Fondés respectivement le 22 février 1936, sous le nom de Daring Faucon, puis renommé CS Imana en 1945, la section football de l’Association Sportive Vita Club en 1935 et le Tout-Puissant Mazembe, club de Lubumbashi en 1939, ces associations sportives sont les trois clubs congolais qui affichent chacun un palmarès pour le moins élogieux. Il n’en reste pas moins que l’un des trois clubs du championnat du niveau national, la Linafoot (Ligue nationale de football), en l’occurrence le TP Mazembe, passe pour le club congolais ayant le plus beau palmarès du football africain avec cinq Ligues des champions de la CAF (1967, 1968, 2009, 2010, 2015), trois Super coupe de la CAF, une Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupe (1980) ainsi que deux Coupes de la confédération (2016, 2017).
Après l’indépendance en juin 1960, DCMP participe au championnat national et devient le premier maître documenté en 1963. Les années suivantes, le club fait partie du trio qui domine le championnat, avec l’AS Vita Club et le Tout-Puissant Mazembe. Les joueurs de ces trois équipes constituent majoritairement l’équipe nationale zaïroise lors de la première participation à la Coupe du monde de 1974.
Le dimanche 6 décembre 1970, Vita jouait contre le Daring au Stade Tata Raphaël. Tex Mbungu, joueur du Daring, inscrit 3 buts et Raoult inscrivit le quatrième et mène 4-0. À la reprise, le V club marqua quatre buts et revenait au score grâce à Luyeye, Kibonge, Mayanga et Mayaula qui inscrit le dernier but de la soirée. Et le 10 décembre 1970, l’AFKIN suspend Vita à cause des jets de pierres faits par les supporteurs en colère alors que le club était mené 4-0. Et la rivalité entre les deux prend de l’ampleur à Kinshasa.
A Lubumbashi, le TP Mazembe entre dans une grande rivalité qui l’oppose face au FC St Eloi Lupopo, club de la même ville ainsi qu’une autre grande rivalité face à l’AS Vita Club qui est l’un des meilleurs clubs au niveau national.
Il convient d’indiquer qu’à l’heure de professionnalisation des clubs, quelques années plus tard, l’incorporation de certains éléments étrangers à l’Institut amènera les missionnaires à abandonner la gestion de l’équipe. Elle est reprise par Englebert et prend la dénomination de F.C. Englebert. À l’issue de cette première saison semi-professionnelle, l’équipe termine première et invaincue. Pour immortaliser ce premier exploit, les dirigeants décidèrent alors de baptiser le club « Tout Puissant Englebert ». Ils firent des émules puisqu’en 2010 on comptait notamment dans le championnat congolais un autre Tout Puissant, celui de Molunge, un Tout Solide Malekesa, et un Tout Capable Elima… Très vite, l’équipe est renommée « Tout Puissant Mazembe » par les Bantous (« autochtones » au sens large) pour célébrer leur force. Mazembe signifie « bulldozer » en swahili ; le nom des « Corbeaux » renvoie aux couleurs du maillot : le noir et le blanc. On peut voir dans ce baptême bilingue – en langue coloniale et en langue autochtone – à la fois les prémices de l’émancipation vis-à-vis du colonisateur belge, et une assimilation de la culture occidentale.
Pays des derbies
Des oppositions sur fond de prestige se sont exacerbées par les supporters dans toutes les villes qui organisent des championnats des provinces. Si à Kinshasa, le derby permet de croiser DCMP à V. Club, Lubumbashi maintient la flamme entre le TP Mazembe et le FC St Eloi Lupopo (1939). Si à Mbuji-Mayi, cette ambiance est créée vers le centre du pays avec une farouche opposition entre Sa Majesté Sanga Balende (1962) et l’Association Sportive Bantous, Kisangani met à l’affiche le Tout Solide Malekesa, créé en 1958, et son éternel rival l’Amical Sportif Nika (fondé en 1955 par les élèves maristes).
De ces rivalités naissent des conflits qui élisent domicile au niveau des administrations respectives et qui finissent par déboucher sur des tragédies. Des accusations de corruption visant les arbitres, des bagarres entre supporters qui dégénèrent parfois dans les gradins, des coups de gaz lacrymogènes lancés lors d’une rencontre étouffante…
A Kinshasa, les rencontres entre V. Club et DCMP se sont jouées plus de 160 fois depuis la création de ces deux clubs. Les deux rivaux s’opposent soit au championnat de Kinshasa, à la Coupe du Congo ou encore à la Ligue nationale de football (Linafoot). De 2008 à 2015, les deux rivaux ont joué 19 matches avec 9 victoires pour V. Club, 3 pour DCMP et 7 matches nuls.
Les deux plus grands clubs de la capitale Kinshasa ont croisé les fers un mercredi du 27 octobre 2021 au stade des Martyrs de la pentecôte, en match de la poursuite du championnat national. Un choc des titans que les amoureux du foot congolais ont pris l’habitude de suivre chaque saison avec un enthousiasme et une attention qui ne varient point.
Implications politiques
Plusieurs centaines de policiers ont empêché à Lubumbashi une rencontre avec les supporters suivie d’un match de préparation du club de football local TP Mazembe, qualifié pour la Coupe du monde des clubs au Japon. Le match entre les équipes A et B de TP Mazembe n’est pas autorisé par la mairie, a déclaré le colonel Paul Kyungu Banza, chef-adjoint de la police de Lubumbashi, en justifiant la présence policière.
Dirigé par l’ancien gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, passé en septembre 2015 à l’opposition, le TP Mazembe a remporté le 8 novembre la Ligue des champions d’Afrique, se qualifiant pour le mondial des clubs devant se disputer du 10 au 20 décembre au Japon. A 11h TU, la police a encerclé le stade où devait se jouer le « match de préparation et d’au-revoir » du club de Lubumbashi, capitale du Haut-Katanga depuis l’éclatement du Katanga en quatre nouvelles entités administratives.
Des milliers de supporters qui affluaient vers le lieu ont été repoussés à coups de gaz lacrymogène. Ancien allié de l’ex-président, Joseph Kabila, M. Katumbi a claqué la porte du parti présidentiel en septembre 2015. Interrogé M. Katumbi a déploré l’interdiction du match. « On ne complote pas dans un stade », a-t-il dit, « le football est apolitique ».
Raymond Okeseleke