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RDC : Tshisekedi lance officiellement les activités d’Air Congo

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Après avoir réceptionné deux Boeing gros porteurs, la nouvelle compagnie nationale a démarré officiellement ses activités ce mardi 17 décembre 2024. Le président de la République, Félix Tshisekedi, a assisté au vol inaugural depuis l’aéroport international de N’djili. Cette nouvelle compagnie d’aviation est créée en joint-venture avec Ethiopian Airlines.

Des passagers à destination de Goma étaient bloqués depuis plusieurs heures dans le Boeing 737-800 stationné à l’aéroport international de N’djili ce mardi. Ces passagers ignoraient encore que leur vol devrait faire l’objet de la cérémonie en présence du chef de l’État, Félix Tshisekedi. Lors du lancement de cette compagnie, le vice-Premier ministre, ministre des Transports, de la Voie de communication et du Désenclavement, Jean-Pierre Bemba, a parlé d’une nouvelle ère et d’un moment « historique » qui symbolise, selon lui, la volonté du gouvernement d’aller de l’avant et d’améliorer les infrastructures de transport à travers le pays.

Avec un capital de départ chiffré à 40 millions de dollars, l’État congolais détient 51 % des parts, et Ethiopian Airlines, 49 %. Après l’échec de plusieurs compagnies nationales, le gouvernement a préféré évoluer, cette fois, en joint-venture, comptant sur l’expérience incontestée d’Ethiopian Airlines. D’ailleurs, c’est cette compagnie panafricaine qui va diriger Air Congo. Et c’est l’ancien directeur régional d’Ethiopian Airlines pour la France et le Maghreb, Mesfin Biru Weldegeorgis, qui prend les commandes, secondé par un Congolais.

Pourquoi s’associer à Ethiopian ?

Dans le secteur aérien, il est difficile de se lancer en solo. Plusieurs pays d’Afrique ont créé des joint-ventures pour faire vivre leurs compagnies aériennes nationales. C’est le cas d’Air Côte d’Ivoire, qui est en partenariat avec Ethiopian Airlines, ou encore de Fly Gabon. Cette stratégie permet de bénéficier de l’expérience de la compagnie panafricaine, ainsi que de partager les moyens de maintenance de ses appareils. Mais il y a aussi l’optimisation des équipages et leur formation.

Pour garantir la réussite de cette expérience en RDC, le patron d’Ethiopian Airlines n’est pas allé par quatre chemins. Il a insisté sur « l’indépendance opérationnelle », libre de toute interférence politique. Dans leur tradition, les dirigeants d’Ethiopian veillent scrupuleusement à chaque terme des accords conclus avec leurs coactionnaires.

Destination des vols

La compagnie affirme assurer des vols réguliers vers Lubumbashi, Goma, Kisangani, Mbuji-Mayi, Kalemie et Kolwezi. D’après un responsable de la Régie des voies aériennes (RVA), les destinations internationales seront lancées avant la fin de 2025. Air Congo compte pour le moment deux appareils en location. Mais l’entreprise envisage d’ajouter progressivement quatre autres aéronefs avant juin 2025. Air Congo fera ensuite l’acquisition de deux appareils Dreamliner destinés aux vols internationaux. Ce qui portera à huit le nombre d’aéronefs.

Ce projet était porté depuis 2021, avant d’être relancé en 2024 en partenariat avec Ethiopian Airlines. Cette compagnie éthiopienne a investi, depuis 20 ans, dans plusieurs compagnies intérieures ou régionales en Afrique. Elle est incontestablement, à ce jour, le premier transporteur du continent.

Heshima

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RDC : Joseph Kabila renoue-t-il le lien avec le Rwanda 28 ans après l’AFDL ?

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Au lendemain de son adresse à la nation, Joseph Kabila a regagné la République démocratique du Congo par une zone sous contrôle des rebelles du Mouvement du 23 mars (M23), branche armée de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), soutenue par l’armée rwandaise.
L’arrivée de l’ancien président à Goma suscite de nombreuses interrogations, notamment sur de liens éventuels avec ces groupes armés. Certains analystes y voient les signes d’une stratégie inspirée de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), coalition rebelle également appuyée par le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi, qui avait renversé le régime de Mobutu en mai 1997.

Depuis son départ du pouvoir en 2019 après deux mandats, Joseph Kabila – 53 ans – s’était fait très discret. Mais depuis sa tribune publiée dans le journal sud-africain « Sunday Times » suivi de son allocution du 23 mai dernier, l’homme semble révéler petit à petit son schéma. Lors de son adresse aux Congolais diffusée sur les réseaux sociaux, il a formulé 12 recommandations parmi lesquelles il classe en priorité la fin de la dictature ou la tyrannie du président Félix Tshisekedi avant de mettre fin à la guerre. Dans l’entretemps, il s’est installé depuis le 25 mai 2025 dans une ville congolaise occupée par les rebelles et l’armée rwandaise.       

« Mettre fin à la dictature, ou mieux à la tyrannie, puis arrêter la guerre. On met fin à la dictature avant d’arrêter la guerre ?… », s’interroge le journaliste Christian Lusakueno, qui attire l’attention de l’opinion sur la chronologie du plan de Joseph Kabila. Pour lui, ce schéma rappelle celui de l’AFDL.
« …On met fin à l’utilisation des mercenaires, puis seulement après, on ordonne le retrait de toutes les troupes étrangères du territoire national. Qu’est-ce que tout cela veut dire ? Joseph Kabila est entré à Goma par le Rwanda. Cela signifie que son plan s’appuie sur ceux qui, comme son père Laurent-Désiré Kabila, avaient contribué à la chute de Mobutu. On sait ce qui s’est passé en août 1998, et c’est cela qui me dérange », analyse le directeur de Top Congo FM.

Ce discours de Joseph Kabila continue de susciter des réactions contrastées et des interrogations sur ses vraies intentions. Son arrivée à Goma intervient après une période d’exil de près de deux ans. La veille de son discours, son immunité parlementaire a été levée par le Sénat, l’exposant à des poursuites judiciaires pour trahison et éventuel soutien aux rebelles de l’AFC/M23. Depuis 2024, le président Félix Tshisekedi accuse Joseph Kabila de collusion avec ce groupe rebelle, ce que l’ancien chef de l’État dément, affirmant vouloir contribuer à la résolution du conflit dans l’est du pays. Une résolution qui passerait, selon lui, par la fin de ce qu’il qualifie de « dictature ».

Son séjour à Goma est vécu comme une « trahison » et une « insulte à la République », d’après le député de l’UDPS, Tobie Kayumbi, l’accusant de légitimer l’occupation de cette ville congolaise par les rebelles du M23 appuyés par le Rwanda.

Depuis que cette rébellion a pris le contrôle de Goma et de Bukavu au début de l’année, de nombreux habitants dénoncent les violences perpétrées par des éléments armés de ce mouvement soutenu par le Rwanda. Une enquête d’Amnesty International confirme ces exactions. Selon le dernier rapport de l’ONG, les rebelles « tuent, torturent et détiennent des civils en otage ». Ces crimes, facilités par l’absence d’administration et de justice fonctionnelles, incluent également des éliminations ciblées, des enlèvements contre rançon et diverses formes de racket.

L’AFDL et ses soutiens rwandais, ougandais et burundais   

L’ancien président de la RDC, Laurent-Désiré Kabila – père de Joseph Kabila – avait largement bénéficié d’un soutien décisif du Rwanda ainsi que de l’Ouganda et du Burundi pour renverser le régime de son prédécesseur Mobutu Sese Seko, en 1997. Avec l’AFDL, le régime de Paul Kagame avait fourni tous les équipements militaires nécessaires pour renverser Mobutu.

Tout a commencé en 1994, lorsque le génocide des Tutsis au Rwanda entraîne la victoire du Front patriotique rwandais (FPR) de Paul Kagame, et la fuite de plus d’un million de réfugiés Hutu vers l’est du Zaïre (actuelle RDC). Parmi les populations qui ont fui l’arrivée du FPR au pouvoir à Kigali, figuraient aussi d’anciens génocidaires (ex-FAR et miliciens Interahamwe).

En 1996, le Rwanda (coordonné par Paul Kagame en tant que vice-président et ministre de la Défense) décide de lancer une opération militaire contre les milices génocidaires au Zaïre, avec l’objectif de sécuriser sa frontière et chasser Mobutu du pouvoir. Pour légitimer cette intervention, le Rwanda cherche un allié zaïrois et trouve Laurent-Désiré Kabila, un ancien rebelle marxiste peu actif depuis des années, originaire du Katanga. Ensemble avec d’autres groupes congolais, ils forment l’AFDL en octobre 1996. Le Rwanda apporte à cette rébellion un soutien total : des troupes rwandaises déguisées en rebelles congolais, des conseillers militaires, des armes, des renseignements, de la logistique et de la formation. L’armée patriotique rwandaise (APR), aux côtés de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), lance alors une offensive fulgurante depuis le Kivu, à l’est du Zaïre. Les forces de Mobutu, démoralisées, mal équipées et souvent abandonnées par leurs officiers, sont rapidement balayées.

L’AFDL progresse vers l’ouest, prenant ville après ville, notamment Kisangani et Mbuji-Mayi. En mai 1997, les troupes de Kabila père et leurs alliés entrent dans Kinshasa sans grande résistance. Mobutu, gravement malade, fuit vers le Maroc où il meurt en septembre de la même année. Laurent-Désiré Kabila se proclame président le 17 mai 1997, rebaptise le pays « République démocratique du Congo », et dissout l’AFDL peu après.

Les liens avec le Rwanda rompus : début d’un cycle de rébellions

Initialement perçu comme une marionnette du Rwanda, Laurent-Désiré Kabila tente de s’émanciper de son influence. En 1998, il expulse les troupes rwandaises et les conseillers étrangers devenues envahissants, ce qui déclenche la euxième Guerre du Congo (1998-2003), impliquant plusieurs pays africains dont l’Angola et le Zimbabwe comme alliés du gouvernement de Kinshasa contre d’abord les troupes rwandaises, ougandaises et burundaises. Après la défaite des Rwandais, ils formeront quelques jours plus tard un autre mouvement rebelle, le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD). Le Rwanda va soutenir cette nouvelle rébellion pour tenter de faire tomber Kabila père. Pendant ce temps, Joseph Kabila, promu général, combat aux côtés de son père les forces soutenues par Kigali. Mais il perdra ensemble avec John Numbi plusieurs batailles au front, notamment celle de Pweto, dans le grand Katanga. Après l’assassinat de son père en janvier 2001, il accède au pouvoir. À la surprise générale, il adopte une ligne plus diplomatique et pragmatique, tendant la main aux anciens ennemis, y compris le Rwanda. Il mène des négociations qui aboutissent aux Accords de paix de Sun City (2002) et à la fin de la Deuxième Guerre du Congo en 2003. Une transition politique avec les belligérants a eu lieu, débouchant sur les premières élections générales et pluralistes du pays en 2006. Malgré les débuts de rapprochement, les relations entre Joseph Kabila et Paul Kagame étaient restées officiellement mitigées. Le Rwanda accuse la RDC de soutenir les FDLR, miliciens hutus rwandais hostiles à Kigali. La RDC accuse le Rwanda de soutenir des rébellions à l’est du Congo (notamment le CNDP puis le M23). Ces relations vont officiellement se dégrader entre 2008 et 2013, avec des accrochages militaires indirects sous le M23. Quand il quitte le pouvoir en 2019, les relations étaient toujours frileuses. Kigali n’avait plus d’ambassadeur à Kinshasa et Kabila avait pris le soin de rappeler Nkulu Kilombo, son diplomate à Kigali.    

Kabila veut-il renouer ses liens avec Kigali ?

Accusé de soutenir la rébellion du M23, appuyée par le Rwanda, Joseph Kabila nie toute implication. Il affirme que, s’il était réellement derrière ce mouvement, « les choses ne se passeraient pas ainsi ».

Son retour à Goma, bastion du M23, a ravivé les interrogations sur ses liens historiques avec Kigali. Lors de la première guerre du Congo (1996-1997), l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), dirigée par Laurent-Désiré Kabila, avait reçu un soutien décisif du Rwanda. Joseph Kabila, alors jeune combattant, avait été formé par des officiers rwandais, notamment James Kabarebe, qui se targuait dans un entretien avec Jeune Afrique d’avoir appris à Kabila à manier une arme.

Aujourd’hui, alors que le Sénat congolais a levé l’immunité de l’ancien président pour permettre des poursuites pour trahison et crimes de guerre liés à son prétendu soutien au M23 , son séjour à Goma est perçu par certains observateurs comme une tentative de réactiver des alliances passées. Cette démarche intervient dans un contexte de tensions accrues entre Kabila et le gouvernement de Félix Tshisekedi, qu’il accuse de dérive autoritaire.

Les prochaines semaines seront cruciales pour déterminer si ce retour marque une simple prise de position politique ou le prélude à une recomposition des forces dans l’est du pays.

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RDC : l’opulence des parlementaires face à la détresse populaire

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Alors que la majorité des Congolais survit avec moins de 2,15 dollars par jour, les dotations financières du Parlement congolais explosent d’année en année. En 2024, selon la Banque mondiale, 73,5 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, mais les élus s’octroient des avantages toujours plus faramineux dans une opacité quasi totale. Entre dépenses somptuaires, absence de contrôle et silence des institutions, cette flambée des budgets parlementaires incarne un affront flagrant au quotidien des citoyens. À l’heure où le pays peine à financer ses écoles et ses hôpitaux, l’indignation monte dans la société civile : jusqu’où ira ce mépris des priorités nationales ?

Les budgets de l’Assemblée nationale et du Sénat congolais suivent une trajectoire ascendante, contrastant avec la stagnation ou la régression économique qui frappe la population. Selon un rapport du Centre de recherche en finances publiques et développement local (CREFDL) publié en mai 2024, intitulé Le biface du Parlement congolais : un contrôleur à contrôler, le Parlement a dépensé 1,1 milliard de dollars entre 2021 et 2023, dont 60 % (660 millions USD) pour l’Assemblée nationale et 40 % (440 millions USD) pour le Sénat. Cela représente une moyenne annuelle d’environ 220 millions de dollars pour l’Assemblée et 146,67 millions USD pour le Sénat.

En 2024, le budget de l’Assemblée nationale de la RDC a été arrêté à 1 296,3 milliards de francs congolais (FC), soit environ 272 millions de dollars américains, selon le rapport de gestion financière présenté par la Questeure de la chambre basse, Chimène PoliPoli. Cette enveloppe budgétaire a été répartie entre les rémunérations, le fonctionnement, les investissements et les interventions économiques, sociales, culturelles et scientifiques, selon un article de Grands Lacs News publié en avril 2025.

En novembre 2024, la radio Top Congo a publié un message sur X (anciennement Twitter) révélant que l’Assemblée nationale reçoit chaque mois une dotation de 47 milliards de francs congolais. Cela représente environ 16,45 millions de dollars américains, selon un taux de change de 2 855 FC pour un dollar. En comparaison, cette dotation était de 4,7 milliards de FC en 2018, ce qui représente une multiplication par 10 en FC. Cependant, cette augmentation en dollars est atténuée par la dépréciation de la monnaie nationale.

Le Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local, le CREFDL, révèle que, entre 2021 et 2023, le Sénat congolais a dépensé environ 440 millions de dollars américains, soit 40 % des 1,1 milliard de francs alloué aux deux chambres parlementaires, comme l’a rapporté le média Interview.cd. Cette somme reflète une tendance à la hausse et sa gestion reste entourée d’opacité.

En 2022, le Sénat a dépensé 422 893 dollars pour l’achat de véhicules, dépassant de 11 % le budget prévu de 3,5 millions de dollars, selon le site d’information actualite.cd. Par ailleurs, ce média révèle également qu’un projet de construction d’un dépôt d’archives, attribué à l’entreprise ETISAC SPRL pour 63 518 dollars, a finalement coûté 82 242 dollars, soit un écart non justifié de 18 723 dollars.

Ces chiffres illustrent une croissance significative des allocations budgétaires au Parlement, suscitant des interrogations sur la gestion des fonds publics dans un contexte où une grande partie de la population congolaise vit dans des conditions économiques précaires.

Des salaires qui font scandale

Au cœur des controverses se trouvent les rémunérations des parlementaires. Avec 500 députés et 108 sénateurs, les salaires représentent une part significative des budgets. En 2022, Martin Fayulu, leader de l’opposition, a affirmé que les députés gagnaient 21 000 USD par mois, une allégation démentie par le bureau de l’Assemblée nationale de l’époque. En 2024, Vital Kamerhe, président de l’Assemblée, a déclaré que les députés percevaient environ 14 millions FC (4 952 USD) par mois, auxquels s’ajoutent des primes, selon un article de Jeune Afrique. Le CREFDL estime que les rémunérations totales des parlementaires congolais s’élèvent à 74 millions USD par an, un chiffre astronomique comparé aux 50 USD mensuels moyens des fonctionnaires congolais, soit un ratio de 100 à 1.

Ce fossé est d’autant plus choquant que les parlementaires bénéficient d’avantages supplémentaires, comme des véhicules de luxe et des primes diverses, souvent financés par des lignes budgétaires opaques, telles que le « Fonds spécial d’intervention » de 309 millions USD mentionné par le CREFDL. Ces pratiques contrastent avec les conditions de vie de la majorité des Congolais, où l’accès à l’éducation, à la santé et à une alimentation de base reste un défi quotidien.

Une population asphyxiée par la crise économique

Pendant que les budgets parlementaires s’envolent, le pouvoir d’achat des Congolais s’effondre. La Banque mondiale rapporte qu’en 2024, 73,5 % de la population vit sous le seuil de pauvreté soit 2,15 USD par jour. L’inflation, estimée à 11,69  pour l’année 2024 selon les données de la Banque centrale du Congo. Les fonctionnaires, qui constituent une part importante de la classe moyenne, touchent un montant insuffisant pour couvrir les besoins de base dans un contexte de hausse des prix. Par exemple, le coût d’un sac de maïs, aliment de base, a doublé dans certaines régions entre 2022 et 2024, selon des rapports locaux.

Les dépenses sociales, telles que l’éducation et la santé, restent sous-financées, avec seulement 30 % du budget national alloué à ces secteurs en 2023, selon des analyses budgétaires. Cette priorisation des institutions sur les besoins sociaux exacerbe le sentiment d’injustice. Comme le souligne un activiste des droits humains : « Pendant que les députés s’achètent des jeeps à 80 000 USD, les écoles manquent de bancs et les hôpitaux de médicaments. »

Une gestion opaque et des appels à la réforme

Entre 2021 et 2023, les deux chambres du Parlement congolais ont dépensé un total de 1,1 milliard de dollars américains, dont 60 % par l’Assemblée nationale et 40 % par le Sénat. Cette enveloppe dépasse de 298,9 millions de dollars les prévisions initiales, selon Radio Okapi.

Parmi les postes de dépense les plus controversés figure l’achat de 26 véhicules pour un montant de 90,2 millions USD, alors que seulement 4,5 millions étaient initialement budgétisés. Cette transaction a été réalisée dans l’opacité la plus totale, en dehors des procédures légales imposées par la loi sur les marchés publics, révèle le site d’informations Desk Eco, citant un rapport du Centre de recherche en finances publiques et développement local (CREFDL).

Toujours selon le CREFDL, un autre abus concerne le recrutement massif de personnel au sein de l’Assemblée nationale. Alors que les textes en vigueur n’autorisent que 87 collaborateurs pour l’ensemble du cabinet politique, ce dernier emploie aujourd’hui plus de 2 700 agents. L’administration parlementaire, quant à elle, recense 612 agents permanents, précise Radio Okapi.

Face à ces dérives, le CREFDL appelle l’Inspection générale des finances et la Cour des comptes à diligenter une mission mixte de contrôle et plaide pour une réforme structurelle afin de rétablir une gestion responsable et transparente des fonds publics.

De son côté, la Première ministre Judith Suminwa Tuluka, investie en juin 2024, a présenté un programme quinquennal ambitieux de 92,9 milliards de dollars, mettant en avant la transparence et la lutte contre les détournements. Elle propose une collaboration étroite avec le Parlement pour assurer une gouvernance rigoureuse. Mais pour de nombreux acteurs de la société civile, ces promesses restent insuffisantes tant que des mesures concrètes et des audits publics ne sont pas engagés. La confiance reste ébranlée.

Un fossé à combler

La hausse continue des budgets de l’Assemblée nationale et du Sénat, estimés respectivement à 280 millions USD et environ 150-200 millions USD en 2024, contraste cruellement avec la détérioration du pouvoir d’achat des Congolais. Cette disparité alimente un sentiment de frustration, voire de trahison, dans un pays où les richesses minières devraient théoriquement bénéficier à tous. Les appels à des audits indépendants et à une meilleure allocation des ressources publiques se multiplient, mais leur mise en œuvre reste incertaine.

Pour que la RDC rompe avec ce cycle d’inégalités, il est impératif que les institutions publiques, y compris le Parlement, adoptent une gestion transparente et priorisent les besoins de la population. Sans cela, les hausses budgétaires continueront de résonner comme une moquerie pour des millions de Congolais luttant pour leur survie.

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RDC : Comment les accords de paix récompensent les bourreaux et enterrent les victimes

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Depuis plus de trois décennies, la République démocratique du Congo (RDC) est le théâtre d’une guerre aux conséquences dévastatrices. De l’Ituri au Sud-Kivu, en passant par le Nord-Kivu, les massacres de civils, les viols de masse, les pillages, les déplacements forcés et les recrutements d’enfants sont devenus le lot quotidien de millions de Congolais. Pourtant, les auteurs de ces crimes, qu’ils soient chefs de guerre notoires ou simples miliciens, échappent presque toujours à la justice.

Les protagonistes de ces conflits armés, ayant causé des millions de morts, n’ont jamais été inquiétés. Pire, certains jouissent aujourd’hui d’une totale liberté, circulent en toute impunité dans les grandes villes du pays, se recyclent dans la politique ou occupent des postes administratifs. Dans les prétoires congolais, les affaires liées aux crimes de guerre sont rares, tant les moyens manquent et la volonté politique fait défaut. Il ne s’agit pas d’un simple dysfonctionnement, mais d’un véritable système d’impunité intégré aux logiques de gouvernance.

Cette impunité systémique est renforcée par des accords de paix qui, au lieu de sanctionner les criminels, les récompensent. Les négociations politiques ont souvent abouti à des amnisties pour les seigneurs de guerre, en échange de leur participation à des gouvernements de transition ou à des postes militaires. Cette stratégie de pacification par la réintégration s’est transformée en prime à la violence, envoyant un message clair : prendre les armes contre la République peut ouvrir les portes du pouvoir.

Les victimes, quant à elles, attendent toujours que justice leur soit rendue. Elles espèrent des procès équitables, des condamnations des responsables et des réparations justes. Elles attendent qu’enfin, les droits de l’homme ne soient plus sacrifiés au nom de la paix, mais deviennent la condition même de sa construction. La RDC ne pourra espérer une paix véritable et durable que lorsque plus aucun criminel ne pourra se cacher derrière un uniforme, un siège politique ou une signature au bas d’un accord. La paix, la vraie, commence là où s’arrête l’impunité.

Il est impératif que la justice ne soit plus sacrifiée au nom de la stabilité politique, mais qu’elle devienne la pierre angulaire de la reconstruction nationale. La RDC a l’opportunité historique de démontrer que les droits de l’homme ne sont pas négociables et que chaque citoyen, quelle que soit sa condition, mérite justice et dignité.

Accords de paix : une justice sacrifiée sur l’autel de la « stabilité »

Depuis plus de deux décennies, les tentatives de pacification en RDC ont souvent privilégié des compromis politiques au détriment de la justice. Les accords de Sun City en 2002 et de Goma en 2008 illustrent cette tendance, où des amnisties ont été accordées à des seigneurs de guerre en échange de leur intégration dans le processus politique. Ces décisions ont permis à certains responsables de graves violations des droits humains d’échapper à toute forme de reddition de comptes.

L’accord de Sun City, signé en avril 2002, visait à mettre fin à la deuxième guerre du Congo. Il prévoyait la création d’un gouvernement de transition incluant des représentants des groupes armés, sans mécanisme clair pour traiter les crimes commis pendant le conflit. Cette omission a été critiquée pour avoir instauré une culture de l’impunité.

De même, la Conférence de Goma en janvier 2008 a abouti à un acte d’engagement signé par les groupes armés et le gouvernement, incluant une loi d’amnistie pour les faits de guerre commis depuis 2003, à l’exception des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et du génocide. Cependant, l’application de cette exception est restée floue, et peu de poursuites ont été engagées contre les auteurs de ces crimes graves.

Cette stratégie de pacification par l’intégration des anciens belligérants dans les structures étatiques a souvent été perçue comme une récompense pour la violence. Elle a envoyé un message selon lequel prendre les armes contre l’État pouvait conduire à des gains politiques, minant ainsi les efforts de consolidation de la paix et de la justice.

Les conséquences de cette approche sont visibles dans la persistance des conflits armés dans l’est de la RDC, où de nouveaux groupes rebelles émergent régulièrement, souvent composés d’anciens combattants réintégrés puis démobilisés. Cette instabilité chronique souligne la nécessité d’un processus de paix qui inclut des mécanismes de justice transitionnelle, afin de briser le cycle de l’impunité et de prévenir la récurrence des violences.

Pour construire une paix durable, il est essentiel que les futurs accords de paix en RDC intègrent des dispositions claires pour la poursuite des auteurs de crimes graves et la réparation des victimes. Sans une telle approche, les efforts de pacification risquent de continuer à échouer, au détriment de la stabilité et de la réconciliation nationale.

Les bourreaux aux commandes

De nombreux anciens chefs rebelles, responsables de violences graves, ont été intégrés dans les structures étatiques, souvent au nom de la « paix et de la stabilité ». Cette stratégie a permis à certains individus, autrefois à la tête de groupes armés, d’occuper des postes influents au sein de l’appareil étatique.

Pour les populations locales, cette réalité est difficile à accepter. Les victimes de ces conflits se retrouvent contraintes de reconnaître l’autorité de ceux qui furent leurs oppresseurs. Cette situation engendre un profond sentiment d’injustice et d’abandon.

« Mon frère a été tué à Beni en 2014, et aujourd’hui, celui qui dirige notre commune est un ancien chef rebelle. Comment voulez-vous que je croie en l’État ? », se désole Martha Kasereka, enseignante à Oicha.

« Chaque fois qu’un groupe armé signe un accord, on leur donne des uniformes et des galons. Nous, les victimes, on nous demande d’oublier. Mais nous, on n’oublie pas », dénonce Jacques Mumbi, rescapé d’un massacre à Nyabiondo.

Cette politique d’intégration sans justice ni réparation alimente un cycle de violence et d’impunité. Elle envoie un message clair : prendre les armes contre la République peut conduire à des récompenses politiques. Ce cycle pernicieux compromet les efforts de réconciliation nationale et mine la confiance des citoyens envers les institutions.

Pour briser ce cycle, il est impératif que la RDC adopte une approche fondée sur la justice transitionnelle, garantissant que les auteurs de crimes graves répondent de leurs actes, tout en assurant des réparations aux victimes. Sans cela, les cicatrices du passé continueront de saigner, entravant toute perspective de paix durable.

Sans justice, pas de paix durable

Ce n’est pas seulement une exigence morale, c’est une condition de survie pour la RDC. Depuis plus de deux décennies, l’Est du pays est ravagé par des conflits à répétition, où les acteurs changent de nom, d’uniforme ou de drapeau, mais rarement de méthodes. Derrière cette instabilité chronique, une constante : l’impunité.

Les crimes les plus abominables, viols collectifs utilisés comme arme de guerre, enrôlement d’enfants-soldats, massacres des villages entiers, restent, dans leur immense majorité, sans suite judiciaire. Les rares procès, comme celui de 2024 ayant condamné par contumace les dirigeants du M23, dont Corneille Nangaa, Bertrand Bisimwa,… sont l’exception qui confirme la règle. Dans le même temps, d’anciens chefs de milices intégrés dans les FARDC ou placés à des postes d’influence jouissent d’une immunité de fait, parfois même d’un prestige reconstruit.

Ce mécanisme pervers qui transforme les fauteurs de guerre en interlocuteurs politiques, a engendré une logique de prédation durable : prendre les armes, semer la terreur, négocier un poste. Le message envoyé aux communautés est glaçant : la violence paie, la justice est facultative. À travers cette impunité systémique, c’est le contrat social lui-même qui est vidé de son sens, car l’État est perçu non pas comme garant de la sécurité, mais comme complice des bourreaux.

Cette culture de l’amnistie automatique et des accords sans justice explique en grande partie la multiplication des groupes armés dans le Nord-Kivu, l’Ituri ou le Sud-Kivu. Elle alimente une défiance généralisée envers les institutions nationales et internationales, accusées de sacrifier la vérité sur l’autel d’une paix de façade. Chaque cessez-le-feu négocié sans vérité ni réparation devient une bombe à retardement.

« Tant qu’on continuera à traiter les criminels comme des partenaires politiques, il n’y aura jamais de paix véritable dans ce pays. La justice ne peut pas être à géométrie variable », souligne Me Cédric Lualoba, avocat au barreau de Goma, engagé dans la défense des victimes de guerre.

Des initiatives judiciaires locales, parfois soutenues par des juridictions militaires ou des ONG, ont tenté de rétablir un semblant d’ordre. Mais elles manquent de moyens, d’indépendance, et surtout, de volonté politique. Car dans de nombreux cas, les criminels sont protégés par ceux-là mêmes qui détiennent le pouvoir au nom d’une paix éphémère.

La RDC ne pourra jamais tourner la page de ses conflits tant qu’elle ne décidera pas d’en écrire les lignes de vérité. Ce tournant exige du courage politique. Il suppose de rompre avec la culture de l’impunité, de reconnaître les souffrances des victimes, et de refuser les compromis qui sacrifient la justice au profit d’une stabilité illusoire. La paix ne se décrète pas. Elle se construit, patiemment, sur des fondations solides. Et la première d’entre elles, c’est la justice.

Les victimes attendent : entre espoir et désillusion

Les familles endeuillées, les femmes survivantes de violences sexuelles, les enfants enrôlés de force ou mutilés attendent toujours que la République les reconnaisse autrement que comme simples chiffres dans les rapports des ONG. Elles espèrent des procès équitables, des condamnations des responsables et des réparations justes.

Des initiatives ont vu le jour pour répondre à ces attentes. En mai 2025, le gouvernement congolais a adopté une politique nationale de justice transitionnelle, accompagnée de textes visant à reconnaître les droits des victimes, à lutter contre l’impunité et à garantir la non-répétition des crimes. Parmi ces mesures figurent la création d’un Fonds national de réparation des victimes de violences sexuelles liées aux conflits et la mise en place d’une liste consolidée des victimes pour faciliter leur accès à la justice et aux réparations.

Parallèlement, la Cour pénale internationale a réactivé ses enquêtes sur les crimes commis dans le Nord-Kivu depuis janvier 2022, en coopération avec les autorités congolaises. Cette démarche vise à cibler tous les auteurs présumés de crimes liés à des schémas récurrents de violence et d’hostilités, notamment ceux perpétrés par le M23 et les Forces rwandaises.

Cependant, malgré ces avancées, de nombreuses victimes restent sceptiques quant à la volonté politique réelle de traduire les criminels en justice. Elles redoutent que ces initiatives ne soient que des promesses sans lendemain, comme cela a souvent été le cas par le passé. La lenteur des procédures, le manque de moyens et les interférences politiques freinent l’établissement d’une justice véritablement indépendante et efficace.

« Ce n’est pas un luxe, ni une lubie. C’est une exigence de civilisation. La justice ne doit plus être un slogan vide dans les discours officiels, mais une réalité concrète, visible, universelle », commente Alicia Bilalo, étudiante en droit à l’Université de Kinshasa. Des mots résonnent comme un appel à l’action pour que la RDC rompe enfin avec la culture de l’impunité.

La paix durable ne pourra être atteinte que lorsque les victimes seront pleinement reconnues et que les responsables des atrocités rendront compte de leurs actes. Il est impératif que la justice ne soit plus sacrifiée au nom de la stabilité politique, mais qu’elle devienne la pierre angulaire de la reconstruction nationale. La RDC a l’opportunité historique de démontrer que les droits de l’homme ne sont pas négociables et que chaque citoyen, quelle que soit sa condition, mérite justice et dignité.

Heshima Magazine

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