recevoir les évêques de la CENCO et les révérends de l’ECC. « Je lui ai demandé de tout faire pour rencontrer les évêques de la CENCO et les pasteurs de l’ECC pour discuter afin de voir ce Pacte social qu’ils proposent comment est-ce que nous pouvons le mettre en avant. Il m’a compris et il va donner sa réponse très rapidement », a proposé Martin Fayulu.

Rejoindre le « camp de la patrie » face à l’agression

Le message de Martin Fayulu ainsi que son pas vers Tshisekedi ont été salués par une bonne partie de l’opinion publique et même des politiques. Le leader de LAMUKA a fait preuve d’une lecture claire de la situation en faisant le distinguo entre son opposition à Félix Tshisekedi et le danger existentiel que court la RDC. Fiyou Ndondoboni, président du Parti Orange, a salué « l’esprit hautement patriotique » de Martin Fayulu. Ce membre de l’Union sacrée de la Nation estime que Fayulu a su faire preuve de courage en privilégiant l’intérêt national au détriment de considérations personnelles. « Nous pensons que d’autres acteurs politiques, membres de la société civile et représentants de l’Église peuvent suivre cet exemple pour bâtir une véritable paix durable pour le Congo de nos enfants », a-t-il suggéré. D’autres Congolais voient dans la démarche de Martin Fayulu un début de cohésion nationale tant souhaitée pour faire face à la crise sécuritaire dans l’Est du pays. « Martin Fayulu a fait preuve de patriotisme. Il a refusé de pactiser avec le Rwanda par pur opportunisme dans l’espoir de prendre le pouvoir à Kinshasa. Il faut séparer une opposition à Tshisekedi et une complicité d’une agression contre son propre pays. C’est cela le camp de la patrie », note le politologue Edgard Nlevo. Ce dernier pense que ce « grand pas » franchi par Fayulu peut enclencher une dynamique nationale autour de Félix Tshisekedi menant vers un dialogue national inclusif.

Deux ennemis d’hier qui surpassent leur ego…

L’opposition entre Martin Fayulu et Félix Tshisekedi s’est longtemps cristallisée autour de vives contestations et d’accusations de fraude électorale liées à la présidentielle de décembre 2018. Fayulu n’a cessé d’accuser Tshisekedi de lui avoir usurpé la victoire à l’issue de ce scrutin. À cette période, le président Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001, devait se retirer à la fin de son mandat constitutionnel en 2016. Mais le report répété des élections a plongé le pays dans une crise politique, marquée par des tensions croissantes et des manifestations. Sous la pression nationale et internationale, les élections sont finalement organisées le 30 décembre 2018. Kabila, écarté de la course, désigne Emmanuel Ramazani Shadary comme son dauphin. Trois figures dominent alors la compétition : Félix Tshisekedi, Martin Fayulu et Emmanuel Ramazani Shadary.

Président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et fils de l’opposant historique Étienne Tshisekedi, Félix Tshisekedi apparaissait comme le mieux placé pour incarner l’unité de l’opposition à la veille de la présidentielle de 2018. Pourtant, cet avantage lui échappe au profit de Martin Fayulu, désigné candidat commun par plusieurs leaders de l’opposition réunis à Genève. Quelques heures après la signature de l’accord, Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe s’en retirent, dénonçant un choix imposé. Ils s’allient ensuite à Nairobi pour créer une nouvelle coalition : le Cap pour le changement (CACH). Face à eux, la plateforme LAMUKA se structure autour de Martin Fayulu, soutenu par des figures de poids comme Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi.

Le 10 janvier 2019, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) proclame Félix Tshisekedi vainqueur avec environ 38 % des suffrages. Martin Fayulu, officiellement crédité de 34 %, rejette ces résultats, dénonce une fraude électorale massive et se proclame véritable gagnant avec plus de 60 % des voix. Les deux hommes resteront en opposition jusqu’à leur première rencontre officielle, le jeudi 5 juin dernier.

Proches à l’origine, Félix Tshisekedi et Martin Fayulu ont vécu une rupture politique profonde qui aura duré près de sept ans. Fayulu est resté l’un des opposants les plus virulents du régime, fustigeant la corruption, l’inefficacité du gouvernement et les irrégularités électorales. Cependant, face à l’agression armée attribuée au Rwanda, les deux hommes ont mis de côté leurs différends pour répondre à l’urgence nationale. La rencontre au Palais de la Nation marque ainsi leur second face-à-face depuis leur rupture, après celui organisé par la CENI à l’intention des candidats à la présidentielle, à la veille de la campagne électorale de 2023.

Une possible alliance pour le futur

Après ce rapprochement, une alliance entre Martin Fayulu et Félix Tshisekedi à l’issue de la crise actuelle n’est pas à exclure. « Il n’y a pas d’ennemi éternel en politique », estime Edgard Nlevo, pour qui cette convergence offre aux deux hommes l’occasion de solder leurs différends passés et d’envisager des perspectives communes.

Félix Tshisekedi, dont le second mandat s’achèvera en 2028, ne pourra plus briguer la magistrature suprême. À ce jour, l’UDPS ne dispose pas encore d’un successeur naturel à la stature nationale. Un rapprochement stratégique avec Fayulu pourrait donc s’inscrire dans une logique de recomposition politique en vue des prochaines échéances.

« Quand Fayulu finira de discuter avec Tshisekedi, quelle sera la deuxième étape ? » s’interroge Mike Mukebayi, cadre du parti de Moïse Katumbi, qui soupçonne l’amorce d’un accord politique entre les deux figures longtemps opposées.

Interrogé après la rencontre de jeudi sur une éventuelle entrée de son parti dans les institutions, Martin Fayulu a toutefois précisé que cette question n’avait pas été évoquée avec Félix Tshisekedi. Pour l’instant, affirme-t-il, sa priorité reste la défense de l’intégrité territoriale face à l’agression rwandaise.

Heshima

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