Grâce à l’Inspection générale des finances (IGF), les fonds de l’Etat sont aujourd’hui retracés. Même quand certains fossoyeurs croient déjà avoir réussi à les égarer. Deux dossiers ont particulièrement été épinglés, à savoir celui de l’ONIP ou des forages et lampadaires.
Le travail qu’abat l’IGF depuis ces quatre dernières années est salvateur à plus d’un titre pour les finances publiques. Plusieurs projets où l’Etat a été délibérément floué sont stoppés net par cette institution de contrôle. L’un des cas le plus récent est le dossier de délivrance de la carte d’identité nationale. L’IGF a suspendu la prestation de la société AFRITECH/IDEMIA, partenaire de l’Office national de l’identification de la population, (ONIP), chargée de la production de la carte d’identité nationale. Dans une note d’observation adressée au ministère de l’Intérieur, l’IGF a décelé un certain nombre d’irrégularités dans le contrat liant les deux parties.
Le contrat précise la hauteur du montant global pour financer le projet de production de la carte d’identité congolaise à 697 millions de dollars, avec 104 millions provenant de l’Etat congolais et 593 millions comme apport du groupe AFRITECH/IDEMIA. Sur ce total, l’Etat congolais a déjà décaissé 20 millions de dollars. Cette somme a été bloquée par l’IGF en raison d’irrégularités décelées. D’après l’IGF, ce groupe ne dispose pas de ses 593 millions.
L’autre grief reproché par l’IGF est qu’il est convenu dans le contrat que l’Etat congolais doit fournir une garantie pour permettre à la société AFRITECH/IDEMIA de lever des fonds auprès des banques commerciales. Or, cette garantie, portant sur la séquestration des avoirs de la Banque centrale du Congo (BCC) au profit de la banque prêteuse, constitue une pratique illégale, d’après l’IGF. Quant au coût de réalisation du projet, il est prévu 444 millions de dollars pour la construction des infrastructures immobilières. Pour l’IGF, il s’agit d’une surfacturation. Une autre irrégularité porte sur le partage des revenus de ce contrat de production des cartes d’identité nationale, estimés à 2 milliards en 20 ans. Selon les termes du contrat, AFRITECH doit toucher 60% de cette manne contre 20% seulement pour la partie congolaise. Les 20% restants sont destinés au remboursement de la dette ayant couvert la garantie. Une manœuvre financière qui n’a pas convaincu l’IGF. Celle-ci note que l’Etat congolais est floué dans ce deal conclu avec AFRITECH de l’homme d’affaires malien, Samba Batshily.
Dossier forages et lampadaires
Un autre dossier dont l’impact a été ressenti au sein de l’opinion est celui du projet de construction de plus de 1000 forages d’eau à travers la République et l’acquisition des lampadaires pour l’éclairage public dans trois communes de la capitale, Kinshasa. L’IGF a été la première à sonner l’alerte sur la surfacturation de ce marché et son défaut d’exécution. A sa suite, la Ligue congolaise de lutte contre la corruption (LICOCO) et l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) avaient fait bloc pour également dénoncer les mêmes faits. La clameur publique a aussitôt fusé pour ces dossiers.
Une information judiciaire a été ensuite ouverte, en avril 2024, par le parquet général près la Cour de cassation à charge des anciens ministres des Finances, Nicolas Kazadi et du Développement rural, François Rubota, mais aussi de Guy Mikulu, le prédécesseur de ce dernier au même poste. Selon le parquet, cette interpellation est en rapport avec l’affaire du détournement présumé des fonds destinés aux forages d’eau à travers la République. En vue d’empêcher que les trois personnes accusées de détournement présumé des deniers publics puissent se soustraire des poursuites judiciaires engagées contre elles, le procureur général près cette Cour, Firmin Mvonde Mambu a enjoint, depuis le 27 avril, à la Direction générale des migrations (DGM) d’instruire tous ses services œuvrant aux postes frontaliers d’interdire à ces personnes de sortir du pays et de Kinshasa où elles sont tenues de répondre devant l’organe de la loi.
Quelques jours après l’ancien ministre du Développement rural François Rubota sera arrêté à la prison de Makala, lui est l’homme d’affaires mis en cause, Mike Kasenga. Pendant ce temps, son ancien collègue des Finances, Nicolas Kazadi, a commencé par prendre la direction de Paris, en France pour des soins de santé appropriés et finalement revenir au pays au cours du mois de juillet.
Genèse du dossier
Pour rappel des faits, tout part du contrat de l’installation de 1000 forages et de construction de stations mobiles de traitement d’eau dans 1000 localités à travers la RDC. Le gouvernement congolais, représenté par le ministère du Développement rural et le consortium STEVERS Construct-sotrod Water, sont tombés d’accord en avril 2021. Le projet a été évalué à près de 400 millions de dollars américains, précisément 398.982.383USD par forage.
Deux ans après, le rapport conjoint de l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) et la Ligue congolaise de lutte contre la corruption (LICOCO), publié le 12 avril 2024, a évoqué un possible détournement de fonds et a dénoncé la surfacturation du marché public. Ces deux structures de la société civile proposent la mise en place d’un comité de suivi de ce projet. Dans un document du 11 avril dernier, le ministre des Finances affirmait avoir obtenu la révision à la baisse du prix unitaire d’un forage, qu’il estimait très élevé.
« C’est ainsi que ledit consortium avait décidé d’augmenter le nombre de stations à livrer à l’État congolais, de 1000 à 1340 pour un coût unitaire de 297.748 dollars américains », avait expliqué le ministère des Finances. Actuellement, le dossier est désormais entre les mains de la justice qui cherche à localiser les forages d’eau fournis au Gouvernement et vérifier le vrai prix unitaire. Dans un réquisitoire prononcé le 18 avril dernier, le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, avait chargé le directeur général du Bureau technique de contrôle (BTC) de se rendre au siège de STEVERS pour obtenir des informations sur l’exécution dudit projet.
Le 20 avril, le consortium STEVERS Construct-sotrod Water a annoncé la livraison, au mois de juillet, de 239 stations de forage, tout en qualifiant « d’infondées» les accusations de surfacturation du projet. Mais malgré ces explications, le 27 juin 2024, l’ancien ministre du Développement rural, François Rubota, et l’entrepreneur Mike Kasenga, Dg de STEVERS Construct-Sotrod Water ont été placés en détention provisoire à la prison centrale de Makala. Ils sont soupçonnés de détournement de fonds publics.
Nicolas Kazadi, le Ponce Pilate ?
Alors qu’il est cité dans ce dossier pour avoir libéré les fonds dans ce projet, Nicolas Kazadi fait le Ponce Pilate. Au cours d’un briefing avec la presse à Kinshasa, l’ancien ministre des Finances avait affirmé que le projet relatif aux forages n’a pas débuté avec le Gouvernement dirigé par le Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde, dont il faisait partie. Il remonte plutôt à l’époque du Gouvernement Sylvestre Ilunga Ilunkamba. Dans son intervention, Nicolas Kazadi a rejeté les allégations de surfacturation. Il a souligné que le paiement du prestataire a été validé sur la base de l’engagement pris par son prédécesseur, José Sele Yalaghuli, pour un montant de 80 millions de dollars réparti en cinq tranches annuelles. Il avait affirmé n’avoir pas encore versé la totalité du montant, mais trois paiements échelonnés à hauteur de 71 millions USD ont été versés, conditionnant le versement du solde après l’achèvement des livraisons correspondant aux sommes déjà versées.
Des détourneurs condamnés
Si l’IGF a dévoilé plusieurs dossiers de détournement de fonds publics dont certains sont pendants devant la justice, d’autres ont abouti par des condamnations à des longues peines de prison. C’est le cas de Michel Djamba Kaombe et Delon Kampay, respectivement inspecteur général (IG) de l’Enseignement primaire, secondaire et technique (EPST) et directeur national du Service de contrôle de la paie des enseignants (SECOPE). Ils sont tous condamnés en appel à 20 ans de prison pour détournements de deniers publics. La sentence a été prononcée en septembre 2021 par la Cour de cassation. En outre, cette instance judiciaire avait ordonné la confiscation de leurs biens selon l’équivalence des montants subtilisés. L’ouverture de leur procès faisait suite à la mission des inspecteurs de l’IGF sur le contrôle de la paie des enseignants et l’utilisation des fonds mis à la disposition du ministère de l’EPST.
Impact sur la gestion des fonds
Depuis une vague d’audits initiés entre décembre 2020 et janvier 2021 par l’IGF, la gestion des finances au sein des entreprises publiques a littéralement changé. A la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), l’IGF avait détecté une « dilapidation des ressources [de l’entreprise] par des paiements des primes et avantages, dont plusieurs illégaux, aux mandataires publics et à leurs collaborateurs immédiats, dont la hauteur est évaluée à 2.800.938 de dollars (2,3 millions d’euros) ».
Les enquêteurs avaient également pointé un déséquilibre entre les dépenses de fonctionnement et celles destinées aux prestations sociales. Pour les équipes d’Alingete, 50 % des ressources de l’entreprise étaient directement affectées à la CNSS, alors que la Conférence interafricaine de la prévoyance sociale recommande que cette part soit seulement de 15 %. A Congo Airways, l’IGF avait épinglé le détournement de 2 040 868 de dollars résultant du non reversement des recettes des ventes de billets. La mission de contrôle avait également noté le paiement de plus de 8,7 millions de dollars au titre de prestations destinées à l’Autorité de l’aviation civile (AAC) entre 2016 et 2020, « sans que (celles-ci) ne soient réelles ».
A l’Office congolais de contrôle (OCC), les hommes de Jules Alingete Key avaient découvert, au cours de la même période de contrôle, le détournement présumé des frais de fonctionnement alloués au conseil d’administration par son président de l’époque, Placide Tshisumpa Tshiakatumba. Au Fonds de promotion de l’industrie (FPI), sous la gestion de Patrice Kitebi, les enquêteurs avaient rapporté, entre autres, le paiement « d’avantages illégaux au directeur général et au directeur général adjoint en sus de ceux […] évalués à plus de 2,6 milliards de francs congolais (1 millions d’euros) pour l’exercice 2018, 2019 et 2020 ». A la Générale des carrières et des mines (Gécamines) – qui a aussi été audité fin mai 2022 – la situation de gestion n’avait pas été reluisante à l’époque. L’IGF avait constaté une série d’irrégularités ayant mené à la perte de plusieurs centaines de millions de dollars ainsi que les conditions de vente ou de cession des actifs miniers au profit des acteurs privés.
Depuis que l’IGF avait réalisé ces différents contrôles, les dirigeants de ces entreprises de l’Etat réfléchissent à deux fois avant d’engager une quelconque dépense. L’impact des précédentes missions de l’IGF influe désormais sur les mandataires. Ce qui a amélioré les recettes notamment dans les régies financières. C’est bien connu, la peur du gendarme est le commencement de la sagesse.
La République démocratique du Congo (RDC) est touchée par une guerre d’agression menée par le Rwanda sur son territoire en appui aux rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Cette situation a déjà une incidence sur l’économie du pays, qui repose essentiellement sur l’exportation des minerais.
La guerre, qui a repris dans l’Est du pays, dissuade les investissements étrangers et la création de nouvelles entreprises. Même si la RDC dispose de ressources naturelles abondantes, l’instabilité dans les zones minières et le manque de sécurité empêchent les investissements à long terme. Les multinationales et les entreprises locales hésitent à investir dans un environnement où les risques liés à la guerre et à la violence sont trop élevés. Le regain de violence armée depuis plus de 3 ans fait perdre énormément de recettes au pays.
Depuis juin 2022, Kinshasa perd ses recettes douanières du poste frontalier de Bunagana, au Nord-Kivu. Cette première cité occupée par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) pouvait réaliser jusqu’à 750 000 dollars de recettes mensuelles. Avec la progression des rebelles dans les deux Kivu, le pays a perdu des revenus qui sont désormais contrôlés par les insurgés. Bunagana est le troisième poste frontalier le plus important du Nord-Kivu après celui de la grande barrière à Goma et celui de Kasindi.
Depuis la prise totale de deux capitales des Kivu, des produits vivriers tels que des pommes de terre, du fromage, du lait frais ou de la viande de bœuf ne sont plus expédiés vers Kinshasa ou dans d’autres villes du pays. Toutes les chaînes d’approvisionnement sont bloquées, affirme Lesly Said, gérante du supermarché du Kivu au complexe Utexafrica, à Kinshasa. « Même avant que Goma ne soit prise, nous avions déjà été impactés par la prise de Minova. Le coût avait augmenté et nous avons eu beaucoup de plaintes de clients, mais nous n’avions pas de choix », a-t-elle déclaré.
Depuis la chute de la ville de Goma, les banques restent toujours fermées. La circulation du dollar américain dans la région devient de plus en plus difficile. Si une telle situation perdure, cela présente le risque d’un basculement de l’économie vers le franc rwandais. Le marché monétaire congolais étant asphyxié par l’absence prolongée des banques et des microfinances, la ville rwandaise voisine, Gisenyi, risque de devenir un débouché pour échapper à cette asphyxie économique de Goma. Cela risque d’être perçu comme une balkanisation économique.
Effort de guerre
Des entreprises publiques fournissent des efforts supplémentaires pour contribuer à l’effort de guerre lancé par le président de la République, Félix Tshisekedi. Pour répondre à cet appel à la solidarité, l’Office de gestion du fret multimodal (OGFREM) a apporté une contribution à hauteur d’un million de dollars. Cette cagnotte a été annoncée au Vice-Premier ministre, ministre des Transports et Voies de communication, Jean-Pierre Bemba, par l’équipe dirigeante de cette entreprise. D’autres entreprises publiques, qui avaient déjà du mal à fonctionner, pourraient fournir des efforts supplémentaires en cette période de guerre.
Cette situation sécuritaire grave a aussi perturbé les prévisions budgétaires projetées pour cette année (18 milliards de dollars). Des coupes budgétaires ont été opérées dans les enveloppes prévues pour certaines institutions comme la Présidence, la Primature, le Gouvernement et le Parlement. La mécanisation des nouveaux agents et fonctionnaires de l’État a été gelée pour une période de 12 mois. Autre effet ressenti, c’est l’inflation. Elle a été particulièrement forte ces dernières années, ce qui a réduit le pouvoir d’achat des Congolais. Les prix des produits de base, en particulier ceux importés, ont augmenté, aggravant ainsi la pauvreté et la précarité pour une grande partie de la population. La tentative du gouvernement de rabaisser les prix des biens de consommation courante s’est révélée vaine.
Chute des prix du cobalt
Pillée dans les Kivu par le Rwanda et les rebelles du M23-AFC, plombée dans l’espace Katanga par la chute de l’une des prix d’une des matières premières les plus en vogue, le cobalt, la RDC essaie tant bien que mal de tenir son économie. Mais les prix mondiaux du cobalt ont sensiblement chuté. Depuis mai 2022, le prix du cobalt a perdu les trois-quarts de sa valeur, passant de 82.000 à près de 22.000 dollars la tonne. Une chute vertigineuse qui s’explique aussi par une surproduction mondiale de ce produit. La Chine, une plus grande consommatrice de ce minerai, s’est émancipée de ce métal blanc. Pékin a commencé à produire des cellules de batteries pour véhicules électriques sans utiliser le cobalt, ce qui occasionne une telle chute des prix. Or, la RDC représente environ 70% de la production mondiale de cobalt, dont les deux tiers sont raffinés en Chine.
Pourtant, la redevance minière des substances minérales stratégiques, notamment le cobalt, reste la plus élevée en RDC. « On aura une situation de baisse des recettes et cela peut affecter les efforts que le gouvernement mène pour restaurer la paix dans l’est du pays », analyse Jean-Pierre Okenda, directeur exécutif de l’ONG « La sentinelle des ressources naturelles ».
Difficile canalisation des recettes du coltan
La RDC est l’un des plus grands producteurs mondiaux de coltan, un minerai essentiel qui est principalement composé de tantalite et de niobium. Le coltan est utilisé dans la fabrication de composants électroniques, tels que les condensateurs pour téléphones mobiles, ordinateurs, voitures électriques et autres appareils high-tech. Ce minerai est principalement extrait dans les régions orientales de la RDC, notamment dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu, ainsi qu’en Ituri. Ces zones sont souvent marquées par des conflits armés et des tensions politiques, et l’exploitation minière y est souvent artisanale. Cela signifie que de nombreux mineurs locaux utilisent des méthodes manuelles et rudimentaires pour extraire le coltan, ce qui peut rendre l’activité extrêmement dangereuse. Au-delà de cet aspect, le pillage de ces minerais par des pays voisins fait perdre des recettes énormes à la RDC.
Résurgence du M23 et boom économique au Rwanda
Depuis la résurgence du M23, fin 2021, dans les Kivu, le Rwanda a fait des bonds importants dans l’exportation des minerais, notamment le coltan. En 2023, Kigali a enregistré une augmentation spectaculaire de 43 % de ses exportations, qui sont passées de 772 millions de dollars en 2022 à plus de 1,1 milliard. En 2010, ces revenus dépassaient à peine les 70 millions de dollars par an. Une manne minière bénéficiée par un pays qui n’a pas grand-chose sous son sol. Ce qui met souvent Kinshasa en colère, estimant que les rebelles des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) que Kigali cherche souvent au Congo sont essentiellement des minerais.
Dans le cadre du soutien à l’effort de guerre, la Première ministre Judith Suminwa fait appel à l’Inspection Générale des Finances (IGF) afin d’assurer la bonne application des recommandations du Chef de l’État relatives aux mesures rigoureuses de réduction du train de vie des institutions publiques.
Les instructions données au gouvernement par le Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi, lors de la réunion du Conseil des ministres du 31 janvier 2025, visant à mettre en place des mesures strictes de réduction des dépenses institutionnelles, sont appliquées sans délai par la cheffe du gouvernement congolais.
Alors que les ministres des Finances, Doudou Fwamba, et du Budget, Aimé Boji, ont entamé des discussions pour formuler des propositions concrètes, Judith Suminwa et une délégation de l’IGF, conduite par Jules Alingete, Inspecteur général chef de service, ont eu d’importants échanges le 5 février 2025 autour de la rationalisation des dépenses publiques.
À l’issue de leurs discussions, la Première ministre a exprimé son souhait de voir l’IGF jouer un rôle clé dans l’optimisation des dépenses et l’augmentation des recettes. Jules Alingete, de son côté, a salué l’engagement de la cheffe du gouvernement et les efforts qu’elle déploie en matière de gestion rigoureuse des finances publiques.
Selon Jules Alingete, l’IGF veillera à ce que, dans l’exécution des dépenses urgentes, l’accent soit mis uniquement sur celles liées à la sécurité et aux déplacements essentiels. « Il y a un mois, un arrêté interministériel relatif aux finances et au budget a été pris sur instruction de Madame la Première ministre afin de mettre de l’ordre dans l’exécution des dépenses et l’augmentation des recettes », a-t-il rappelé.
Un effort nécessaire
L’accélération des mesures de réduction du train de vie des institutions est un acte patriotique destiné à dégager des économies permettant d’octroyer une prime exceptionnelle aux militaires, policiers et aux patriotes Wazalendo engagés dans les combats contre l’armée rwandaise et ses supplétifs du M23. Grâce à ces mesures, le gouvernement pourra allouer environ 27 692 460 dollars à la défense nationale.
Au-delà du secteur public, le Président Tshisekedi a également interpellé le secteur privé. « Dans cet effort national, j’en appelle également à la responsabilité du secteur privé, invité à contribuer activement à cette cause commune de nos soldats qui se battent avec héroïsme pour la défense de notre intégrité territoriale et de notre souveraineté. Ils ont besoin de notre soutien total, qu’il soit moral, matériel ou logistique », a déclaré le Chef de l’État.
Qui est concerné ?
Parmi les mesures rigoureuses adoptées figurent des réductions progressives des frais de fonctionnement et des interventions économiques de la Présidence, de l’Assemblée nationale, du Sénat, du gouvernement, du pouvoir judiciaire et des institutions d’appui à la démocratie.
Toutes les missions et évacuations sanitaires non essentielles à l’étranger, ainsi que certaines subventions octroyées à des organismes publics jugées non prioritaires, sont également suspendues.
Sont aussi gelées pour une durée de 12 mois : les augmentations salariales, les corrections de grades et la mécanisation des agents publics de l’État. Cependant, les militaires et les policiers ne sont pas concernés par ces restrictions.
Des mesures enfin appliquées
Depuis les élections de 2006, la classe politique congolaise dénonce régulièrement le coût excessif des institutions du pays et réclame une réduction du train de vie des institutions et de leurs dirigeants. Plusieurs gouvernements se sont succédé sans y parvenir.
En 2022, des députés membres de l’Union sacrée de la nation avaient plaidé en faveur de cette mesure à la veille de l’examen et du débat du projet de budget 2023 à l’Assemblée nationale. En octobre 2024, la société civile, force vive du Nord-Kivu, avait même proposé une réduction de 50 % des dépenses institutionnelles pour financer les salaires des enseignants.
Néanmoins, la Première ministre Judith Suminwa a toujours fait de cette question son cheval de bataille. Lors de la clôture des consultations menées du 20 au 21 avril 2024 en vue de la formation de son gouvernement, elle avait réaffirmé son engagement en ce sens.
Alors que le Vice-Premier ministre, ministre de l’Économie nationale, avait pris des mesures contre la vie chère en République Démocratique du Congo (RDC), c’est l’effet contraire qui se produit depuis quelques jours sur les marchés des biens de consommation courante. Le lait en poudre, le poisson chinchard ou encore les viandes surgelées connaissent une envolée des prix.
Son panier en plastique soutenu par son avant-bras gauche, l’index droit posé sur sa lèvre inférieure, Pierrette n’en revient pas. Cette mère de cinq enfants, la cinquantaine révolue, écarquille les yeux devant les étalages d’un petit marché à Mbundi-Terminus, un quartier situé à l’ouest de Kinshasa, dans la commune de Mont-Ngafula. « Je reviens d’une chambre froide à quelques pas d’ici, ce ne sont pas les prix que j’avais laissés la semaine passée », déclare-t-elle à Heshima Magazine. Le poisson chinchard de « 20 plus », qui se vendait à 7 000 francs le kilogramme, coûte désormais 11 000 francs. Un kilogramme de poisson salé passe de 18 000 à 22 000 francs.
Cette surchauffe des prix est constatée par plusieurs Congolais, aussi bien à Kinshasa qu’à l’intérieur du pays. Certains, dont les revenus n’arrivaient déjà pas à joindre les deux bouts, sont dans le désarroi. « C’est une érosion de mon pouvoir d’achat. La hausse des prix des biens de consommation et celle des prix des transports en commun nous asphyxient complètement. Pourtant, mon salaire n’a pas bougé depuis plusieurs années en dépit d’une telle inflation », déclare Jean-Pierre Mukendi, un fonctionnaire de l’État.
Une hausse vertigineuse des prix
Dans un communiqué signé le 25 novembre, le Mouvement national des consommateurs lésés (MNCL) constate « avec regret une hausse vertigineuse » des prix des produits alimentaires de première nécessité dans les provinces de Kinshasa, du Haut-Katanga et du Lualaba. Selon cette structure, il y a une augmentation de plus de 89 % sur les prix de certains produits de consommation courante. Le carton de chinchard est passé de 165 000 à 249 200 francs. Un sac de semoule qui coûtait 57 000 francs se vend aujourd’hui à 60 000 francs. Le lait en poudre (Nido) de 2,5 kg passe de 67 800 à 79 680 francs. Les côtelettes de porc, dont le kilogramme se vendait à 10 000 francs, coûtent à ce jour 14 000 francs. Un sac de riz de marque Lion, qui était fixé à 46 000 francs il y a quelques mois, est vendu à ce jour à 69 000 francs.
Le gouvernement peine à baisser les prix
Asphyxié par la montée en flèche des prix, le gouvernement peine à gagner sa bataille contre la vie chère en RDC. En août, le Vice-Premier ministre, ministre de l’Économie nationale, Daniel Mukoko Samba, avait annoncé une batterie de mesures pour combattre la hausse des prix des produits de première nécessité. Il avait annoncé un allègement fiscal sur les importations de ces denrées pour réduire le coût de ces produits sur le marché. Ces mesures devraient permettre une réduction des prix sur le marché allant de 20 à 25 % en moyenne.
Au moins neuf produits sont concernés par ces mesures d’allègement fiscal, parmi lesquels le lait en poudre, la volaille, le poisson chinchard, l’huile végétale, l’huile de palme, le maïs et le riz. Une autre mesure prévoyait la suppression des barrières illicites qui impactent négativement les prix des biens de première nécessité, ainsi que l’imposition de sanctions aux personnes à l’origine de ces barrières. La Première ministre avait pris un décret pour ces mesures fiscales. Trois mois après, des Congolais constatent toujours la montée des prix sur le marché. Le gouvernement avait menacé des sanctions contre certains hommes d’affaires qui continuent à pratiquer de tels prix malgré l’allègement fiscal. « Il n’est pas exclu que certains d’entre eux soient expulsés du territoire national si nous découvrons des personnes qui s’attèlent à des pratiques qui n’ont pour finalité que de faire souffrir le ménage congolais. C’est une question de l’État qui doit assumer son rôle », avait déclaré Daniel Mukoko Samba.
Les marges de manœuvre du gouvernement semblent être réduites, notamment en raison de la position du pays qui importe la quasi-totalité de ses produits de première nécessité.